Le Club de la Presse de Montpellier se mobilise

Alors que deux journalistes de France 3 sont détenus depuis 80 jours en Afghanistan, le Club de la Presse de Montpellier organise un rassemblement de soutien le vendredi 19 mars à Montpellier, en présence de Florence Aubenas, dans le cadre d’une mobilisation nationale des Clubs de la Presse.

Depuis le 29 décembre 2009, Stéphane et Hervé, deux journalistes de France 3 sont retenus en otage en Afghanistan. Journalistes spécialistes des missions en zones de conflit, ils effectuaient un reportage dans le pays.

« Malgré certaines déclarations révoltantes de la part des autorités, les Clubs de la Presse tiennent à rappeler que ces journalistes ont été kidnappés alors qu’ils exerçaient leur mission d’information du grand public », précisent les Clubs de la Presse dans leur appel à la mobilisation. En effet, Nicolas Sarkozy a jugé que leur travail était d’une « imprudence vraiment coupable », et Claude Guéant, secrétaire général de l’Élysée, de surenchérir, le 17 janvier, sur Europe 1 que « le scoop ne doit pas être recherché à tout prix » et que les deux journalistes ont fait « courir des risques aussi à beaucoup de nos forces armées qui, du reste, sont détournées de leurs missions principales ».

Ces propos avaient soulevé la colère des gens du métier, du Syndicat National des Journalistes et de Reporters sans Frontières. « A la question de savoir s’ils ont pris des risques, la réponse est oui, bien évidemment. Tous les journalistes qui posent le pied en Afghanistan prennent un risque. Tous les jours, des centaines de journalistes prennent des risques. Les deux reporters de France 3 menaient un travail d’intérêt général. Exactement comme ceux qui sont au milieu des gravats de Port-au-Prince » rappelle Reporters sans Frontières dans un communiqué.

Chose qu’Alain Genestar a fait également valoir dans le Monde du 27 février : « l’époque – celle des jours actuels – est désormais à la comptabilité de la générosité, à la réprimande, à la discorde, à la désignation des présumés coupables. On dénonce leur comportement en public, au mépris de la discrétion qu’imposent ces circonstances. On les montre du doigt. On les expose à la vindicte populaire, les accusant de gaspiller l’argent des contribuables et de jouer avec la vie de nos fiers soldats. Jamais les journalistes et les photographes n’ont demandé à être traités avec une considération particulière. Ils n’exigent aucun régime de faveur – surtout pas -, mais seulement le respect dû à leur métier qui, dans certaines circonstances exceptionnelles – et la guerre, bien sûr, en est une -, s’exerce dangereusement, exige un courage et une audace qui échappent aux règles normales de la vie ordinaire ». Et de conclure : « sans l’audace et le courage de Robert Capa, sans l’audace et le courage des reporters, les lecteurs, les auditeurs, les téléspectateurs, le public, les citoyens ne seraient pas informés de la réalité de la guerre. De la « vraie » réalité, celle qui ne s’écrit pas ni ne se photographie, à l’abri du danger. Alors, « imprudents coupables », Capa et les autres ? Oui, nous sommes tous, par profession, journalistes et photographes, des « imprudents coupables ». »

Ainsi, engagés au quotidien pour la liberté d’exercer des journalistes, les Clubs de la Presse ont décidé de se mobiliser. Un rassemblement public est organisé le vendredi 19 mars, à partir de 10h, sur le parvis de l’Opéra-Comédie, à Montpellier, à l’occasion des 80 jours de détention des deux journalistes.

La journaliste Florence Aubenas, ancienne otage en Irak, prendra la parole pour apporter son soutien aux deux journalistes en captivité. Elle sera accompagnée de Claude Sérillon, qui a exercé pendant de longues années sur les antennes de France Télévision. De même, des représentants du Club de la Presse, de Reporters Sans Frontières et de plusieurs médias régionaux, seront également présents pour témoigner de leur solidarité envers leurs confrères.

Il est à savoir également que Reporters Sans Frontières a lancé un « Appel de soutien à nos confrères de France 3 enlevés en Afghanistan ». Il est consultable ici.

Alors, toutes les personnes sensibles à la question sont invitées, par le Club de la Presse de Montpellier, à rejoindre la place de la Comédie, « pour que
Stéphane et Hervé ne tombent pas dans l’oubli
».

 Pour plus d’informations n’hésitez pas contacter le Club de la Presse de Montpellier au : 06 07 64 86 03.

Julie DERACHE & Ibra Khady NDIAYE

Les Etats-Unis maîtres de l’humanitaire en Haïti

En décidant de contrôler l’aéroport de Port au Prince, les Américains ont pris en charge la coordination de l’aide humanitaire en Haïti. Cette décision fait polémique puisque, entre le vendredi 15 janvier et le samedi 16 janvier, deux avions français n’ont pas pu atterrir dans la capitale haïtienne. Bien plus qu’un élan humanitaire, le secours d’Haïti semble être, pour les États-Unis, un enjeu politique.

Les USA contrôlent le ciel d’Haïti

Six jours après le séisme de magnitude 7 qui a frappé l’île d’Haïti, les Américains ont décidé de prendre en charge la coordination de l’aide humanitaire en prenant le contrôle de l’aéroport de Port au Prince. Barack Obama, qui avait annoncé qu’il était prêt à débourser sur le champ plus de 100 millions de Dollars pour venir en aide aux sinistrés, a également envoyé un porte-avion à propulsion nucléaire, l’USS Carl Vinson avec dix-neuf hélicoptères à son bord. Ce bâtiment naval servira notamment de base flottante pour les rotations des aides aériennes. De plus, depuis le weekend dernier, quelques 4 200 militaires américains sont sur la zone et 6 300 troupes supplémentaires sont attendues d’ici le début de cette semaine.

Des avions interdits d’atterrir

Les États-Unis, en mettant en place de tels dispositifs, ont la volonté de mettre fin à la situation chaotique du cheminement de l’aide humanitaire et d’endiguer les émeutes qui ne cessent de progresser chaque jour dans la capitale haïtienne. Le problème est, qu’entre le vendredi 15 janvier et le samedi 16 janvier, deux avions français n’ont pas pu atterrir sur le petit aéroport de Port au Prince par ordre des forces américaines qui ont privilégié l’atterrissage de leurs propres avions. Le premier avion français transportait un hôpital de campagne et l’autre était un avion-cargo affrété par Médecins Sans Frontières avec à son bord un hôpital chirurgical gonflable.

Si le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, sur le plateau d’Europe 1 a voulu éviter toute polémique en affirmant que la décision américaine «est tout à fait heureuse» , l’association Médecins Sans Frontières (MSF) émet des réserves. En effet, MSF a lancé, dimanche 17 janvier, un appel d’urgence en demandant que «les avions-cargos transportant du matériel médical et chirurgical d’urgence soient autorisés à atterrir en priorité à Port-au-Prince afin de soigner les milliers de blessés en attente d’opérations chirurgicales vitales.» Les médecins n’ont pas été les seuls à s’inquiéter de l’autoritarisme américain. Alain Joyandet, secrétaire d’État chargé de la Coopération et de la Francophonie avait dénoncé «un manque d’arbitrage ou de discernement» de la part des Américains.

Des intérêts colossaux pour les Américains

C’est sans véritable concertation internationale que les États-Unis ont pris la décision d’organiser à eux seuls la coordination de l’aide humanitaire. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette démarche.

Tout d’abord, les États-Unis sont historiquement liés à Haïti. De 1915 à 1935, les Américains ont occupé l’île. Sous cette occupation, Haïti revint temporairement à la stabilité, mais au prix de révoltes sociales qui allaient favoriser l’arrivée au pouvoir des militaires. Washington mit en place un gouvernement soumis à ses volontés et s’engagea en contrepartie à fournir au pays une assistance politique et économique. Toutefois, rappelons qu’en 1918, les Américains réprimèrent dans le sang une révolte paysanne qui fit plus de 15 000 morts. L’hostilité de la population à l’égard de l’occupant progressa et conduisit finalement, en août 1934, au départ des Américains. Mais, la relation entre les deux États, et l’influence américaine ne s’est jamais véritablement éteinte. Si bien que plus d’un demi million d’Haïtiens résident actuellement aux États-Unis.

Mettre en place «l’une des plus grandes opérations de secours de l’histoire» est aussi un bon moyen pour les États-Unis de mettre entre parenthèse leur image expansionniste, la guerre en Irak et les conflits en Afghanistan. C’est aussi une méthode pour donner un second souffle à Barack Obama embarrassé par un prix Nobel de la paix qu’il ne peut pas vraiment assumer.

Enfin, les USA sont certainement les seuls à pouvoir mettre en œuvre une telle logistique. Ce qui fait d’eux les mieux placés pour organiser l’aide humanitaire.

En revanche, cette gestion autocratique ne doit pas engendrer des tensions avec les autres pays au risque de faire oublier le principal objectif : reconstruire Haïti.

Pour aller plus loin

www.wsws.org/francais/News/2010/jan2010/hait-j18.shtml

http://structures.ac-martinique.fr/cdi/pages/histoirhaiti.htm

http://www.humanite.fr/article2758879,2758879