The Front Runner : au cœur de la tourmente

En avant-première en France et au Festival international du film politique de Carcassonne, le film de Jason Reitman, inspiré de la vie du sénateur Gary Hart aborde le comportement à adopter pour un candidat à la Maison Blanche et le traitement médiatique d’une campagne.

1984, Denver, dans l’État du Colorado. Gary Hart, sénateur depuis 10 ans vit amèrement sa défaite face à Walter Mondale lors des primaires au sein du parti démocrate. Quatre ans plus tard, il décide de retenter sa chance. Annoncé comme le favori de la course à la Maison Blanche face à Reagan et Bush, ce père de famille de 46 ans, bienveillant au travail comme à la maison, va se heurter aux difficultés d’une primaire tumultueuse, où sa vie de famille va vaciller.

Incarné par Hugh Jackman, Gary Hart va vivre pendant ces trois semaines de campagne surement les pires moments de sa vie. C’est un déferlement médiatique qui va s’abattre sur lui. Chacun de ses faits et geste vont être épiés et rapportés. Proche des citoyens, il n’hésite pas à en faire la démonstration tout au long du film. Celui que l’on aime comparer à John Fitzgerald Kennedy, sait lui aussi parler à toutes les tranches d’âges et à toutes les classes. Candidat qui bouscule les codes, en annonçant sa candidature à la présidentielle dans un lieu tout aussi atypique que symbolique pour lui, les montagnes de Red Rocks à Denver.

Deux journalistes sont au cœur de l’intrigue : A.J. Parker, jeune reporter au Miami Herald incarné par Mamoudou Athie et Tom Fiedler du Washington Post incarné par Steve Zissis. Au travers du personnage de A.J. Parker, est abordé la question du traitement médiatique. Faut-il évoquer la vie privée des candidats ? C’est à ce dilemme que va se retrouver confronter notre jeune journaliste, dont son unique volonté est de bien faire son travail pour ne pas perdre sa place. Plus expérimenté, Tom, va lui se retrouver dans une impasse. Une semaine après le début de la campagne, il obtient, d’une source anonyme des informations qui peuvent renverser le cours des choses. Creuser ou ne rien faire ? Malgré le déni de sa rédaction, il choisit d’enquêter. Son rôle vient confronter l’immédiateté, temps dans lequel évolue les journalistes et la fiabilité des informations.

Plus de 20 ans après les frasques sexuelles du Président Kennedy, le film pointe l’importance de l’image et de la crédibilité d’un homme politique. Sa sortie est prévue dans les salles françaises le 16 janvier 2019. En attendant voici la bande annonce.

Dilma Rousseff, future présidente du Brésil ?

Le 31 octobre prochain aura lieu le deuxième tour des élections présidentielles du Brésil. Elles opposent Dilma Rousseff, candidate du Parti des Travailleurs (PT) à José Serra, candidat du Parti de la Social Démocratie Brésilienne (PSDB). Donnée gagnante au premier tour des scrutins, la candidate du PT doit finalement affronter les urnes à nouveau, pour mieux l’emporter ? Décryptage.

Les 136 millions d’électeurs brésiliens ont encore quelques jours pour évaluer les programmes électoraux des deux candidats en lice pour les présidentielles.
Soutenue par l’estimé Président Luiz Inacio Lula da Silva, Dilma Rousseff, 62 ans, va peut-être accéder à la fonction suprême sans n’avoir jamais accompli de mandat électoral.
Avec 46,9% des voix obtenues au premier tour devant le social démocrate (PSDB) et ex-gouverneur de Sao Paulo, José Serra, qui a recueilli 32,6% des suffrages, la candidate reste la favorite du second tour.

Voter Dilma c’est voter Lula

Ayant atteint le quota maximum de deux mandats consécutifs fixé par la Constitution, Lula a mis sa popularité au service de Dilma Rousseff.
Cette dernière, ancienne chef de la maison civile (équivalent du premier ministre), a pu sortir de l’ombre pour affronter pour la première fois l’épreuve des urnes.

Cependant, l’appui de Lula ne serait pas désintéressé puisqu’il resterait dans les coulisses du pouvoir.
Pour beaucoup, il vivrait le mandat de Dilma Rousseff comme une transition avant les élections présidentielles de 2014. Il pourrait briguer un troisième mandat, fort de la continuité politique assurée par sa protégée.
L’actuel Président avoue ainsi vouloir faire corriger par sa candidate les erreurs commises lors de sa présidence, pour qu’elle réussisse là où il a échoué.

Dilma Rousseff entend, quant à elle, poursuivre la politique de l’actuel Président. Un mélange de pragmatisme économique et d’interventionnisme social qui a porté ses fruits puisque le pays est en plein essor économique.
Quasi inconnue de l’opinion publique il y a un an, elle était pourtant présente dans les différents gouvernements de Lula depuis 2003. Rousseff, compétente et autoritaire, était surnommée la « dame de fer ».
Toutefois, l’ancienne guerillera a su gommer son austérité et lisser son image à coup de marketing électoral. L’opposition a d’ailleurs raillé ce changement d’attitude mais aussi d’allure, la candidate du PT étant présentée comme une marionnette façonnée par son mentor. Ses capacités techniques en matière d’économie et d’énergie ne suffisant pas semble-t-il à pallier son manque de charisme.

Le bilan de Lula à double tranchant

Si la dauphine de Lula doit sa bonne place dans les sondages à la popularité du Président sortant, elle hérite des dossiers qui demeurent les bêtes noires du gouvernement actuel.
Fernanda, étudiante brésilienne qui vit à Paris, suit de loin les débats de son pays natal, non sans avoir un avis sur la question. Elle estime que si Dilma Rousseff n’a pas connu le plébiscite annoncé par les sondages, c’est en raison du bilan mitigé de Lula. Celui-ci aurait ainsi fait émerger la candidate verte Marina Silva avec près de 20% des suffrages au premier tour.

Fernanda pointe surtout du doigt les lacunes de la présidence Lula en matière d’éducation, opinion partagée par le journaliste Gustavo Ioschpe du journal « Veja » cité par « Courrier International ». La réforme de l’éducation est en effet prioritaire de par son rôle déterminant dans le développement d’un pays émergent.
Selon l’étudiante, la popularité de Lula est basée sur des mesures sociales de court terme, comme les crédits à bas taux ou les bourses qui poussent les parents à scolariser leurs enfants.
De ce fait, l’éducation, l’écologie, les réformes fiscales, agraires et institutionnelles sont autant de dossiers qui ont connu des carences gouvernementales.

Un second tour chahuté

Le candidat social démocrate, José Serra, bénéficie avec ce second tour d’une chance de refaire son retard. La candidate verte Marina Silva étant résolument neutre, il peut de nouveau espérer renverser la tendance.
L’enjeu de ce second tour prend donc des allures de bras de fer entre Serra et Rousseff. Le report des vingt millions de voix recueillis par la candidate écologiste est convoité par les deux candidats.

De plus, Dilma Rousseff a dû aussi faire face à diverses polémiques. La candidate s’était déclarée favorable à la légalisation de l’avortement, sujets sensibles dans un pays à majorité catholique.
Des groupes de pression religieux ont mené une offensive qui a finalement fait reculer la candidate. Dans une lettre aux églises, celle-ci a dû s’engager à ne pas prendre des mesures contraires aux principes de l’Eglise, comme la légalisation du mariage homosexuel ou de l’avortement.
Cette pratique n’est en effet permise que dans les cas où la santé de la mère est en jeu, ou s’il y a eu viol.

Par ailleurs, Rousseff a dû également composer avec les alliés de circonstance du Parti du Mouvement Démocratique Brésilien (PMDB), en acceptant Michel Temer sur sa liste.
Le personnage est sujet à controverses pour ses lacunes en économie et son éthique douteuse, qui l’a récemment impliqué dans deux enquêtes pour corruption. Un délit qui avait déjà entaché la campagne de Dilma Rousseff lorsque la chef de la maison civile qui lui avait succédée avait été mise en cause avant de donner sa démission.

Les derniers sondages semblent donner raison aux efforts de la candidate de Lula en la créditant d’une avance de dix points sur son adversaire. Toutefois les études d’opinion ne font pas les élections, en témoigne l’expérience du premier tour. En quelques jours, tout peut encore basculer.