Sponsoring et liberté d’expression

Leurs entraineurs, leurs clubs, leurs pairs, leurs supporters, leurs fédérations, leurs sponsors… Nombreux sont les sujets sur lesquels la voix du sportif de haut-niveau doit se faire prudente. Une attention permanente à ce qui sort de leur bouche amplifiée par l’omniprésence d’organes de presse prêts à relayer toute déclaration un tant soit peu polémique. Mais c’est bien au niveau des contrats de sponsoring que se cristallisent les entraves à la libre expression dans le sport.

« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. »
Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, art.19

La tyrannie des sponsors

Un droit visiblement bien difficile à exercer pour nos champions, dont la conscience se trouve prise en étau par la multiplicité de leurs contrats de sponsoring. Les sportifs sont les égéries, les ambassadeurs de marques qui pèsent dans le milieu économique. Leur objectif : s’approprier l’image du sportif afin de profiter de sa renommée. Pour cela elles s’emparent littéralement de l’image, du look, du discours de leurs poulains. Une image figée, le temps d’un contrat, pour ne pas perturber le consommateur.

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L’exemple emblématique est celui du footballeur Robert Pirès dont les firmes s’étaient accaparées des attributs de son look. Ainsi, l’équipementier Puma lui avait interdit de se raser le bouc considérant qu’il faisait partie intégrante de son image. Les shampoings Pétrole Hahn le contraignaient de leur côté à maintenir sa longue chevelure…

Aucune marge de manoeuvre

Les sportifs ont une aura qui porte, et leur parole ont souvent valeur d’évangile. Cependant leur communication est soigneusement orchestrée par leur club et leurs partenaires. Ainsi les joueurs du PSG sont tenus de répondre sans condition aux médias dits « partenaires » tel la chaîne BeIN Sport. De même aucun commentaire négatif quant aux médias qataris n’est toléré devant les autres organes de presse. Et quand le club passe un contrat avec la marque de cosmétiques Nivea, ce sont les joueurs qui sont sommés de participer au spot de pub. Aucune contestation possible. Le soutien est total, unanime.

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Partenariat Transatlantique : La liberté subordonnée aux enjeux économiques ?

Connu sous l’acronyme anglophone TTIP, le Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement (PTCI) est un accord commercial en cours de négociation entre les Etats-Unis et l’Union Européenne depuis 2013. Reporté volontairement après les élections européennes de 2014, il doit fournir un cadre de normalisation et d’harmonisation des lois et réglementations des Etats signataires. Son objectif : doper les échanges économiques, c’est-à-dire faciliter exportations et importations en tout genre. Une liberté de circulation des biens, des services et des capitaux dont les conséquences sociales, environnementales, alimentaires semblent déraisonnées…

TTIP : quèsaco ?

Bruxelles, le 13 février 2013. La Commission Européenne annonce l’ouverture des négociations entre l’Union Européenne et les Etats-Unis en vue de la conclusion d’un Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement (PTCI) prévoyant l’instauration d’une zone de libre-échange économique désignée sous l’appellation Grand Marché Transatlantique (GMT). L’institution européenne annonce un pacte ambitieux aux retombées économiques considérables : une sorte de miracle économique dont Etats-Unis et Europe tireront profit. Selon le communiqué officiel fourni par Bruxelles, l’accord « rapporterait d’ici à 2027 des gains annuels totaux se traduisant par une hausse du PIB de 0,5 % pour l’UE et de 0,4 % pour les États-Unis, ce qui équivaudrait à des revenus annuels supplémentaires de 86 milliards d’euros pour l’économie européenne et de 65 milliards d’euros pour l’économie américaine ». Trois grands axes sont évoqués pour clarifier les enjeux du traité :

  Faciliter l’accès au marché : En allégeant les droits de douane actuels, en moyenne de 5,2 % pour l’UE et de 3,5 % pour les États-Unis selon l’Organisation Mondiale du Commerce. L’investissement, la création de nouveaux services l’ouverture aux marchés publics européens qui représenteraient 25 % du PIB et 31 millions d’emplois, sont également mentionnés.

  Alléger la réglementation et homogénéiser les normes : Les producteurs voulant vendre de part et d’autre de l’Atlantique doivent « souvent payer et se conformer à des procédures à deux reprises avant d’obtenir l’approbation pour leurs produits. » Les parties américaines et européennes sont ainsi invitées à se mettre d’accord sur de mêmes règles et procédures « en négociant un accord ambitieux sur les obstacles sanitaires et phytosanitaires (normes de santé et d’hygiène, par exemple pour les produits alimentaires) ainsi que sur les obstacles techniques au commerce ». L’objectif est clairement de freiner les coûts et de gagner du temps pour les entreprises, avec, pour garantie, d’assurer la santé et la sécurité des consommateurs et de l’environnement.

 « Répondre aux défis partagés et aux opportunités communes du commerce mondial au XXIe siècle » : objectif visant à respecter les droits de propriété intellectuelle de chaque continent, maintenir un commerce sensible au développement durable et s’accorder sur une pérennisation d’un système profitable à tous.

En harmonisant les réglementations entre l’UE et les Etats-Unis, ces accords, qui devraient être finalisés au plus tôt début 2016, sont censés créer un marché commun de 820 millions de consommateurs.

Etats contre multinationales : le tribunal de la discorde

Si le discours de la Commission Européenne promet de belles perspectives économiques et financières aux deux continents, il ne fait pas état de la création d’une structure galvanisant les doutes sur les bienfaits de ce traité. Au cœur des préoccupations, l’ISDS (Investor-State Dispute Settlement, en anglais), soit le mécanisme devant régler des différends entre investisseurs et États. Privé, ce « tribunal » donnerait la possibilité à des multinationales d’attaquer en justice des États. Ce qui est contraire au principe de souveraineté étatique. Dans les faits, si un gouvernement décide d’interdire un produit ou une pratique considérés nocifs pour l’environnement ou la santé publique – une boisson énergisante ou un produit cosmétique par exemple -, les entreprises directement visées par l’interdiction pourraient, avec une facilité déconcertante, porter plainte auprès de l’ISDS au simple motif de : « impossibilité de dégager un profit ». Derrière la nature privée de cette structure s’esquisse l’ombre d’un système partisan des intérêts industriels (lobbying). La pilule serait dure à avaler pour les États et collectivités locales de l’UE, contraintes dans un tel schéma à verser des compensations financières à l’entreprise concernée.

Enfin, la privatisation d’une telle structure pose un problème majeur. Elle porterait atteinte à une des institutions majeures de l’UE : la Cour de Justice de l’Union Européenne, l’instance interprétant la législation européenne. En somme, elle garantit une application uniforme du droit dans tous les pays de l’UE. L’organe judiciaire européen statue également sur les différends opposant les gouvernements des États membres et les institutions de l’UE. Et c’est bien là nœud du problème : si le pacte transatlantique est adopté, il serait impossible pour un pays attaqué par une multinationale de saisir la Cour. La ratification du traité par Bruxelles scellera le sort des 28 Etats membres, leur empêchant de faire machine arrière face à l’ISDS. En attendant, les négociations sur ce point sensible du pacte se font dans l’opacité la plus totale. Confidentialité oblige, les parlementaires européens sont contraints de ne divulguer aucun élément – les lecteurs ne peuvent ni photocopier les documents ni de prendre de notes, leur téléphones sont confisqués à l’entrée – sous peine de perdre leur immunité parlementaire. De plus, le nombre de députés ayant accès à ces documents est très restreint : une quarantaine sur 751 au total. Un déficit démocratique ne faisant qu’accroître les inquiétudes.

ONG et formations politiques se mobilisent contre le TTIP

capture_d_ecran_2013-11-24_a_19.40.34.png Depuis plusieurs mois, plusieurs partis politiques et ONG s’insurgent contre ce traité et ont uni leurs forces pour, selon les mots des Jeunes Ecologistes, « médiatiser et rendre publiques des négociations non transparentes qui se déroulent aujourd’hui dans la plus grande opacité au mépris des droits des citoyens et des élus » au motif que le TTPI est entièrement au service du business et de l’économie (ultra-)libérale. Un sentiment partagé par de nombreux collectifs citoyens et organisations partisanes qui continuent à utiliser le terme TAFTA (sa première dénomination abandonnée parce que jugée trop proche de celle d’un traité rejeté par le Parlement Européen en 2012 : ACTA). Dans la rue, comme sur internet, certains citoyens et élus font bloc contre ce qu’ils considèrent comme une grave atteinte aux libertés individuelles et à la souveraineté étatique.

Pendant sa campagne aux dernières élections européennes, Jean-Luc Mélenchon a mis le PTCI au cœur de son programme en s’insurgeant que François Hollande « n’en [ait] jamais parlé en France ni aux Français ». Il avait déjà sonné l’alarme quelques mois plus tôt en affirmant que le PTCI ferait bientôt manger aux européens du poulet au chlore. Derrière cette allégation provocatrice et non-fondée se dessine les contours d’une crainte beaucoup plus grande partagée : que la législation européenne devienne un copier-coller des normes nord-américaines. Il n’y aurait donc pas harmonisation des réglementations mais subordination européenne aux normes étatsuniennes concernant la protection des données personnelles sur internet, les pesticides, l’environnement, les OGM, le gaz de schiste, les normes sociales, la santé, la régulation financière, etc… Pour les opposants, ce sont donc bien les libertés européennes et nationales qui vont lentement s’étioler avec la ratification de ce traité. Ce dont se font l’écho bon nombre de sites écologistes comme, par exemple, sauvonslaforet.org. Ce dernier a d’ailleurs mis en ligne une pétition qui, à ce jour, a été signée par plus de 80.000 personnes. Pourtant, dans le mandat de négociation confié par les Etats à la Commission Européenne, texte préalable à l’établissement des négociations, est annoncé la mise en place d’un certain nombre de garde-fous pour pallier une éventuelle déréglementation généralisée. Parmi eux, le respect des législations nationales en matière de normes environnementales et sociales. Ce qui signifie que, en ce qui concerne le poulet chloré, l’Europe conservera « le niveau de protection [qu’elle] juge approprié ».

La suspicion de bon nombre d’ONG provient de caractère confidentiel, voire totalement secret, des négociations, ce qui est contraire à l’idéal démocratique et au principe fondamental de liberté d’information. Pour s’en expliquer, la Commission Européenne a expliqué dans son Guide sur la transparence dans les négociations commerciales de l’UE que : « Un certain niveau de confidentialité est nécessaire pour protéger les intérêts européens et conserver des chances d’obtenir un résultat satisfaisant ». Quoi qu’il en soit, le PTCI, encore à ce jour en négociation, ne sera pas adopté sans avoir été ratifié par le Parlement Européen et les parlements nationaux (comme le prévoit le traité de Lisbonne). Autrement dit, par le peuple européen.


Géolocalisation et autres entraves à la libre circulation

«Toute personne a le droit de circuler librement. Toute personne a le droit de quitter tout pays». La libre circulation des individus fait partie des libertés fondamentales garanties par la Déclaration universelle des droits de l’homme, à l’article 13. A priori, les sportifs semblent pouvoir jouir pleinement de ce droit. Peut-être même plus qu’un citoyen lambda , au vu de leur pouvoir financier. Or, bien des exemples viennent témoigner d’entraves à cette libre circulation. Combien des sportifs retenus, emprisonnés, voire envoyés en camp militaire suite à des contre-performances. Plus quotidiennement cette régulation des déplacement se routinise dans le monde du sport. Il faut être localisable. Dans le cadre de la lutte anti-dopage, les athlètes doivent ainsi répondre à de rigoureuses obligations de géocalisation. Un bon moyen d’endiguer le dopage peut-être mais surtout une atteinte à la liberté fondamentale de circuler.

Malheurs aux vaincus !

Du fait d’impératifs professionnels très précis et contractualisés par des clauses toujours plus nombreuses, les sportifs sont limités dans leurs déplacements, et entravés contre leur gré. En témoignent les restrictives mises au vert d’avant compétition, les stages obligatoires – intitulés « tournées » – pour les sponsors ou pour aller chercher de nouveau foyers de supporters à l’autre bout du monde. Des contraintes inhérentes à la professionnalisation des athlètes, et à leur marchandisation.

Mais, plus exceptionnellement, l’histoire du sport a vu beaucoup plus grave. Des cas de séquestration, voire d’emprisonnement à la suite de contre-performances. Le régime nord-coréen avait ainsi réservé un accueil tout particulier: à ses footballeurs à leur retour de la Coupe du Monde 2010. En Côte d’Ivoire, on pratique plutôt le redressement militaire. En 2000, l’équipe nationale se fait sortir au premier tour de la Coupe d’Afrique des nations (CAN). Pas franchement du goût des généraux putschistes au pouvoir. Accusés de ne pas avoir mis «assez de cœur» à l’ouvrage, les joueurs sont envoyé en «stage de redressement»… dans un camp militaire.

Géolocalisation et lutte anti-dopage

Depuis quelques années, les instances de lutte contre le dopage dans le sport imposent des contraintes de déplacement et de localisation de plus en plus restrictives. Le dispositif de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) exige ainsi des sportifs la communication de leur agenda sur trois mois. L’idée étant de pouvoir être localisé en cas de contrôle antidopage inopiné. Toute erreur de localisation ou absence à un contrôle – « no show » – aboutit à un avertissement. Trois avertissements successifs peuvent entraîner une suspension. De quoi donner envie de se plier à ce système de surveillance orwellien.

Source d’angoisse, le « no show » constitue le cauchemar des athlètes, notamment avant un grand championnat ou une olympiade. Véritable épée de Damoclès, la procédure peut ainsi interrompre les rêves de titres et de records d’athlètes s’étant focalisés uniquement sur cet objectif. Avant les Jeux Olympiques de Londres en 2012, Laure Manaudou a évoqué publiquement cette menace puisqu’elle comptait déjà deux « no shows » dus à des étourderies ou en raison d’un imprévu.

Dans une lettre ouverte parue dans le Monde en avril 2013, Serge Simon (médecin, président de Provale, l’union des joueurs de rugby professionnel) s’insurgeait contre la géolocalisation la considérant comme trop intrusive. En conflit juridique avec l’AFLD devant la Cour européenne des droits de l’homme, il considère ce stratagème comme « une entrave aux droits et aux libertés individuelles à l’instar d’un « bracelet électronique », qui n’oserait dire son nom ».

ADAMS, logiciel de surveillance

Et pour systématiser la surveillance, les chantres de ce dispositifs ont développé l’outil parfait. Un logiciel nommé ADAMS . Acronyme issue d’une traduction de l’anglais : Système d’Administration et de Gestion Antidopage. ADAMS est un instrument de gestion en ligne qui simplifie l’administration des opérations antidopage des partenaires et des sportifs au quotidien. Il permet aux sportifs de se conformer aux règles de leur sport en matière de localisation en actualisant leurs informations où qu’ils se trouvent dans le monde.

ADAMS permet aussi de désigner un représentant tel qu’un responsable d’équipe, un agent ou une tierce personne pour entrer les données à leur place. Cette fonctionnalité aide aussi les organisations antidopage à partager des informations sur la localisation. Un point essentiel afin que les sportifs n’aient pas à transmettre à répétition les informations sur leur localisation. Les sportifs peuvent également actualiser leurs informations dans ADAMS par l’envoi de messages SMS. Une machine bien huilée.

Quelques exemples emblématiques et récents de « no show » français

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Dernièrement le marathonien James Theuri – kenyan naturalisé français en 2006 – a été pris par la patrouille de l’AFLD et condamné à un an de suspension.

Le rugbyman du Stade Toulousain,Yoann Huget, a manqué la coupe du monde de rugby 2011 en Nouvelle-Zélande faute à un troisième « no show » et écopé de six mois de suspension.

Le cycliste Grégory Baugé a été suspendu un an pour trois manquements aux règles de localisation en janvier 2012. La sanction, rendue par la Fédération française (FFC), s’appliquant rétroactivement, Baugé perd le titre mondial de la vitesse sur piste qu’il avait obtenu six mois avant à Apeldoorn, au Pays-Bas, ainsi que le titre par équipe, remporté avec Kévin Sireau et Michael d’Almeida.

Inquiétée pour avoir contrevenu par trois fois aux règles de localisation, la vétérante Jeannie Longo a finalement été relaxée en novembre 2011 par la commission de discipline de la Fédération française. Elle risquait une suspension allant de trois mois à deux ans.

La championne de taekwondo Gwladys Epangue, victime d’une procédure de « no show » en 2010 redoute dorénavant de ne pas remplir le logiciel de géolocalisation ADAMS correctement.

Du droit de disposer de son corps

Dans les Etats autoritaires modernes, le sport est une véritable vitrine du régime. C’est donc la performance qui prime. Quitte à passer aux oubliette certaines libertés dans l’espoir de fructueuses moissons de trophées. Les sportifs sont de simples VRP, hommes sandwichs qui doivent représenter au mieux leur nation. Stratégie similaire à celle de la RDA ou de l’URSS en leur temps. Les athlètes sont de fiers représentants d’un Etat prestigieux.

Ce raisonnement, on le rencontre encore, à des degrés moindres certes, un peu partout. Etats-Unis, Chine et Russie en tête. Ainsi, en Chine, les enfants sont sélectionnés dès l’âge de cinq ans par les centres spécialisés à la recherche de futurs champions. Leurs corps sont maltraités dès le plus jeune âge pour en faire des graines de star de la discipline.

Le tyran Ma Junren

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Autre exemple frappant de la captivité des sportifs : les coureuses de demi-fond chinoises entraînées par leur « entraîneur-tortionnaire » Ma Junren. Dans les années 1990, elles étaient surnommées : l’armée de « Ma ». Ce sulfureux entraîneur, œuvrant pour le régime, faisait avaler à ses disciples des dizaines de kilomètres par jour ainsi que du sang de tortue et de la de soupe de chenilles aux champignons (selon la légende), faire les corvées ménagères du camp d’entraînement, tout en les insultant. Véritable tyran, il obtint des résultats surprenant amenant ses coureuses au sommet de la performance. Ces dernières possèdent encore de nombreux records du monde (10 000m et 3000m notamment).

Les Russes champions de la seringue !

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Si leur utilisation imposée s’est raréfiée, certains produits dopants – créatine – ne sont toujours pas bannis. Et cela en dépit d’une nocivité reconnue. Causez-en aux joueurs de NFL, aux cyclistes voire aux rugbymen. En Russie, le dopage institutionnel a été clairement démontré. Il faut dire qu’un athlète sur cinq suspendus pour dopage dans le monde est russe, c’était un peu gros. D’après l’Association Internationale des Fédérations d’Athlétisme, ils sont ainsi soixante-sept athlètes de nationalité russe à être condamnés pour dopage. Un chiffre éminement révélateur quant à l’existence probable d’un système de dopage. Cette proportion est trop alarmante pour ne pas y suspecter une forme d’organisation étatique.

Des corps soumis à rude épreuve

Second pendent de cette mise en danger, les cadences infernales en vogue aujourd’hui. Trois matchs par semaine pour les basketteurs de NBA ! Quatre en dix jours de boxing-week pour les footeux de Premier League. Les sportifs doivent répéter les efforts de façon constante, se dépasser sans cesse pour le plaisir des foules, et des télévisions. On appelle ça «les impératifs du sport moderne», il paraît.

Extrait du reportage « Sport : le revers de la médaille » diffusé sur Arte en juin 2014.

Les conséquences de cette course effrénée aux résultats sont calamiteuses. Recours au dopage presque systématique donc, surmédicalisation constante, accélération des rythmes d’entraînement, réduction des temps de récupération ou de repos après blessure, obsession du record… Une ruée vers l’or, olympique, et le spectacle qui met en danger la santé des athlètes. Imaginez ces mecs qui se farcissent le tour de la France à la force du cuisseau en trois semaines à peine. Six heures de moulinage par jour, à 40 km/h de moyenne !

La croissance frénétique des vitesses sur le Tour de France (cyclisme)

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Sport, performance et liberté

Le sportif de haut-niveau : le parfait esclave moderne ? Un mois et demi après ce foutu 7 janvier, et dans le cadre de notre dossier liberté, nous avons transposé cette question de la liberté au monde du sport. Alors, les sportifs sont-ils des Charlies ou Chaouachi embrigadés ? Quatre articles à venir, de nombreux témoignages, graphiques et autres arguments pour en débattre. Sans oublier vos points de vues : en sondage et commentaires !

Fin de vie : peut-on mourir librement ?

Alors que Vincent Lambert est plongé dans un état de conscience minimal depuis 2008, sa famille se déchire sur son sort. Dans l’attente d’une décision de justice européenne, l’affaire relance à nouveau le débat sur la fin de vie. Euthanasie, suicide assisté : tour d’horizon de la législation en France et chez nos voisins.

Le cas Lambert

Vincent Lambert, 39 ans, victime d’un grave accident de la route en 2008 est depuis tétraplégique. Cet ancien infirmier psychiatrique est maintenu en vie artificiellement suite à la décision de la Cour européenne des Droits de l’Homme (CEDH) qui s’est prononcée le 7 janvier dernier contre l’avis du Conseil d’État et du corps médical du CHU de Reims.
Dans un état végétatif depuis presque sept ans, la famille de ce jeune père se déchire en justice sur son sort. Ses parents, une de ses sœurs et un demi-frère, demandent à ce qu’il soit maintenu en vie. Sa femme, Rachel Lambert, se prononce pour le droit de laisser mourir son compagnon. Elle est soutenue dans son combat judiciaire par le neveu de Vincent Lambert, cinq frères et sœurs et l’équipe médicale. Les juges devront trancher dans les prochaines semaines. En attendant leur décision qui devrait être rendue en février ou mars, le débat sur la légalisation de l’euthanasie est relancé. Avant que le silence ne remporte une dramatique victoire, Vincent Lambert s’était, selon son épouse et l’un de ses frères, exprimé contre l’acharnement thérapeutique.

Cette affaire fait écho à la tragique histoire de Vincent Humbert qui avait suscité de vives émotions au sein de la population. En septembre 2000, le jeune homme âgé de 19 ans, est également victime d’un terrible accident de la route. Devenu tétraplégique, aveugle et muet, il avait entrepris de nombreuses démarches pour obtenir le droit d’être euthanasié. Allant même jusqu’à écrire une lettre au président de la République d’alors, Jacques Chirac, en vain. En septembre 2003, la mère de Vincent Humbert, aidée d’un médecin, provoque la mort de son fils. En février 2006, le jugement se conclut par un non-lieu.

Aucun d’entre nous n’est à l’abri de vivre une telle situation. Il est donc légitime de se demander si, dans nos sociétés actuelles et avec les lois qui les gouvernent, nous avons la liberté de choisir comment et quand rendre notre dernier souffle.

En France, le débat est ouvert

La question de la législation sur la fin de vie est de nouveau ouverte au sein du Parlement, tout comme au gouvernement. Depuis le mois de janvier, les députés débattent de la proposition de loi initiée par le tandem Claeys (PS) – Leonetti (UMP). Il s’agit pour l’instant d’une passe d’armes sans vote au terme de laquelle un projet de loi devrait voir le jour. Si consensus il y a, dans la majorité comme dans l’opposition, c’est sur le rejet du rapport rendu par les deux élus. En effet, celui-ci évite soigneusement de traiter des sujets les plus épineux, comme l’euthanasie et le suicide assisté. Tout juste est mis en avant la nécessité de reconnaître un « droit à la sédation en phase terminale ». En d’autres termes, endormir la personne malade pour atténuer la perception d’une douleur, d’une souffrance insupportable. Une avancée à pas feutrés en comparaison aux trois lois précédentes qui servent de gouvernail.

  • La première loi datant du 9 juin 1999 garantit au patient malade le droit d’accès aux soins palliatifs. Quinze ans plus tard, le constat est sans appel : seulement 20% des patients qui réunissent les conditions pour en bénéficier y ont accès.
  • La seconde loi du 4 mars 2002 ouvre, quant à elle, de nouveaux droits aux malades. Ces derniers, étant dans leur propre intérêt, peuvent décider de refuser tout acharnement thérapeutique inutile. Si tant est qu’ils soient en état d’exprimer leurs volontés.
  • C’est dans ce cadre que la loi Léonetti du 22 avril 2005 complète le vide juridique de celle de 2002. Ce texte renforce le pouvoir et l’autonomie des patients dans le sens où elle affirme l’interdiction de l’obstination déraisonnée pour tous les malades. Selon une estimation du Ministère de la Santé, ce point concerne environ 1500 personnes en état végétatif ou pauci-relationnel.

La proposition de loi de MM. Claeys et Leonetti cherche ainsi à renforcer la dernière en vigueur. Pour prendre les devants face à ces états où le patient ne peut pas exprimer clairement sa volonté, la rédaction de directives anticipées s’impose comme une solution évidente. Un « droit à être entendu » qui appuierait une fois de plus le pouvoir décisionnel du malade. Jusqu’à présent, ces consignes n’ont qu’un caractère consultatif et non contraignant. Le médecin peut donc choisir d’appliquer – ou non – les volontés du patient.

Qu’en est-il chez nos voisins ? La question demeure d’actualité dans tous les États membres de l’Union européenne. En l’absence d’une harmonisation européenne, la législation diffère d’un pays à un autre. Et la liberté de mourir dans la dignité est sensiblement disparate que l’on soit citoyen suisse, italien, suédois, allemand ou autre. Tour d’horizon…

Les législations des pays européens en matière d’euthanasie


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Renforcement de la surveillance sur Internet : qui dit quoi ?

« Je suis Charlie » et les autres messages de solidarité nés sur les réseaux sociaux n’ont hélas pas écarté la circulation de propos haineux, appelant parfois au terrorisme. Le gouvernement socialiste a confirmé, mercredi 21 janvier 2015, le renforcement des contrôles sur le web et sa volonté de coopérer avec les différents opérateurs d’internet dans un cadre international. Ce cyber-volet du plan Vigipirate permettrait de mieux repérer les profils djihadistes et limiter les appels à la haine et l’apologie du terrorisme. Un dispositif qui relance le débat des limites de la liberté d’expression sur la toile.
Paroles d’acteurs de la société politique et civile.

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La liberté de la presse mise à mal en Europe

Parmi les 47 chefs d’Etat et de gouvernement qui ont participé à la marche républicaine pour la liberté d’expression à Paris le 11 janvier dernier, quelques-uns ne sont pas exempts de reproches en matière de liberté de la presse. À l’image du Président hongrois, Viktor Orban, ou du Premier ministre turc, Ahmet Davutoğlu, leur comportement à l’égard des médias laisse apparaître des manquements importants à l’Article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Il stipule que la liberté d’expression et d’information sont des principes intangibles. L’Union européenne est depuis longtemps considérée comme la région du monde la plus avancée dans ce domaine. Cependant, les ONG et les organisations estiment que la liberté de la presse en Europe est menacée dans quelques pays. Certains gouvernements engagent même des actions en justice par simple motivation politique et vont jusqu’à censurer certains médias.
Zoom sur les bons et les mauvais élèves européens en matière de liberté de la presse.

Dossier spécial « Liberté »

« Liberté, liberté chérie … » L’actualité du mois de janvier aura remis au goût du jour ce symbole traditionnel de la république. Une notion parfois « oubliée » des compatriotes de l’Hexagone et pourtant jamais inaliénable dans les esprits quand elle se trouve menacée. On l’adore comme on la déteste. On la revendique comme on la tait. Après tout, c’est notre liberté de choisir.

De l’euthanasie à la presse, du sport à la philosophie, de l’art à l’économie… Les sociétés européennes regorgent de débats alimentés par ce thème inépuisable, centralisateur et clivant. Hautcourant a épluché ce droit fondamental sous certaines de ses coutures. Une autopsie subjective et inattendue, sur des angles choisis en fonction de notre libre-arbitre : telle est ici notre liberté éditoriale.

À l’occasion de ce dossier spécial, l’équipe de Hautcourant innove ses formats journalistiques et propose des sujets 100% web-magazine : carte interactive, déambulation graphique, duels d’opinions… Un regard décalé sur des sujets de réflexion. Tournez les pages de ce web-journal illustré en toute liberté.