La Marseillaise en redressement judiciaire : « La morosité s’était installée depuis quelques temps »

SA Seilpca, la société éditrice de La Marseillaise – L’Hérault du jour a demandé son placement en redressement judiciaire vendredi 14 novembre. L’heure est à la morosité dans les rédactions. Les réductions d’effectifs de ces deux dernières années n’ont pas suffi. Après un exercice 2013 à l’équilibre, le groupe accuse aujourd’hui un déficit cumulé de 2 millions d’euros et 1,5 millions supplémentaires de pertes prévisionnelles sur la seule année 2014. D’obédience gauchiste – communiste jusqu’en 1997 – les deux titres souffrent depuis le 1er janvier « d’une forte baisse de la communication institutionnelle, de la publicité et des annonces légales » selon Jean-Louis Bousquet son PDG. Une situation qui s’explique par le récent passage à droite de nombreuses municipalités, notamment de la région marseillaise.

État d’alerte à La Marseillaise. Les salariés du titre – qui publie aussi L’Hérault du jour – ont accueilli avec colère la mise en redressement judiciaire de leur société éditrice SA Seilpca. Le régime drastique des dernières années se révèle vain. Les départs s’étaient pourtant multipliés avec de nombreuses ruptures conventionnelles depuis 2012. On se souvient évidemment du « licenciement économique » de Philippe Pujol, prix Albert Londres remercié en octobre dernier. «On a déjà eu une grosse vague de départs il y a quelques mois, justement pour éviter cette situation, mais ça n’a pas suffi », rappelle un journaliste à l’AFP. « Cela a déstabilisé la rédaction et les lecteurs ne s’y retrouvent pas du tout », regrette-t-il. Jean-Marie Dinh, délégué SNJ-CGT, dénonce lui un passage en force de la direction.

« Sera-t-on payés à la fin du mois ? »

« La direction a cédé à une forme de précipitation qui nous surprend. Nous avons le sentiment qu’elle passe en force, au mépris du personnel. Elle ne nous a pas donné les informations que nous réclamons, notamment sur l’état du passif et de l’actif, et sur ses objectifs », s’indignait Jean-Marie Dinh. « Tout cela est très précipité. Nous regrettons de ne pas avoir été consultés sur la situation du journal ». Et pourtant, l’épée de Damoclès était bien visible, suspendue juste au-dessus de la tête des rédactions ces derniers mois : « Les notes de frais mettaient de plus en plus de temps à être payées ».
Si les salariés sont bien conscients de l’état désastreux des finances de leur employeur, ils se refusent à abdiquer. Interrogé sur l’imminence d’un plan social par l’AFP, un journaliste annonce, clairvoyant, « On s’y attend. On veut réduire au maximum son amplitude ». Tous plaident la spécificité de leur titre : « Nous sommes pleinement convaincus de la nécessité de maintenir ce journal. On est conscient de sa valeur historique.».

«Une voie différente»

Né clandestinement de la volonté du Front National (pas celui des « Le Pen ») pendant la Résistance, le quotidien fait valoir la singularité de sa ligne éditoriale dans le paysage de la presse locale. Fortement ancré à gauche, communiste jusqu’en 1997 avant d’élargir ses horizons, La Marseillaise – L’Hérault du jour « n’est adossée à aucun grand groupe financier ou industriel, elle ne dégage pas de dividendes et participe depuis soixante-dix ans à l’animation du débat public » pour L’Humanité. « Nos territoires ont besoin de ce journal » ajoute l’organe du PCF. Ce dernier soutient directement La Marseillaise via son antenne locale PCF13 : « Les communistes se placent aux côtés des salariés et de la direction, afin d’assurer la pérennité du journal. La Marseillaise nous est essentielle ». Même son de cloche chez Annie Menras, chef d’agence de L’Hérault du jour à Montpellier et rédactrice en chef du quotidien régional : « Nous nous refusons à envisager la disparition de ce titre. Les conséquences seraient désastreuses du point de vue du pluralisme de la presse. Nous sommes une voie différente».

Des licenciements à venir

Cette ligne très à gauche pose problème. En effet, comme le soulignait Les Échos, les élus de droite mènent la vie dure aux deux quotidiens du groupe : « La nouvelle majorité UMP de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a par exemple décidé de se limiter aux annonces obligatoires, et réduit son budget de 300 000 euros. ». Un conflit qui se retrouve dans de nombreuses communes et communautés de communes passées à droite en 2014. La Marseillaise, qui tire six à sept fois moins que La Provence ou Midi-Libre s’en trouve prise à la gorge comme l’évoque son PDG Jean-Louis Bousquet : « Nous allons adopter un plan de sauvegarde pour tenir le coup. Nous allons en appeler à nos lecteurs, au monde politique, et chercher d’éventuels partenaires. La situation nous contraint à cette démarche pour préserver la continuité de notre titre. ». Un « plan de sauvegarde », en vérité un joli moyen de dire qu’il faudra trancher dans les effectifs – 213 salariés dont 75 titulaires de la carte de presse. Le PDG insiste sur la nécessité de « geler les dettes » car les difficultés de trésorerie empêchent pour l’heure de moderniser le titre, selon ses dires.

Une AG exceptionnelle se tenait ce lundi à 12h30. Des précisions sur l’avenir du groupe et de ses employés sont donc à venir rapidement. Pour l’heure, Annie Menras le rappelle « Nous acheter, c’est la première façon de nous aider ! ». Les lecteurs eux, expriment leur soutien sur Facebook et Twitter

*Le groupe La Marseillaise – L’Hérault du jour ne soumet pas ses chiffres de tirage et de diffusion à l’OJD. Aucune donnée officielle n’est donc disponible à ce sujet.

MEDIA – L’Agglo-Rieuse riposte

Suite à la condamnation du journal satirique montpelliérain, l’Agglo Rieuse se mobilise. Dénonçant une « décision de justice qui constitue une véritable peine de mort » et une « sanction disproportionnée« , le média local a fait appel de son incrimination auprès de la cour de cassation.

Mais l’Agglo-Rieuse n’en reste pas là et a fondé l’association « Soutenons la presse ! ». Elle vise à défendre la liberté de la presse et se destine à « aider tous les journaux qui auraient à subir des dérives similaires« . Dans ce contexte, une journée de mobilisation est organisée le 26 novembre, place du marché aux fleurs à Montpellier. Trois dessinateurs exposeront et des ouvrages de dessins de presse seront en vente. Les fonds récoltés approvisionneront l’association, qui s’engage à publier un état des comptes annuel de ce fond de soutien qui « appartient à nos lecteurs » précise l’Agglo-Rieuse.

Edwy Plenel : « Sarkozy me fait penser à Nixon »

« Mais qu’ils sont cons ces journalistes ». Les propos choc de Carla Bruni Sarkozy reflètent les tensions grandissantes entre pouvoir politique et journalistes. Karachi, Bettencourt, espionnage téléphonique…Edwy Plenel, journaliste et co-fondateur de Mediapart, est le premier à dénoncer ouvertement les scandales qui mettent à mal la présidence Sarkozy. Rencontre avec un « chien de garde » de la démocratie.

L’affaire Karachi : « Royaume du Secret, verrouillé par le pouvoir exécutif »

Un scandale au cœur de l’Elysée, un attentat meurtrier en 2002, un gouvernement Balladur remis en question, des financements occultes… Avec pour point de départ un simple contrat de vente de sous-marins français au Pakistan, l’affaire Karachi dissimule jeux de pouvoir et corruption. Nicolas Sarkozy est-il mêlé à cette affaire ? La campagne de Balladur a-t-elle été financée par les retro commissions ? L’arrêt des pots-de-vins a-t-il provoqué le désastre de Karachi ? Edwy Plenel propose une piqure de rappel aux retardataires.
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Entre entraves à la liberté de la presse et blocages de la justice, le gouvernement se montre peu coopératif avec les juges indépendants chargés de l’affaire : Marc Trevedic et Renaud Van Ruymbeke.
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« Sarkozy : il doit répondre »

« Je ne vois pas en quoi ça concerne la présidence de la république ». De Karachi à Bettencourt, Nicolas Sarkozy ne cède pas. Muet sur les questions sensibles il ne semble pas décider à répondre. Un silence, symbole d’une démocratie titubante ?
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Sarkozy journaliste, Sarkozy humoriste ? Edwy Plenel revient sur l’attitude ambivalente du chef de l’Etat à l’égard de la presse.
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Vols, espionnages, attitudes du président : « Tout ça est très malsain »

Les vols des ordinateurs des journalistes en charge des affaires Karachi et Bettencourt interviennent dans un climat de troubles, où la liberté de la presse est malmenée. L’indifférence du gouvernement, et en premier plan du chef de l’Etat, en est que plus interpellante.
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« Eric Woerth paravent de Nicolas Sarkozy »

Illustration de tout un système, l’affaire Woerth-Bettencourt reflète les sacrifices d’un ministre pour son président. Cette protection du chef de l’Etat à n’importe quel prix peut sonner comme une menace à l’équilibre des pouvoirs. Pour Edwy Plenel, c’est là que les journalistes interviennent.
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La justice pénale internationale : un défi pour l’avenir

Jeudi 28 octobre, l’amphithéâtre B de la faculté de droit de Montpellier a accueilli une projection-débat sur le thème de la justice pénale internationale. Le point de départ de cette soirée était la diffusion du film de Christophe Gargot, « D’Arusha à Arusha », qui présente le fonctionnement du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR). Cette projection a ensuite permis d’ouvrir le débat sur les défis que doit relever la justice pénale internationale.

D’Arusha à Arusha : parole à la défense

Du procès de Nuremberg à la mise en place du Tribunal Pénal International pour le Rwanda, des efforts ont été faits en matière de jugement des crimes de génocide.
Le 6 avril 1994, l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana, cible d’un attentat, explose en plein vol. Quelques heures plus tard, c’est le début du génocide des Tutsis par les Hutus. Dans le documentaire « D’Arusha à Arusha », réalisé par Christophe Gargot, le génocide n’est pas traité dans ses faits mais il témoigne de la complexité de juger un tel événement par la communauté internationale.
Arusha est une ville de Tanzanie où siège le TPIR, créé par les Nations-Unies pour juger les responsables du génocide rwandais.

Pour réaliser son documentaire, Christophe Gargot a pioché des extraits dans les 30 000 heures d’enregistrements effectués par le Tribunal.
Parmi les 79 personnes poursuivies, Georges Ruggiu, ancien animateur belgo-italien de la radio Mille Collines et seul étranger à comparaître devant le TPIR, semble d’un sang-froid saisissant malgré les nombreuses incitations au crime exprimées à travers ce média. D’ailleurs, durant le film, des extraits radiophoniques sont utilisés pour témoigner de l’influence de ce support médiatique sur les auteurs du génocide.
L’autre principal inculpé est Théoneste Bagosora, un colonel retraité des Forces armées rwandaises. Présenté comme le cerveau du génocide, il nie avoir planifié les massacres, préférant parler de « préparation ».

Pour juger ces criminels, l’ONU a mis en place des salles d’audience ultra équipées.
Mais le réalisateur a également insisté sur l’existence, moins connue, de tribunaux populaires implantés dans les collines du Rwanda, là où les crimes ont été perpétrés. Le silence des images montrant les tribunaux de plein air, appelés les Gacaca, contraste avec le témoignage de Jean de Dieu.
Ce dernier, hutu, s’est dit contraint de commettre des crimes pour que sa compagne tutsie soit épargnée.
Un paradoxe qui illustre l’ambiguïté entre responsabilité et culpabilité. Des cas comme celui-là sont difficiles à résoudre pour la justice pénale internationale, confrontée à des « bourreaux malgré eux » révélant une part d’humanité lors des audiences.

Les défis de la justice pénale internationale en débat

Avant même la diffusion du documentaire « D’Arusha à Arusha » et le débat qui suivit, François Roux, avocat et chef du bureau de la défense du Tribunal Spécial pour le Liban, avait préparé l’auditoire. « La justice pénale internationale est complexe » avait-t-il annoncé.

D’un côté, il y a le sentiment général qu’il faut lutter contre l’impunité des crimes commis au Rwanda, au Cambodge ou en ex-Yougoslavie. De l’autre, il y a la justice qui, selon François Roux, « ne doit ni lutter contre l’impunité ni œuvrer pour la réconciliation ». Il cite les propos qu’il adresse aux juges devant les tribunaux : « Oubliez qui vous a nommés et pourquoi vous avez été nommés », autrement dit oublier la pression onusienne et l’atrocité des crimes. Seule l’application du droit compte, la réconciliation devant logiquement découler d’un verdict juste.

François Roux a travaillé à la défense d’accusés présentés devant les tribunaux internationaux, à l’image de Douch au Cambodge. Pour l’avocat, « il ne peut y avoir de justice sans défense. Avant de juger il faut comprendre ».
Le système de la justice pénale internationale est accusatoire. Dans les tribunaux, l’absence de juge d’instruction, sauf au Cambodge, contraint l’accusation et la défense à procéder à leurs propres enquêtes. Ce mode de fonctionnement basé sur le Common Law choque les juristes issus du droit romano-germanique.
Les tribunaux sont alors perçus comme des théâtres où l’on fait défiler des témoins et où les victimes n’ont pas le droit de faire valoir leurs intérêts.

Cette justice des symboles condamne lourdement les donneurs d’ordre, tels que les chefs d’État ou hauts gradés de l’armée, pour en faire des exemples.
Quant aux exécutants, leurs peines sont moindres, ils ne peuvent être condamnés comme des criminels de droit commun en raison du contexte particulier et politique dans lequel on les a poussés à agir.
Dans l’incapacité de juger tous les criminels, la justice pénale internationale délègue son pouvoir aux tribunaux populaires où la procédure est loin d’être tout à fait respectée. A l’image des « Gacaca » rwandais où les victimes sont devenues juges, les avocats absents, et les témoignages de personnes emprisonnées considérés comme irrecevables.

Une justice internationale imparfaite, de par sa jeunesse -quinze ans aujourd’hui-, mais aussi en raison des difficultés posées par la non-adhésion de certains pays concernés.
De la légitimité d’un tribunal dépend l’efficacité de la justice. Or, les tribunaux spéciaux internationaux sont parfois perçus comme des outils d’ingérence des Nations-Unies dans les affaires internes des Etats.

Ainsi au Rwanda, le tribunal n’a jamais connu l’adhésion du pays. Cela a compliqué les enquêtes et la recherche de preuves, rendues déjà difficiles par les délais séparant la commission des crimes et la mise en place du tribunal.
Le Liban n’a pas ratifié la charte de création du tribunal spécial, alors même qu’il était à l’origine de la demande de sa création.

Des pays s’insurgent contre ce qu’ils considèrent comme une ingérence dans leurs affaires. D’autres pensent que l’ONU doit veiller à ce que des criminels ne se cachent pas derrière le « paravent de la souveraineté » pour échapper à la justice.
Faudrait-il alors préférer aux tribunaux spéciaux les  »commissions vérité et réconciliation » ? Leur travail est important mais leur bilan est mitigé car elles suscitent autant d’espoirs que de frustrations. Le désir de voir des têtes tomber étant souvent perçu comme un préalable à toute réconciliation.
« Il n’y a pas de réponse parfaite, nous sommes condamnés à faire parce que ne rien faire serait condamnable », conclut François Roux.

Les étudiants de la clinique de droit international, qui sera mise en place au second semestre 2011 à la faculté de Droit de Montpellier, seront peut être ceux qui contribueront aux améliorations de la justice pénale internationale.
Olivier de Frouville et François Roux ont mené conjointement cette initiative. Après avoir pris contact avec le bureau des co-procureurs du Cambodge il y a trois ans, le premier, professeur de Droit public à l’Université de Montpellier propose son projet de coopération au second.
François Roux a déjà participé à la création de cliniques de droit international, notamment aux Etats-Unis et au Liban. L’objectif est de faire travailler les étudiants de master 2 sur des questions pratiques posées par des professionnels. Grâce aux liens établis, les étudiants pourront postuler pour des stages dans les institutions internationales, et, à plus grande échéance, travailler en leur sein.

Une semaine avec Europe Ecologie

Pendant une semaine, Haut Courant a suivi Europe Écologie dans la dernière ligne droite de la campagne des régionales : réunions, meetings, débats participatifs, rencontres avec les différents candidats. Haut Courant vous donne ainsi un aperçu du programme d’Europe Écologie ainsi que de ses différentes figures.