Louie Bruyère, écrivain en herbe : « J’ai l’angoisse de ne pas créer »

C’est sous son nom de plume, Louie Bruyère, que Diané, étudiant en 3e année de licence LEA espagnol, publie ses premiers fanzines. Ce jeune homme de 25 ans se définit avant tout comme un écrivain avant d’être étudiant. « Je me concentre principalement sur mes livres », confie-t-il.

De ses premiers écrits, il n’en a que les souvenirs de sa mère. « J’avais 9 ans, en 1997 et je vivais au Congo. J’écrivais alors mon journal sur mes journées en tant que réfugié de la guerre civile qui sévissait alors. J’ai depuis perdu ces écrits, mais je rêve de les réécrire ! »

Il était une fois, Le palais des songes

Des rêves, Louie en a plein la tête. Car le jeune homme n’a jamais cessé d’écrire depuis ses 9 ans et voudrait désormais trouver un éditeur pour le publier. En septembre 2009, Louie Bruyère se lance dans l’écriture de fanzines, ces magazines japonais qui racontent des histoires de fiction.

« À l’époque du merveilleux, il existait un continent nommé Belle-erys ». C’est ainsi que débute Le Palais des songes, le tome 1 d’une longue série imaginé par Louie. L’univers fantastique dans lequel Louie Bruyère nous plonge est peuplé de fées et de créatures.

« C’est l’histoire d’un héros qui se fait attaquer par une créature et qui s’échappe du monde des cauchemars. Pour s’en sortir, le héros cherche son fée». Lorsqu’il raconte son histoire, Louie est animé par la passion. Il invente même un système politique nouveau, propre au monde qu’il a créé. « Je suis partie d’une utopie, puis je l’ai complexifiée ». Son écriture est inspirée de ses modèles, Francis Scott Fitzgerald, Benjamin Button, Tolkien ou encore J.K Rowling, même s’il cherche toujours à innover.

Le Tome 1 disponible à Sauramp et Ikoku grâce à l’autofinancement

Pour l’heure, c’est le système D qui permet à Louie d’être lu.
Il finance lui-même l’impression de ses exemplaires et les mets en emprunts dans les librairies de Montpellier. À Sauramp ou Ikoku, les fanzines de Louie peuvent être lus sur place ou empruntés sous un système de caution de 1€. Seul le Tome 1 est disponible avec ce système. Un tome 1 qui se compose de 20 chapitres, soit 400 à 500 pages ! « Je ne peux pas publier tous les tomes d’un coup, cela me reviendrait très cher. J’espère trouver des financements pour faire évoluer la formule, voire trouver un éditeur ». Pourtant, Louie en est à l’écriture du 5e Tome !

« La touche effacer de l’ordinateur est maléfique », Louie Bruyère

Pour l’écriture de ces tomes, Louie est resté à la vieille école : du papier et un stylo. « La touche effacer de l’ordinateur est une touche maléfique ! Je préfère écrire mes premiers jets à la main puis taper la version finale à l’ordinateur. Les mots sur le papier s’inscrivent et restent et je prends plus le temps de réfléchir ».

« J’ai l’angoisse de ne pas créer ». Louie enchaîne en effet les projets littéraires. Entre deux tomes, le jeune homme écrit des nouvelles, des contes de fées pour enfants, des romans… Il réussit même à vendre quelques exemplaires numérisés de ses contes sur Amazon… en attendant de trouver un éditeur qui publiera les quinze années d’écriture qui dorment dans ses tiroirs !

Dany Laferrière : « Je suis un écrivain du quotidien »

Écrivain haïtien de renom, Dany Laferrière propose dans son dernier roman, Tout bouge autour de moi, une vision au plus près de la population d’Haïti. Un an après le séisme, il revient sur les impressions vécues durant le drame et l’énergie déployée par les survivants.

Dany Laferrière était présent au moment du tremblement de terre qui a fait plus de 250 000 victimes en Haïti le 12 janvier 2010. C’est suite au drame que le citoyen qu’il est a commencé à écrire Tout bouge autour de moi. Son but : donner une autre image de la situation que celle renvoyée par les médias.
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Au plus près de la catastrophe, Dany Laferrière redécouvre le courage d’une population qui continue à vivre malgré tout. Dès le lendemain du tremblement de terre, la vie devait rependre son cours…
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Dans le monde occidental la situation d’Haïti touche et génère une solidarité internationale. Un après, la polémique enfle sur la non distribution de l’aide à la population. Pour Dany Laferrière, peu importe le montant de l’aide reçue, c’est la manière dont les Haïtiens survivent au quotidien qui compte.
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Sur le plan politique, les élections présidentielles du 28 novembre 2010 n’ont toujours pas abouti à la mise en place d’un gouvernement et les questions demeurent. L’arrivée surprise le 16 janvier 2011 de l’ancien dictateur Jean Claude Duvalier – dit Bébé Doc – n’arrange rien à l’affaire. Dany Laferrière était familier de ce personnage qui l’avait poussé à quitter le pays. Il s’est exilé à Montréal en 1976 après la mort d’un de ses amis journalistes opposant au régime, Gasner Raymond.
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Les médias nous on fait connaître une facette de la réalité haïtienne, les dégâts matériels et notamment les conséquences politiques et économiques du drame. Pour Dany Laferrière, l’être humain compte avant tout et les médias n’ont pas assez pris en compte la réalité du quotidien.
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« La réalité colombienne m’a rattrapé »

L’un, William Ospina, est essayiste, journaliste, poète. Il traite dans « Le pays de la Cannelle », son dernier opus, de la découverte puis de la conquête de la Colombie par les colons espagnols.
L’autre, Evelio Rosero, est romancier, nouvelliste. C’est son roman « Les Armées » qui le fit connaître en Europe. Il a d’ailleurs reçu le prix The Independant pour ce livre qui met en scène une violence plus contemporaine : celle de la Colombie actuelle, autour d’un village imaginaire.
Invités en France par le Centre national du livre à l’occasion des Belles Étrangères, ils ont acceptés de revenir sur ce qui les rapproche inévitablement : La Colombie et leur engagement littéraire. Rencontres.

Vos romans l’un historique, l’autre plus contemporain, font référence à la Colombie et sa situation actuelle.

William Ospina : C’est le poids énorme de l’Histoire qui a construit notre pays, l’arrivée des colons espagnols, les massacres des populations indigènes, la traite des noirs… Tous ses événements l’affectent encore. D’ailleurs la mixité de notre population s’explique par l’Histoire.

Evelio Rosero : La réalité colombienne m’affecte en tant que citoyen mais aussi en tant qu’écrivain, je ne pouvais pas ne pas rendre compte de celle-ci. Et la réalité c’est aussi la présence des quatre forces armées : narco trafiquants, paramilitaires, guérillas et militaires face à des civils démunis.

Quelle place occupe les quatre forces armées auxquelles vous faites références ?

E. R : Il n’y a pas une entité plus saine qu’une autre, chaque force tue. Les informations colombiennes relataient il y a peu l’histoire d’une mère de famille se lamentant de voir ses deux fils engagés l’un dans la guérilla, l’autre dans la formation paramilitaire. La mort est la réponse dans tous les cas.

La Colombie ne serait-elle que guerre et souffrance ?

E.R : Tout n’est pas obscur. Il y a une réponse de l’esprit, de l’humour, de la musique. Je l’exprime au début de mon roman. Néanmoins la réalité qui frappe le village imaginaire dont je parle est malheureusement très réelle, la violence est réelle. J’aurais aimé écrire seulement sur le bonheur.

Juan Manuel Santos est arrivé au pouvoir en juin dernier, pensez-vous que cela puisse faire changer les choses ?

E. R : Il y a des différences entre Santos et son prédécesseur Uribe. Cependant Santos s’inscrit dans la continuité du premier. Il est le dauphin d’Uribe et s’emploie d’ailleurs à couvrir les méfaits de son prédécesseur tels que les liens du gouvernement avec les narcotrafiquants et les paramilitaires.

W.O : La différence entre les deux est qu’Uribe appartient à la nouvelle classe de dirigeant alors que Santos vient de la vieille élite colombienne. Leurs intérêts sont différents. Alors qu’Uribe était très attaché à maintenir le régime de grands propriétaires, Santos veut changer cela. On ne peut pas savoir jusqu’où va aller cette différence et si cela va déclencher un autre genre de conflit.

En tant que journalistes, quelle place est donnée à la liberté de la presse en Colombie?

W.O : Je n’ai jamais senti de contraintes, vécu de censure vis-à-vis de mon travail journalistique. Mais je sais malgré tout qu’il y a des choses qu’on ne peut pas dire. La censure se fait par mon autocensure.

Etre écrivain permet-il une plus grande liberté d’expression ?

E.R :La littérature est vitale, elle nous touche et a ce pouvoir de partager la réalité. Le mot écrit reste à la différence des informations télévisées. En tant qu’écrivain je me sens engagé, j’ai le devoir d’écrire de mieux en mieux sans m’affilier à un parti politique quel qu’il soit.

W.O : Je crois à la capacité de la littérature pour modifier l’histoire, les êtres humains, les consciences. La réalité colombienne exige un gros travail sur le plan littéraire et culturel. Si la littérature nous aide à voir, à entretenir la mémoire alors il sera plus facile de changer les choses. L’important n’est pas qu’un pays ait une guérilla, mais qu’il soit capable de la stopper.

Propos recueillis par Clémence Olivier

Marc Lévy : « Ecrire, c’est un territoire de liberté ».

A l’occasion de la sortie de son dixième roman  » La première nuit « , la librairie Sauramps Odyssée a accueilli hier soir, jeudi 10 décembre, Marc Lévy. Romancier français qui a vendu le plus de livres en France et dans le monde, ses neuf derniers romans ont été publiés, à ce jour, à 19 millions d’exemplaires. Second volet d’un diptyque,  » La première nuit  » raconte l’histoire d’Adrian, astrophysicien, qui part à la recherche de Keira, archéologue, disparue après un attentat. Dans un périple qui nous entraîne des hauts plateaux éthiopiens jusque dans les étendues glacées du nord de l’Oural, Marc Lévy conclut avec  » La Première nuit « , l’aventure fantastique commencée avec  » Le Premier jour « . Rencontre.

D’où vient votre goût pour l’écriture ?

Je ne sais pas. Je crois du plaisir de raconter des histoires. Mais je ne sais pas d’où il vient. Je pourrai vous faire une réponse toute convenue mais je ne le souhaite pas. Vous savez, si je vous demandai d’où est venu l’amour que vous portez à votre conjoint, vous n’en sauriez rien. Il est venu, c’est tout. Il y a des choses qui sont là et nous ne pouvons pas trouver d’explications.

Vous parlez toujours d’amour. C’est votre priorité dans la vie ?

Non ce n’est pas une priorité, c’est une question d’humilité. Je pense que l’amour est ce qui motive tout un chacun. De la chose la plus simple dans votre quotidien, à la chose la plus complexe. Quoi que vous cultiviez, quoi que vous fassiez, vous le faites par amour. Après, vous pouvez avoir une espèce de prétention, de fierté qui font que vous dites que ce n’est pas vrai. Mais tout se fait par amour. Nous élevons nos enfants par amour, nous vivons avec quelqu’un par amour, nous cultivons notre jardin par amour, nous construisons une maison par amour, … Tout se fait par amour. Même si cela dérange les cyniques. C’est une réalité. En tout cas, c’est la mienne. Je ne vois pas comment faire autrement.


Pensez-vous que par amour, comme c’est le cas avec Adrian, un homme est capable de tout ?

Il faut demander cela à ma femme ! (rires) Si je répondais oui, cela serait très prétentieux.

Est-ce que l’on peut dire « Marc Lévy, l’auteur séducteur » ?

Non. Je suis quelqu’un de très timide et de très pudique. Je ne suis pas du tout un séducteur. J’étais le plus mauvais dragueur de tout le lycée et ils s’en souviennent encore ! J’aimerai bien que la légende s’entretienne mais j’aurai, de suite, quelques copains pour dénoncer la forfaiture.

C’est la première fois que vous publiez un diptyque, pourquoi ?

J’ai écrit cette histoire dans une continuité. Je ne me rendais pas compte que je m’embarquais dans une intrigue aussi longue. C’est mon éditeur qui m’a fait remarquer qu’il était difficile de publier un livre de 950 pages. Donc, nous l’avons scindé en deux tomes. L’endroit où ils ont coupé l’histoire, c’est quand même un peu vache.

Vous l’auriez coupé où ?

Si c’était à refaire, j’aurai fait trois tomes de 350 pages chacun, au lieu de deux. Je crois que je me serais fait encore plus d’ennemis ! (rires) L’idéal aurait été de publier un seul livre. Mais les lecteurs trouvent très désagréable de lire un ouvrage de 950 pages. Dans le métro, par exemple, ce n’est pas très pratique.

Il y a une unité de temps entre les deux romans qui correspond à la réalité. J’ai vécu l’été comme Adrian.

A quel personnage vous identifiez-vous ?

Si je vous dis Keira, cela va vous paraître ridicule. C’est un mélange. Il n’y a pas un endroit où je me mets, moi, dans le roman. Je suis trop pudique pour me mettre dans un personnage. Cependant, je m’identifie pas mal à Walter (ndlr : Walter est le meilleur ami du héros). Je pourrai vous dire que je suis Adrian, le héros. Mais, j’ai déjà le vertige sur un tabouret et il escalade les montagnes à 2 000 mètres !


Pourquoi le thème de la destinée est présent dans tous vos romans ?

Parce que je crois que c’est ce qui me fait le plus peur.


Vous croyez en la destinée ?

Ce n’est pas ce que je vous ai dit. Je n’en sais rien. Qu’est ce que c’est que la destinée ? J’ai toujours voulu croire, et cela n’engage que moi, que la destinée est une succession de choix que la vie nous présente. Je déteste l’idée que tout est écrit. Sinon pourquoi se lever le matin, pourquoi aller à l’école, … Si tout est écrit, il n’y a qu’à se poser sur le tapis roulant et attendre qu’il arrive au bout. Je pense que la destinée, c’est une succession de choix. Et le destin, c’est ce que l’on va décider de prendre comme choix. Je trouve que c’est ce qu’il y a de plus intrigant. Pourquoi le piano qui se décroche tombe à deux centimètres de vous ou vous tombe sur la figure ?

Trois de vos ouvrages font référence à des évènements historiques : Les enfants de la liberté à la Résistance, Toutes ces choses qu’on ne s’est pas dites à la Chute du Mur de Berlin, et Où es-tu ? à l’ouragan de 1974. Quel est votre rapport à l’Histoire ?

Je trouve assez intéressant, pour certains romans, que les personnages évoluent dans l’Histoire qui les englobe. Je ne peux pas faire une réponse courte à la question que vous me posez. Chacun des trois romans que vous me citez à sa raison, divergente des deux autres. L’histoire des Enfants de la liberté est très particulière. Celle de Toutes ces choses qu’on ne s’est pas dites a d’autres motifs.

Mon rapport à l’Histoire ? Je pense que l’Histoire imprime l’histoire personnelle que nous vivons. Nous ne pouvons pas nous extraire du contexte historique dans lequel nous vivons, des évènements historiques dans lesquels nous vivons. Quand on est romancier et que l’on raconte l’histoire de personnages, on ne peut pas prendre deux personnages qui vivent en 1960 et les faire avoir les mêmes réactions que des personnages des années 2010. Ne serait-ce que les sentiments qu’ils ont. Ils ne sont pas impactés par la même morale publique, par la même conjoncture, par les mêmes problématiques. Je ne sais pas quel âge vous avez. 20 ans ? 22 ans ? Avoir 20 ans, il y a trente ans, n’est pas du tout la même chose qu’avoir 20 ans aujourd’hui. Ne serait-ce que parce qu’il y a trente ans, nous n’avions pas de téléphone portable. Nous ne savions pas ce que c’était que d’envoyer un sms. Vous ne savez sans doute pas ce que c’était de faire passer un petit papier en cours quand j’avais 16 ans. Il fallait avoir une technique pour faire passer une boulette de papier du dernier rang au premier, et dire à une copine « on se voit à 16h30 » sans que les copains ne le sachent et sans se faire chopper par la maîtresse. C’était un exploit ! Aujourd’hui, un petit texto, et hop hop hop, l’affaire est dans le sac ! Le débarquement du sms a changé les modes de communication. Sans vouloir me vieillir, à mon époque, nous n’avions qu’une chaîne de télévision et à 20h30 nous étions au paddock. Nous vivions dans une autre planète que celle dans laquelle vous vivez. J’ai un fils de 20 ans, je suis donc témoin de ce monde là.

Vous évoquez votre jeunesse, quels étaient vos livres préférés à l’époque du lycée ?

Je dirai La nuit des temps de Barjavel. D’ailleurs mon livre est une façon de rendre hommage à Barjavel. Le petit prince de Saint-Exupéry, Huis clos de Sartre, Paroles de Prévert, La condition humaine de Malraux, et E=mc2 mon amour de Patrick Cauvin. Et à la sortie du lycée, Romain Gary.

Plusieurs de vos romans ont été adaptés au cinéma, que pensez-vous de ces adaptations ?

C’est très complexe. L’adaptation d’un roman répond à des règles incontournables. Il y a toujours deux points de vue. Celui du lecteur et celui de l’auteur. Je considère que lorsqu’un réalisateur vous fait l’honneur d’adapter votre roman, il faut lui laisser la liberté de raconter l’histoire à sa façon. C’est un auteur à part entière. On ne peut pas contraindre l’intelligence d’un auteur à filmer les pages d’un livre. Même si la tentation de l’auteur du livre est de filmer exactement l’histoire qu’il a écrite. C’est un pari qui est impossible. Ne serait-ce que parce qu’un roman raconte une histoire en huit-neuf heures et qu’un film doit la raconter en une heure et demie. A partir du moment où c’est bien filmé, où les acteurs sont justes, la mise en vie de ses propres personnages est extrêmement jouissive.

J’ai vécu trois expériences différentes. Dans Et Si c’était vrai, le film est très éloigné du roman. Le réalisateur a prit le parti de changer la nature des personnages. Il les a débaptisés. Le « Arthur » et la « Lorraine » du film ne sont pas le « Arthur » et la « Lorraine » de mon roman. Alors que dans Mes amis, mes amours, même si la réalisatrice a enlevé une quantité de scènes importantes du roman et qu’elle en a rajouté d’autres, le « Matthias » et le « Antoine » du film sont vraiment le « Matthias » et le « Antoine » du roman. C’est une adaptation plus fidèle. Où es-tu ? a été produit en format télévision. Les quatre heures du téléfilm permettent de coller à la rythmique du roman. Donc, c’est encore plus fidèle. Cela a été trois très belles aventures.


En parlant de télévision, quelle est votre émission télévisée préférée ?

L’émission où ils vont dans des pays au bout du monde… En Terre Inconnue !


Et si nous faisions un petit portrait chinois… Si vous étiez…

Une saison ?

Le printemps.

Une femme ?

Joker !

Une musique ?

Une chanson des Beatles.

Un roman ?

Clair de femme de Romain Gary.


Un pays ?

La France.


Un personnage historique ?

Pasteur.

Vous dites que vous aimez la France, pourquoi vivre à New York ?

J’ai toujours vécu à l’étranger. J’aime vivre à l’étranger et j’aime vivre en étranger. Ce n’est pas parce que l’on vit à l’étranger que l’on n’aime pas son pays. De la même façon qu’à vingt ans, ne plus habiter chez ses parents ne vous empêche pas de les aimer. Nous sommes trois millions de Français à vivre à l’étranger. Heureusement d’ailleurs. Si aucun Français ne vivait pas à l’étranger, on ne saurait pas ce qu’est la France.

Quels conseils donneriez-vous à un jeune écrivain qui veut se lancer ?

Si je pouvais en donner un seul : n’en écouter aucun. Écrire, c’est un territoire de liberté. Vous pouvez écrire un roman sans ponctuation si cela vous amuse. Il ne faut pas laisser l’écriture et la littérature s’enfermer dans des règles grammaticales. Certes, elles sont très importantes pour le maintien de la langue. Mais, il ne doit pas y avoir tout le temps des règles. Le seul gardien de la liberté d’écriture, c’est vous-même. Il faut écrire avec beaucoup d’humilité. L’écriture c’est un long tunnel de solitude. Avec un papier et un crayon, on peut tout écrire. Et si on peut tout écrire, on peut rentrer dans un domaine imaginaire qui vous transpose bien au-delà des murs qui vous enferment. C’est la seule conscience à garder quand on écrit. On peut faire ce métier très sérieusement sans jamais se prendre au sérieux. Il y a autant de façon d’écrire qu’il y a de gens qui écrivent. Il y a autant de façon d’aimer que de gens qui aiment. Il n’y a pas plus de recettes d’écriture, qu’il y a de recettes amoureuses.

L’écriture est-elle un besoin pour vous ? Avez-vous besoin d’écrire tous les jours ?

Je vous dirais que c’est un bonheur. Je ne veux pas donner de gravité à la chose. Dans ma vie, j’ai vu trop de gens dans le besoin pour avoir l’espèce de prétention de dire : « j’ai besoin d’écrire ». Si je ne peux plus écrire, je survivrai. Je touche du bois, mais s’il arrive quelque chose à mon fils, je ne sais pas si je survivrai. C’est un bonheur, un vrai bonheur que d’écrire. Je recommence un nouveau roman dans quelques semaines et je suis heureux de cela.

Pour finir, quel est votre rêve ?

De vivre très, très vieux. Cela englobe tous les autres rêves. Il y en a beaucoup. Tant que vous êtes vivant tous les rêves sont possibles.