Le CSA a 20 ans

Le 17 février 1989 était créé le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, en remplacement de la Commission Nationale de la Communication et des Libertés. Il reste aujourd’hui la seule autorité de régulation de l’audiovisuel en France. Mais les critiques sont nombreuses, notamment depuis la nomination de Michel Boyon à sa présidence il y a 2 ans.

Les 9 membres du CSA sont nommés pour 6 ans. Ils sont nommés par tiers par le président de la République, le Président de l’Assemblée Nationale et le Président du Sénat. Michel Boyon a été nommé président le 24 janvier 2007 par Nicolas Sarkozy. Il est le premier président du CSA depuis sa création il y a 20 ans a ne pas être journaliste de formation (après Jacques Boutet, 1989–1995, Hervé Bourges, 1995–2001 et Dominique Baudis, 2001–2007). De nombreuses critiques s’étaient déjà élevées alors contre cette nomination apparue comme politique, Boyon ayant fait carrière au sein de plusieurs cabinets ministériels de droite. Il a été directeur de cabinet du Premier ministre Jean Pierre Raffarin mais également au Ministère de la Culture sous François Léotard. Depuis sa nomination, il enchaîne les déclarations pro-Sarkozy, défendant même la dernière loi sur l’audiovisuel public qui enlève pourtant au CSA une grosse partie de son pouvoir.

Les critiques se multiplient

Depuis le début de l’année, l’institution s’est effectivement vue privée de son pouvoir de nomination des présidents des sociétés de l’audiovisuel public en faveur du président de la république lui même. Catherine Tasca, ministre chargée de la communication à sa création il y a 20 ans, l’accuse aujourd’hui de ne s’acquitter « que timidement de la garantie du pluralisme » au moment même où les pouvoirs sont concentrés en un seul parti politique. Michèle Cotta (ancienne présidente de la Haute autorité de l’audiovisuel) et Hervé Bourges (ancien président du CSA) ont signé une tribune dans le Monde pour dénoncer cette « régression démocratique ». Au début du mois dans les colonnes du Figaro, Michel Boyon précise face aux attaques que le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel possède un droit de véto face aux choix du Président de la République.

Autre point de critique à l’encontre du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel : la non comptabilisation du temps de parole de Nicolas Sarkozy dans les médias depuis son accession à l’Élysée. Une requête avait en effet été déposée au CSA en septembre dernier par le parti Socialiste, soucieux de l’omniprésence du Président dans les médias. Au nom de son parti, François Hollande craignait alors que la surexposition de Nicolas Sarkozy (224 passages aux JT de TF1 et France 2 de mai à août 2007) ne s’oppose avec le principe de pluralisme de l’information. Cette demande avait été débouté immédiatement par Michel Boyon.

Jean-Pierre Grand: « L’affaire Filippis est le symbole des dérives de la presse »

Jean-Pierre Grand, député UMP et maire de Castelnau-le-Lez (Hérault), est l’un des premiers parlementaires à s’être indigné de l’interpellation musclée de l’ancien directeur de publication de « Libération », Vittorio de Filippis le 28 novembre 2008. Le motif ? Une plainte en diffamation datant de 2007 concernant un commentaire d’internaute sur le site du journal.
Interrogé à ce sujet, l’élu nous livre sa position sur l’évolution de la presse.

Jean-Pierre Grand dénonce la disproportion des moyens employés lors de l’arrestation, une dérive. Alors que les ministres de la Justice et de l’Intérieur défendaient la régularité de la procédure, Nicolas Sarkozy a exprimé « son émoi ». M. Grand estime que son intervention à l’assemblée nationale [[le 1er décembre, « Je considère aujourd’hui que, dans notre démocratie, on a le de voir absolu de préserver la liberté de la presse »]] n’est pas étrangère à cette rectification.

Se référant certainement à Serge Dassault, il pose la question de l’indépendance des titres.
Il préconise une aide publique « plus forte » pour pallier la capitalisation « embarrassante » des journaux.
Il n’hésite à faire appel à la mémoire collective pour rappeler que le secret des sources est un enjeu à part entière.

Le député villepiniste exprime ses réserves quant aux initiatives de Nicolas Sarkozy : réforme de l’audiovisuel et États Généraux de la Presse.

Audiovisuel public

Un véritable bras de fer a commencé depuis mardi dernier concernant le projet de loi sur la réforme de l’audiovisuel public. Actuellement, 800 amendements sont en cours de discussion à l’Assemblée Nationale. Une chance légendaire selon la droite et une offrande faite aux chaines privées invoque la gauche…

Décryptage

Le personnel de France Télévision est monté au créneau mardi 26 novembre, le jour de l’examen des textes par les députés. Cette grève a causé l’annulation du JT de 13h de France 2 ainsi qu’une manifestation qui rassemblait environ 4.000 personnes selon les organisateurs et 2.000 selon la préfecture de police. Les manifestants sont partis de la Tour Eiffel jusqu’au palais Bourbon, le siège de l‘assemblée nationale, avec pour emblème une poupée vaudou.

La droite veut-elle du mal à l’audiovisuel public ? Pas du tout ! Répondent les députés de la majorité. Selon son géniteur Nicolas Sarkozy, ce projet assurerait la qualité du service public qui « ne peut pas fonctionner selon des critères purement mercantiles« . « C’est une mesure de bon sens et j’y suis très favorable » a affirmé la ministre de la culture Christine Albanel devant les députés en juin dernier.

La réforme de l’audiovisuel public fait l’objet d’un seul projet de loi, qui aborde à la fois la suppression de la publicité, les sources de financements de compensation, le contenu des programmes de la nouvelle télévision publique et la gouvernance de France Télévisions. Mais, on l’aura compris, l’amendement phare de cette loi, est la disparition progressive de la publicité sur l’audiovisuel public français d’ici 2012.

Cependant, pour compenser le manque à gagner des chaines publiques estimé à 450 millions d’euros, le gouvernement a prévu une taxe de 3% sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision privées ayant des recettes publicitaires supérieures à 11 millions d’euros. Soit TF1, Canal Plus et M6. Notons que le PDG d’M6 a déclaré sur la 5 que ce chiffre était erroné et que le manque à gagner n’était pas si conséquent que cela.

Suite de la saga, le 19 novembre dernier donc, les députés UMP, réunis en commission, décident de baisser de moitié cette taxe jusqu’à 2012. La raison officielle est la crise économique actuelle. Ces derniers jugent anormal « de demander aux chaines privées de financer le public ». Pendant ce temps là, les députés de la gauche et le personnel de l’audiovisuel public ainsi que certains représentants de l’UMP comme Hervé Mariton (député de la Drôme) continuent à être défavorable à cette réforme en confiant « La pub, c’est rigolo, c’est bon pour le moral et c’est bon pour la consommation ».

Noël Mamère député (vert) de colère a dénoncé le jour de la manifestation, le 26 novembre, « le hold-up de l’Etat contre le service public au profit des copains du Président » en rajoutant « Ce dont Bouygues a rêvé, Sarkozy l’a fait et il va même plus loin ». L’opposition en général crie au scandale et aux machinations et critique un père noël qui serait très généreux avec TF1 notamment. Quant aux figures emblématiques des chaines publiques, elles se font très rares et ne font pas de déclarations publiques concernant ce sujet, sauf Audrey Pulvar, présentatrice du journal national de France 3, qui fait exception et ne cache pas son engagement contre cette loi. La journaliste devrait s’inquiéter davantage puisque des députés UMP ont proposé la semaine dernière, la suppression de son JT qui « ferait doublon avec celui de France 2 ». Coïncidence ?

Une autre télévision est possible, oui mais laquelle ?

Après l’annonce du 8 janvier dernier concernant la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, les réactions ont été nombreuses. Souvent le fait des professionnels de l’audiovisuel. Deux chercheurs ont accepté d’imaginer ce que pourrait être la « télévision de qualité » que Nicolas Sarkozy appelle de ses voeux.

Philippe Meirieu est l’auteur d’« Une autre télévision est possible », Chronique Sociale, Lyon, octobre 2007.
Professeur en sciences de l’éducation à l’université Lumière-Lyon 2, il est aussi responsable pédagogique de la chaîne de télévision pour l’éducation et la connaissance, Cap Canal

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Philippe Meirieu
Vous qui dénoncez la course à l’audience que se livrent les chaînes de télévision tout en reconnaissant que l’immense majorité d’entre elles ne peut vivre que grâce aux revenus de la publicité , que pensez-vous de l’annonce de Nicolas Sarkozy concernant la suppression de la publicité pour le financement des chaînes publiques ?

Je suis très réservé sur cette annonce. La question de la publicité a été traitée sous l’angle du marché et non pas sous l’angle du statut de la publicité en général.
Je n’appelle pas à une augmentation ou à une diminution de la publicité, mais à une réflexion globale sur le rôle et la place de la publicité à la télévision. Il faudrait réfléchir à l’ensemble des choses qui perturbent la gestion de l’espace public audiovisuel. Toutes chaînes confondues. Par exemple, moi, au titre de la protection de l’enfance, je suis favorable à une suppression de la publicité un quart d’heure avant et un quart d’heure après chaque émission de jeunesse.
D’autres moyens de financement existent. Par exemple le partenariat. On pourrait imaginer des partenariats avec l’éducation nationale, le ministère de la santé etc… Une forme de partenariat ciblé pourrait être entrepris avec les collectivités territoriales. Par ailleurs, je ne suis pas hostile à une augmentation de la redevance qui est en France l’une des plus basse d’Europe.

Que serait pour vous une télévision de qualité ?

Une télévision qui se passionnerait pour la chose publique, aussi bien pour la médecine, que pour l’éducation… Il y a eu des réussites dans ce domaine qui pourraient être reprises.
Une télévision qui prend les gens pour des gens intelligents, ce qui ne veut pas dire de ne pas les distraire. Mais une télévision qui n’est pas un caractère hypnotiquo-magique, qui refuse un certain nombre de trucages, systématiques dans le talk-show.
Une télévision qui donne une place essentielle à l’image de création. Il y a le documentaire mais également quelque chose qui en France aurait un fort potentiel : le cinéma d’animation. Ce n’est pas forcément élitiste. Beaucoup de personnes apprécient le documentaire touristique ou animalier. Le docu-fiction quant à lui peut aider à faire comprendre des choses. Ce qui serait par exemple intéressant, ce serait de faire des scénarios qui présenteraient ce qui se passerait si ceci ou si cela…. Les créateurs ne sont pas suffisamment mis à contribution. De plus il faudrait que ça fonctionne par appel d’offre et pas par copinage.
Une télévision qui prend des risques. Il faudrait avoir du courage pour supprimer le matin les émissions de jeunesse, type dessins animés, qui ont une influence très nocive en terme d’attention à l’école. Par ailleurs, nous sommes dans des formes archi éculées, le 13 /26/52 mn pour le documentaire. Il y a d’autres formes possibles ! Promo et copinages sont devenus le carburant de la télévision. C’est insupportable ! Ce sont toujours les mêmes émissions critiques, même les moins traditionnelles, c’est encore de la promo et du copinage !
Pour que la télévision se fasse culturelle, il faut qu’elle se fasse créatrice de forme. La télévision a été créatrice à ses débuts. Aujourd’hui, c’est l’âge de la télé réalité, qui a été très astucieux en termes d’inventivité. Le problème est qu’il modélise les autres émissions. On tombe dans le paradigme voyeurisme, exhibition, narcissisme.

Yves Soulé est formateur lettre à l’IUFM de Montpellier. Il est associé au laboratoire interdisciplinaire de recherche en didactique éducation et formation (LIRDEF)

Yves Soulé

Comment réagissez-vous à l’annonce de Nicolas Sarkozy concernant la suppression de la publicité sur les chaînes publiques?

J’éprouve beaucoup de soupçons par rapport à un gouvernement qui décide, sans concertation, de dissoudre le lien consubstantiel de la télévision publique et de la publicité .
Je ne crois pas aux idées de partenariat pour financer la télévision sans les logiques d’audimat et donc de publicité. Pourquoi ne pas plutôt imaginer une sorte de carte bancaire télévisuelle qui permettrait une consommation à la carte ? Les téléspectateurs paieraient ainsi leur consommation effective. C’est une solution qui risque néanmoins d’être plus chère que ne l’est la redevance aujourd’hui.
Je me méfie de cette volonté de retour en arrière, vers un passé idéalisé . Y-a-t-il déjà eu une télévision de qualité ? Il faudrait s’intéresser aux discours de la presse sur la télévision dans les années 60…

Que serait une télévision de qualité?

Mon rôle en tant que formateur n’est pas d’imaginer ce que la télévision devrait être. En tant que téléspectateur, j’ai une opinion sur la question. Pour commencer, il faut se méfier lorsque qu’on parle de « la » télévision. Elle est aujourd’hui hybride .
S’il est question des chaînes publiques hertziennes, une télévision de qualité serait un télévision qui n’aurai pas de compte à rendre en terme de rentabilité immédiate . Une télévision qui se poserait la question de l’interactivité avec le téléspectateur.
La télévision conserve un rôle majeur dans la production. On a besoin de l’écriture télévisuelle à côté de l’image figée et presque laborieuse de la lecture en ligne. La télévision a un impact spécifique . Il y a une proximité à l’objet. Elle a été accusée de ruiner la veillée . Aujourd’hui, elle s’oppose à la consommation individuelle, privée, voire égoïste d’Internet.
Toutefois, il faut penser ces deux outils dans leur complémentarité. Un outil comme You Tube offre un formidable catalogue. On ne peut nier les problèmes que son utilisation implique, mais ça appelle une réflexion plus large : pourquoi l’offre de l’Institut National de l’Audiovisuel est si chère ?
Il faudrait un intérêt accru de la télévision pour des publics spécifiques, tels que les ados par exemple. Leur parole dérange. Il faudrait se préoccuper de ce public comme le font certaines radios et non pas en fonction de l’intérêt que pourraient y trouver leurs parents.
Contrairement à Philippe Meirieu quant il parle de sidération, je préfère parler de considération. Cela suppose un certain respect dans le professionnalisme des gens de la télévision. On ne peut pas critiquer a priori. Il y a comme une difficulté à penser la télévision. Elle fait peur . Le pouvoir d’aliénation qu’on lui prête est tel qu’on en vient à la considérer comme l’«autre».
La télévision nécessite un apprentissage, sur quatre points essentiels : le contenu, le traitement, les intentions et l’impact. Le téléspectateur peut choisir d’avoir une position critique face à la télévision, mais soyons honnête, la télévision est aussi bien souvent une fenêtre d’oubli de la réalité, de décalage par rapport à ses obligations journalières. Elle constitue une soupape. Il serait aberrant de demander au téléspectateur qu’il se comporte comme les chercheurs aimeraient qu’il le fasse.

L’ADN de la télévision publique

Cet ADN souffre de n’être que partiellement déchiffré. Si son importance est largement reconnue, les experts divergent quant à la façon de l’identifier. Le public a été mis à contribution.

«De l’exception culturelle à l’exécution culturelle»

C’est le slogan que brandissent depuis quelques temps (en 2007, suite au report d’un décret voté dans le cadre de la télévision du futur, en 2008, au festival international de la production audiovisuelle (FIPA) de Biarritz) les professionnels de la création.
Pourtant les déclarations d’intention ont été nombreuses dans le sens d’un intérêt accru à la création. Outre celles émanant du gouvernement, on peut noter la volonté affirmée d’ « assurer la promotion de l’exception culturelle » dans les vœux 2008 du président du conseil supérieur de l’audiovisuel. Le même Michel Boyon qui, dans les colonnes du Monde du 12 mars dernier réaffirmait « la vocation du service public comme haut lieu de la création audiovisuelle ». Au forum Télérama sur le big bang de la télévision du 27 mars dernier, Patrice Duhamel précisait que France Télévision a «un devoir d’audience, un devoir de qualité et donc un devoir d’audace» .
L’idée de préserver l’exception culturelle n’est pas nouvelle. On la retrouve déjà en 1993, dans les réflexions de la commission Campet sur le service public. En 2006, le directeur général de France Télévision , Patrice Duhamel, affirme « le documentaire, c’est l’une des marques de fabrique, l’ADN de la télévision publique » « nous y insistons énormément ».

Qu’en est-il dans les faits ?

«Le but de la réforme n’est pas d’exacerber les tensions entre chaînes publiques et privées, rappelle Christine Albanel au forum Télérama, mais au contraire de clarifier les règles du jeu». Des enquêtes ont été effectuées afin d’expliciter l’identité propre de chacune d’elles . L’Acrimed, du 12 au 18 septembre 2007 a réalisé un « coup de sonde » entre les programme de TF1 et France 2. Deux chaînes qu’a choisi d’interroger du 2 au 29 février 2008, la rédaction du Nouvel Observateur[[Le nouvel Observateur du samedi 8 au vendredi 14 mars 2008]]. Quel constat ? Des différences « non flagrantes » pour l’Acrimed, un phénomène de « persistance rétinienne » qui fait oublier les distinctions pour le Nouvel Observateur. Dans les deux études, ce sont pour les magazines d’information et les documentaires que les variations sont le plus convaincantes.
Cela suffit-il à conforter les opinions du premier ministre sur les ondes de RTL qui dit ne pas voir de différences ente la télé publique et la télé privée ? Ou faut-il affiner l’analyse en se référent aux indications de la ministre de la culture et de la communication qui affirme sur France Culture «non ! (il n’y a pas beaucoup de choses à revoir dans le cahier des charges de la télévision publique) il y avait beaucoup d’éléments qui allaient dans le très bon sens» .

La parole au public, cet inconnu

Thierry Curtet sur le blog sauvons la télé.com- souligne que «ceux qui critiquent la télévision sont ceux qui ne le regardent pas » .
Qui sont les téléspectateurs ? Brigitte le Grignou, dans « du côté du public, usages et réception de la télévision » [[Du côté du public, Usages et réceptions de la télévision, Economica, Paris, 2003]] révèle « tandis que s’accumulent les données sur l’audience, le public, quant à lui demeure inconnu [[Ibid, p.60]] ». Après avoir rappelé qu’en France, la recherche sur le public menée par l’industrie télévisuelle est le fait d’une société privée : Médiamétrie (détenue par les chaines, les radios et centres d’achat d’espace publicitaire), elle précise « ce sont alors les clients qui définissent les méthodes et les outils, mais aussi l’objet à étudier en fonction de leurs intérêts respectifs ». Ce faisant elle invite à s’interroger sur la domination des mesures quantitatives. Celles qui sont issues de critères sélectionnés a priori. Il faut savoir les compléter par des méthodes qualitatives qui sauront recueillir l’expression du public.
L’idée de la consultation de «ceux qui regardent la télévision» a trouvé à se concrétiser via la toile. Christine Albanel a lancé un forum de discussion autour de la problématique télévision publique, vers un nouveau contrat de service public. Forum clos à présent que le site cma-telepublique propose de prolonger . L’idée a essaimé : blog sauvons la tele.com, France 3, enquêtes de Télérama etc.
Si les jugements sont divers, une question revient souvent : comment concilier une télévision de qualité qui soit en même temps populaire ? Elle en appelle une autre. A quelle aune mesurer la qualité de la télévision publique ? Philippe Lefait, le présentateur des mots de minuit, interrogé sur Médiapart donne un élément de réponse « la pseudo logique mercatique ne disparaît avec la publicité que si l’on juge une chaine publique comme on note du patinage artistique. Une note technique (l’audience), pondérée par une note artistique (la qualité des programmes). La direction du groupe France Télévision a d’ailleurs mis en place il y as six mois un outil de ce type , la qualimat, qui doit être consacré de la même façon que l’est l’audimat aujourd’hui. s’il n’est pas sacralisé dans les textes, les lobbies et les amis médiatiques du président Sarkozy parviendront à le remettre en cause».

L’ADN de la télévision publique

Cet ADN souffre de n’être que partiellement déchiffré. Si son importance est largement reconnue, les experts divergent quant à la façon de l’identifier. Le public a été mis à contribution.

«De l’exception culturelle à l’exécution culturelle»

C’est le slogan que brandissent depuis quelques temps (en 2007, suite au report d’un décret voté dans le cadre de la télévision du futur, en 2008, au festival international de la production audiovisuelle (FIPA) de Biarritz) les professionnels de la création.
Pourtant les déclarations d’intention ont été nombreuses dans le sens d’un intérêt accru à la création. Outre celles émanant du gouvernement, on peut noter la volonté affirmée d’ « assurer la promotion de l’exception culturelle » dans les vœux 2008 du président du conseil supérieur de l’audiovisuel. Le même Michel Boyon qui, dans les colonnes du Monde du 12 mars dernier réaffirmait « la vocation du service public comme haut lieu de la création audiovisuelle ». Au forum Télérama sur le big bang de la télévision du 27 mars dernier, Patrice Duhamel précisait que France Télévision a «un devoir d’audience, un devoir de qualité et donc un devoir d’audace» .
L’idée de préserver l’exception culturelle n’est pas nouvelle. On la retrouve déjà en 1993, dans les réflexions de la commission Campet sur le service public. En 2006, le directeur général de France Télévision , Patrice Duhamel, affirme « le documentaire, c’est l’une des marques de fabrique, l’ADN de la télévision publique » « nous y insistons énormément ».

Qu’en est-il dans les faits ?

«Le but de la réforme n’est pas d’exacerber les tensions entre chaînes publiques et privées, rappelle Christine Albanel au forum Télérama, mais au contraire de clarifier les règles du jeu». Des enquêtes ont été effectuées afin d’expliciter l’identité propre de chacune d’elles . L’Acrimed, du 12 au 18 septembre 2007 a réalisé un « coup de sonde » entre les programme de TF1 et France 2. Deux chaînes qu’a choisi d’interroger du 2 au 29 février 2008, la rédaction du Nouvel Observateur[[Le nouvel Observateur du samedi 8 au vendredi 14 mars 2008]]. Quel constat ? Des différences « non flagrantes » pour l’Acrimed, un phénomène de « persistance rétinienne » qui fait oublier les distinctions pour le Nouvel Observateur. Dans les deux études, ce sont pour les magazines d’information et les documentaires que les variations sont le plus convaincantes.
Cela suffit-il à conforter les opinions du premier ministre sur les ondes de RTL qui dit ne pas voir de différences ente la télé publique et la télé privée ? Ou faut-il affiner l’analyse en se référent aux indications de la ministre de la culture et de la communication qui affirme sur France Culture «non ! (il n’y a pas beaucoup de choses à revoir dans le cahier des charges de la télévision publique) il y avait beaucoup d’éléments qui allaient dans le très bon sens» .

La parole au public, cet inconnu

Thierry Curtet sur le blog sauvons la télé.com- souligne que «ceux qui critiquent la télévision sont ceux qui ne le regardent pas » .
Qui sont les téléspectateurs ? Brigitte le Grignou, dans « du côté du public, usages et réception de la télévision » [[Du côté du public, Usages et réceptions de la télévision, Economica, Paris, 2003]] révèle « tandis que s’accumulent les données sur l’audience, le public, quant à lui demeure inconnu [[Ibid, p.60]] ». Après avoir rappelé qu’en France, la recherche sur le public menée par l’industrie télévisuelle est le fait d’une société privée : Médiamétrie (détenue par les chaines, les radios et centres d’achat d’espace publicitaire), elle précise « ce sont alors les clients qui définissent les méthodes et les outils, mais aussi l’objet à étudier en fonction de leurs intérêts respectifs ». Ce faisant elle invite à s’interroger sur la domination des mesures quantitatives. Celles qui sont issues de critères sélectionnés a priori. Il faut savoir les compléter par des méthodes qualitatives qui sauront recueillir l’expression du public.
L’idée de la consultation de «ceux qui regardent la télévision» a trouvé à se concrétiser via la toile. Christine Albanel a lancé un forum de discussion autour de la problématique télévision publique, vers un nouveau contrat de service public. Forum clos à présent que le site cma-telepublique propose de prolonger . L’idée a essaimé : blog sauvons la tele.com, France 3, enquêtes de Télérama etc.
Si les jugements sont divers, une question revient souvent : comment concilier une télévision de qualité qui soit en même temps populaire ? Elle en appelle une autre. A quelle aune mesurer la qualité de la télévision publique ? Philippe Lefait, le présentateur des mots de minuit, interrogé sur Médiapart donne un élément de réponse « la pseudo logique mercatique ne disparaît avec la publicité que si l’on juge une chaine publique comme on note du patinage artistique. Une note technique (l’audience), pondérée par une note artistique (la qualité des programmes). La direction du groupe France Télévision a d’ailleurs mis en place il y as six mois un outil de ce type , la qualimat, qui doit être consacré de la même façon que l’est l’audimat aujourd’hui. s’il n’est pas sacralisé dans les textes, les lobbies et les amis médiatiques du président Sarkozy parviendront à le remettre en cause».

L’ADN de la télévision publique

Cet ADN souffre de n’être que partiellement déchiffré. Si son importance est largement reconnue, les experts divergent quant à la façon de l’identifier. Le public a été mis à contribution.

«De l’exception culturelle à l’exécution culturelle»

C’est le slogan que brandissent depuis quelques temps (en 2007, suite au report d’un décret voté dans le cadre de la télévision du futur, en 2008, au festival international de la production audiovisuelle (FIPA) de Biarritz) les professionnels de la création.
Pourtant les déclarations d’intention ont été nombreuses dans le sens d’un intérêt accru à la création. Outre celles émanant du gouvernement, on peut noter la volonté affirmée d’ « assurer la promotion de l’exception culturelle » dans les vœux 2008 du président du conseil supérieur de l’audiovisuel. Le même Michel Boyon qui, dans les colonnes du Monde du 12 mars dernier réaffirmait « la vocation du service public comme haut lieu de la création audiovisuelle ». Au forum Télérama sur le big bang de la télévision du 27 mars dernier, Patrice Duhamel précisait que France Télévision a «un devoir d’audience, un devoir de qualité et donc un devoir d’audace» .
L’idée de préserver l’exception culturelle n’est pas nouvelle. On la retrouve déjà en 1993, dans les réflexions de la commission Campet sur le service public. En 2006, le directeur général de France Télévision , Patrice Duhamel, affirme « le documentaire, c’est l’une des marques de fabrique, l’ADN de la télévision publique » « nous y insistons énormément ».

Qu’en est-il dans les faits ?

«Le but de la réforme n’est pas d’exacerber les tensions entre chaînes publiques et privées, rappelle Christine Albanel au forum Télérama, mais au contraire de clarifier les règles du jeu». Des enquêtes ont été effectuées afin d’expliciter l’identité propre de chacune d’elles . L’Acrimed, du 12 au 18 septembre 2007 a réalisé un « coup de sonde » entre les programme de TF1 et France 2. Deux chaînes qu’a choisi d’interroger du 2 au 29 février 2008, la rédaction du Nouvel Observateur[[Le nouvel Observateur du samedi 8 au vendredi 14 mars 2008]]. Quel constat ? Des différences « non flagrantes » pour l’Acrimed, un phénomène de « persistance rétinienne » qui fait oublier les distinctions pour le Nouvel Observateur. Dans les deux études, ce sont pour les magazines d’information et les documentaires que les variations sont le plus convaincantes.
Cela suffit-il à conforter les opinions du premier ministre sur les ondes de RTL qui dit ne pas voir de différences ente la télé publique et la télé privée ? Ou faut-il affiner l’analyse en se référent aux indications de la ministre de la culture et de la communication qui affirme sur France Culture «non ! (il n’y a pas beaucoup de choses à revoir dans le cahier des charges de la télévision publique) il y avait beaucoup d’éléments qui allaient dans le très bon sens» .

La parole au public, cet inconnu

Thierry Curtet sur le blog sauvons la télé.com- souligne que «ceux qui critiquent la télévision sont ceux qui ne le regardent pas » .
Qui sont les téléspectateurs ? Brigitte le Grignou, dans « du côté du public, usages et réception de la télévision » [[Du côté du public, Usages et réceptions de la télévision, Economica, Paris, 2003]] révèle « tandis que s’accumulent les données sur l’audience, le public, quant à lui demeure inconnu [[Ibid, p.60]] ». Après avoir rappelé qu’en France, la recherche sur le public menée par l’industrie télévisuelle est le fait d’une société privée : Médiamétrie (détenue par les chaines, les radios et centres d’achat d’espace publicitaire), elle précise « ce sont alors les clients qui définissent les méthodes et les outils, mais aussi l’objet à étudier en fonction de leurs intérêts respectifs ». Ce faisant elle invite à s’interroger sur la domination des mesures quantitatives. Celles qui sont issues de critères sélectionnés a priori. Il faut savoir les compléter par des méthodes qualitatives qui sauront recueillir l’expression du public.
L’idée de la consultation de «ceux qui regardent la télévision» a trouvé à se concrétiser via la toile. Christine Albanel a lancé un forum de discussion autour de la problématique télévision publique, vers un nouveau contrat de service public. Forum clos à présent que le site cma-telepublique propose de prolonger . L’idée a essaimé : blog sauvons la tele.com, France 3, enquêtes de Télérama etc.
Si les jugements sont divers, une question revient souvent : comment concilier une télévision de qualité qui soit en même temps populaire ? Elle en appelle une autre. A quelle aune mesurer la qualité de la télévision publique ? Philippe Lefait, le présentateur des mots de minuit, interrogé sur Médiapart donne un élément de réponse « la pseudo logique mercatique ne disparaît avec la publicité que si l’on juge une chaine publique comme on note du patinage artistique. Une note technique (l’audience), pondérée par une note artistique (la qualité des programmes). La direction du groupe France Télévision a d’ailleurs mis en place il y as six mois un outil de ce type , la qualimat, qui doit être consacré de la même façon que l’est l’audimat aujourd’hui. s’il n’est pas sacralisé dans les textes, les lobbies et les amis médiatiques du président Sarkozy parviendront à le remettre en cause».

Le réalisateur, le producteur et le diffuseur

Ils sont trois acteurs principaux du scénario de la création audiovisuelle. Condamnés à évoluer de concert, leur entente est parfois proche de celle décrite par Sergio Leone dans The Good, The Bad and The Ugly. Un documentariste, un producteur et un diffuseur ont accepté d’expliciter leur rôle et de réagir aux annonces de Nicolas Sarkozy .

Laure Pradal est documentariste

Elle a travaillé pour l’émission Strip-Tease et réalisé de nombreux documentaires diffusés sur Arte, France 2 et France 3.
Ce sont « des documentaires d’auteur, avec une écriture orientée vers la fiction. J’ai réalisé surtout des films personnels, seulement cinq commandes, c’est alors moi qui écris le scénario . Le diffuseur ou le producteur commande uniquement le sujet ». Elle explique que dans son travail, le repérage est très important. Pour un documentaire de 13 minutes, il peut prendre 6 mois. Il faut obtenir toutes les autorisations. Le réalisateur doit donc savoir « mener plusieurs projets en parallèle ». Laure Pradal confie « le plus déplaisant est peut-être l’incertitude liée à ce métier, le statut d’intermittent est un atout en France, par rapport à d’autres pays, mais il est toujours menacé ».
Pour elle « le producteur idéal est celui qui a une culture documentaire importante, qui connaît parfaitement le travail de l’auteur pour pouvoir séduire les diffuseurs. Il doit avoir un regard extérieur pour juger le travail de l’auteur, tout en lui laissant une grande liberté créative ». Interrogée sur les phénomènes de concentration dans la production, elle répond « Il y a bien sûr de grosses productions qui ont le monopole mais les diffuseurs veillent à travailler avec des boîtes plus petites et en province. Ils travaillent souvent davantage avec des réalisateurs qui se sont fait un nom qu’avec des inconnus ». Laure Pradal veut gagner plus d’indépendance «je vais travailler avec la production de mon frère: Manuel Pradal, cela deviendra une structure familiale. Des réalisateurs comme Agnès Varda ont depuis très longtemps leur propre production».
Au sujet de l’annonce concernant la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, elle réagit : « Ce qui est en danger est tout ce qui touche à la culture, l’espace de création va être de plus en plus limité, l’intermittent de plus en plus marginalisé ».
La qualité de la télévision publique en France ? « Seules quelques cases, très tard le soir ». Laure Pradal est d’accord avec l’idée que les grosses productions peuvent servir de vitrines « si elle entraînent le spectateur dans une curiosité vers le genre documentaire. Mais cela peut avoir un effet pervers, le spectateur peut devenir accroc à ce genre de films avec des artifices permanents. Son mode de pensée ne lui permettra alors plus d’accéder à des films plus austères ».

Laure pradal

Marie-France Dewast travaille pour ADL Production

Cette société est implantée à Montpellier. Marie-France Dewast l’a rejoint il y a quatre ans. Elle en est la productrice déléguée. ADL produit des documentaires de création.
Une dizaine d’auteurs lui ont soumis leur projet. Elle en a produit trois (deux étant diffusés à la télévision, un troisième en circuit associatif). Lorsqu’on l’interroge sur sa profession à travers une citation de Catherine Humblot « la plupart des sociétés de production fonctionnent sur un mode artisanal… les producteurs sont des gens passionnés, susceptibles et en perpétuel danger financièrement » sa réponse est laconique « je suis d’accord avec elle » .
Didier Mauro [[Le documentaire, Cinéma et télévision, Dixit, Paris, 2003]] remarque que les sociétés de production spécialisées en documentaire sont dix fois plus nombreuses (650) qu’il y a vingt ans. Ce sont souvent de petites structures qui prennent des risques financiers. « L’apport de la Société de production dans le montage financier d’un film varie de 5 à 20 %, en industrie le plus souvent » explique Marie-France Dewast . La recherche de financements est une partie importante du travail des producteurs. Marie-France Dewast rajoute « mais pas la seule, car ce travail ne se fait que si on adhère au projet d’un auteur et qu’on décide de s’y investir à fond – et souvent à fonds perdus ! » . Il commence par la réécriture du sujet très souvent, et par des conseils à l’auteur. Il continue avec la recherche d’accords avec un diffuseur. «Les chaînes publiques sont des partenaires recherchés mais très convoités» .
Interrogée sur les ventes à l’étranger, elle explique « les ventes à l’étranger sont rares et chères : d’abord il faut faire traduire les dialogues, les sous-titres en langue étrangères sont assez coûteux ; les démarches également, car il faut se rendre sur les marchés, type festival en France et à l’étranger… on pratique plus fréquemment les ventes aux chaînes du câble ou à des locales ».
Consultée sur son ressenti après l’annonce de la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, Marie-France Dewast s’interroge « tout est lié aux compensations qui seront garanties, et, qui paiera ? » elle ajoute « mais, je ne suis pas contre une chaîne publique sans publicité ».
Sa définition d’une télévision de qualité ? « diversité et chance aux nouveaux venus en préservant les auteurs plus expérimentés qui ont des choses à nous apprendre ».

L'asile du droit. Documentaire produit par Marie-France Dewast

Tiziana Cramerotti est la responsable de l’antenne et des programmes de France 3 Sud

Tiziana Cramerotti explique que sur les 200 à 250 projets qu’elle reçoit chaque année, une vingtaine sont retenus. Lorsqu’on lui pose la question des critères, elle précise « il s’agit de documentaires ancrés dans la région, tous les thèmes sont ouverts, ils sont parfois liés à un événement. Par exemple, l’année dernière, à l’occasion du mondial de rugby, trois documentaires ont été diffusés. Dans ce cas précis, 18 mois d’anticipation ont été nécessaires ».
Si le nombre de projets qui lui parviennent est suffisamment important pour permettre une offre diversifiée, il arrive à Tiziana Cramerotti de proposer des sujets. Ayant une formation de linguiste, elle a un jour trouvé intéressant de chercher à « identifier quels étaient les gens qui, à travers le temps, avaient forgé l’accent du Sud Ouest ». Elle ajoute « dans ce cas précis, cela s’est fait de façon très informelle, j’ai eu l’occasion d’en parler autour de moi, et, d’un intérêt commun avec un réalisateur est né la documentaire Drôle d’accent».
Concernant le goût du public, il n’y a pas d’enquête d’opinion . Tiziana Cramerotti explique que « les retours que font sur le site Internet les téléspectateurs sont le plus souvent encourageants et enjoignent à continuer ainsi ».
France 3 Sud s’inscrit dans le projet du documentaire dès le départ, par un contrat de coproduction. « La chaîne participe à un échange éditorial avec le producteur et le réalisateur » renchérit Tiziana Cramerotti, avant de préciser que la part de la chaîne dans le budget total du film est de l’ordre de 25% en moyenne.
Interrogée sur les récentes déclarations de Nicolas Sarkozy concernant le financement des chaînes publiques, elle répond qu’« en attendant plus de précisions, rien ne change » . Quant à sa conception de ce que doit être une télévision de qualité, elle affirme « une télévision attentive à la vie des citoyens dans leur quotidien, aussi bien dans leurs affaires de travail, de famille, d’amour, de connaissance mais aussi de repos et de loisirs. Une télévision qui sait prendre l’individu dans toutes ses composantes et qui est rigoureuse dans son travail ».

Graine d'espoir. Documentaire diffusé sur FR3

Documentaire et chaînes publiques

Si un « genre » de l’audiovisuel français peut s’interroger sur les nouveaux dispositifs en matière de financement des télévisions publiques, c’est le documentaire.

Olivier Mille, président de la commission d’aide à la création télévision Procirep, rappelle «le secteur public finance une part importante de la fiction et de l’animation et la totalité du documentaire» [[ Ecran Total n° 678, oct 2007]] L’apport des chaînes publiques dans le documentaire s’élève à 99,8 millions d’euros en 2006, soit un taux de financement de l’ordre de 45,2% [[Chiffres CNC]]
Le budget d’un documentaire de 52 minutes destiné à une chaîne hertzienne coûte en moyenne 150 000 euros . Dans ce budget, plusieurs acteurs interviennent selon un scénario très précis.
Scénario qui met en lumière la dépendance du documentaire envers la manne des chaînes publiques.
Pour financer un documentaire, trois acteurs sont indispensables : un diffuseur (dans ce cas les chaînes publiques), un producteur, et l’Etat (via le Cosip/CNC, compte de soutien à l’industrie des programmes audiovisuels) . Le Cosip, crée en 1986, est selon Didier Mauro, auteur de « Le documentaire, Cinéma et Télévision »[[ Le documentaire, Cinéma et télévision, éditions Dixit, Paris, 2003]] « le principal bailleur de fonds du documentaire » . Il est alimenté par une taxe sur la redevance et les recettes publicitaires des chaînes publiques et privées ainsi que sur les abonnements.

Un scénario précis

Lorsque qu’un documentariste a un projet destiné à être diffusé à la télévision, il peut espérer obtenir des aides à l’écriture via le CNC Centre National de la Cinématographie, la SCAM Société Civile des Auteurs Multimédias, les régions … .
Une fois ces aides obtenues (ou non, les dossiers sont nombreux), il doit trouver une société de production prête à s’investir afin de réunir les moyens nécessaires à la réalisation du film. Le producteur prépare alors avec l’auteur le dossier de présentation du projet .
Ce dossier est proposé aux chaînes de télévision en vue d’établir un contrat de diffusion ou de coproduction. Il sert ensuite à demander des financements aux institutions (Cosip, Procirep…). Le projet n’est éligible qu’une fois contractualisées les relations entre la société de production et la chaîne de télévision .
Les démarches visant à rechercher des financements complémentaires (aides de l’Union européenne, des collectivités territoriales, des ministères et musées, instituts de recherche, prévente de droits de diffusion etc.) ne seront elles déclenchées, qu’une fois établis les rapports entre le Cosip et la société de production.

Les règles du scénario

Les règles qui régissent ce scénario sont nombreuses . Elles portent sur le statut de l’œuvre audiovisuelle, sa définition, sa production, sa diffusion (les chaînes publiques ont une obligation de diffusion de 40 % d’oeuvres françaises et 60 % d’œuvres européennes). Certaines de ces règles sont aujourd’hui remises en question.
La commission Copé sur la « nouvelle télévision publique » a pour but de réfléchir à quatre grandes thématiques : le financement, les nouvelles technologies, la définition du futur contrat de service public et enfin la gouvernance d’entreprise, c’est-à-dire les rapports entre France Télévision et l’Etat. Une façon de mettre en route «l’une des plus grandes réformes accomplies» durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Sauf que la réforme de l’audiovisuel était, bien avant ces effets d’annonces, déjà en chemin.
En octobre dernier, le gouvernement reculait sur la procédure d’adoption du décret visant au renforcement des obligations d’investissement des diffuseurs dans les œuvres audiovisuelles. Ce décret, voté par le Parlement, précisait la notion d’oeuvre et le pourcentage des quotas leur revenant.
A peu près au même moment, Christine Albanel confiait une mission de concertation à David Kessler et Dominique Richard ayant pour but de réfléchir à l’évolution des décrets Tasca, au motif qu’ils seraient désormais inadaptés «à l’ère du numérique ». Décrets qui contraignent les chaînes à investir 16% de leur chiffre d’affaire dans la production audiovisuelle .
Ces discussions ont contribué à augmenter les tensions entre producteurs et diffuseurs.
Désaccords vites aplanis après l’intervention du 8 janvier de Nicolas Sarkozy . Muriel Roze, directrice des magazines et documentaires sur FR3, a résumé l’état actuel des choses, en commentant le projet de suppression de la publicité sur les chaînes publiques « Les producteurs sont forcément un peu inquiets, c’est évident, leur sort est très largement lié au nôtre ».

Quels scénarios pour la création audiovisuelle ?

Suite à l’annonce de Nicolas Sarkozy relative à la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, les appréhensions des professionnels de la création sont nombreuses.



« Nous sommes inquiets » confiait Jacques Peskine, délégué général de l’union syndicale des producteurs audiovisuels (USPA), lors du festival international des programmes audiovisuels (FIPA) à Biarritz.
Un sentiment que la création de la commission instituée par Nicolas Sarkozy pour réfléchir à un nouvel audiovisuel public, n’est pas parvenue à éliminer. Jean-François Copé, son président, a été apostrophé le 20 février dernier sur France inter, au sujet des effets collatéraux de cette annonce. L’auditeur : un scénariste de téléfilm, lui précise «sachez que nous les créateurs, ressentons déjà les conséquences de cette déclaration (fuite de certains annonceurs). Dans quelle mesure pouvez-vous nous garantir la pérennité du financement ?». Dans sa réponse, Jean-François Copé s’est reporté aux propos de Nicolas Sarkozy selon lesquels il y aurait une compensation à l’euro près des pertes liées à la suppression de la publicité . «Une promesse qui n’engage que ceux qui y croient» commente le même jour à la radio Catherine Tasca, ancienne ministre de la culture et de la communication «nous connaissons l’état actuel des finances publiques, je ne crois pas un instant en la capacité d’installer durablement un volume équivalent».

La popularité de Nicolas Sarkozy est en berne. Les français semblent plus confiants en l’action de son premier ministre. C’est d’ailleurs à lui qu’a été adressé, le 23 janvier dernier, un courrier commun des organisations de l’audiovisuel et du cinéma.
Dans cette lettre, les auteurs admettent que « la philosophie (du projet de suppression) pourrait aller dans le bon sens » mais soulignent « le flou » des contours sur la compensation des ressources. Ils ajoutent « le service public joue un rôle essentiel dans la diversité et le dynamisme de la production française de fiction, de documentaire, d’animation et de spectacles vivants. Nous nous trouvons donc à un instant décisif de l’avenir de France Télévision et de la création audiovisuelle française ».

Qu’est-ce que cela signifie ?

Qu’en est-il des mécanismes qui rendent la création directement dépendante de la télévision publique ? Quel est le quotidien des professionnels de la création audiovisuelle ? Que pensent les spectateurs de cette réforme ? Qu’en pensent certains spécialistes ?

Une série d’articles pour répondre à ces questions

Les premiers, à travers l’exemple du documentaire, s’attacheront à présenter les étapes à suivre pour le financement de ce « genre » particulier (Documentaire et chaînes publiques) ainsi que le quotidien des acteurs stratégiques du film documentaire (Le documentariste, le producteur et le réalisateur).
Puis, une interrogation sur l’exception culturelle française servira d’introduction aux articles consacrés aux attentes du public (Télévision Publique, qu’en pense le public ?) ainsi qu’à celles de spécialistes ayant réfléchi dans leurs travaux à la télévision (Une autre télévision est possible, oui mais laquelle ?).