La grogne des étudiants québécois résonne jusqu’en France

Mardi 22 mai, de nombreux parisiens sont venus exprimer leur soutien aux étudiants québécois, à l’occasion du centième jour de grève outre Atlantique. L’objectif: dénoncer la politique libérale et le mépris du gouvernement envers le peuple. Le mot d’ordre: obtenir le retrait de la loi 78, mesure « d’exception » votée par le parlement pour tenter de casser cette révolte citoyenne.

Depuis mi-février, la province canadienne connaît la plus forte grogne estudiantine de son histoire. Les jeunes protestent contre la décision du premier ministre Jean Charest d’augmenter de 82% en cinq ans les frais d’inscription dans les universités. Ils étaient plus de 200 000 manifestants dans les rues de Montréal au mois de mars. Ces derniers jours la révolte s’est durcie et s’est étendue à l’ensemble de la société québécoise.

Dépassé par l’ampleur des évènements, le pouvoir en place fait preuve d’impuissance et d’indifférence. Borné, il refuse de revenir sur sa décision. Aucune négociation significative n’est entamée avec les syndicats étudiants. Le seul compromis consenti par le premier ministre est de fixer une hausse plus forte de ces droits de scolarité sur une période plus longue. Une proposition naturellement rejetée en bloc par les grévistes. Enlisé dans ce mouvement qualifié de « printemps d’érable » par les médias, Jean Charest fait voter à la hâte une « loi d’exception », le 19 mai. Un véritable bond en arrière sur les droits et la liberté d’expression des jeunes québécois.

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Ce dispositif répressif prévoit notamment de punir les étudiants récalcitrants par une amende de 1000 à 125000 dollars, par jour de « rébellion ». Sur place, la résistance s’organise et continue de faire front face aux arrestations policières et autres dérives qu’engendre les mesures prises par le pouvoir en place. Pour cette date symbolique du 22 mai, des dizaines de milliers de manifestants arpentent le bitume des principales villes de la province canadienne. Face à cette levée de bouclier, le gouvernement est à nouveau au pied du mur. La colère est telle que certains Français vibrent désormais en chœur avec les révoltés québécois.

Soutenir et célébrer la mobilisation de ce printemps d’érable

Les maquillages et carrés de tissus rouges, signes de ralliement des manifestants du printemps d’érable, dominent la foule rassemblée dans le centre-ville de Paris. Les pancartes et autres étendards arrivent au compte-goutte et se dressent sur une place Saint-Michel peu à peu prise d’assaut. L’heure des discours au mégaphone et des ferveurs collectives a sonné. Philippe, un thésard québécois vivant en Ile de France, prend la parole et dresse le portrait de ses camarades grévistes. Il encourage les manifestants à exporter la lutte en France (lien vidéo).


Rassemblement parisien du 22 mai en soutien aux… par masterjournalisme08

Parmi les participants à ce rassemblement de soutien aux étudiants, Louise Beaudoin. Cette figure politique du Parti Québécois, opposée à la politique libérale exercée par le gouvernement actuel se sent tiraillée entre «« espoir »» et « indignation ». « Cette jeunesse qui se révolte incarne un signe fort pour notre province. Au moment où je vais me retirer de la vie politique, je suis heureuse de constater que cette nouvelle génération se soulève. Mais je suis scandalisée par l’adoption d’une loi qui va à l’encontre des droits fondamentaux, à commencer par la liberté de s’exprimer. » La députée de la circonscription de Rosemont n’hésite pas à tirer à boulet rouge contre le pouvoir en place. « La résolution de ce conflit ne peut se faire que par la médiation, il faut établir un dialogue et non passer en force une loi-matraque. Il faut trouver une solution politique et non juridique. C’est sur ce point que se trompe le gouvernement Charest. Jusqu’à présent, les dirigeants n’ont pas trouvé de solution car ils n’en ont pas cherché ».
Même son de cloche pour Samuel, ancien étudiant en cinéma à Montréal. « Il est frustrant de voir que le gouvernement n’a jamais vraiment voulu s’asseoir avec les étudiants. Cette indifférence de Jean Charest et ces lois qui donnent un fort pouvoir à des policiers qui en usent et, j’ai l’impression, en abusent, donnent raison aux gens de descendre dans la rue. ».

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« Chaque génération a son évènement politisant »

Si les manifestants parisiens se sont réunis pour dénoncer la crise politique et sociale que traverse le Québec, ils sont également là pour célébrer l’union de tout un peuple face à l’adversité. Le champ lexical de la dimension fédératrice du printemps d’érable se décline dans chaque discours et se lit sur toutes les lèvres. C’est ce que clame Joseph. Le jeune homme a étudié la littérature à Montréal l’an passé. « Cette révolte est inouïe. C’est un mouvement d’une ampleur inédite là-bas. Si elle continue à s’unir comme c’est aujourd’hui le cas, cette génération est capable de grandes choses. Je voudrais adresser ce message: Il faut rêver Québec, il faut rêver ! ».

Sur la place Saint-Michel, l’enthousiasme fuse. Beaucoup estiment qu’une page est en train de se tourner. La lutte a désormais atteint un point de non-retour. L’ensemble de la société en sera changée, bouleversée. Beaucoup sont convaincus que l’implication citoyenne des jeunes en sortira renforcée. A en croire Christophe, de passage à Paris et étudiant en science politique dans la ville de Québec, « Chaque génération a son évènement politisant. Aujourd’hui nous assistons à l’éveil ou plutôt au réveil d’une jeune génération, qui pour la première fois essaie de comprendre la vie politique et a l’envie d’exprimer ses idées».

Haut Courant sur Radio Campus : le gaz de schiste

L’exploration du gaz de schiste suscite débats et controverses en France. L’occasion pour l’équipe d’Hautcourant de revenir sur les différents niveaux de mobilisation. Que ce soit au Québec, à l’Assemblée nationale, dans la communauté scientifique ou dans le sud de la France, la prospection du gaz de schiste soulève la résistance des citoyens et des collectifs, avec en tête de file José Bové. Si la suspension provisoire des permis d’exploration, décidée par la ministre de l’environnement Nathalie Kosciusko-Morizet, ralentit le processus d’exploration, la colère et la mobilisation de l’opinion publique s’organise.

Au sommaire de l’émission du 15 février 2011

 Retour sur le film Gasland

 Mobilisation au Québec

 Réactions de la ministre de l’écologie Nathalie Kosciusko-Morizet à l’Assemblée nationale

 Interview de José Bové, eurodéputé écologiste

 Interview de Jean-Claude Favier, membre d’Attac à Montpellier

 Interview de Françoise Elbaz Poulichet, chercheuse et chimiste à l’université Montpellier 2

 Mobilisation des collectifs à Montpellier

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Annick, une étudiante québécoise représente la francophonie à Vancouver

Aux Jeux Olympiques de Vancouver, la jeunesse francophone est bien représentée. Annick, étudiante québécoise à l’université Laval, en Études Internationales et Langues Modernes, spécialité Développement du Tiers-Monde, est très impliquée dans le monde associatif et la vie universitaire. Elle a dernièrement participé aux Jeux du Québec et aux Jeux de la francophonie canadienne. C’est tout naturellement qu’elle a rejoint le Conseil Jeunesse Francophone de la Colombie-Britannique pour vivre la fièvre des Jeux Olympiques. Elle témoigne pour Hautcourant.

Dans quel cadre se déroule ta participation aux Jeux Olympiques de Vancouver ?

Je travaille pour le Conseil Jeunesse Francophone de la Colombie-Britannique en tant qu’agente de projets pour les Olympiques. Notre association avait deux projets pour les Olympiques.

Le premier était d’accueillir une délégation pan-canadienne de jeunes francophones provenant des différentes provinces et territoires du Canada. Pendant une semaine, cette délégation, composée d’une vingtaine de jeunes, a fait du bénévolat pour la Place de la Francophonie sur Granville Island. Ces jeunes étaient chargés de l’accueil des visiteurs, de l’accueil des artistes, de la logistique, de la circulation, etc… Ils ont également visité le quartier du Downtown Eastside, connu pour être le quartier des sans-abris, ici, à Vancouver. Ils ont aussi assisté à plusieurs spectacles offerts à travers la ville dans le cadre des Olympiques. Leur séjour était de huit jours. L’expérience semble avoir été inoubliable. Des amitiés se sont créées et ils rapportent de nombreux souvenirs de cette aventure…

Le second projet, mon projet, est l’organisation et la participation à une parade costumée. Elle se déroule chaque soir, sur Granville Island, juste avant les spectacles sur la scène principale de la Place de la Francophonie. La parade est dirigée par une compagnie de Rhode Island (USA) qui se nomme Big Nazo. Ils sont ici avec six de leurs membres et une soixantaine de costumes d’extraterrestres pour envahir Granville Island et inviter les touristes à venir assister aux spectacles francophones.

Peux-tu m’en dire un peu plus sur cette parade ?

Une quinzaine de jeunes provenant des quatre écoles francophones de la grande région de Vancouver fait partie chaque soir de la Parade Big Nazo. D’autres jeunes d’écoles d’immersion française, des bénévoles et beaucoup d’autres personnes prennent aussi part à cette parade monstrueuse ! Elle est accompagnée d’une fanfare, toute vêtue de bleu et de blanc, les couleurs de la francophonie.

C’est une parade complètement folle, avec des personnages drôles, colorés, amusants. Les enfants y assistant ont toutes sortes de réactions : ils sourient, ils rigolent, ils pleurent ou sont quelques fois effrayés. La parade rend les gens heureux, ils dansent avec nous. Chaque soir, c’est vraiment un moment magique.

Quel est le rôle du Conseil Francophonie Jeunesse de la Colombie-Britannique ?

Représenter la jeunesse francophone de la Colombie-Britannique dont Vancouver est la principale métropole. Cette jeunesse francophone représente une minorité dans toutes les provinces canadiennes. Même si beaucoup de gens parlent le français, peu de jeunes l’utilisent à l’extérieur des cours ou de la maison. Peu d’activités sont offertes en français. La vie se passe majoritairement en anglais. Les langues parlées ici sont davantage le mandarin, l’indien… Le français est souvent loin derrière. Les jeunes ne sont pas incités à parler le français et ne s’identifient pas particulièrement à la culture francophone. Cette dernière n’est pas vraiment mise en évidence à Vancouver.

As-tu rencontré des Français à Vancouver ?

Ah oui ! Il y a beaucoup de Français composant la population francophone ici. Où je travaille, 50% au moins sont français. Mais, dans mon association, nous sommes tous québécois. J’avais déjà des amis québécois ici, mais je me suis aussi fait quelques amis mexicains et j’ai un super coloc français ! Je lui ai fait découvrir la culture québécoise qu’il n’a pas « kiffé » à la base. Il a eu des difficultés à comprendre notre accent (rires) ! Mais j’ai un peu réussi à le lui faire aimer et il rencontre de plus en plus de québécois. Au final, je ne crois pas qu’il nous déteste (rires) !

Pourquoi as-tu souhaité participer à ce projet ?

Vivre les Olympiques dans son pays est une expérience unique ! Vancouver est une ville qui m’a toujours intriguée. J’ai souvent entendu parler de la ville et de la mentalité des gens d’ici. J’avais envie de vivre à Vancouver, en plus de vivre des Olympiques. J’avais également envie d’acquérir une expérience concrète. Prendre une pause dans mes études pour mettre en application ce que j’ai appris et voir ce que je peux apporter à la jeunesse francophone ici. C’est un peu comme un stage rémunéré. Cela me permettra de voir si je suis vraiment faite pour travailler avec des jeunes. Je souhaite pratiquer un métier en rapport avec les adolescents qui tend vers l’enseignement, mais hors du milieu scolaire traditionnel. Cet emploi est l’occasion parfaite pour moi de me tester !

Quelles sont tes impressions sur les Jeux Olympiques ?

Les Jeux sont définitivement rassembleurs. Je n’ai jamais vu autant de drapeaux canadiens portés par autant de gens en même temps. Ils font la queue pour acheter des articles made in Canada pour afficher leur fierté nationale. Ce phénomène est surprenant pour moi qui vient du Québec, et qui voit rarement le Canada autant « affiché ». Dans les bars et restaurants du centre ville, on chante constamment le « Oh Canada » et les gens lèvent leur verre au pays et à l’équipe canadienne. Puis, Vancouver est juste une trop belle ville !

En arrivant, j’étais complètement contre cet esprit olympique. J’ai suivi de près les mouvements anti-olympiques. Voici quelques liens qui en disent long sur la résistance aux Jeux ici à Vancouver :

 http://vancouver.mediacoop.ca/

 http://contrelesolympiquesde2010.anarkhia.org/?p=452

 http://www.thefiveringcircus.com/ (c’est un film gratuit et super intéressant pour connaître les raisons anti-olympiques)

Comment sont vécus les Jeux Olympiques par la population locale ?

La population locale semble divisée. D’un côté, les gens sont fiers de pouvoir montrer au monde entier leur ville. Vancouver est magnifique, la température est incroyable, une ville où il fait bon vivre. Les gens sont fier que les Jeux se déroulent dans leur ville, ils sont impliqués comme bénévoles pour accueillir le monde. On voit des drapeaux de tous les pays partout dans les vitrines, les blocs appartements, dans les commerces, etc.

De l’autre côté, ils considèrent les Jeux comme une nuisance au fonctionnement de la ville. Des routes et des ponts ont été bloqués, certains trajets des transports en commun ont été modifiés. Ils sont toujours pleins. Les gens font la fête constamment. Certains consomment trop et font des conneries en public.

Les plus opposés aux Jeux sont les communautés autochtones du Canada, les sans-abris, les anticapitalistes…

Toi qui t’intéresse aux Premières Nations, sais-tu comment elles sont représentées ? Comment vivent-elles les Jeux ? Est-ce que cela leur pose un problème ?

Les Jeux prétendent donner toute la place aux Premières Nations. Les mascottes sont inspirées de légendes autochtones, le symbole des Olympiques est l’Inukshuk (ndlr, un inukshuk est une construction de pierres adoptant une forme humaine élaborée par les peuples inuit et yupik dans les régions arctiques d’Amérique du Nord), il y a un Pavillon des Autochtones, une organisation des Quatre Nations Hôtes et leur représentation lors de la Cérémonie d’ouverture était importante.

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Mais, selon moi, c’est de la poudre aux yeux. Car même si l’on parle d’une meilleure situation des Premières Nations dans l’ouest du pays, comparativement à l’est, les problèmes des communautés autochtones sont existants et alarmants. J’ai assisté à une discussion sur la jeunesse avec la gouverneure générale du Canada Michaelle Jean et plus de la moitié des 500 jeunes présents étaient des jeunes des Premières Nations. Leurs problèmes sont encore plus que graves, importants et aucunement pris en considération. L’image donnée des Premières Nations aux Olympiques tente de montrer un respect extrême envers les peuples autochtones alors que l’on sait très bien que le Canada est loin derrière concernant les droits humains envers ces populations.

Julie DERACHE

A Québec, Bonhomme fait son carnaval

Du 29 janvier au 14 février 2010, les rues enneigées de Québec s’animeront au rythme du carnaval. Souvent méconnu à la faveur de ceux de Venise ou de Rio, il est pourtant le plus grand carnaval d’hiver au monde. Avec plus de visiteurs chaque année, il est devenu le rendez-vous inévitable des carnavaleux en Amérique du Nord qui profitent d’un grand nombre d’activités familiales, sportives et traditionnelles. Destination la Belle Province, Hautcourant vous fait découvrir ce carnaval atypique.

Depuis 1955, Québec célèbre l’hiver et ses plaisirs avec son grand carnaval. Chaque année, le Carnaval de Québec propose un savant mélange d’activités traditionnelles et d’innovations. Il invite les spectateurs à sortir dans les rues pour suivre une course en canot sur un Saint-Laurent prit dans les glaces, participer à une course de chiens de traîneaux ou encore s’initier à la sculpture sur glace.

Avec le thème « Le Carnaval vous fait danser!« , la 56e édition met la danse et la musique à l’honneur. Du 29 janvier au 14 février 2010, Bonhomme Carnaval, la mascotte, invite chacun à vivre l’effervescence carnavalesque au rythme de spectacles de danse en tout genre : breakdance, cheerleading, salsa, arts martiaux, folklore, entre autres. Cette année, avec un budget record évalué à plus de dix millions de dollars, le Carnaval de Québec a encore élevé le niveau de sa programmation. Les sensations fortes seront au rendez-vous : deux nouvelles glissades illuminées de plus de 120 mètres seront notamment aménagées.

De plus, depuis l’année dernière, Bonhomme est à la page. Il a fait son apparition sur Facebook en créant sa page « Carnaval de Québec« . Vous pouvez y lire les dernières nouvelles sur la grande fête hivernale québécoise.

Voici quelques un des moments forts et incontournables du Carnaval de Québec.

La Grande virée, une folle équipée

Enfant, qui n’a jamais rêvé de faire de faire du traîneau à chiens ? Avec la Grande Virée, tous les amoureux de la montagne et des huskies se régaleront. Le long de la rue Saint Louis et de Grande Allée, sur un circuit de six kilomètres, se tient une course d’attelages de chiens de traineau. Au départ et à l’arrivée du Château Frontenac, une quarantaine d’attelages participent à la course à laquelle assistent plusieurs milliers de spectateurs. Après la course, il est aussi possible de faire un petite caresse à des toutous bien fatigués.

Palais et maison de glace, des demeures éphémères

S’il est une chose que les Québécois aiment faire, ce sont des bâtiments en glace ou en neige. Le Carnaval est l’occasion rêvée pour en réaliser. Outre les bars de glace longeant Grande Allée, des petites sculptures ci et là, la Maison de Glace Natrel et le Palais de Glace sont de véritables institutions.

La Maison de Glace construite sur les Plaines d’Abraham, donne lieu à des jeux de glissades pour les enfants mais est aussi un très beau point de vue sur les festivités.

Chaque année, un somptueux château de glace illuminé est construit face au Parlement. Ce, en quelques semaines avec près de 6 500 blocs de glace. En 2008, 270 tonnes de glace ont été utilisées pour sa réalisation. Depuis 1955, le Palais de glace, qui peut être visité par les carnavaleux, est construit afin de « loger » Bonhomme.

L’international de sculpture sur neige, l’art se fait partage

Au Carnaval de Québec, célébrer l’hiver, c’est aussi faire œuvre d’art. A différents endroits de la ville, naissent par-ci, par-là, des sculptures de neige. En se promenant sur les Plaines d’Abraham, haut lieu historique, le spectateur peut contempler une exposition internationale de sculptures sur glace. Chaque année, des équipes venues du monde entier y participent. Citons, entre autres, les États-Unis, la Suède, Singapour, le Venezuela, la France… Au détour des sentiers enneigés, le promeneur peut également voir des sculptures de chacune des provinces du Canada, ou encore de chaque région du Québec. De jour ou de nuit, le spectacle vaut le détour.

La course en canots, entre tradition et immensité

La course en canots entre Québec et Lévis sur le fleuve glacé est l’une des activités les plus appréciées du carnaval. Maintenant sport de compétition, le canot fut pendant longtemps un élément essentiel dans la vie des riverains du Saint Laurent. Pendant l’hiver, il était le seul moyen de transport et de communication entre les deux rives. Aujourd’hui, cette course attire plusieurs dizaines de milliers de spectateurs. Elle se divise en deux temps. D’abord, les préliminaires sur la rue Saint Joseph. Puis, la finale sur le Saint Laurent. Spectacle réellement impressionnant que de voir les participants courir sur un fleuve glacé tirant leur canot derrière eux.

Les parades, un peu de chaleur dans le froid de l’hiver

Plusieurs défilés ont lieu tout au long du Carnaval de Québec. Le plus imposant est sans doute celui de fin de carnaval. La parade suivant le boulevard Lévesque, la rue Cartier et Grande Allée est regardée par près de 100 000 spectateurs. Des chars décorés selon différents thèmes, des carnavaleux déguisés et enthousiastes font le spectacle. A la fin, Bonhomme clôt le défilé en saluant le public. Malgré le froid glaçant, la parade vaut le coup d’œil. Alors équipez-vous de chaufferettes !

Prenez des vacances, enfilez tuque et mitaines, et venez célébrer Bonhomme, le roi de la fête !

Julie Derache

Au Québec, la question de l’identité nationale se pose aussi

Le débat sur l’identité nationale n’est pas uniquement français. De même, l’Hexagone n’est pas le seul à se questionner sur le port ostentatoire de signes religieux. Au Québec, province francophone du Canada, la controverse est virulente. Et ce depuis plusieurs années. Le président français Nicolas Sarkozy s’est-il inspiré de ses cousins d’Outre-Atlantique pour son débat sur l’identité nationale ? En 2007, le premier ministre du Québec, Jean Charest, a lancé la Commission Bouchard-Taylor, ou plus exactement la Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles. Outre la problématique de l’intégration, cette commission a mis en exergue toutes les questions que se posent les Québécois sur leur identité nationale. Aujourd’hui encore, la polémique continue dans la Belle Province.

L’identité nationale québécoise, une question ancienne

La question de l’identité nationale est un sujet sensible au cœur de la Belle Province. Pour autant, une grande majorité des Québécois s’identifie d’abord et avant tout au Québec, avant de s’identifier au Canada. « Ils ont ben compris qu’ils ont plus l’droit de nous appeler les Canadiens, Alors que l’on est québécois » chante Linda Lemay. Le Québec est leur nation. Mais comment définir la nation québécoise ?

Le nationalisme a toujours été fort au Québec depuis le XIXe siècle, donnant lieu à différents courants politiques et à divers courants de pensée, se basant très souvent sur l’antagonisme franco-anglais. Toutefois, la question de la souveraineté s’est cristallisée dans les années 1960 avec la Révolution Tranquille. Cette dernière marque, dans l’imaginaire collectif québécois, la formation d’une nouvelle société moderne, ouverte sur le monde et pénétrée par de grands idéaux tels la démocratie, le pluralisme et la nation. La Révolution tranquille fut une importante période de réformes politiques, économiques et culturelles entreprises par Jean Lesage et René Lévesque. Aujourd’hui encore, de nombreux partis politiques tels que le Parti québécois, Québec solidaire ou le Bloc québécois désirent la souveraineté de la province.

En 2006, le gouvernement fédéral canadien, en la personne de Stephen Harper, premier ministre canadien, émet une motion reconnaissant que « Les Québécois forment une nation au sein d’un Canada uni« . Celle-ci engendra un grand débat autour de la définition de la nation québécoise. Citons, notamment, une conférence tenue à l’Université Laval à Québec : « La nation québécoise existe-t-elle ? ».

L’identité nationale québécoise et les accommodements raisonnables.

La discussion fut relancée lors du débat public organisé pour la Commission de consultation Taylor-Bouchard sur les pratiques d’accommodement raisonnable reliées aux différences culturelles en 2007-2008. Qu’est ce qu’un accommodement raisonnable ? C’est une notion juridique canadienne issue du droit du travail, décrite dès 1985, par la Cour suprême du Canada comme :  » L’obligation dans le cas de la discrimination par suite d’un effet préjudiciable, fondée sur la religion ou la croyance, consiste à prendre des mesures raisonnables pour s’entendre avec le plaignant, à moins que cela ne cause une contrainte excessive  » Elle s’applique à plusieurs motifs de discrimination dont le sexe, la grossesse, l’âge, le handicap ou encore la religion.

Les requêtes de la part de groupes ethniques ou religieux minoritaires ont été considérées par une partie des médias et de l’opinion publique comme étant excessives, voire contraires aux valeurs des Québécois.
C’est en 2002 que la notion a été mise en lumière par les médias québécois, lorsqu’un jeune sikh a décidé de porter un kirpan (arme symbolique s’apparentant à un poignard) dans une école québécoise. Pour les autorités de l’école, le kirpan est une arme, alors que pour ce jeune sikh, il s’agit d’un symbole religieux. D’un côté, le port d’arme blanche sans permis est interdit au Québec, d’un autre la Charte canadienne des droits et libertés reconnaît le droit de pratiquer librement sa religion. Devant le refus de l’école d’obtempérer, le jeune sikh a poursuivi l’établissement. À l’issue du procès, il a pu porter, à l’école, un kirpan dans un fourreau de bois placé à l’intérieur d’un sac d’étoffe cousu de manière à ne pouvoir être ouvert. Autre exemple : en avril 2006, une communauté juive orthodoxe a payé la pose de vitres teintées pour une salle de sport à Montréal. Elle ne voulait pas que ses enfants voient des femmes en tenue de sport. Le cas le plus marquant est celui d’une jeune musulmane ontarienne de 11 ans qui est expulsée, en 2007, d’un match de soccer à Laval, dans la banlieue de Montréal. L’arbitre décide que l’hijab (voile islamique) porté par la jeune fille est un risque pour la sécurité des participants et lui demande de le retirer. Devant son refus, il l’expulse. Aucun des médias européens présents à cette rencontre n’a jugé bon de s’intéresser à ce sujet. Face à ces différents exemples, et bien d’autres, le terme « accommodement raisonnable » a acquis une connotation péjorative et a provoqué un mécontentement dans la population.

C’est en février 2007 que le premier ministre du Québec Jean Charest ouvre alors la Commission Bouchard-Taylor, présidée par deux Québécois de renom : l’historien Gérard Bouchard et le philosophe Charles Taylor. Leurs travaux consistaient à comprendre et analyser, au travers des accommodements raisonnables, les causes d’un malaise social lié au modèle d’intégration socioculturelle institué au Québec depuis les années 1970. Ce débat avait pour objectif de répondre à la problématique : comment conjuguer pluralité et identité québécoise.

La Commission s’est terminée le 22 mai 2008 par le dépôt d’un rapport. Les résultats n’ont pas été concluants et très contestés. Notamment par de nombreux souverainistes. Mais aussi, par les immigrés eux-mêmes. Citons notamment Djemila Benhabib, journaliste d’origine algérienne. Elle décrit son malaise depuis son arrivée au Québec face aux demandes formulées par des groupes musulmans, demandes qu’elle qualifie d’islamistes et de  » prosélytistes « . Dans son essai, elle critique ouvertement les groupes qui revendiquent des passe-droits au nom de leur religion.  » Ces islamistes qui revendiquent benoîtement les auspices du respect de la religion et du droit à la différence, pervertissent l’idée de la démocratie. Qu’on se le tienne pour dit, il ne s’agit pas là de liberté individuelle, mais de prosélytisme, d’intégrisme, de fascisme ouvert. Car dès qu’une religion s’affiche ostensiblement dans la sphère publique, il y a confusion des genres « , peut-on lire dans Ma vie à contre-Coran. En faveur de la laïcité à la française, qui interdit notamment aux fillettes le port du voile islamique dans les écoles publiques, Djemila Benhabib pense que les commissaires Bouchard et Taylor ont eu tort de conclure que la crise des accommodements raisonnables, n’était qu’une crise de perceptions.

Ainsi, les effets positifs escomptés après le rapport n’ont pas eu lieu. Il semblerait même que les différentes communautés s’intègrent moins bien dans la société, suite aux résultats de la Commission. Selon Cyberpress.ca, cette dernière a provoqué une augmentation du nombre d’incidents antisémites. Un article du Devoir montre notamment que les Musulmans en subissent les contrecoups. Kamel Béji, professeur de l’Université Laval, d’origine tunisienne, a souligné que, depuis les travaux, la situation semblait encore plus difficile pour eux : « Ça a eu un effet néfaste sur les femmes voilées, a-t-il dit. Les employeurs ne veulent pas de femmes qui portent le voile et la population voit les hommes comme ceux qui forcent les femmes à le porter. » Cette problématique n’est pas sans rappeler les débats français autour de l’interdiction du port du voile ou de la burqa. Excepté que la conception de la laïcité est actuellement différente au Canada.

L’interdiction du port ostentatoire de signes religieux en question.

La problématique revient sur le devant de la scène ces derniers mois. Jean-Marc Léger, dans une chronique sur Canoë (chaine de télévision québécoise) souligne que  » la Commission Bouchard-Taylor a tenté d’aseptiser le débat, mais sans succès. Il revient inévitablement sous une forme ou une autre. Cette fois-ci, c’est sur le port de signes religieux au sein de la fonction et des services publics. À une question claire, nous obtenons une réponse tout aussi claire. Soixante pour cent des Québécois estiment que l’on devrait interdire le port de tout signe religieux dans la fonction et les services publics.  » En effet, le projet de loi 16 sur les accommodements raisonnables piloté par la ministre de l’Immigration, Yolande James, est source de polémiques. En ce mercredi 06 janvier, le Devoir met en avant les oppositions politiques face à la mise en place d’une telle loi. Par exemple, pour Québec solidaire (parti de gauche pluraliste), les droits de la personne sont les plus importants. Selon lui, on ne peut pas nier à un ensemble de personnes leur liberté d’expression et de religion en interdisant le port des signes religieux au nom du principe de laïcité. Jugement auquel s’oppose Michèle Sirois, spécialiste en sociologie des religions, qui a quitté Québec solidaire suite à cette question:  » cette prise de position s’oppose aux valeurs fondamentales de la grande majorité des Québécois et constitue un recul par rapport aux gains historiques de la gauche et du mouvement nationaliste.  » écrit-elle sur son blog.

Ainsi, au Québec comme en France, la question de la laïcité est au cœur du débat sur l’identité nationale.