Laurent Puigségur : « On est bien plus maître de son destin en sport qu’en politique »

Les sportifs de haut-niveau sont de plus en plus nombreux à s’engager en politique. Au niveau national comme local. Hautcourant est allé à la rencontre de Laurent Puigségur et Joël Abati, deux itinéraires croisés. Similaires mais différents. Portraits croisés de deux anciens partenaires de jeu. De capitaine à maire-adjoint, premier volet avec Laurent Puigségur.

Le handball, la passion du jeu

Il est des joueurs d’exception et des hommes de cœur, Laurent Puigségur est de ceux-là. A la fois talentueux et incontournable. Capitaine emblématique du Montpellier Handball, actuel MAHB, celui qui était surnommé Peggy a contribué aux premiers succès et à la réussite d’un club devenu meilleur club français et l’un des meilleurs européens. Arrivé dans l’Hérault en 1990, juste après un premier titre de champion de France gagné avec Nîmes, le pivot en gagnera neuf autres avec le MHB. Mais son palmarès ne s’arrête pas là : 6 fois vainqueur de la Coupe de France, 3 fois de la Coupe de la Ligue, vainqueur de la Ligue des Champions en 2003 et Champion du monde en 2001. C’est en 2006, que Peggy décide d’arrêter sa carrière de joueur professionnel. Mais, encore et toujours passionné par le handball, il est aujourd’hui entraîneur de l’USAM Nîmes/Gard en 1ere Division, une activité « très prenante ».

Avec un père professeur de gym, Laurent est, comme nombre de ses comparses, tombé dans la marmite du sport tout petit : « le handball était la cerise sur le gâteau ». S’essayant à de nombreux sports, il a rencontré l’entraîneur qui a fait la différence. Une femme. Celle qui « m’a fait rester dans cette discipline ». De doué pour le handball, il est devenu passionné. Et s’il est heureux de faire partie de la génération qui a popularisé ce sport, il dénonce un manque de considération pour la discipline handballistique : « il faut que tous nos exploits servent, qu’ils fassent évoluer les mentalités. Surtout les mentalités télévisuelles, pour que l’on considère le handball comme un sport phare en France. En plus, c’est un sport télégénique, rapide, avec un public familial, jeune. Il faut qu’il sorte de l’anonymat ». Et de rajouter : « les Experts viennent de faire quelque chose d’historique et d’extraordinaire. Il faut que cela serve ».

La politique, une opportunité

Laurent Puigségur vit à Jacou depuis une dizaine d’années. Alors, quand l’édile de la commune, Jean-Marcel Castet, lui demande de se joindre à lui pour les municipales en 2008, il saisit l’opportunité qui s’offre à lui. Il devient maire-adjoint et délégué à la communication. On pourrait se demander pourquoi Laurent a été élu à la communication et non au sport : « je suis du matin au soir dans le monde du sport, j’avais envie de voir autre chose. De plus, j’ai fait des études dans ce créneau ». En effet, après avoir stoppé sa carrière en 2006, Laurent Puigségur avait alors repris des études qui ont abouti à l’obtention du Dedpad (Diplôme d’état de directeur de projet d’animation et de développement). Il consacre actuellement environ une demi-journée par semaine à la mairie de Jacou. Ses tâches sont diverses : rédacteur-en-chef de l’Echo de la Mayre et du Mois à Jacou, journaux municipaux, chargé de la communication autour des manifestations culturelles, ou encore chargé de la finalisation du nouveau site internet de la mairie. Un petit niveau d’engagement politique municipal qui lui convient : « je n’ai pas d’autres ambitions politiques, ni de velléités à briguer des postes plus importants. Ce que je fais me plaît, c’est très intéressant. Mais, je ne sais pas si je me représenterai aux prochaines élections municipales ».

De sensibilité de gauche, Laurent n’est cependant pas encarté : « les appareils politiques ne m’ont pas donné envie de les rejoindre ». Pour lui, entrer en politique était « un moyen de pouvoir rendre tout ce que l’on a pu me donner en tant que sportif. Si je me suis engagé, c’était par envie d’aider mes concitoyens et de voir de l’intérieur ce qu’il se passe ». En effet, Laurent a décidé de se présenter en tant qu’adjoint pour servir les autres : « j’ai été éduqué de manière citoyenne. On m’a apprit le partage et à m’occuper des autres ». D’ailleurs, sa gentillesse et sa simplicité ont conquis tous ceux qu’il côtoie. Sa conception de la politique ? « Un moyen d’aider les gens, d’améliorer leur cadre de vie et leur sécurité, de proposer des offres culturelles intéressantes… », dit-il avec le sourire. Pour Laurent, les qualités essentielles, que ce soit dans le monde du sport ou de la politique, sont humaines : « c’est une question d’éducation et de valeurs ». Même si, selon lui, il n’y a pas de pont tracé entre le sportif et le politicien, l’ancien sportif voit des similitudes entre leurs deux parcours : « on a besoin des mêmes axes de motivation. Tout d’abord, le besoin d’unité : on doit former un groupe lié ou une liste cohérente. Ensuite, les élections, c’est comme un match : il y a la victoire ou la défaite au bout. Les deux pratiques se ressemblent : il faut aller au combat pour gagner ». Et c’est comme tout autre citoyen, que le sportif doit légitimement s’engager au sein de la cité : « il faut arrêter les préjugés disant que les sportifs ne sont pas à même de faire de la politique. Certains ont fait des études, sont intelligents et sont tout à fait aptes à mener certaines affaires ». Et de rajouter : « il faut que toutes les strates sociales, tous les horizons soient représentés. Cela créé du débat et permet aux électeurs de s’identifier à des élus ».

Les élections régionales, des élections compliquées

Laurent Puigségur n’a pas non plus sa langue dans sa poche. Il se montre très critique quant à la campagne de la gauche pour les prochaines élections régionales : « ce sont des élections compliquées, et je n’en pense certainement pas du bien ! La gauche devrait préparer un programme plutôt que de se diviser encore et encore, et détruire tout ce qui se fait de bien ». Et lorsqu’on évoque le fait que son ancien camarade de jeu, Joël Abati, se soit engagé dans la bataille des régionales aux côtés de Georges Frêche, l’ancien capitaine du MBH sourit : « c’est une excellente chose pour lui. Mais attention, la politique, ce n’est pas le sport de haut-niveau. Il faut qu’il fasse attention aux requins ». Pourquoi ? Dans le sport, il n’y a pas de requins ? « On est bien plus maître de son destin en sport qu’en politique. S’il est inscrit sur une liste, c’est que l’on compte sur lui… »

Julie DERACHE

Nikola Karabatic, droit dans les yeux

Tout juste auréolé d’un nouveau titre de champion d’Europe, Nikola Karabatic est de retour sur la scène handballistique montpelliéraine pour disputer un match dynamique de Ligue des Champions avec Constanta. Après la victoire de son équipe (37 à 24), c’est un peu fatigué qu’il se livre et revient sur son parcours, du MAHB à Vienne en passant par Kiel.

A Bougnol, le tapis rouge se déroule devant le champion. Au rythme des tambours des Blue Fox, la foule scande : « Niko, Niko, Niko ! » Mercredi soir, les Montpelliérains fêtaient le retour du champion, de leur champion : Nikola Karabatic. Accompagné de ces deux acolytes, Mika et Doudou, le célèbre handballeur revient tout juste de Vienne où l’équipe de France vient d’être une nouvelle fois sacrée championne d’Europe. Pas fatigué le Niko ? « Si, mais c’est mon métier d’être à fond à chaque fois, de tout donner ! » Et il le prouve. Il a offert un superbe spectacle aux supporters montpelliérains : aussi bon en défense qu’en attaque, le demi-centre est partout à la fois. Avec une main d’acier et ce but improbable marqué depuis l’autre bout du terrain, le capitaine a mené son équipe à la victoire contre des Roumains qui « tentent beaucoup de choses aussi bien dans l’offensif que dans le défensif« . Le match contre Constanta était très bien préparé : l’équipe roumaine était la seule à avoir battu le MAHB depuis le début de la compétition, les hommes de Canayer se devaient de laver l’affront.

Niko puise son énergie dans son équipe où « l’état d’esprit » et « la dynamique collective » sont capitaux. Être ensembles, unis, généreux, fidèles : voilà peut-être la recette magique des joueurs du MAHB ? En tout cas, c’est celle de Nikola Karabatic. Fatigué par un long championnat, par un match éreintant de Ligue des Champions, il répond encore présent avec le sourire et un regard qui ne vous lâche pas. Un charisme à l’état brut.

A tout juste 25 ans, Karabatic, c’est un palmarès impressionnant : quatre fois champion de France, deux fois champion d’Europe, champion olympique, champion du monde, meilleur joueur au monde 2007, entre autres. Le secret ? « Un travail de tous les jours : deux entraînements de deux heures par jour pendant la saison. Parfois plus. Être sportif professionnel, c’est également une hygiène de vie : il faut faire attention à tout ce que l’on fait, à ce que l’on mange« . Mais ce n’est pas tout. Le haut-niveau, c’est « aussi et surtout un état d’esprit » : il faut avoir des « qualités physiques et du talent bien sûr, mais le plus important se passe dans la tête. Ce sont les qualités mentales qui sont indispensables : savoir ce que l’on veut, avoir des ambitions… » Avoir l’œil du tigre en somme ? « Oui ! »

Le champion a su « très tôt » ce qu’il voulait : devenir joueur professionnel, devenir le meilleur. Toucher des doigts l’excellence. Avec un père handballeur, gardien de l’équipe nationale yougoslave, c’est tout naturellement que Nikola est tombé dans la marmite alors qu’il n’était qu’un enfant. Puis, c’est au tour du petit dernier, Luka, de rejoindre les rangs du MAHB. Ce qui rend Niko « très heureux » : « je suis d’autant plus attentif à ce qu’il fait, lui, en tant que joueur. Je suis peut-être plus exigent avec lui qu’avec un autre. J’essaye de lui apporter mon expérience« . Chez les Karabatic, la passion du handball, « c’est de famille« . Et pour réaliser son rêve, Niko a travaillé durement, du MAHB à Kiel où il a « tout apprit et beaucoup mûri » : « on réussi en travaillant plus que les autres« .

Quels nouveaux défis attendent un jeune joueur qui a tout gagné ? « Gagner tout ce qui vient. Gagner cette Ligue des champions ! Quand on est un grand sportif, il faut savoir se remettre en question à chaque compétition. » Sa plus belle victoire est, peut-être, avoir donné la passion du handball à toute une génération d’enfants qui ne rêvent que d’être des « Nikola Karabatic » et qui portent fièrement le maillot numéro 22.

Et lorsque l’on évoque devant lui cette « génération Karabatic« , il reste modeste : « depuis tout petit, j’ai toujours été un passionné de handball. J’ai toujours rêvé de voir du handball à la télévision et dans les médias. Alors, si j’ai pu participer à rendre accessible mon sport, j’en suis heureux. J’essaye de le mettre constamment en avant, avec les partenaires, dans les médias« . La « génération Karabatic » a de beaux jours devant elle, et son icône peut continuer à nous faire rêver, la main sur la balle et la tête dans les étoiles.

Julie DERACHE

Sportif et politique, Joël Abati donne son nom à un gymnase

La commune de Clapiers a officiellement inauguré hier soir, mercredi 9 décembre, son gymnase en lui donnant le nom de Joël Abati, joueur de handball au palmarès impressionnant.

Le handball est à l’honneur dans la région. D’un côté, Montpellier utilise l’image de Nikola Karabatic, sacré meilleur joueur mondial en 2007, pour représenter la ville. Au détour de chaque rue, fleurissent des affiches du champion mettant en avant des valeurs sportives comme la fraternité, le respect et la réussite. D’un autre, les gymnases baptisés du nom des hommes de Canayer se multiplient. Après la halle des sports « Laurent Puigségur » à Jacou et le complexe « Nikola Karabatic » à Frontignan, c’est au tour de Clapiers de faire honneur à un joueur du MAHB.

C’est dans une ambiance festive que Joël Abati donne son nom au complexe sportif de la ville de Clapiers, située à 5 km de Montpellier. Entouré de ses anciens acolytes, Jo se dit « fier de l’honneur que lui] fait [sa] commune ». Et de rajouter : « c’est dans les petits gymnases que l’on créé les grands champions ». Encourageant ainsi les dizaines d’enfants présents qui rêvent à leur tour de devenir des grands. Les différents officiels parmi lesquels Pierre Maurel, l’édile de Clapiers, Robert Molines, le président du MAHB, et Jacques Martin, l’élu chargé des sports à l’Agglomération de Montpellier, n’ont pas tari d’éloges sur Joël Abati. Ils ont d’abord félicité le joueur à la carrière et au palmarès importants. Ce dernier collectionne les titres et les médailles : deux titres de champion du monde et un de champion d’Europe, une médaille d’or aux Jeux olympiques en Chine, entre autres. Sans oublier qu’il a été élevé au grade de chevalier de la Légion d’Honneur en 2008. Le champion à l’œil de tigre, rafle tout et avoue ne pas aimer perdre. Quitte à malmener quelque peu ses adversaires. Pierre Maurel évoque une anecdote amusante à propos de celui que l’on surnomme « le Révérend » : « à la fin de chaque match , il va se confesser pour se faire pardonner. Or, le prêtre lui dit qu’il ne faut pas tendre l’autre joue et l’invite à multiplier les pains. Pour la bonne cause ! ». Petite histoire mise en scène dans une vidéo sur le site [Youtube.

Mais, c’est avant tout l’homme qui est célébré. « Quand on est fier de ses concitoyens, on les met en avant » souligne le maire. Robert Molines juge que Joël est « un grand monsieur, un individu avec des qualités morales. Quelqu’un de bien ». Il représente « des valeurs essentielles comme la fidélité, l’amitié et la tolérance » ajoute le représentant de l’Agglomération de Montpellier. Natif de Fort-de-France en Martinique, il encourage le multiculturalisme et l’échange.

Aujourd’hui, une nouvelle carrière s’ouvre à lui. C’est avec un engagement politique et citoyen qu’il commence sa nouvelle vie professionnelle. Selon le site Sportweek.fr, Joël Abati aurait déclaré : « j’ai toujours aimé la politique et je suis passionné par ce nouveau challenge. Il m’était difficile d’en parler auparavant, compte tenu de mon devoir de réserve quand j’étais joueur. Aujourd’hui je peux m’investir à fond dans le projet. » D’une part, révèle Jacques Martin, « il sera le représentant de la vie sportive dans le prochain conseil de région ». D’autre part, sur la demande du président du Conseil régional, Georges Frêche, il sera candidat aux prochaines élections régionales à ses côtés.

Après les discours et les différentes annonces, place à la musique et à la danse. Après la remise de la médaille de la ville à Joël, un groupe antillais, Kawak, est venu animer la fin de soirée. La mairie de Clapiers a fêté son champion jusqu’au bout : un grand buffet a été préparé avec attention. Au menu : gourmandises et saveurs des îles.