Les déchets en outre-mer : le tri et le recyclage rament

Si le tri des déchets rentre peu à peu dans les habitudes des français, certains départements sont à la peine. C’est notamment le cas des territoires ultramarins. Dans le cadre de la COP21, Eco-Emballages, éco-organisme en charge du tri et du recyclage des emballages ménagers, propose une série d’actions pour augmenter les performances de ces territoires. Une opération plus compliquée qu’il n’y paraît.

Trier ses déchets : ce geste écolo n’est pas tout à fait entré dans les moeurs des départements et collectivités d’outre-mer (DOM-COM). Pour (re)motiver les citoyens ultramarins, Eco-Emballages, agréé par l’Etat, lance un plan de relance du recyclage dans ces territoires (hors Nouvelle-Calédonie et Polynésie Française qui, de part leur statut de Pays d’outre-mer, ne sont pas soumis au même Code de l’environnement).

L’enjeu est double : finaliser l’implantation des dispositifs de tri et améliorer la collecte des emballages ménagers là où elle existe déjà. Pour Véronique Héritier, responsable de La Réunion chez Eco-Emballages, « il convient de s’adapter à des mondes et à des réalités différents ». Et pour cela, elle l’affirme : « Il faut développer une autre économie du déchet pour chacun des territoires ultramarins. » Sous-entendu trier plus pour recycler plus, surtout lorsque les soutiens financiers de l’éco-organisme sont liés aux performances et restent essentiels pour atteindre l’objectif et lancer la machine.

Des DOM-COM peu trieurs

Car pour l’heure, on ne trie pas beaucoup ses déchets en outre-mer. En 2014, on parle d’une moyenne de 15,8 kilos d’emballages ménagers triés et recyclés : 9 kg en Guadeloupe / Saint-Martin, 10 kg en Guyane, 13 kg en Martinique, contre 45,9 kg en métropole. De bien maigres résultats sur des territoires où la préservation de l’environnement est intimement liée à l’attrait touristique. Véronique Héritier explique ces résultats par « la très lente installation des dispositifs ».

Quand la métropole a commencé à trier ces déchets dans les années 2000, c’est beaucoup plus récent dans la plupart des DOM-COM : A Mayotte, 100% de l’île est équipée d’un dispositif de tri des déchets, mais seulement depuis novembre 2013… A Saint-Pierre-et-Miquelon, la mise en place de la collecte sélective date de novembre 2014 alors qu’en Guyane, le premier centre de tri et la première collecte n’ont vu le jour qu’en septembre 2015… Pourquoi l’accélération du déploiement aujourd’hui ? « Le développement des dispositifs de tri est soumis à la loi européenne. Pour les territoires non-équipés, la France peut avoir des pénalités », précise Véronique Héritier. Des enjeux financiers qui incitent fortement l’Etat et les DOM-COM à devenir écolos sous couvert de la loi sur la transition énergétique.

Les Réunionnais sortent du lot

-142.jpgAvec 21,9 kg par habitant et par an d’emballages ménagers recyclables triés et recyclés, La Réunion est le DOM le plus performant. La raison ? Car « le département a lancé le tri dix à quinze ans avant les autres DOM-COM ». Mais pas que… Véronique Héritier pointe également « la motivation des élus et des personnels réunionnais que l’on ne retrouve pas toujours dans les autres territoires ». A La Réunion, il existe « une réelle volonté politique » qui serait au final incitative d’après elle. « Actuellement, si les collectivités réunionnaises ont réduit les fréquences de collecte dans une logique de baisse des taxes, de maîtrise des coûts et de réduction de l’emprunte carbone, elles ont aussi accepté de mener des actions de sensibilisation plus accrues », termine fièrement la responsable du DOM le plus trieur.

Parallèlement, des initiatives se mettent en place : « une collecte sélective des bouteilles de soda et de bière s’est développée sur l’île », indique Véronique Héritier. « Je crois en l’économie sociale et solidaire (ESS), particulièrement adaptée à l’outre-mer », lance-t-elle. L’ESS, une alternative pragmatique : « Les volumes actuels de déchets à recycler ne sont pas suffisants pour assurer le fonctionnement pérenne d’unités de traitement, et ce, même si la modernisation du seul centre de tri de l’île est en cours. »
Un manque de déchets recyclables à traiter souvent lié à l’implication de la population, au climat et à l’aspect financier. Et ce, dans tous les DOM-COM.

Pourquoi le tri et le recyclage ne décollent pas dans les DOM-COM ?

« Les territoires ultramarins sont isolés, denses et moins riches que ceux de la métropole. Cela freine considérablement les performances de tri », expose Véronique Héritier. En outre-mer, il y a une forte pression foncière, accentuée par des zones difficiles d’accès et des transports locaux coûteux. « La collecte est parfois une véritable gageure », soupire-t-elle.
À cela s’ajoute la convention de Bâle relative au transfert transfrontalier des déchets. De fait, les DOM-COM non-équipés d’unités de traitement in situ doivent, à prix fort, expédier les déchets recyclables vers la métropole : « Cela réduit les coopérations inter-DOM et avec les autres États de la même zone géographique », témoigne Véronique Héritier qui pense néanmoins que la sortie du statut de déchet de certaines matières va faire évoluer la règlementation.

-143.jpgAutre trouble-fête : le climat. En raison de l’hygrométrie, le papier et le carton sont par exemple difficilement valorisables si on les stocke trop longtemps. Les engins techniques trop innovants sont également sensibles. A Saint-Martin, Patrick Villemin, président de la société Verde SMX qui gère le site de recyclage-valorisation, avoue qu’il s’agit là de la plus grande difficulté : « Les coûts et les délais de livraison pour du matériel neuf nous freinent énormément. On essaie de gérer au mieux avec du matériel d’occasion : le système de débrouille est très important à Saint-Martin ! »

Puis il y a les coûts de gestion. En outre-mer, le taux de recouvrement des impôts ou redevances permettant de financer la collecte et le traitement des déchets est significativement plus faible qu’en métropole. Résultat : peu de projets d’investissement nécessitant des fonds publics et peu d’engagement des collectivités. « Il faut privilégier le recyclage uniquement lorsque les bénéfices sont supérieurs aux coûts », annonce Véronique Héritier.
Une démarche liée à l’implication de la population ultramarine qui doit inexorablement remplir ses poubelles de matières recyclables. A Saint-Martin, Patrick Villemin l’admet : « Il faudrait que le tri à la source soit de plus grande qualité. » Véronique Héritier renchérit en souhaitant développer une communication engageante :« nous devons insister sur les dommages locaux induits par les comportements inciviques. » Changer les habitudes : voilà peut être ce qui s’avèrera le plus ardu.

La COP21 : accélérateur de changement en outre-mer ?

-144.jpgAujourd’hui, les déchets génèrent des émissions de gaz à effet de serre lorsqu’ils sont traités (enfouis ou brûlés). Sachant que les DOM-COM sont plus sensibles aux changements climatiques, il y a urgence.

Présenté lors de la COP21, le plan de relance pour améliorer les performances de tri et de recyclage dans les DOM-COM sera peut-être l’élément accélérateur d’une prise de conscience écologique et d’une nouvelle économie en outre-mer.
Naviguer vers plus de tri et de recyclage, c’est aussi s’embarquer dans la création d’emplois dans des territoires où le chômage reste très élevé. Les déchets : une ressource à ne pas négliger.

Yves Jégo s’installe en Guadeloupe

Depuis le 20 janvier 2009, des mouvements sociaux d’une ampleur considérable bloquent l’île. Selon le MEDEF-Guadeloupe, la grève générale aurait déjà entraîné un manque à gagner de 130 millions d’euros pour l’économie locale. Après deux semaines de paralysie, le Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer se décide enfin à agir.

Commerces et écoles fermés, habitants bloqués par la pénurie d’essence, touristes immobilisés, la Guadeloupe est en panne. La grève générale s’accompagne d’une grève des stations d’essence aux lourdes conséquences. Un collectif regroupant 46 organisations syndicales et associatives, le «Liyannaj Kont Pwofitasyon» (LKP) rassemble les foules autour de lui, dans des manifestations historiques. Le 31 janvier, ils étaient 65 000 selon le LKP et près de 20 000 selon la police dans les rues de Pointe-à-Pitre sur une population de 405500 habitants.
Le 1er février, Yves Jégo, Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, décide de s’installer en Guadeloupe jusqu’au règlement de la crise qu’elle traverse.

« Ils ne feront pas ce qu’ils veulent dans notre pays »

La priorité pour les manifestants ? Le pouvoir d’achat et la lutte contre « la vie chère ». Concrètement, il s’agit, entre autres, d’une baisse des prix des produits de première nécessité, des impôts et des taxes, ainsi que d’une augmentation des salaires, retraites, smic ou minimum vieillesse. Mais c’est bien un ras-le-bol général qui s’exprime. Education, formation, production, service public, emploi… autant de domaines concernés par les 146 revendications du LKP. Le tout dans un climat politique tendu, étayé par des slogans tels que « La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a pa ta yo : yo péké fè sa yo vlé an péyi an-nou » (« La Guadeloupe nous appartient, elle ne leur appartient pas : ils ne feront pas ce qu’ils veulent dans notre pays »).
Les gérants de stations-service grévistes, eux, refusent l’implantation de nouveaux concurrents.

Tardives négociations

Six jours de fortes mobilisations pour de premières discussions, cela peut paraître long. Et les organisateurs n’ont pas été insensibles à cette attente. Désormais, ils veulent de vraies réponses. Des négociations entamées le 26 janvier sont suspendues le 31. Devant la détermination du mouvement à ne pas lâcher prise, Yves Jégo s’est vu contraint de considérer ces évènements sérieusement, estimant la « situation explosive ».
Finalement arrivé sur place le 1er février, il évoque l’application anticipée d’un Revenu de Solidarité Active (RSA) dès 2009 pour 61 000 foyers, « un accord sur la baisse de la TVA appliquée aux produits de première nécessité », ou encore le gel du montant des loyers HLM. Il insiste sur sa volonté de contrôler la transparence des prix en Guadeloupe.
Un plan de 56 millions d’euros a aussi été posé sur la table des négociations par la région, le département et l’association des maires. Ce plan prendrait la forme de baisses de taxes et de redéploiements de crédits.
Le 2 février, Yves Jégo a annoncé la réouverture de 25 stations services (sur les 115 que compte l’île) et prévoit une réouverture de toutes les stations le 4. Optimisme forcé ou début de conciliation ?

Le Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, en fonction depuis mars 2008, affronte un premier mandat ministériel qui ne manque pas d’obstacles. La sortie de crise de la Guadeloupe s’annonce délicate. Un risque de contagion est aussi à envisager, en Martinique notamment. Certains syndicats ont d’ores et déjà lancé un appel à la grève pour le 5 février. En mars, il devra gérer la question du référendum sur la départementalisation de Mayotte, qui attise la colère des Comores voisines.

Yves Jégo s’installe en Guadeloupe

Depuis le 20 janvier 2009, des mouvements sociaux d’une ampleur considérable bloquent l’île. Selon le MEDEF-Guadeloupe, la grève générale aurait déjà entraîné un manque à gagner de 130 millions d’euros pour l’économie locale. Après deux semaines de paralysie, le Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer se décide enfin à agir.

Commerces et écoles fermés, habitants bloqués par la pénurie d’essence, touristes immobilisés, la Guadeloupe est en panne. La grève générale s’accompagne d’une grève des stations d’essence aux lourdes conséquences. Un collectif regroupant 46 organisations syndicales et associatives, le «Liyannaj Kont Pwofitasyon» (LKP) rassemble les foules autour de lui, dans des manifestations historiques. Le 31 janvier, ils étaient 65 000 selon le LKP et près de 20 000 selon la police dans les rues de Pointe-à-Pitre sur une population de 405500 habitants.
Le 1er février, Yves Jégo, Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, décide de s’installer en Guadeloupe jusqu’au règlement de la crise qu’elle traverse.

« Ils ne feront pas ce qu’ils veulent dans notre pays »

La priorité pour les manifestants ? Le pouvoir d’achat et la lutte contre « la vie chère ». Concrètement, il s’agit, entre autres, d’une baisse des prix des produits de première nécessité, des impôts et des taxes, ainsi que d’une augmentation des salaires, retraites, smic ou minimum vieillesse. Mais c’est bien un ras-le-bol général qui s’exprime. Education, formation, production, service public, emploi… autant de domaines concernés par les 146 revendications du LKP. Le tout dans un climat politique tendu, étayé par des slogans tels que « La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a pa ta yo : yo péké fè sa yo vlé an péyi an-nou » (« La Guadeloupe nous appartient, elle ne leur appartient pas : ils ne feront pas ce qu’ils veulent dans notre pays »).
Les gérants de stations-service grévistes, eux, refusent l’implantation de nouveaux concurrents.

Tardives négociations

Six jours de fortes mobilisations pour de premières discussions, cela peut paraître long. Et les organisateurs n’ont pas été insensibles à cette attente. Désormais, ils veulent de vraies réponses. Des négociations entamées le 26 janvier sont suspendues le 31. Devant la détermination du mouvement à ne pas lâcher prise, Yves Jégo s’est vu contraint de considérer ces évènements sérieusement, estimant la « situation explosive ».
Finalement arrivé sur place le 1er février, il évoque l’application anticipée d’un Revenu de Solidarité Active (RSA) dès 2009 pour 61 000 foyers, « un accord sur la baisse de la TVA appliquée aux produits de première nécessité », ou encore le gel du montant des loyers HLM. Il insiste sur sa volonté de contrôler la transparence des prix en Guadeloupe.
Un plan de 56 millions d’euros a aussi été posé sur la table des négociations par la région, le département et l’association des maires. Ce plan prendrait la forme de baisses de taxes et de redéploiements de crédits.
Le 2 février, Yves Jégo a annoncé la réouverture de 25 stations services (sur les 115 que compte l’île) et prévoit une réouverture de toutes les stations le 4. Optimisme forcé ou début de conciliation ?

Le Secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, en fonction depuis mars 2008, affronte un premier mandat ministériel qui ne manque pas d’obstacles. La sortie de crise de la Guadeloupe s’annonce délicate. Un risque de contagion est aussi à envisager, en Martinique notamment. Certains syndicats ont d’ores et déjà lancé un appel à la grève pour le 5 février. En mars, il devra gérer la question du référendum sur la départementalisation de Mayotte, qui attise la colère des Comores voisines.