Vinifilles, So femme et vin : des vins conjugués au féminin

Des femmes qui font du vin. Chose rare il y a vingt ans. Aujourd’hui les vigneronnes s’affirment et se regroupent. Rencontre avec les Vinifilles du Languedoc, « Belles, rebelles, actives, gourmandes, sympas, sociables et dynamiques » et les vigneronnes de So femme et vin du Sud-Ouest, qui conjuguent le vin au féminin.

Fini le bon vieux vigneron rustre et costaud qui cultive sa vigne pendant que sa femme est la maison. La parité est en marche dans tous les domaines et le vin n’y a pas échappé. Certaines sont associées à leur frère, père ou mari, d’autres gèrent leur exploitation seule, mais toutes sont chefs d’entreprise et régissent à leur façon leur vignoble.

En 2009 né le Cercle Femmes de Vin, le premier réseau professionnel national de femmes qui font du vin. Intégré à l’Union des vignobles de France, il est composé de 250 membres répartis dans 9 associations régionales, dont les Vinifilles pour le Languedoc et So femme et vin pour le Sud-Ouest.


-25.png Les Vinifilles ce sont vingt vigneronnes, dont plus de la moitié sont en bio. Pour Valérie Ibanez, la présidente de l’association, ce sont des femmes qui se regroupent pour faire du vin « comme des hommes qui se regroupent pour voir un match de foot ». Des femmes qui ont les mêmes problèmes, une même sensibilité pour le vin et le savoir-faire, et surtout « des femmes d’entreprises, pas des potiches » !

-24.png


So femme et vin porte les couleurs du Sud-Ouest. Vingt-sept vigneronnes mais aussi des œnologues, des consultantes, des grossistes, bref des femmes qui font, qui vendent, qui goûtent et surtout qui aiment le vin.
Pour la présidente Gaëlle Reynou-Gravier, le but est de mettre l’image de la femme en avant : « Ce sont en majeure partie les femmes qui achètent le vin, des femmes qui sont curieuses des vins faits par des femmes. » Même si l’association est ouverte à toutes les « confessions », la notion de développement durable est centrale pour ces femmes qui s’y impliquent « quelle que soit la manière ».


« Féminines mais pas féministes »

Gaëlle de So femme et vin se revendique comme étant « féminine mais pas féministe », tandis que Valérie des Vinifilles est plus modérée : « ce n’est pas du féminisme pur et dur ». La connotation péjorative du mot « féminisme », parfois quasi entendu comme un gros mot, prend ici tout son sens. « On ne veut pas être cataloguées, se renfermer dans une image. C’est pour ça que nous ne voulons pas en faire un mouvement féministe », s’empresse d’expliquer Gaëlle.

Même si elles s’accordent toutes à dire que le milieu reste essentiellement masculin, aucune ne se plaint en revanche d’une quelconque domination du vigneron. « Aucun problème avec les hommes, on aborde simplement les choses de façon différente », explique Françoise Ollier des Vinifilles. Pour Gaëlle il n’y a pas de sensation d’exclusion : «Les femmes sont beaucoup plus acceptées par rapport à avant.» « Il y a quelques difficultés physiques et matérielles liées au fait d’être une femme, mais pas dans le contact d’humain à humain », ajoute Nadia Lusseau de So femme et vin. « On n’est pas contre les hommes », lance Françoise faisant référence à Sacha Guitry. « L’idée, c’est de communiquer que les femmes savent faire aussi bien que les hommes dans un univers masculin », conclut Nadia.

Un réseau d’entraide

-261.jpg

Isabelle Daulhiac est aussi viticultrice et enseignante d’économie dans un lycée agricole. Elle explique que les groupes de viticulture traditionnels, qui sont mixtes, sont essentiellement masculins. Une des raisons qui a poussé les femmes à se rassembler. «On reste chacune dans notre coin à travailler et on a peu l’occasion de rencontrer d’autres femmes. L’association offre un réseau, une possibilité d’échanges si on a une question sur un client, un fournisseur, n’importe quoi», détaille Katharina Mowinckel. Même chose chez les Vinifilles. « À la base c’est un réseau d’entraide », explique Françoise. Mais plus qu’un réseau, il est devenu un groupe d’amies. « C’est plus agréable de partir avec deux copines. Ça change tout ! », s’exclame-t-elle. Pour Valérie, le travail en groupe apporte une valeur ajoutée incontestable à chaque vigneronne et puis « quand on fait les choses à plusieurs, c’est plus sympa ! »

Si se rassembler apporte de la convivialité à ces femmes, c’est aussi et surtout un outil de communication essentiel. Alors qu’il y a vingt ans on regardait d’un drôle d’œil une femme qui gérait seule son domaine, aujourd’hui c’est quasiment devenu un argument de vente. Katharina est dans ce cas et pour elle « le fait d’être une femme c’est même positif, c’est presque un avantage ». Valérie Ibanez le constate également : « C’est une façon de se démarquer commercialement. » Être une femme vigneronne ferait donc vendre, mais les femmes font-elles des vins pour autant féminins ?

Des « vins féminins » ?

Pour Thierry Daulhiac c’est incontestable, le vin ressemble à son ou à son/sa vigneron(e). « On reconnaît les caractéristiques d’une personne dans le vin : une femme va amener plus de finesse et d’élégance dans son vin, alors qu’un vigneron grossier fera un vin massif. » Gaëlle Reynou-Gravier de So femme et vin n’est pas de cet avis. « Les gens qui gouttent nos vins ne disent pas ‘ah, ça c’est un vin de femmes’ ! » Pour la présidente du Sud-Ouest c’est la manière de voir le vin qui est différente et non le vin en lui-même : « Cibler les femmes, c’est réducteur. » On laissera votre palais trancher sur la question. Féminin ou non, ces femmes ont choisi de concevoir un vin bien particulier : un vin bio.

Le vin bio se conjugue-t-il au féminin ?

Chez les Vinifilles 60 % sont en bio, contre une moitié pour So femme et vin. Y-a-t-il plus de femmes dans le vin bio que dans le vin conventionnel ? Difficile à savoir, aucun chiffre ne le démontre. D’après Thierry Daulhiac, « la femme qui devient mère est plus sensible à une nourriture saine ». Ce qui expliquerait son choix du bio, un choix philosophique et idéologique d’après Isabelle, sa propre femme. Lui est venu au bio pour se rapprocher du terroir, pour revenir à une technique plus proche de la nature et non forcément dans l’idée première de faire un produit plus sain. « La question de la santé est plus féminine », selon Isabelle. Elle explique que la femme est plus préoccupée par l’environnement et la santé humaine : « Elle a une fibre maternelle, féminine, qui la rend plus consciente des problèmes environnementaux.»

Qu’il soit bio, naturel, rouge, blanc, rosé, en fût, ou en bouteille, le vin des femmes est bon, et après tout, c’est tout ce qui compte !

Violence faite aux femmes: Devenez lanceur d’alerte.

Ce 25 novembre 2015, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, nous sommes tous concernés. Décrétée par l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1999 elle a pour but de sensibiliser l’opinion face à ce problème. En France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon.

Lorsqu’une femme est victime de violence, au sein de son couple, dans son travail ou dans la rue, elle fait souvent face au silence. Au silence des autres, de ceux qui voient mais ne regardent pas. De ceux qui entendent mais n’écoutent pas. Pourtant, chacun peut devenir un lanceur d’alerte et aider ces femmes à faire le premier pas. Il suffit de: Voir. Ecouter. Comprendre. Ne pas juger. Pour sauver.

Chez les femmes en bonne santé, la première cause de mortalité n’est ni la cigarette, ni les accidents, c’est les coups. Selon une étude de la Banque Mondiale, le viol et la violence conjugale sont la première cause de mortalité dans le monde chez les femmes de 15 à 44 ans. La violence faite aux femmes tue plus que le cancer, les accidents de la route, la guerre et le paludisme réunis. Triste constat qui ne touche pas que les pays les plus pauvres. Il en est de même chez les Européennes. Un bilan douloureux où chacun a sa responsabilité. Le 25 novembre 2014, Ban Ki-Moon, secrétaire général de l’ONU déclarait : « Il nous incombe, à nous tous, de prévenir et de combattre la violence à l’égard des femmes et des filles, en commençant par remettre en question la culture et la discrimination qui la perpétue. »

Selon un bilan publié ce lundi par la Fédération Nationale Solidarité Femmes, le 3919, la ligne téléphonique destinée à aider les femmes victimes de violence, a traité plus de 50 000 appels en 2014, soit deux fois plus que l’année précédente. Une étude qui révèle l’importance des campagnes de communication sur les femmes victimes de violence mais aussi sur chaque citoyen, qui, à tout moment, peut devenir un lanceur d’alerte.

La seule chose à briser, c’est le silence

Aline Faucherre est psychologue clinicienne et juriste au Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles (CIDFF) de Montpellier. Le premier constat, c’est l’efficacité du 3919 (numéro gratuit et anonyme, qui n’apparaît pas sur les factures) : « ça a permis à beaucoup de femmes et de témoins de rompre le silence. » Mais le combat n’est pas encore gagné. Encore beaucoup de femmes sont dans un isolement total, en particulier les femmes issues de milieux dits privilégiés, traditionnels où le tabou est encore plus fort. « Les menaces de l’agresseur isolent la victime, ce qui fait qu’elle a du mal à aller vers les associations qui peuvent l’aider ». D’où l’importance du rôle du témoin. Qu’il soit un voisin, un ami, un membre de la famille, un collègue, un médecin, un gendarme. De témoin il peut devenir lanceur d’alerte, et sauver des vies. Mais comment ?



Je suis témoin d’une agression dans un espace public
Même si la situation reste rare, le risque de mort est bien réel. Il faut avertir les forces de police. « Comme tout citoyen, vous intervenez, sinon c’est non-assistance à personne en danger. »

Je suis témoin d’une agression dans le huit-clos conjugal
Si c’est une scène où n’il y a pas d’urgence, « le risque de s’interposer quand vous êtes un citoyen lambda, c’est que les deux se retournent contre vous. » Même si c’est délicat, « si vous entendez la scène, la première chose à faire, c’est appeler le 17. »

J’entends des bruits inquiétants mais j’ai des doutes
Tout d’abord, informez. Donner de l’information peut s’avérer plus efficace qu’il n’y paraît.« Il n’y a pas très longtemps, une étudiante est venue. Dans une cité universitaire elle entendait des bruits suspects. Mais elle ne savait pas qui. Elle est venue ici chercher des affiches avec le 3919 qu’elle a placardé dans tous les halls d’entrée. »

Une amie, une connaissance se confie à moi
Sans doute la situation la plus difficile. « Il ne faut absolument pas parler au conjoint, ça ne ferait qu’affaiblir la victime.» Ouvrir la porte, mais rester en retrait. Il faut avoir « une position d’ouverture mais très respectueuse. Souvent elle n’est prête ni à se séparer de cet homme, ni à demander de l’aide. Elle pense qu’elle maîtrise la situation, qu’elle est capable de s’en sortir toute seule. Il faut faire preuve de prudence. D’abord lui dire que vous avez été témoin, que ça s’appelle de la violence, que ce n’est pas une scène de ménage anodine. Surtout, évitez de porter un jugement sur le conjoint. Ne pas dire « c’est un salaud », etc. Lui dire que c’est défendu par la loi. Ce qui est important, pas dans l’urgence mais dans la rapidité, c’est de travailler avec elle à ce qui pourrait la protéger. Lui demander à elle quels seraient ses points de repli.
-74.jpg Est-ce qu’il pourrait y avoir un code entre elle et vous en cas d’agression. Un mot, un geste qui veut dire qu’il faut appeler la police. Ne surtout pas faire les choses à sa place, ne pas l’obliger à porter plainte et rester disponible.
» Aline Faucherre le sait, « c’est une posture frustrante et difficile». Le lanceur d’alerte doit être patient et rester aux aguets.

La psychologue raconte l’histoire d’une femme qui habitait dans un immeuble à Montpellier. Tous les indices d’un « danger de mort » étaient là. Elle l’a poussé à parler à sa voisine, et à mettre en place un code. Si elle tapait trois fois sur le mur, elle était en danger. Un soir, devant leur bébé, le mari étrangle sa femme. Grâce au code la voisine contacte les gendarmes et les pompiers, qui sauvent in extremis la femme qui ne respirait plus.« C’est clairement l’intervention de la voisine qui a sauvé cette jeune femme.»

Des professionnels formés à donner l’alerte ?

Médecins généralistes, gynécologues, policiers et gendarmes. Des corps de métiers qu’une femme violentée rencontre inévitablement. Mais des professionnels plus ou moins aptes à déceler la violence, alors qu’ils devraient être les premiers lanceurs d’alerte.

Le déficit de formation des professionnels de santé
Aline Faucherre, également formatrice auprès des professionnels de santé, milite pour que les médecins soient formés à repérer et à aider les femmes qui n’osent pas crier au secours. La psychologue déplore l’absence de questions relatives à la violence subie par la patiente lors du questionnaire habituel d’antécédents médicaux des médecins généralistes. Il suffirait de poser la question : « Avez-vous été victime de violence dans votre vie ? » « Une question très simple. », qui pourtant est rarement posée. «Les médecins traitent une sorte de dépression ou de souffrance diffuse sans poser la question de l’origine.»
Il y a 15 ans, une formation spécifique aux urgences existait en lien avec le CIDFF, pour que la victime soit prise en charge par une assistance sociale dès sa venue au service des urgences. Mais cette formation a été supprimée et confiée en interne. Malheureusement, Aline Faucherre constate que souvent, aux femmes qui se présentent aux urgences suite aux coups qu’elles ont reçu, « on ne leur pose pas la question ». Il existe des formations auprès des professionnels, mais qui restent largement insuffisantes. Les violences conjugales ne sont pas enseignées en formation initiale à la faculté de médecine. «C’est quand même très dommage de ne pas former les jeunes professionnels», déplore Aline Faucherre.

Une prise de conscience des forces de l’ordre
La juriste note une importante différence entre les gendarmes et les policiers. « Depuis 10 ans, il y a un énorme effort de formation du côté des gendarmes, avec dans chaque brigade deux référents des Violences Intra-Familiales (VIF). Deux gendarmes volontaires et particulièrement formés aux violences conjugales. Ils disposent d’une grille d’audition qui permet de donner au procureur des éléments importants pour prendre une décision.»
Mais la police, ne dispose que d’une formation en interne, jugée insuffisante par la psychologue, qui a encore des échos de plaintes mal enregistrées.

Il a lancé l’alerte

-5.png Vincent Lagalie, formateur dans un centre de formation pour adulte, est venu en aide à des femmes victimes de violence. C’est dans le cadre d’entretien avec des stagiaires qu’il a repéré les premiers signes qui l’ont alerté. « Souvent il ne s’agit que de quelques mots…. l’expression d’une difficulté familiale ou conjugale qui passe par un problème d’hygiène, de fatigue, d’un stress, d’un mal être. » Les mots finissent par se transformer en maux. Lorsque les langues se délient, Vincent explique à la personne ce qu’est le CIDFF, lui dit qu’il va les contacter et lui propose de la mettre en relation avec la structure, afin de faciliter sa démarche.
Comment réagit la personne ? « Par l’étonnement d’abord que l’on puisse lui proposer un accompagnement, puis un soulagement et des remerciements.» Vincent note l’importance d’agir vite, surtout lorsqu’il y a urgence et assure à la personne concernée la rapidité de la prise en charge. Il se fait alors le relais, souvent nécessaire entre la victime et les professionnels. Il déclenche la prise en charge simplement en écoutant et en informant.

Betty Mercier : «  Même avec un cancer, ce sont des femmes avant tout »

Betty Mercier, Maître de Conférence à l’Université de Montpellier~1, a créé l’Association Étincelle Languedoc-Roussillon, en 2008. Un espace d’accueil, d’accompagnement et de bien-être pour les femmes atteintes d’un cancer, qui regroupe aujourd’hui une trentaine de bénévoles et plus de 600 « étincelles ». « Ici, les femmes ne sont pas des patientes mais des étincelles. », explique Betty Mercier qui a accepté de raconter à Haut courant son histoire, son projet et ses rêves.

Haut Courant : Quelle est votre histoire au sein d’Étincelle ?

Betty Mercier : Ma mère. J’ai perdu mon papa d’un cancer. Puis quand ma mère a eu un cancer à son tour ça a été un véritable choc. Je ne connaissais rien en ce qui concernait le cancer et quand elle m’appelait pour demander des conseils pour les problèmes de cheveux et d’ongles, je ne savais pas quoi lui dire. J’ai essayé de me renseigner sur Internet. Quand j’ai vu qu’il n’y avait rien, je me suis demandée comme cela était possible ! Il n’y a rien pour s’occuper de toutes ces femmes qui sont malades et qui ont pleins de questions. Aucune question n’est futile, par contre face au médecin qui s’occupe du traitement de la maladie on n’ose pas. Le cancer engendre pourtant des tonnes de problème.

Un matin devant la télé j’ai découvert une femme venue présenter son association à une émission, qu’elle avait appelé Étincelle et qui accueillaient les femmes atteintes d’un cancer. Je suis allée à Paris rencontrer cette femme. Je lui ai demandé des conseils pour créer le même type d’association, ici à Montpellier. Comme le nom Étincelle était jolie je lui ai demandé si je pouvais créer un comité local. Au départ ça n’a pas été facile, mais comme j’étais déjà dans le milieu hospitalier, je suis allée voir les gens, des anciens collègues dans la recherche, la Mairie, j’ai fait mon chemin et j’ai réussi à récolter de l’argent grâce aux dons. Ce projet est un bel hommage à la mémoire de ma mère.

H.C : Quelle aide apporte Étincelle aux femmes atteintes d’un cancer ?

B.M : Les femmes qui viennent ici recherche une écoute, elle veulent sentir qu’elles ne sont pas seules et qu’elles peuvent parler librement. Ici il n’y a aucun regard de jugement. D’accord elles ont un cancer mais ce sont des femmes avant tout. La maison Étincelle est un endroit où elles peuvent se lâcher. On les écoute et on leur apprend aussi à s’occuper d’elles. Elles adorent ça ! Il y a tout ce côté esthétique et féminin très important. Elles peuvent également parler avec les psychologues bénévoles de tous les problèmes psychologiques qu’engendre la maladie. Un cancer ça met à rude épreuve un couple, la famille, les enfants, l’argent, le travail, etc. Il y a tellement de dommages collatéraux liés au cancer. En général, ces femmes ont un arrêt de travail de 6 mois au moins, donc le salaire n’est plus le même. Il faut gérer les conjoints qui ont souvent du mal à supporter la maladie et qui s’en vont. Plus de cheveux, parfois ablation du sein, c’est une véritable spirale. Une femme jeune, de 38 ans par exemple, à qui ont annonce un cancer, elle perd son mec mais elle est encore jeune elle a envie de plaire. Puis on lui annonce qu’elle ne pourra plus avoir d’enfant. Elle est opérée, elle a un sein en moins donc elle est mutilée, elle doit rester avec une cicatrice le temps que ce soit refait et encore ce n’est jamais extraordinaire. C’est très lourd.

H.C : Étincelle a créé l’année dernière son propre magasine L&Vie. Comment est née cette idée ?

B.M : En 2010, une jeune femme qui avait créé un magazine gratuit, Décor&Sens, est venue faire un reportage sur la maison Étincelle. Cette personne avait elle-même eu un cancer. J’étais très motivée par cette idée de magazine pour les étincelles et par les étincelles. J’ai demandé à cette journaliste de nous aider à créer ce magazine et elle a acceptée. Une première maquette a été lancée mais il nous manquait une commerciale, car comme pour tout magazine gratuit il nous fallait des annonceurs. La vie est bien faite, une jeune étincelle assiste à une discussion sur le magazine et nous révèle être commerciale ! Quatre nanas et on s’est lancées dans cette aventure.

On en est au troisième numéro d’L&Vie. Il sort tous les deux mois. Tous les bénévoles d’Étincelle y participent : Jennifer De Calheiros la socio-esthéticienne de l’association, Marie-Morgane Le Berre la responsable du Pôle Activités Physiques Adaptés et Nutrition, Alain Andreu le responsable du Pôle Psychologie, Maître Hicham El Malih l’avocat d’Étincelle. On a des retours extraordinaires, parce que les gens disent que ce magazine il a une âme et on s’éclate en plus. Enfin, c’est un formidable outil de communication. On le distribue nous même. Là, où il y a des salles d’attentes. On a un public qui attend beaucoup et qui a besoin de lire, d’où une édition papier disponible dans des lieux spécifiques. On raconte des histoires de femmes qui avec leur cancer ont réussi à faire des choses merveilleuses, réaliser leur rêve. Pour le numéro de février-mars, nous avons fait un spécial couple, avec toujours nos propres histoires. Le prochain sera un spécial mère-fille. On a une rubrique mode, avec des photographes professionnels, tous bénévoles.

H.C : Quelle est votre plus grande satisfaction aujourd’hui ?

B.M : Que tous les jours, les femmes me disent qu’Étincelle leur a sauvé la vie. Quand elles arrivent elles sont au plus bas, quand elles repartent elles sont belles et elles ont le sourire. On s’attache beaucoup, mais il faut garder une attitude très professionnelle. Quand on accompagne des personnes atteintes d’un cancer il faut être fort et avoir de l’énergie. C’est pour cela qu’il faut savoir parfois mettre l’affectif de côté. Si je m’effondre, comment va faire la femme atteinte d’un cancer ? Grâce à ça j’ai réussi à toujours accompagner ma mère. Et c’est elle aujourd’hui qui m’accompagne. Même si elle n’est plus là, elle est toujours présente.

H.C: Quels sont les projets que vous aimeriez aujourd’hui réaliser ?

B.M: Mon rêve serait de créer une maison Étincelle pour les hommes. Un espace mixte ne peut pas fonctionner. Ici c’est trop féminin, il faut un endroit adapté aux hommes : sport, cuisine, esthétique car les hommes prennent aussi soin d’eux mais dans une ambiance mec ! Un bar à café, la télé pour le foot, faire un truc qui rassemble car les hommes ne parlent pas de la maladie entre eux, contrairement aux femmes. Il leur faut un endroit où ils puissent se sentir bien et se lâcher.

J’aimerais également faire un espace d’accueil et de recherche. En forme d’étoile avec des psychologues, un parcours santé, de l’esthétique et un lieu pour évaluer. Faire des tests à l’arrivée des Étincelles et un an après analyser l’évolution sur leur bien-être, la qualité de vie. C’est évident qu’avec un bien-être, il y a moins de récidive et de meilleurs guérisons. Donnez-moi 500 m2 et je fais ce projet. J’y crois.

Silence, ça frappe !

L’actualité met les femmes à l’honneur ces derniers temps. Mais pas forcément de la meilleure façon : à travers leurs souffrances et dans leur silence meurtri. La lutte contre les violences faites aux femmes est la grande cause nationale de l’année. La Journée Internationale pour les droits des femmes fête ses 100 ans. 2010 verra aussi le MLF (Mouvement de Libération des Femmes] souffler ses 40 bougies… Un bien bel anniversaire pour une cause qui a encore de beaux jours devant elle. En effet, le bilan est plutôt noir, et les médias le rappellent tous les jours. Pour briser le silence, Hautcourant met en lumière ce phénomène de société encore très tabou.

«Ne restons pas muets face aux violences conjugales ». Tel est le titre du petit film de 2 minutes 30 réalisé par Olivier Dahan, en 2008, à la demande d’Amnesty International. Joués par Clotilde Courau et Didier Bourdon, les personnages évoluent sur une petite musique d’époque, dans un effrayant silence. En détournant les codes du cinéma muet, cette scénette illustre et amplifie le silence qui entoure souvent les violences domestiques et souligne l’importance d’oser dire « stop ». La conclusion est : « en France, 1 femme décède tous les 3 jours suite aux violences conjugales ».

Autres spots, même réalité. Les Films du Poisson ont lancé, en 2006, une campagne de dix courts-métrages à visée préventive et pédagogique, d’une durée maximale de trois minutes. Ce, pour la journée internationale de lutte contre les violences. Le thème : en France, une femme sur dix est victime de violences conjugales. Zabou Breitman y a réalisé un court-métrage. Choc.

La violence à l’encontre des femmes : définitions et chiffres

Définitions

Les violences faites aux femmes, physiques et morales, sont diverses. Les Nations Unies les définissent ainsi : « tous les actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée ».

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), elle peut revêtir différentes formes : « sévices sexuels, corporels ou psychologiques infligés par un partenaire intime ; sévices corporels ou sexuels infligés par des membres de la famille ou autres ; harcèlement sexuel et sévices sexuels exercés par des personnes incarnant l’autorité (enseignants, représentants des forces de l’ordre ou employeurs) ; trafic pour travail forcé ou prostitution forcée ; et pratiques traditionnelles telles que mariages forcés ou mariages d’enfants, violence liée à la dote ; crimes d’honneur commis contre les femmes pour laver l’honneur de la famille. En situations de conflits, le viol systématique est une autre forme de violence exercée à l’égard des femmes ». Ainsi, « la violence à l’encontre des femmes n’est autre qu’une violation des droits de la personne humaine ». La plus commune serait celle exercée par un partenaire intime.

Chiffres

Une étude menée par l’OMS, dans dix pays, portant sur la santé des femmes et la violence domestique, montre notamment que :

 15 à 71% des personnes interrogées ont dit avoir subi des violences corporelles ou sexuelles de la part d’un mari ou d’un partenaire,

 De nombreuses femmes ont indiqué que leur première expérience sexuelle leur avait été imposée,

 Chaque année dans le monde, quelques 5000 femmes sont assassinées par des membres de leur famille au nom de l’honneur,

 À l’échelon mondial, jusqu’à une femme sur cinq, et un homme sur dix, déclarent avoir subi des violences sexuelles pendant leur enfance.

En 2007, l’INSEE a fait une enquête sur les violences faites aux femmes. Il en ressort quelques données : « sans compter les agressions subies dans leur cadre familial actuel, 6 % des femmes ayant entre 18 et 59 ans ont été l’objet d’injures sexistes en 2005 ou 2006, 2,5 % ont été agressées physiquement et 1,5 % a déclaré avoir subi un viol ou une tentative de viol. Dans ce dernier cas, un sur cinq est perpétré par l’ex-conjoint et la moitié des victimes connaissaient leur agresseur. Les violences sexuelles sont moins fréquentes au sein du ménage, mais c’est l’inverse pour les violences physiques ». Les violences intra conjugales sont très mal rapportées : « un cinquième des victimes de violences physiques et le tiers des victimes de violences sexuelles n’ont pas porté plainte, ni enregistré de main courante, ni parlé à qui que ce soit (ami, médecin ou association). Et, quand la victime se confie, c’est rarement à la police ; celle-ci ne reçoit que 12 % des victimes (plainte et main courante) pour les violences physiques, 8 % pour les violences sexuelles soit, globalement, à peine une sur dix ».

Un article du Monde, datant du 25 février, nous informe que «675 000 femmes ont été victimes de violences lors des deux dernières années», et que «pour l’année 2007, les violences conjugales se chiffrent à plus de 47 500 faits constatés par les services de police et de gendarmerie, selon l’Observatoire national de la délinquance». Ainsi, en moyenne, une femme meurt tous les deux jours et demi des violences exercées par son partenaire.

magdamontemor.jpg

La violence à l’égard des femmes : sous le feu des projecteurs

Le vendredi 26 février 2010, l’Assemblée Nationale a voté une loi accentuant la protection des personnes victimes de violences conjugales, et notamment celle à l’encontre des femmes. Partant d’un constat : « loin du fait divers qui appellerait une réponse simpliste et sécuritaire, les violences faites aux femmes sont un problème social et sociétal, auquel il convient d’apporter une réponse globale, coordonnée et accompagnée des moyens humains et financiers » de Danielle Bousquet, députée socialiste, cette loi prévoit notamment la création d’un délit de violences psychologiques. Le texte est soutenu par de nombreuses associations, dont la Fédération nationale solidarité femmes, qui regroupe soixante-cinq associations accueillant des femmes victimes de violences dans le couple et leurs enfants.

Ce vote intervient au moment même où un fait divers, le meurtre de la mère du petit Ibrahima par son ancien compagnon, souligne l’importance d’une telle loi. En effet, Tanja Pozgaj a été poignardée par son ex-compagnon, mardi 16 février, sous les yeux de son enfant. Alors qu’elle avait alerté sans cesse, la police, la justice, le maire de sa commune depuis plusieurs mois, être harcelée par cet homme connu pour des violences répétées contre des femmes. La tragédie aurait-elle été évitée, si les autorités l’avaient mieux protégée ?

Pour sortir du silence, les femmes à l’action

La lutte contre les violences faites aux femmes est la Grande Cause nationale de 2010. Ainsi, les associations féministes et autres organisations de défense des droits des femmes ont toute la lumière pour agir. Voici quelques évènements à venir.

Les États Généraux de la femme

40 ans après, Elle a décidé de lancer une nouvelle édition des États Généraux de la femme, sous la présidence d’honneur de Simone Veil. Le concept est le même qu’en 1970 : donner la parole aux Françaises à travers des rencontres et des débats organisés à travers le pays, et sur le site Elle.fr. L’objectif étant de dresser un état des lieux de la vie des Françaises. L’ensemble des résultats sera révélé en mai prochain à Paris.

La Journée de la Femme : « un siècle de féminisme »

Le 8 mars est depuis 100 ans la Journée internationale pour les droits des femmes. Le 8 mars 1910, à Copenhague, une confédération internationale de femmes socialistes de tous les pays a créé cette journée en vue de servir à la propagande du vote des femmes. Mais ce n’est qu’en 1977 qu’elle sera officialisée par les Nations Unies qui invitent tous les pays à célébrer une journée pour les droits des femmes. Souvent, elle est l’occasion de rappeler que les droits des femmes et l’égalité entre les genres sont loin d’être une réalité. D’ailleurs, cette année le thème est : « Droits égaux, Opportunités égales : Progrès pour tous ».

kake_expo_femmes.jpg Cette journée donnera lieu à de nombreuses manifestations en France, et à travers le monde. Par exemple, le Bureau d’Information pour la France du Parlement européen présentera, du 8 au 19 mars prochains, l’exposition « Violence contre les femmes : le Parlement européen s’engage ».

Autre exemple : la chaîne Téva diffusera une programmation spéciale « Journée de la femme le 8 mars 2010 ». Seront notamment diffusés les films : Fashion Maman avec Kate Hudson, Working Girl avec Melanie Griffith, Et Dieu créa la femme avec Brigitte Bardot ou Lady Chatterley avec Marina Hands.

Julie DERACHE

Conseil de lecture : Le Livre noir de la condition des femmes de Christine Ockrent et Sandrine Treiner

A consulter également : Qu’est-ce que la violence envers une femme ?

Contacts utiles

 Violence conjugale : 01.40.33.80.60 / www.sosfemmes.com

 Violence au travail : 01.45.84.24.24

 Allo enfance maltraitée : 119 / www.allo119.gouv.fr

 Sos femmes battues : 01.40.02.02.33

 Viol : 0800 05 95 95 / www.cfcv.asso.fr

Adopte un mec.com : le concept de l’homme-objet fait fureur sur Internet

Meetic.com et ses acolytes peuvent aller se rhabiller. Finis les sites traditionnels de rencontre sur Internet. Dépassés surtout, avec l’arrivée sur la Toile d’un petit dernier prêt à tout chambouler : AdopteUnMec.com. Avec ce site, les femmes fixent désormais les règles du jeu de la drague en ligne…