ÉCONOMIE – Crowdfunding réussi pour le supermarché coopératif La Cagette

Moins de deux semaines après le lancement de la collecte, le supermarché coopératif La Cagette dépasse son objectif de financement.

Mission accomplie pour La Cagette. Le supermarché coopératif de la rue Balard, qui espérait récolter 5000 euros pour meubler et équiper son local, totalise aujourd’hui plus de 7500 euros de financement participatif.

Le supermarché est géré par une association à but non lucratif. Son ambition est de « rediriger les bénéfices de notre consommation vers les postes souhaitables (production agricole responsable et prix justes pour les consommateurs) », selon son site Internet. En contrepartie, les membres-acheteurs doivent prêter main-forte au magasin 3h par mois. Ils seraient aujourd’hui plus de 400, pour un seul salarié.

La campagne de financement participatif continue jusqu’au 28 novembre. Retrouvez également un reportage du Nouveau Montpellier sur La Cagette.

« C’est qui le patron ? » : une brique de lait devient l’égérie d’un nouveau mode de consommation positif

Lassés de subir les pressions des multinationales et la chute constante du prix du lait, 51 entrepreneurs ont choisi de reprendre le contrôle de leur production. Avec l’aide des consommateurs ils créent la brique « c’est qui le patron ? ».

La crise du lait se poursuit en France et les producteurs peinent à faire entendre leurs revendications auprès des grandes multinationales. Après l’affaire Lactalis qui refusait de payer les entrepreneurs au juste prix en août dernier, Nicolas Chabanne décide de prendre le taureau par les cornes. Président du collectif « Les Gueules Cassées » qui milite contre le gaspillage alimentaire depuis sa création en 2014, il crée la marque « c’est qui le patron ? ». Un deuxième volet d’action qui entend tourner le dos aux grandes firmes alimentaires pour redonner le pouvoir aux producteurs et aux consommateurs.

La brique de lait, chef de file de la marque

La brique de lait « c’est qui le patron » est le premier produit de la marque. En août dernier, plus de 6000 consommateurs ont répondu à un questionnaire en ligne afin d’établir son cahier des charges. Ils ont ainsi voté pour un produit d’origine 100% française, garantissant une traçabilité optimale, sans OGM et issu de vaches élevées en pâturage 3 à 6 mois dans l’année. Chaque critère correspondant à un coût fixe, les consommateurs ont également défini le prix de vente de la brique.

Commercialisée à 99 centimes, les consommateurs semblent disposés à payer un peu plus cher leur brique de lait afin de soutenir les producteurs et assurer la pérennité de leur activité.

« #cestquilepatron ? Ça vaut le coup de mettre quelques centimes de plus pour avoir un produit de qualité, dont on connaît tout et qui ne floue pas les producteurs. Belle initiative ! », utilisateur de Twitter.

Rémunérés au juste prix, les entrepreneurs toucheront désormais 39 centimes par litre de lait vendu contre les 25 ou 26 qu’ils perçoivent actuellement de la part des multinationales. Une situation alarmante qui contraint les producteurs à travailler à perte.

« #lamarqueduconsommateur : et si c’était ça l’avenir ? #cestquilepatron ? Pour Moi c’est une réelle révolution qui devra guider nos achats ! », utilisateur de Twitter.

Disponible dans les Carrefour de Paris et de la région Rhône-Alpes depuis le lundi 17 octobre, la brique sera vendue dans tous les Carrefour de France à partir du 2 novembre 2016.

Après le lait, la marque souhaite soumettre d’autres produits aux votes des consommateurs. Prochainement, les français pourront se rendre sur le site afin d’établir le cahier des charges d’un jus de fruit ou encore d’une pizza.

La brique de lait s’invite sur les plateaux politiques

Le lait « c’est qui le patron ? » a fait irruption dans l’Émission politique du jeudi 21 octobre grâce à l’intervention d’Alexandre Jardin, fondateur du mouvement citoyen collaboratif « Bleu Blanc Zèbre ». Une promotion inattendue et bienvenue pour la marque qui privilégie une communication de réseaux afin de faire des économies sur le prix de vente du produit.

Invité de l’émission, Alexandre Jardin critique le programme politique du candidat à la primaire, Bruno Le Maire. Un texte de 1012 pages qu’il juge incompréhensible pour la plupart des français. « Vous avez écrit une brique, je vous en apporte une autre », a-t-il lancé en dégainant la fameuse brique de lait.

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Tandis que Bruno Le Maire se targue d’être proche des français, Alexandre Jardin prend le parfait contre-pied. Il dénonce l’élitisme du candidat et son incapacité à répondre aux problèmes du peuple. Désormais ce sont les « citoyens qui fabriquent les solutions » comme le démontre la création de la brique de lait « c’est qui le patron ? ».

« Les français ont des compétences. Cette France qui existe, elle veut compter, elle n’en a plus rien à foutre qu’une élite écrive 1012 pages pour penser à sa place », Alexandre Jardin.

Plus qu’un mode de consommation alternatif, la marque « c’est qui le patron ? » est le fruit d’une action politique, citoyenne et concrète, contre l’inactivité des puissances dirigeantes.

Extrait de l’Émission politique diffusée sur France 2, le jeudi 21 octobre 2016. Débat entre Alexandre Jardin et le candidat à la primaire de la droite et du centre, Bruno Le Maire :

Naturels ou biodynamiques : des vins plus bio que bio

OGM, pollution, maladies : l’agriculture conventionnelle est plus que jamais remise en question. Malgré un succès commercial indéniable, le vin bio ne fait pas l’unanimité auprès de tous les vignerons. Plus traditionnels et parfois saugrenus, les vins biodynamiques et naturels se veulent « plus bio que bio ».

Chez les «bio» aussi, on a le goût de la nuance. À côté du vin bio, produit conformément à une réglementation européenne, d’autres types de vins issus de l’agriculture biologique séduisent le palais des aficionados : les vins naturels et les vins biodynamiques. Moins présents dans les rayons des supermarchés, ces concurrents cherchent à faire valoir leurs différences. En biodynamie, par exemple, nombre de viticulteurs poussent le processus de culture et de vinification à coup de techniques qui peuvent surprendre le novice. Côté naturel, on parle de respect du terroir et d’absence de sulfites ajoutés.

C’est à partir des écrits de Rudolf Steiner, philosophe croate du début du siècle dernier, que la biodynamie prend sa source. Il y décrivait tout un lot de règles et autres préparations à base de bouse de vache, silice de corne, diverses fleurs et plantes aromatiques. Mixez le tout avec le suivi du calendrier lunaire et les positions zodiacales et vous obtiendrez un vin biodynamique.

Dans le monde du vin, la culture de la terre et la vinification sont deux choses totalement différentes. Dans le vin bio, c’est dans la cave que le bât blesse selon François Aubry, propriétaire du domaine de La Fontude, «le cahier des charges du bio a été allégé à cause de pressions industrielles». Dans les faits, une quarantaine d’additifs et intrants sont encore autorisés, et l’utilisation de sulfites est limitée à 25 % de moins que le conventionnel. «Le bio reste laxiste au niveau chimique», accuse Jacky Dumouchel, caviste montpelliérain.

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La biodynamie : l’ésotérisme au service du vin

Pour venir se rajouter aux labels bio dont les vignes doivent être certifiées au préalable, la biodynamie est encadrée par un cahier des charges, ainsi que des organismes de suivi (Demeter et Biodyvin). Un vin sérieux, mais entaché de critiques et moqueries : «Entre un vin bio et un autre issu de la biodynamie, je ne ressens pas de différences au niveau du goût», commente Frédéric Guy-Moyat, caviste toulousain. D’autres voient ces pratiques comme de la «pseudo science».

Hormis son penchant ésotérique farfelu, le principe est de favoriser la biodiversité dans les cultures. Encensée au début des années 2000 par de célèbres œnologues tels que Robert Parker ou Jancis Robinson, cette pratique viticole connaît une popularité grimpante. Selon François Aubry, «beaucoup se tournent vers la biodynamie pour une question de confiance. Il s’agit très souvent d’anciens consommateurs de bio qui cherchent plus de cohérence». D’une considération supérieure au bio selon les connaisseurs, la qualité organoleptique de la biodynamie fait toujours débat.

Le vin naturel ou l’amour du terroir

Si le vin naturel est obtenu à partir de vignes travaillées en agriculture biologique, il ne jouit pas d’un label. Seule une certification d’engagement est proposée par des associations (notamment « AVN » ou « vins SAINS »). La terre doit être vierge de toute chimie, la vigne ne reçoit aucun traitement ni désherbage, et la vinification se veut sans aucun intrant ni sulfites ajoutés. Selon Jacky Dumouchel, «moins on utilise de sulfites, plus on revient au vrai métier de vigneron. C’est avant tout un choix philosophique visant à retrouver l’expression naturelle du terroir». L’authenticité est au rendez-vous avec le vin naturel.

En bouche, la différence est plus nette : «Lorsque je bois du vin naturel, j’ai l’impression de boire du jus de raisin», ajoute Frédéric Guy-Moyat. À en croire Jacky Dumouchel, le concept fonctionne bien auprès des consommateurs : «ceux qui passent le cap sont conquis et ne reviennent que rarement vers du conventionnel». Le public visé par le naturel n’est pas le même pour François Aubry : «ce vin est davantage consommé par un public assez jeune et ouvert, qui n’a pas eu plusieurs décennies pour éduquer son palais avec du vin conventionnel ou bio».

Quant à l’obtention d’un label pour le vin naturel, la question n’est pas à l’ordre du jour pour les vignerons : «il s’agit avant tout de personnes créatives qui veulent travailler comme elles le souhaitent», affirme Jacky Dumouchel. Issu d’une fabrication «loufoque» ou plus conventionnelle, ce qui compte à la fin, c’est que le vin soit bon.

La monoculture de maïs dans le sud-ouest : modèle résilient aux changements climatiques ?

Alors même que la conférence sur le climat au Pérou se termine sans aucun engagement ferme, la France a récemment été touchée par des intempéries à répétitions dans le sud-est, par une érosion généralisée des côtes due à la montée des eaux, par des températures inhabituellement douces…etc. A l‘heure où les phénomènes météorologiques et leurs conséquences sont de plus en plus marqués et récurrents, les agriculteurs du Midi échappent pour l’instant aux aléas du climat grâce à leur modèle.

Jusqu’à présent, le climat s’est montré plutôt clément avec les céréaliers du sud-ouest.Néanmoins, même si ces producteurs ont évité les catastrophes notamment grâce à la monoculture du maïs, il convient de s’interroger sur la résilience à long terme de ce type de production. Simon Giuliano, ingénieur de recherche à l’Ecole d’Ingénieurs de Purpan Les chercheurs en agronomie s’inquiètent en effet de ces brusques changements météorologiques et souhaitent anticiper les conséquences directes pour les cultures et l’environnement. Entretien sur les bouleversements agricoles à venir avec Simon Giuliano, ingénieur de recherche à l’Ecole d’Ingénieurs de Purpan, située à Toulouse.

Quel est le contexte agricole du sud-ouest de la France ?

La plaine de Garonne présente généralement des sols à faible potentiel agronomique : caillouteux, peu profonds, et sujets à des remontées des nappes phréatiques notamment en hiver. D’une manière générale, leur fertilité est réduite du fait de leur faible taux de matière organique, compris entre 2 et 2,5%. Notre parcelle d’expérimentation s’appelle d’ailleurs « Terre blanque » (terre blanche), en opposition aux terres plus « foncées », plus riches en matières organiques et donc plus favorables à la culture.
Dans ce milieu, la monoculture de maïs domine le paysage agricole du sud-ouest sur les terres irriguées. Cette culture apparaît idoine de par ses besoins en chaleur, sa relative simplicité technique et sa rusticité : il est flexible quant aux conditions climatiques et au climat printanier. Elle est surtout la plus intéressante économiquement pour les exploitants agricoles du fait de sa rentabilité à l’hectare importante. Cette culture représente environ 70 % des terres irriguées en Midi-Pyrénées (environ 100 000 ha pour le seul maïs grain). Viennent ensuite des cultures telles que le sorgho ou le soja dont le renouveau s’amorce mais qui demande plus d’expérience.

Les aléas climatiques observés ces dernières années et particulièrement en 2014 menacent-ils cette agriculture ?

Plus que les changements, ce sont ses variabilités et ses imprévisibilités qui sont préoccupantes. Les événements exceptionnels : pluies orageuses, grêles ou sécheresses sont difficilement gérables. Les agriculteurs raisonnent à long terme : ils ont besoin de stabilité, et le climat actuel ne leur offre plus ce confort. D’une manière générale, la culture du maïs s’adapte bien au contexte afférent au fleuve Garonne et semble avoir quelques atouts pour faire face aux aléas. Du fait que le maïs soit implanté sur des terres déjà irriguées, les périodes de sécheresse peuvent être affrontées plus sereinement. D’autre part, le maïs est de nature rustique et résiste assez bien aux écarts de températures constatés ces dernières années. Le réchauffement n’altère pas sa culture car il pousse dès lors qu’il fait plus de 6°c et sa température optimale de culture va jusqu’à 30°C, à condition de pouvoir irriguer. Par ailleurs, ses semis en avril lui confère un net avantage sur les autres céréales. Contrairement au blé semé en octobre, il n’est pas contrarié par le climat hivernal : fortes précipitations menant fréquemment à des inondations des parcelles par remontées de nappes phréatiques ou au contraire sécheresses importantes comme en Languedoc-Roussillon. Les risques climatiques ne sont néanmoins pas absents : le printemps 2013 très pluvieux a particulièrement gêné les agriculteurs, notamment ceux en monoculture qui ont une pointe de travail très importante au moment du semis. De plus, les ravageurs du maïs, la pyrale et la sésamie, des papillons nuisibles à la culture, pourraient se développer plus largement et plus intensément. Cependant même si cette culture apparaît comme adaptée à ce contexte, elle n’en demeure pas moins éprouvante pour son environnement.

C’est-à-dire…

Comme toute monoculture, par absence de rotation des cultures (changements d’espèces végétales, de dates de semis, de travail du sol,…), elle a pour inconvénients d’augmenter la pression des ravageurs et mauvaises herbes et de poursuivre l’appauvrissement de sols déjà fragiles. D’autre part, elle nécessite une irrigation importante, notamment en période de sécheresse estivale. Ces besoins tendent à augmenter avec les sécheresses qui s’accentuent : 8 des 10 dernières années ont dépassé la référence en irrigation au niveau régional. Cette irrigation est en quelque sorte une « assurance » pour obtenir un rendement correct. Néanmoins, contrairement aux idées reçues, le maïs optimise bien mieux la ressource en eau que certaines céréales comme le blé.
De plus, des quantités importantes d’herbicides sont utilisées pendant la culture afin de lutter contre les mauvaises herbes qui prolifèrent du fait de la monoculture et de l’irrigation. Cette culture demande des quantités importantes d’engrais azotés très consommateurs en énergie.
L’effet combiné de l’irrigation, de l’usage des herbicides et d’engrais azotés provoque des dégâts environnementaux importants parce qu’elle fait pénétrer des résidus de phytosanitaires dans les sols et, in fine, dans les nappes phréatiques. Les molécules herbicides employées sur le maïs, tels le S-Métolachlore, sont la première cause de dégradation des eaux de surface à l’échelle du bassin Adour-Garonne.
Si le maïs s’avère rentable pour les agriculteurs, c’est aussi en partie parce qu’ils ne payent pas les externalités négatives engendrées par cette monoculture. De plus, cette culture a été encouragée par les politiques publiques du fait d’une prime supplémentaire accordée pour le maïs irrigué.

Quel sont les moyens qui peuvent être mis en œuvre pour essayer de réduire l’impact sur l’environnement de ce système de production ?

L’EI Purpan et l’INRA d’Auzeville sont en pointe dans la recherche sur le maïs. Sur le Domaine de Lamothe, cette problématique est l’enjeu de 5 hectares dédiés à des expérimentations destinées à réduire l’impact de cette agriculture sur l’environnement (eau, sol, air) sans pour autant en diminuer la rentabilité économique.
Vue d'ensemble de la station d'expérimentations de l'E.I Purpan
Il s’agit d’agir à la fois sur la dose des intrants (phytosanitaires, engrais) et sur les techniques de culture permettant de réduire l’impact de ces intrants. Ainsi, nos recherches portent sur des plantations de cultures intermédiaires (des légumineuses – trèfles, vesces, et des crucifères – moutardes, choux, navets- cultivées en mélange) – durant les mois où le maïs n’est pas en place. Les légumineuses permettent un enrichissement naturel du sol en azote. Elles captent effectivement l’azote de l’air avant de le réinjecter dans le sol et permettent de diminuer les quantités d’engrais, impliqués à la fois dans l’impact sur l’émission de gaz à effets de serre et sur la qualité de l’eau. Quant à la crucifère, son effet permettrait de contrôler certains ravageurs et maladies. Nous étudions également les effets du non-labour qui permettent une meilleure vie du sol et de ne pas perturber le processus de décomposition de la matière organique. A terme, ils permettraient une meilleure valorisation de la matière organique du sol. Le désherbage mécanique est lui aussi étudié en remplacement du désherbage chimique. Les exploitants économisent sur leurs moyens de production et l’environnement est davantage épargné. L’ensemble de ces techniques nous permet de diminuer jusqu’à 2/3 les quantités de produits phytosanitaires appliqués sur le maïs, tout en maintenant une rentabilité identique.
panneau_inra.jpg La pratique des cultures associées est développée par les agronomes

L’avenir risque justement d’être marqué par la raréfaction de l’eau. Comment faire face à cette de tension hydrique, mis dernièrement en exergue par l’affaire du barrage de Sivens ?

Le bon sens voudrait que les exploitants accentuent la diversification de leurs cultures et choisissent des cultures moins gourmandes en eau. Plus facile à dire qu’à mettre en pratique, les revenus des exploitants sont la conséquence directe de la productivité et de la rentabilité de leur culture et non pas de la préservation de l’environnement. D’autre part, la rentabilité des autres céréales n’est pas au niveau de celle du maïs. D’autres systèmes d’exploitation, augmentant la valeur ajoutée produite (agriculture biologique, circuit court,…), sont possibles mais ils demandent une refonte complète du système d’exploitation, ce qui n’est pas évident à réaliser pour un individu impliqué dans une filière.
Il ne faut pourtant pas les incriminer pour autant car ils répondent aussi à une demande du marché : le maïs est principalement utilisé pour servir de fourrage aux animaux et donc soutenir la filière viande. Ils sont aussi incités à poursuivre dans cette voie par l’Europe via des subventions. L’acte d’achat des citoyens est donc également central.
A terme, il faudrait une révision plus systémique en mettant en pratique des concepts tels que l’agroforesterie (mode d’exploitation associant des plantations d’arbres dans des cultures ou des pâturages) ou les cultures associées que nous cherchons à développer grâce à nos recherches sur le site de Lamothe.
Levée de maïs dans un système sans labour

« A Terre de Liens, la façon de travailler remet en cause des siècles de propriété privée »

Être locataire de la terre que l’on cultive, plutôt que propriétaire ? Fondée en 1998, l’association Terre de Liens (TDL) accompagne les citoyens désireux de mener des projets agricoles alternatifs : TDL leur loue les parcelles qu’ils exploitent dans le respect de l’environnement. Haut Courant a rencontré Marie-Laëtitia Melliand, coordinatrice de la Fondation Terre de Liens.

Haut Courant : Quel est votre rôle au sein de Terre de Liens?

Marie-Laëtitia Melliand: Je suis Coordinatrice de la Fondation Terre de Liens. Issue du Fonds de dotation Terre de Liens, créé en 2009, la Fondation, reconnue d’utilité publique depuis mai 2013, permet à Terre de Liens de recevoir des dons, ainsi que des donations ou legs de capitaux ou de terres.
Actuellement, nous sommes deux salariés au sein de la Fondation, le directeur, Jérôme Deconinck, et moi.
Nos missions sont principalement de faire connaître la Fondation à l’extérieur, de développer la collecte de dons, l’instruction de dossiers de legs ou de donation, la gestion des fermes détenues par la Fondation (rédaction des baux ruraux, la relation avec les fermiers, les travaux sur les fermes…) et plus largement la participation à la construction du mouvement Terre de Liens.

H.C : Les agriculteurs subissent une longue et violente crise économique. Terre de Liens propose-t-elle un modèle pouvant inverser la tendance?

M-L M : Terre de Liens propose à des porteurs de projet de leur mettre à disposition (bail rural) un outil de travail sous forme de terres agricoles et parfois de bâtiments et d’habitation, pour leur permettre une installation agricole sans avoir à s’endetter lourdement, sur une unité de production que nous jugeons économiquement viable.

tdl_bouteilles_c_boudes-gemonet_-2.jpg En très grande majorité, les fermiers de Terre de Liens font le choix de la commercialisation de leurs produits en vente directe ou de circuits courts. Tous sont en agriculture biologique, ce qui permet aussi une meilleure valorisation de leurs produits.
Enfin, un fermier Terre de Liens n’achète pas les terres et les bâtiments qu’il utilise mais restera locataire durant toute sa carrière. Leur endettement est donc moindre, et ils n’ont pas à mobiliser leurs capitaux dans du foncier. C’est d’ailleurs un des freins majeurs à l’installation agricole : trouver du foncier, puis être en mesure de l’acheter. Beaucoup de banquiers ne suivent pas, et s’ils le font, le taux d’endettement du fermier est souvent élevé. En effet, les prix du foncier ne cessent d’augmenter, liés à l’agrandissement, l’urbanisation, la spéculation.

La crise que connaît actuellement le monde agricole est pour nous largement intrinsèque au fonctionnement du modèle agricole moderne, qui pousse à la concentration et à l’agrandissement des exploitations, à l’industrialisation des méthodes de production, au développement des intermédiaires et des circuits de ventes longs, etc.

Pour autant, être fermier Terre de Liens ne prémunit évidemment pas des difficultés économiques.

H.C : En quoi le projet de TDL est-il une remise en cause de la tradition paysanne de rapport à la terre?

M-L M : Le « modèle traditionnel » repose sur la propriété privée. Classiquement, un paysan est souvent propriétaire d’au moins une partie de ses terres, et très souvent de sa maison d’habitation. Une fois sa carrière terminée, il reste bien souvent sur place, continue d’habiter la ferme tout en gardant parfois une parcelle de subsistance pour lui. Cela pose parfois des problèmes de transmission du lieu tant que la maison n’est pas libre ou que le fermier n’arrive pas à franchir le cap psychologique de la transmission. Cela les incite à louer à des agriculteurs déjà en place, donc alimente le cercle vicieux de l’agrandissement.

A Terre de Liens, nos fermiers sont locataires de l’ensemble de l’outil de travail, ferme, terre et bâtiments compris. Ils bénéficient d’un bail à carrière, qui leur garantit de pouvoir rester sur place jusqu’à la retraite.

Là où réside l’originalité du « modèle Terre de Liens », c’est que les fermiers doivent partir lors de leur retraite, et laisser la place au paysan suivant. L’ancien locataire doit donc avoir prévu un « après », mis de l’argent de côté pour sa retraite et ne peut pas compter sur la revente de ses biens ou de ses terres. Il est parfois difficile pour un paysan de partir de l’endroit où il a vécu et travaillé toute sa vie, mais cela fait partie du contrat. Nous essayons de faire de la pédagogie, mais notre façon de travailler remet tout de même en cause des siècles de fonctionnement basé sur la propriété privée.

H.C : L’association est propriétaire de nombreuses terres. Comment gérez-vous cela? Comment assurez-vous qu’il n’y ait pas appropriation par vous ou un agriculteur donné?

M-L M : La gestion quotidienne des terres est effectuée par les fermiers, nous n’avons pas notre mot à dire sur leur gestion et leurs choix économiques. Les seules contraintes sont d’ordre environnementales, car TDL ne signe que des Baux ruraux environnementaux (BRE) –un type de bail particulier avec clauses environnementales, notamment la certification en bio, biodynamie ou Nature et Progrès.
Bien qu’au fil du temps un paysan se sente de plus en plus « chez lui », il est locataire. TDL est avant tout un mouvement citoyen, qui regroupe plus de 10 000 personnes aujourd’hui, et beaucoup plus demain, nous l’espérons, donc nos terres sont une propriété collective ! Cela se traduit par des contacts entre les fermiers et les actionnaires et donateurs qui ont permis l’acquisition de leur ferme. Ainsi ils n’oublient pas que c’est bien grâce à la mobilisation citoyenne qu’ils ont pu s’installer.

H.C : Comment tout un chacun peut-il participer à votre action et plus généralement au sauvetage de l’agriculture?

M-L M : Il y a plusieurs moyens de passer à l’action :

tdl_pain_c_boudes-gemonet_-2.jpg – Par l’épargne solidaire : il est possible de souscrire des actions de notre société, la Foncière Terre de Liens – notre outil d’acquisition du foncier – pour 103 euros par action. Cet argent, qui pourra être récupéré par l’actionnaire selon des modalités définies à l’avance, sera mobilisé pour l’achat de domaines agricoles (terres, bâti) considérés comme viables, sur lesquels un porteur de projet a émis le souhait de s’installer et de devenir fermier de Terre de Liens. L’instruction des dossiers, qui est un processus long, est suivie par chaque association Terre de Liens dans les régions.

 Par le don, le legs, la donation : grâce au nouvel outil qu’est la fondation, il est possible de faire un don, un legs ou une donation et de bénéficier d’avantages fiscaux. Les dons d’argent servent au fonctionnement de la fondation et du mouvement, voire parfois à acheter des fermes. Les donations et legs de domaines agricoles sont évidemment les bienvenus !

 en participant à la vie de son association locale – Terre de Liens est présent dans toutes les régions – par l’adhésion, l’implication bénévole ou la participation au « groupe local Terre de Liens ».

Il y a des moyens d’implication pour chacun!

Des consommateurs à la découverte du premier « drive-fermier » en Gironde

Le 13 octobre dernier, le tout premier « drive-fermier » a ouvert ses portes à Eysines, dans la banlieue bordelaise. Original, le concept propose aux consommateurs de faire de l’e-commerce avec des produits agricoles exclusivement girondins.

Vendredi, 14h55, Véronique, jeune femme d’une quarantaine d’années, arrête sa voiture devant un hangar drive-fermier à Eysines, dans la banlieue bordelaise. À 15 heures pétantes, elle repart avec le sourire et le coffre plein. Cinq minutes, c’est le temps record qu’il lui a fallu pour faire son marché. Deux jours avant, elle avait commandé et payé ses produits agricoles sur internet. Nombreux sont ceux qui, comme Véronique, ont été séduits par cette nouvelle forme de cybermarché version agricole.
Ce concept, le drive-fermier, initié en partie par la Chambre d’Agriculture de la Gironde, permet de simplifier la corvée des courses pour le consommateur qui connait désormais l’origine de ses achats.

«C’est un énorme gain de temps»

Plus besoin de passer des heures en grande surface, d’aller chercher sa côte de bœuf chez Dédé le boucher, de faire une escale chez le viticulteur de la bourgade voisine pour acheter sa bouteille de rouge, puis de finir par quelques kilomètres supplémentaires pour acheter ses légumes au marché. Avec le drive-fermier, le marché se fait dorénavant en ligne, la production locale est relancée et en prime, cela permet de faire une action écologique en diminuant les transports de distribution. Faire ses courses sur le web et venir récupérer ses marchandises à la façon du MacDrive en plus sain, c’est selon Véronique «très pratique, car on peut passer commande à n’importe quelle heure, à minuit si on veut, et ça ne coûte pas plus cher qu’à la ferme». Chaque semaine, les clients ont jusqu’au mercredi minuit pour passer leur commande en ligne. Ils peuvent ensuite venir récupérer leurs marchandises directement acheminées par les producteurs concernés le vendredi après-midi entre 14h et 19h à la Sica maraîchère d’Eysines[[La Sica maraîchère bordelaise est une coopérative de producteurs. Adresse : 44 rue du 19 Mars 1962, 33320 Eysines]], ou prochainement au château des Iris à Lormont. «C’est un énorme gain de temps ! On arrive, on se gare, les producteurs chargent les coffres de voiture avec les cagettes déjà prêtes, et le tour est joué!», rapporte Bernadette, une cliente très enjouée. « Et comme on achète directement aux agriculteurs, les prix sont moins chers qu’en grande surface».
Avec une vingtaine de producteurs partenaires, le choix des produits est très large et plutôt original. En plus des fromages olfactivement corsés mais très savoureux, des conserves de foie gras, des vins bordelais et des légumes, le consommateur peut aussi acheter des produits atypiques tels que des physalis [[Plante de la famille des Solanacées, dont une espèce, acclimatée en France, donne un fruit jaune. On l’appelle aussi « amour en cage »]], du safran ou encore du civet de chevreau.
Clients satisfaits, ambiance champêtre et chaleureuse, les vendredis sont aussi l’occasion d’échanger avec les producteurs. Au final, chacun y trouve son compte, avec d’un côté, le client qui «fait une bonne affaire en mangeant sain et en faisant travailler l’économie locale», selon Véronique, et le producteur qui adapte ses quantités à la demande. «Cela nous permet de limiter les invendus», explique Marlène Serrano, productrice de fromages de chèvres. Lassée des visites de journalistes dans sa petite ferme pourtant encore inconnue il y a quelques mois, elle accepte tout de même de nous présenter les véritables productrices de ses fromages – ses chèvres – et de nous parler de sa démarche. «C’est une autre clientèle que l’on touche. Si sur les marchés la majorité de nos clients sont des ruraux, il s’agit plutôt de citadins avec le drive-fermier.» Maintenant, grâce au drive-fermier, Véronique, qui admet acheter régulièrement des surgelés, n’a plus d’excuse pour ne pas consommer local.

http://www.drive-fermier.fr/33/

Les Restos du Cœur de l’Hérault misent sur les circuits-courts

Cette année, l’association héraultaise mène un projet inédit en France en s’approvisionnant en fruits et légumes locaux. Une démarche dont l’objectif est double : améliorer la qualité des produits distribués aux plus démunis, et tenter de venir en aide à un secteur agricole en crise.

Le 28 novembre dernier, a débuté la 27ème campagne d’hiver des Restos du Cœur. Dans un contexte où la crise économique et sociale frappe de plus en plus de français, l’association se prépare à accueillir, encore cette saison, un nombre grandissant de bénéficiaires de l’aide alimentaire. Sur les trois dernières années, il a fallu approvisionner pas moins de 160000 demandeurs en plus, soit une augmentation cumulée de 21% par rapport à 2007. L’Hérault n’échappe pas à ce triste tableau. Face à ce phénomène, l’association du département n’a pourtant pas hésité à se lancer dans ce nouveau processus d’avitaillement.

Des produits de meilleure qualité pour plus de cohésion sociale

L’an passé, une équipe de l’unité « Innovation », de l’INRA*- Montpellier, a mené une étude sur la possibilité d’intégrer, dans l’approvisionnement de l’aide alimentaire, des produits directement issus de l’agriculture locale. Un projet qui, d’emblée, a séduit les Restos du cœur de l’Hérault. La première motivation qui a nourri ce projet est qualitative. Cette initiative permettrait une amélioration de la qualité nutritionnelle de l’alimentation pour les plus précaires. Françoise Vezinhet (présidente départementale de l’association) insiste d’ailleurs sur l’importance de cet aspect. « Auparavant, nous étions approvisionnés par des grossistes au niveau national. Mais avec des circuits courts, nous allons pouvoir miser davantage sur la fraîcheur des produits. Pour nous, il était essentiel de faire une offre de meilleure qualité aux personnes que nous accueillons ». L’un des trois objectifs fondateurs de cette initiative, énoncée dans le rapport de l’INRA, concerne en effet, « la construction d’une cohésion sociale ». Autrement-dit, la possibilité pour tous, de se nourrir plus sainement.

Mais comme le souligne ce rapport, « il ne suffit pas de distribuer des fruits et légumes pour que ceux-ci soient consommés ». Par l’insuffisance des savoir-faire culinaires, et les aprioris véhiculés par la société, certains produits, peu connus, sont mal acceptés ou souvent jugés trop difficiles à préparer. Dans certains cas, les bénéficiaires des Restos du cœur ne disposent même pas de lieux de stockage ou d’ustensiles de cuisine adéquats. Face à ces freins économiques et sociaux, il est donc primordial de sensibiliser et pouvoir être à l’écoute des individus, à qui seront distribués ces fruits et légumes frais.

Françoise Vezhinet, présidente des Resto du Cœur de l’Hérault

Françoise Vezinhet, présidente des Restos du Cœur de l’Hérault

Une perspective de nouveaux débouchés pour les producteurs locaux

La deuxième raison qui a motivé la mise en place de ce nouveau mode d’approvisionnement est davantage éthique et solidaire. Par ce processus, les Restos du Cœur de l’Hérault soutiennent les producteurs locaux. Actuellement, la situation de certains producteurs de fruits et légumes est très préoccupante. Entre les crises économiques à répétition, les mauvaises conditions climatiques de cet été, et la méfiance qu’a engendrée la bactérie E. Coli auprès des consommateurs, une grande partie des agriculteurs de ce secteur, se retrouvent dans une situation financière critique. Françoise Vézinhet explique ainsi qu’« en arrière-plan de cette démarche, il y a l’idée de pouvoir absorber certaines productions qui n’arrivent pas à trouver un marché ailleurs ».

Les productions locales peinent parfois à trouver des débouchés, et le travail des producteurs n’est pas toujours rémunéré convenablement. L’association départementale espère donc proposer à ce secteur agricole, une solution alternative et rentable. Pour ce faire, les prix ont été fixés à l’avance, et, l’achat de produits est garanti tout au long de cette campagne d’hiver. Ces prix n’ont cependant pas pu être modifiés par rapport à ceux établis par l’association nationale, qui continue de s’approvisionner auprès d’un grossiste. La présidente des Restos du cœur de l’Hérault reste ainsi très prudente quant à la pérennité de cette démarche, et aux bénéfices que vont en tirer les agriculteurs. « A l’heure du bilan, il faudra voir si on a rémunéré les producteurs à un niveau suffisamment correcte. Aujourd’hui, on est vraiment dans une phase d’expérimentation». Elle juge bon de préciser qu’il faut «un approvisionnement où tout le monde est gagnant. A savoir, un nouveau débouché rentable pour les producteurs locaux, et, des produits de meilleure qualité et bien acceptés par les personnes accueillies dans les centres. »

L’association nationale des Restos du Cœur suit cette expérimentation de très près. Elle veut d’ailleurs être associée à l’évaluation et la validation de cette démarche. Si cette initiative s’avère être couronnée de succès, ce mode d’approvisionnement local pourrait être étendu à d’autres départements, et pourquoi pas, à terme, à d’autres réseaux d’aide alimentaire. Un projet d’autant plus prometteur qu’il permet d’améliorer l’impact environnemental, en réduisant le bilan carbone lié au transport de ces produits.

« Des solutions locales pour un développement global », des clés pour l’avenir

Du 7 au 13 avril est diffusé le documentaire « Des solutions locales pour un développement global » de Coline Serreau à l’Utopia de Montpellier. Au menu de ce film résolument optimiste : la dénonciation des méfaits de l’agriculture intensive et la volonté de montrer qu’une autre voie est possible.

Une semaine avec Europe Ecologie

Pendant une semaine, Haut Courant a suivi Europe Écologie dans la dernière ligne droite de la campagne des régionales : réunions, meetings, débats participatifs, rencontres avec les différents candidats. Haut Courant vous donne ainsi un aperçu du programme d’Europe Écologie ainsi que de ses différentes figures.

Fermetures des prisons agricoles au Canada : la fin d’une époque

En février 2009, le gouvernement canadien a annoncé son désir de fermer les « prison farms », ces établissements pénitentiaires dans lesquels les prisonniers produisent eux-mêmes leur nourriture. Le dernier établissement de ce type sera mis hors-service d’ici la fin 2010. Retour sur un système pénal longtemps très répandu en Amérique du nord mais peu connu en Europe.