Le retour des fameux transporteurs nationaux peut raviver pour certains des souvenirs difficiles, telles que de longues nuits à dormir assis. Mais dans la grande majorité des cas, elle offre une option supplémentaire pour voyager à bas prix. Bien moins cher que le train, quelques euros de moins que le covoiturage : la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, – dite Loi Macron – offre un cadeau de Noël avant l’heure aux voyageurs low cost.
Mais que dire de l’expérience utilisateur ? Entre lenteur, confort spartiate et violence envers votre estomac, selon le trajet pratiqué il faut prendre son mal en patience. J’ai testé pour vous le trajet de bus Montpellier – Toulouse.
Le coût du transport : un argument majeur
Emmanuel Macron le dit lui-même : « Le transport en autocar est 8 à 10 fois moins cher que le train ». L’argument est bien sûr orienté essentiellement pour la population qui n’a pas les moyens d’affronter les prix prohibitifs de la SNCF. Nul ne peut remettre en question l’intérêt de ce point, défendu corps et âme par notre ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique.
Certaines compagnies de bus exerçant des transports alors limités au niveau départemental, régional ou international, ont donc sauté sur l’occasion. L’effort de guerre a vite été lancé par plusieurs entreprises, pour se positionner sur ce nouveau marché supposé florissant. La compagnie Eurolines, alors limitée aux trajets entre la France et ses pays voisins, a donc lancé le 10 juillet 2015 la ligne Isilines, destinée à des trajets moyenne à longue distance au sein même de l’hexagone.
Pour un trajet de Montpellier à Toulouse, le constat est sans appel : pour partir en train, il va vous en coûter en moyenne de 30 à 50 euros, entre 15 et 20 euros pour le covoiturage et le trajet en bus avec Isilines revient à 9 euros pour un allé simple. Un prix dérisoire en considérant que l’autoroute A9 possède un des prix au péage les plus chers de France (21,90 euros de la sortie Saint Jean de Védas à l’entrée de Toulouse). Mais que se cache-t-il derrière ce prix si attractif ?
A prix divisé, temps multiplié
Même si leurs prix ne permettent pas à tous et à toutes de voyager, les trains et covoiturages possèdent un dénominateur commun néanmoins alléchants : le temps de trajet. La durée moyenne de porte à porte pour relier les deux villes, est de plus ou moins deux heures (selon les retards pour l’un et les bouchons pour l’autre).
Le prix est très attractif côté autocars. Le temps de trajet beaucoup moins : Départ de Montpellier à 9h15 du matin, arrivée à Toulouse à 13h45. C’est long. Et en effet, le bus s’arrête en gare routière de Narbonne pour embarquer des voyageurs, ainsi que sur un arrêt d’autoroute de Port-Lauragais pour changer de chauffeur. 4h30 pour réaliser le voyage entre Montpellier et Toulouse, c’est plus du double d’un trajet classique en voiture ou en train.
Quelques options promises par la compagnie Eurolines peuvent cependant être intéressantes pour les voyageurs qui ne sont pas pressés. Wi-Fi à bord, prises pour brancher ses appareils ou encore toilettes embarquées, font partie de la liste des promesses distillées par le transporteur. Encore une fois, quelques détails viennent polluer la route de l’autocar.
Des options pas si avantageuses
C’est bien connu : les chauffeurs d’autobus n’en ont que faire de votre pause pipi sur l’aire d’autoroute de Lézignan-Corbières. Oui mais voilà, sur le site internet de la compagnie les bus semblent bien équipés pour faire de votre attente un point surmontable.
La présence de toilettes intégrées peut rassurer les voyageurs qui ont peur du temps de trajet. Un point intéressant, mais qui comporte quelques petits biais : la lumière ne fonctionne pas si le moteur du bus ne tourne pas, et lorsque ce dernier roule, le dispositif sanitaire s’apparente plutôt à une sortie rodéo. Avis aux cowboys de l’extrême, cette option est faite pour vous. Nous passerons l’absence de papier toilette, souvent une évidence pour des sanitaires publiques.
Autre option pouvant ravir : la présence de prises de courant, permettant de charger vos appareils numériques à bord. Encore une fois, le plaisir est de courte durée. Si votre ordinateur portable ne tient pas plus d’une heure en route, et que vous possédez une prise 230 volts – classique – pour le recharger, dommage pour vous. Non seulement le rechargement ne se fait que par câble USB, mais le dispositif se trouve uniquement sur l’îlot central du bus (au dessus des toilettes).
La connectivité à internet est souvent un argument majeur, déployé de plus en plus par les compagnies de transport. Isilines propose donc la Wi-Fi gratuite à bord de sa flotte de bus. Sur ce point, il faudra revoir vos exigences à la baisse. Vous souvenez-vous de la connexion 56kbps et des modems à numérotation bruyante du début des années 2000 ?
La Wi-Fi est une chose, la rapidité en est une autre.
Pour les néophytes, cette capture d’écran prise à l’intérieur du bus indique plusieurs choses : tout d’abord le nom du réseau, correspondant à la compagnie de transport. Le « débit descendant » est ce qui nous intéresse le plus : il s’agit de la vitesse avec laquelle vos données arrivent sur votre équipement. Dans le cas présent, « 0,14 Mbps » correspond à 1/50ème d’une connexion ADSL classique en 2015. N’espérez pas regarder vos séries favorites à bord.
Entre impatience et économies, qui gagne ?
Il est inutile de parler du confort, l’expérience montre souvent qu’entre l’autocar, le train, ou le covoiturage, personne ne gagne (mis à part la 1ère classe en train bien sûr). Il semble que dorénavant la SNCF aura de plus en plus de mal à vendre ses billets TGV au prix fort, face à une concurrence de plus en plus acharnée. Fort de son expérience, Guillaume Pepy, le PDG de la compagnie ferroviaire, a d’ailleurs annoncé le 3 septembre dernier le lancement des Ouibus, sans aucun doute pour rester dans la course.
Reste à constater que la libéralisation des transports en autocar reste un point positif de la Loi Macron. Malgré la patience dont il va falloir s’armer, et des options qui sont pour le moment en demi-teinte, l’économie réalisée par les voyageurs reste l’argument majeur de la nouvelle offre. Il reste à voir avec le temps, quel moyen de transport résistera le mieux à la création progressive de nouveaux moyens de voyager à bas prix.
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