« 5, 4, 3, 2, Impro ! »

Il est 21 heures à peine passées, les lumières de la Laiterie des Beaux-Arts, à Montpellier baissent d’intensité. Les derniers arrivés installent des chaises, où ils peuvent, entre les banquettes et les tables du restaurant. Les discussions s’éteignent dans un murmure tandis que quelques « chuts » agacés se font entendre.

Au centre de l’attention, ce vendredi 4 janvier, une petite scène de trois mètres sur deux. C’est sur ce rectangle, à peine surélevé par rapport à la salle, que se produiront les stars de la soirée : Improspectus, une troupe d’impro amateur. Quatre improvisateurs, un arbitre, deux régisseurs, tout le monde est là, c’est parti pour deux heures de spectacle et de rires.

Des improvisations variées

Après avoir testé la réactivité du public (« quand je dis bonne année vous me répondez… ? » « Bonne santé ! »), l’arbitre s’assure que chacun a proposé un thème qui sera susceptible d’être joué dans la soirée. Le principe est simple. Avant chaque saynète, le maître du jeu tire un sujet imaginé par l’un des spectateurs et les quatre comédiens doivent improviser dessus. A certains moment, des contraintes leur sont distribuées, telles que des styles théâtraux (vaudeville), littéraires (conte de fée, roman d’aventure), des accents, des personnages ou des actions (faire une bise avant chaque réplique). Ces obligations ne sont pas toujours un handicap, selon Cyril Montvillof, directeur de la troupe et comédien pour la soirée : « En réalité, ça nous donne des cadres, c’est une aide, contrairement à ce que peut croire le public. On a plus de facilité à faire avancer le récit, à lui donner un début, une fin et une trame forte. » Le reste du temps, les improvisateurs sont libres et sont seulement sommés de respecter un temps de jeu, entre deux et cinq minutes, généralement. Elodie, Julien, Tic et Cyril, n’ont que quelques secondes pour regrouper leurs idées avant que le public ne scande « 5, 4, 3, 2, Impro ! » et n’exige leur entrée sur scène. Là, ils n’ont qu’un seul mot d’ordre : « On veut juste que les gens s’amusent ! »

« En général, on rigole beaucoup »

Dans le public, Chloé, au deuxième rang est une habituée : « ça fait trois ans que j’habite à Montpellier, je viens les voir assez régulièrement. On sait jamais comment ça va se passer mais en général, on rigole beaucoup. » Elle continue : « Les thèmes de ce soir sont pas tous extras, genre  » Rock n’Roll et teddybear « , c’est pas vraiment facile d’en retirer une situation comique. Et puis l’arbitre est pas toujours assez sévère si les thèmes ne sont pas respectés. » Malgré ces quelques reproches, la jeune femme est conquise : « On passe toujours un bon moment quand-même ! » A côté d’elle, la cinquantaine de spectateurs présente semble acquiescer : des éclats de rires accompagnent les quatre comédiens, transformés pour l’occasion en girafe, pingouin, conducteur de radeau et vahiné. Les sujets s’enchaînent, certains sont plus réussis que d’autres. Tandis que le sujet « Ma chaussette sent la banane » ne tire que quelques sourires, « j’ai faim » en vaudeville provoque l’hilarité des spectateurs.

Au final, c’est sous des applaudissements fournis qu’Improspectus tirera sa révérence, sur les coups des 23 heures.

« Sugar Man » : à la recherche de Sixto Rodriguez

Sixto Rodriguez, c’est le soldat inconnu de la folk américaine des seventies. Il est le protagoniste de Sugar man, le premier documentaire de Malik Bendjelloul, en ce moment à l’affiche.

Sugar Man, enquête musico-journalistique de Malik Bendjelloul, revient sur le parcours d’un musicien atypique, né dans les années quarante à Détroit : Sixto Rodriguez. Le chanteur, entiché de musique grâce à la guitare de son père, écrit les banlieues ouvrières de cette Amérique que l’on oublie parfois. Ses textes sont aussi poétiques que politiques et sa voix attire rapidement les chasseurs de succès. Pourtant, après deux albums sortis en 1969 et 1971, les honneurs attendus ne sont pas aux rendez-vous. Sixto Rodriguez, toujours ouvrier, abandonne sa carrière musicale et disparaît de la scène publique. 


Une icône ressuscitée

Pendant ce temps, l’Afrique du sud s’ébranle, toute coupée du monde qu’elle est. La musique de Sixto Rodriguez y arrive, par le hasard d’un disque oublié dans la valise d’une touriste américaine. Une génération privée de liberté reprend Sugar man, l’histoire d’un dealer américain. Rapidement censuré, il devient un étendard pour les rares afrikaners qui luttent contre l’apartheid. D’aucuns le comparent à Bob Dylan et il vend plus de 500 000 albums, devenant, sans le savoir, une véritable icône de la « nation arc en ciel ».
Dans les années 90, un vendeur de disque et un journaliste musical, tous deux Sud-Africains, veulent en savoir plus sur ce mystérieux artiste. Ils le pensent mort, suicidé sur scène, immolé ou victime d’une overdose en prison. Leur démarche d’enquête constitue la base du documentaire de Malik Bendjelloul. Les pérégrinations de ces fans de la première heure nous mènent doucement vers la révélation : Sixto Rodriguez n’est pas mort. Il travaille dans la démolition, toujours bien arrimé au bitume de la Motown qu’il décrivait dans ses chansons. La suite, émouvante quoiqu’un peu galvaudée, raconte la rencontre des deux protagonistes avec Sixto Rodriguez, sa vie modeste dans la ville du moteur puis la consécration, enfin, de ce musicien talentueux. A l’initiative des deux acolytes, il découvre son public, immense et passionné, lors d’une tournée en Afrique du sud en 1998.

Un documentaire original et passionnant

Malik Bendjelloul signe un documentaire presque à la hauteur du talent de Sixto Rodriguez. Les témoignages sont bien choisis, émouvants sans être complaisants. Les images sont soignées et la bande son – signée Rodriguez – ravira les amateurs de folk. La première partie du documentaire souffre parfois de longueurs, et quelques images prétextes – qui viennent pallier le défaut d’images d’archive de l’artiste – gâchent un esthétisme par ailleurs bien maîtrisé. On regrette que le documentaire soit quelque peu romancé. En effet, Sixto Rodriguez n’ignorait pas tout de son succès puisqu’il avait effectué plusieurs tournées en Australie au début des années 80 avant d’abandonner effectivement la musique. Malik Bendjelloul occulte complètement cette partie de la carrière de Sixto Rodriguez. L’histoire, vraie, se suffisait à elle-même. Le résultat est toutefois convaincant et le rythme ne souffre pas trop des quelques excès de Bendjelloul et la seule découverte du trop peu connu Rodriguez est un argument suffisant pour aller voir Sugar Man.

La Ligue contre le cancer collecte vos téléphones portables, radiographies et cartouches d’encre

Si vous gardez précieusement vos cartouches d’imprimantes, vos vieilles radiographies argentiques et vos vieux téléphones dans une boîte, c’est le moment de faire une bonne action pour la Ligue contre le cancer.
Ghislaine Guelorget, bénévole et responsable de la collecte, a lancé cet ambitieux projet dans l’Hérault afin de récolter des fonds pour la lutte contre le cancer.
Élodie Malbeck, stagiaire en communication sur le projet de collecte,
précise : « Cette action cible uniquement l’Hérault et les fonds collectés restent dans l’Hérault pour la recherche ou servent aux personnes malades de la région. »

Déposez vos cartouches et téléphones dans votre mairie

La mise en place de cette collecte demande beaucoup d’investissement à Ghislaine et Elodie : « Nous faisons des tournées dans toutes les mairies du département de l’Hérault pour la collecte des téléphones et des cartouches d’imprimantes. Nous leur proposons de placer des urnes et des affiches pour la collecte. Pour les radiographies, ce sont les centres de radiologies et quelques pharmacies dans les villes de plus petite taille, qui les collectent. » explique Élodie Malbeck.

Si les principales mairies adhèrent au concept, quelques récalcitrants restent à convaincre. « Certaines mairies nous répondent qu’elles n’ont pas de temps à consacrer à la collecte. Il nous faut alors insister. » déplore la jeune stagiaire. Puis elle s’empresse d’ajouter : « Mais il y a quand même de bonnes surprises. Par exemple, il y a eu sur Montpellier un magasin de téléphonie mobile qui nous a fait un don de 700 € en nous donnant tous les vieux téléphones portables que les gens lui rapportaient. Il les stockait dans son arrière-boutique depuis un moment sans prendre le temps de les amener à recycler. »

En plus de soutenir la lutte contre le cancer, recycler ces objets nocifs pour l’environnement permet de créer des postes : « Pour 1.000 téléphones portables recyclés, la structure de traitement APF-entreprise adaptée de Villeurbanne, crée un poste pour un travailleur handicapé pour un mois. » fait observer Élodie Malbeck.

Une donation alternative qui fait son chemin

En moyenne, la collecte d’un téléphone portable, quel que soit son modèle ou son état, rapporte 1.€.40 à la Ligue. Une tonne de radiographies argentique équivaut à 250 € et un carton plein de cartouches jet d’encre représente 30 €. « Ce n’est pas ce qui rapporte le plus. Les dons restent toujours encrés dans les mœurs, mais avec la crise, les gens donnent moins d’argent. Pour l’instant, cette démarche n’est pas encore très connue du grand public, mais petit à petit la collecte d’objets à recycler pourrait peser plus que les donations. »

Les chiffres de la collecte, qui existe depuis déjà trois ans, progressent d’année en année : « On est passé de 9.800 portables en 2010 à 14.000 portables en 2012, collectés dans l’Hérault, soit 20 000 € pour la Ligue contre le cancer. Et le projet n’est pas prêt de s’arrêter.
Tant qu’il y aura le cancer, nous continuerons à placer nos urnes de collecte.
» affirme Elodie Malbeck.

« L’homme qui rit » : Victor Hugo magnifié 

Dans l’hiver 1690 une tempête de neige fait rage : Gwynplaine jeune garçonnet d’une dizaine d’années est abandonné à son sort. Luttant contre le froid et la mort, il se met en quête d’un abri pour le reste de la nuit. Sur son chemin, il porte rescousse à un bébé dont la mère vient de mourir de froid. Les deux orphelins sont recueillis par Ursus, vagabond philosophe, qui erre de ville en ville dans une vielle roulotte. Il ne peut rester indifférent face à la balafre qui orne le visage du jeune garçon et la cataracte qui touche Déa dès son plus jeune âge. 
Quelques années plus tard, le trio ainsi formé, sillonne les routes et donne en spectacle « l’homme qui rit » qui conte l’histoire d’amour entre Gwynplaine et Déa. A chacune de leur représentation c’est un franc succès qui les attend, de partout on veut voir la cicatrice de l’homme qui rit. Ce dernier fait rire, effraie et émeut les foules. Plus encore, il les transporte. 
Gwynplaine succombe peu à peu aux sirènes de la gloire et lorsque la troupe se rend dans la banlieue de Londres, leur petit monde bascule tout à coup. 

« C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches » [[Citation du film et de Victor Hugo]]

Victor Hugo est à l’honneur en ce moment. Alors qu’on attend la sortie de l’adaptation américaine des « Misérables », prévue pour février prochain, en France c’est le réalisateur Jean-Pierre Améris qui reprend à merveille le roman philosophique d’Hugo.
La mise en scène spectaculaire souligne tour à tour l’œuvre de l’écrivain ainsi que le talent du casting savamment choisi. Le tout orchestré dans des décors fastes et réalistes qui nous plongent au cœur du Londres du 18ème siècle. 
Véritable plaidoyer politique, le film s’insurge contre l’oisiveté excessive d’une noblesse opulente face à la misère morbide du petit peuple. Des thèmes récurrents qui ont traversé la Révolution jusqu’à nos jours : la mutilation de Gwynplaine n’est autre que celle de la nature humaine, l’intolérance face à la différence de l’autre et le mépris dans le regard d’autrui. Gwynplaine obligé de cacher son vrai visage derrière un foulard dénonce abruptement : « le peuple, c’est moi » .  
La distribution des rôles vient parfaire l’ensemble : Gérard Depardieu grandiose dans la peau du nomade au grand cœur, pseudo-philosophe qui prend sous son aile deux enfants abandonnés. Christa Theret pleine de grâce et figure de l’innocence, éprise d’un Marc-André Grondin dont la mine balafré n’entame en rien la prestation brillante et les émotions vibrantes qu’il s’amuse à jouer. 

Meilleur que ce que l’on attendait, L’homme qui rit ramène le spectateur directement au cœur de l’univers propre à l’écrivain français. Une mise en scène sublimée pour un Victor Hugo engagé, du « Made in France » comme on en fait plus. 

Les réfugiés syriens doivent faire face aux difficultés.

Révolution devenue guerre civile, la crise syrienne n’en finit pas de s’enliser dans la violence. Les populations, premières victimes des bombardements sans fin du régime de Bashar el-Assad, n’ont plus d’autre choix que de fuir. En Turquie, dans la région frontalière de Hatay, les réfugiés doivent faire face à de nombreuses difficultés.

« Quand les avions sont arrivés, nous avons décidé de partir. ». Fatima fait partie de ces dizaines de milliers de réfugiés syriens installés dans la région turque de Hatay. Ces derniers mois, leur nombre n’a cessé d’augmenter. Alors que le régime de Bashar el-Assad mène une opération de grande envergure dans les régions d’Alep et d’Idlib, les bombardements quotidiens font fuir tous ceux qui avaient, jusqu’à là, résisté aux violentes attaques de l’armée régulière et des milices pro-Assad.

« Il y a trois mois, un avion a bombardé notre village, nous sommes partis en voiture dans une autre ville. Nous sommes restés dans une école pendant dix jours, puis deux avions ont frappé. Nous nous sommes dit que nous ne pouvions pas rester. Nous avons traversé les montagnes jusqu’en Turquie. », raconte Abou Abdu, le mari de Fatima, originaire du gouvernorat d’Idlib. Avec sa femme et ses sept enfants, ce chauffeur de 48 ans vit désormais dans le petit village de Kavalcık à deux kilomètres de la frontière. La cohabitation avec leurs voisins turcs est pacifique : « Ils nous ont bien accueillis. », assure la mère de famille, avec sa petite dernière de un an et demi dans les bras. Pourtant, la situation est loin d’être simple pour Abu Abdu, qui retourne régulièrement en Syrie travailler et gagner de quoi entretenir sa famille. « Le loyer de cette maison, avant que les Syriens n’arrivent, était de 50 dollars et moi je dois payer 300 dollars ! Au lieu de m’aider, le propriétaire préfère profiter de ma situation. », explique-t-il. « Ils sont où les 100 millions de dollars d’aide ? Dites aux responsables qu’ils nous envoient de l’aide. En Turquie, ils sont pauvres, comment est-ce qu’ils pourraient nous aider ? ».

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Les enfants d’Abou Abdu et Fatima ne vont plus à l’école et attendent de rentrer en Syrie.

Une situation précaire dans les camps.

Très peu de réfugiés peuvent se permettre de louer une maison dans ce pays d’accueil. Dans les nombreux camps mis en place le long de la frontière turque, les réfugiés trouvent un abris, de la nourriture et des soins médicaux mais les conditions sont plus que sommaires. « Nous, nous sommes des hommes, nous pouvons supporter. Mais les enfants et les femmes enceintes ? », questionne Mohamed. Ce combattant de l’Armée Syrienne Libre, arrivé il y a un mois et demi à Hatay, déplore les conditions de vie auxquelles sont confrontés les réfugiés.

A Boşin, ils sont 5 000 hommes, femmes et enfants à s’entasser sous les centaines de tentes du Croissant rouge. Bâches blanches et barbelés encerclent ce campement de fortune, où la circulation se fait difficilement, sous l’œil attentif des soldats turcs. « Si on veut ramener un blessé de Syrie ici, en Turquie, il faut que les gendarmes vérifient les blessures à la frontière. Le temps de faire ça, l’homme n’a plus de sang et il meurt avant d’arriver à l’hôpital. », explique Mohamed. « Nous demandons aux Nations-unies et à la Ligue arabe qu’ils bougent. ».

Malgré les mauvaises conditions, les réfugiés retrouvent un peu de sécurité. Pourtant, le bruit de la guerre n’est jamais loin. A quelques kilomètres seulement, les avions pilonnent les villes syriennes de Salqin et Bab el-Hawa. Au bruit des avions, les enfants de Abu Abdu et Fatima courent à la porte voir ce qu’il se passe. Histoire d’être sûrs que, cette fois, les bombes ne s’abattent pas sur eux.

La dernière interview du patron du Monde Érik Izraelewicz

Érik Izraelewicz, directeur des rédactions du journal Le Monde est décédé mardi 27 novembre 2012. Il était présent à Montpellier le 20 novembre 2012. La décentralisation de l’impression du quotidien Le Monde sur les rotatives du Midi Libre était aussi pour lui, l’occasion de rencontrer et d’échanger avec ses lecteurs. Les étudiants d’Hautcourant y étaient. Dernière interview d’Érik Izraelewicz…

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Erdoğan : Le stratège turc

Beaucoup de personnes se disent inquiètes aujourd’hui du modèle choisi par de nombreux gouvernements issus du Printemps arabe. Un modèle politique qui selon certains est directement inspiré du gouvernement turc de l’AKP (parti pour la justice et le développement, au pouvoir depuis 2002). Si du coté occidental on s’alarme de cette voie manifestement « islamique », ces craintes ne semblent pas pleinement justifiées.

Les déclarations du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdoğan, sont souvent abruptes. Criminalisation de l’avortement, création de nouveau cours de religion pour les écoliers, débat sur le retour de la peine de mort en Turquie, sont les exemples d’un discours « islamiste » dénoncé par l’opposition.

Cependant, il semble qu’une autre lecture soit possible. « Erdoğan est affublé d’islamiste alors que sa politique s’approcherait plus du puritanisme à l’américaine », déclare un professeur de l’université Galatasaray. « Lorsqu’il demande aux familles de faire au minimum trois enfants, on le traite d’islamiste rétrograde. Mais cela peut aussi être analysé comme une volonté de prévenir le vieillissement de la population et les problèmes que cela a engendré en Europe ».
Les États-Unis ont connu une période où l’alcool était illégal, en Turquie il est seulement surtaxé. Il y a toujours les pro-life [[mouvement pour l’interdiction de l’avortement aux Etats-Unis]] qui ont un combat similaire et s’appuient sur les mêmes arguments. Cette tendance religieuse n’est pourtant pas décriée avec la même force.

La criminalisation de l’avortement n’a pas eu lieu. Mais par une déclaration provocante, le débat engendré a permis au chef du gouvernement de cerner les différentes opinions, les arguments contre et les opposants. « Il y reviendra peut-être, mais d’ici deux ou trois ans. Erdoğan fait trois pas en avant et deux et demi en arrière. Il ne revient jamais vraiment à la position de départ », continue le professeur. « Il semble qu’il tente de créer une génération puritaine, religieuse », ajoute-t-il.

Aydin, étudiant en science politique, se dit proche de mouvement de la gauche politique. Son discours est plus tranchant : « Erdoğan parle beaucoup, mais agit peu ». Selon lui, le premier ministre a les mains liées. L’héritage laïque de Mustafa Kemal est encore très important. De même, certains des excès de l’Etat, comme l’emprisonnement d’étudiants dans des conditions douteuses, amènent à une repolitisation des jeunes. D’où une opposition de plus en plus forte de la part de ces derniers.

Néanmoins cette voie politique fait peur. Erdoğan avance ses pions de manière audacieuse et cela lui réussi pour le moment, mais c’est un jeu risqué. « Si cela continue dans ce sens, nous partirons vivre à l’étranger. Nous ne voulons pas vivre dans un pays similaire à l’Iran. » confesse Kivanç, fonctionnaire et père de famille.

Festival « Hérault Trait Libre » : le dessin de presse fait fi des frontières

29 dessinateurs de presse et 18 nationalités étaient réunis le week-end dernier à Pierresvives. Ils étaient présents pour célébrer le festival Hérault Trait Libre, premier festival du dessin de presse, avec la thématique de l’eau en fil rouge. Du Japon jusqu’à Cuba, en passant par l’Iran, Madagascar ou Israël, tous sont membres de l’association Cartooning for peace, présidée par Plantu. Les enjeux du dessin de presse varient considérablement d’un pays à l’autre. Et la notion de liberté peut changer du tout au tout. Mais tous ont en commun la passion du dessin. Des idées, un seul langage, une image. Rencontre avec six dessinateurs.

No-Rio : la langue e(s)t l’image

NORIO.jpg Le plus important pour No-Rio, c’est de transmettre un message. « L’image est à la base du langage, elle est la parole la plus simple. » Le japonais a travaillé dans le cinéma et dans le dessin animé puis s’est entièrement consacré au dessin de presse. « Au début, j’avais du mal à m’exprimer uniquement par l’image, mais, à force, j’ai appris à réduire mes phrases » confie le nippon. Même dans un pays comme le Japon, il est parfois difficile de publier certains dessins. La pudeur des Japonais empêche d’aborder des sujets lourds en émotion. Selon No-Rio, « que ça soit pour le 11 septembre ou pour le tsunami en 2011, les gens en souffrent encore. (…) Ce dessin par exemple, (voir ci-dessous) n’a pas du tout été apprécié. Pourtant vous y voyez quelque chose de mal ? ». C’est pourquoi il publie souvent dans des médias étrangers. « Le dessinateur est un être idéaliste, il dessine pour le résultat. Moi, je dessine pour garder espoir en la liberté de la presse » conclut-il.

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Ares : l’autodidacte free-lance

ARES.jpg Primé à de nombreuses reprises, le cubain a commencé le dessin en caricaturant amis et professeurs. Puis, il s’est attaqué à « l’humour, sans aucun contenu politique. » Le temps fait son travail et Ares fait du chemin : « Mon humour a évolué… Du point de vue du contenu et du point de vue de la forme. Un humour avec plus de préoccupations sociales. » Pour autant, l’artiste, qui met un point d’honneur sur son indépendance, dit toujours, ne pas toucher au politique. Publié à Cuba, mais surtout à l’étranger, il parle de son dessin comme d’un langage sans frontières textuelle ou idiomatique : « L’humour avec lequel je travail est sans textes. Il se comprend bien et a plusieurs lectures. Très souvent je fais un dessin pour une situation et il sera utilisé dans une autre publication, pour un thème très différent. »

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Bousiko : une image, 1 000 mots

BOUSIKO.jpg Originaire d’Haïti, Bousiko a fait ses premières dents sur la bande dessinée avant de se lancer dans le dessin de presse. Il travaille à présent pour les journaux haïtiens, Le Matin et Le Nouvelliste. « Aujourd’hui, je travaille seul. J’écoute, j’observe et je dessine. Je me suis vite rendu compte qu’un dessin vaut plus que 1 000 mots » affirme le caricaturiste. Les restrictions quant au dessin de presse en Haïti sont de moins en moins nombreuses. Le pays est en totale reconstruction et la presse est un élément qui y contribue. Bousiko fait partie de ces dessinateurs militants qui veulent voir de l’avant. Il termine en déclarant : « Je veux donner de l’espoir à mon pays et montrer au monde que Haïti n’est pas sur le point de périr. »

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Firoozeh : devoir d’auto-censure

FIROOZEH.jpg En Iran, les interdits sont partout, surtout dans la presse. Pour Firoozeh, le problème vient de l’État qui multiplie les limites. « Limites politiques, sociales… je ne peux même aborder de sujets économiques depuis les nouvelles mesures internationales », mais en contrepartie « ces limites nous obligent à plus d’imagination » assure-t-elle. Après avoir fait de l’illustration pour enfants, la dessinatrice s’est tournée vers le dessin de presse et a travaillé dans près de 10 journaux. En Iran, le pouvoir décide à lui seul de l’ouverture et de la fermeture des titres de presse, ce qui force les journalistes à l’autocensure : « Je n’ai jamais eu de problèmes avec mes dessins car je m’autocensure. Si ce n’est pas moi, ce sera le rédacteur en chef qui le fera. Le risque de voir la fermeture du journal est trop grand.»

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Boligán : Un dessin sans alphabet, un dessin universel

BOLIGAN.jpg 1992. « L’Europe de l’est vient de s’effondrer » et il ne reste que « très peu d’espace de publication à Cuba ». Boligán est alors embauché au Mexique. Son coup de crayon ? Un syncrétisme, entre le style d’Union-soviétique -~sans texte~- et la griffe caribéenne. Combinant humour et réflexion, ses dessins « traitent de problèmes universaux et non précisément de politique (…) Ça peut concerner le Japon comme la France. » Les questions de la globalisation, de l’écologie, ou des technologies, le sensibilisent. Convaincu que « la caricature est un moyen efficace pour tenter d’activer la conscience », Boligán se réjouit qu’elle soit « respectée » et « toujours vue dans un journal – même s’il n’est pas lu. Encore plus aujourd’hui avec les moyens électroniques. » Il regrette que l’impact ne soit pas aussi grand dans son pays natal, où « il y a moins de journaux et pas d’accès Internet. »

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Côté : 99 %

COTE.jpg Originaire du Québec, Côté travaille aujourd’hui pour le quotidien Le Soleil. Il a d’abord fait de la science-fiction et du dessin pour enfants. « L’avantage du dessin de presse, c’est que l’on n’est pas astreint à la rigueur journalistique. On peut jouer davantage sur l’émotion. » souligne-t-il. Le québécois préfère les sujets polémiques aux sujets consensuels, il a notamment été très inspiré lors des manifestations étudiantes de 2012 au Canada. Il ajoute que « le dessin de presse est vu par 99 % des lecteurs, ça nous donne plus d’impact. L’interaction avec le public est plus importante. » Côté n’a jamais eu à se soucier de savoir si ce qu’il faisait était publiable ou non. Il le résume en affirmant : « La censure nous est complètement extérieure. Il faut juste faire attention au niveau de langage. Il y a une certaine manière de dire les choses. »

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L’association Cartooning for peace a été créée en 2006, afin de promouvoir la tolérance et le dessin de presse comme « moyen d’expression d’un langage universel ». Si chaque pays a ses contraintes en termes de liberté d’expression ou de bienséance, il n’en demeure pas moins que le dessin de presse a l’avantage de pouvoir être compris au-delà des frontières.

Vote à l’UMP : motivation et engorgement

« Fallait pas rater ce jour-là ! » s’exclame une militante. Tel était le mot d’ordre des membres de l’UMP, appelés aux urnes pour élire leur nouveau président, le 18 novembre. Tirés à quatre épingles, ils sont venus en couple, en famille ou entre amis en ce dimanche hautement symbolique.

Au 8, avenue d’Assas à Montpellier, la fédération UMP n’a jamais été aussi visible. Devant l’immeuble classé, divers groupes discutent. À 20 mètres, un car stationne. La file d’attente pour voter déborde sur la chaussée, tandis que Raymond Couderc, secrétaire départemental de l’UMP, s’extirpe de la fédération. Il s’apprête à rejoindre sa voiture pour faire le tour des bureaux de vote héraultais. Avant de tourner les talons, il déclare « Il faut un général à la tête des troupes. » Arnaud Julien, président de la Fédération UMP de l’Hérault, le raccompagne. Entretenant son électorat, il serre au passage la main des militants et ajoute un petit mot à chacun. Très vite, il est rappelé à l’intérieur. « Je dois aller faire la police », ironise-t-il.

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La file des votants s’étend jusqu’à l’extérieur. Crédits C.P.

En effet, les militants, tous d’un certain âge, s’impatientent. « Y a du monde, c’est la merde » s’insurge une vieille dame en sortant. Selon Arnaud Julien, il y avait déjà la queue à 9h. De l’extérieur à l’intérieur du bureau, ils sont une quarantaine à attendre leur tour. Une fois entrés dans le local, ils doivent atteindre l’un des deux isoloirs verts au fond de la salle. Enfin, ils se faufilent pour glisser le précieux bulletin dans l’urne. Sous une chaleur étouffante, les militants font un dernier effort pour s’extraire de l’immeuble et attraper une grande bouffée d’air frais. Ce véritable parcours du combattant se fait sous l’œil de Charles de Gaulle, Jacques Chirac, Valéry Giscard d’Estaing et de Nicolas Sarkozy, bienveillants sous leur cadre de verre.

Dans un coin, les discussions sont animées. Un groupe de trois personnes s’est trompé de bureau de vote. Un jeune militant appartenant à l’organisation leur explique qu’ils doivent aller voter à la Grande Motte. Puis il ajoute, « Vous pouvez vous y rendre ? Est-ce que vous pourriez prendre des procurations pour Copé ? Si vous votez pour Copé bien entendu. » L’organisation du scrutin laisse à désirer…

Une réelle motivation pour voter

Si l’attente est pesante, les militants sont imperturbables. Ce vote est très important à leurs yeux. Jean, une cigarette entre les lèvres et la verve avare, admet « Ce vote est primordial, j’espère que ça va changer quelque chose. » Jean-Marc, militant depuis 1958, est venu voter avec sa femme. « Le vote par les membres, c’est très important, ça fait partie de la démocratie. C’est normal qu’il n’y ait pas de structure supérieure pour décider qui va être candidat. Nous sommes à la base, on travaille sur le terrain tous les jours. C’est normal qu’on nous demande de désigner nos représentants. » C’est la première fois que les militants sont appelés aux urnes et ils prennent leur rôle très à cœur.

À l’issue de cette journée, les militants auront un président. « Avoir un chef, ça fera une vraie opposition au pouvoir », assure Nadine, mère de famille et encartée depuis 4 ans. Jacqueline, militante de la première heure, ajoute avec tonus : « On est dans un mouvement où on aime bien les gens qui bougent, qui sont remplis d’énergie. Un homme qui sera le meilleur président pour la France pour l’avenir. Il faut espérer que le meilleur gagne, mais j’vous dirai pas pour qui j’ai voté ! » Même si les militants sont très attachés au secret du scrutin, on comprend à demi-mots que leurs voix iront à Jean-François Copé.

1/4 Le compost en ville, c’est facile

Cette année encore, l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEM) organise la semaine européenne de réduction des déchets. Une initiative suivie par l’agglomération qui proposera Place de Zeus, jusqu’à vendredi, une sensibilisation du public à travers différents stands d’informations et d’ateliers. Pourquoi est-il urgent réduire le poids de nos poubelles ? Comment ? Tout au long de la semaine, Haut-courant.com plonge dans nos bennes et vous donne quelques clés pour mieux comprendre les enjeux du problème et agir au quotidien. Aujourd’hui, le compost…même en ville.

Allez, un petit effort, remontons nos manches, bouchons-nous le nez et plongeons ! Que trouve-t-on donc dans nos poubelles ? Selon l’ADEM, on trouvera un peu plus de 20% de papier et de carton, 11,2% de plastique, 12,7% de verre, 3% de métal, 19,4 % de petits éléments divers et surtout 32,2 % de déchets dits putrescibles c’est à dire décomposables (restes de repas, jardins, cuisine….). On les appelle aussi les biodéchets. Au final, dans l’agglomération de Montpellier chacun d’entre nous génère 604 kg de déchets par an. Soit 247000 tonnes au total, de quoi remplir 230 terrains de foot sur une hauteur de 1 mètre. Alors oui : « Réduisons nos déchets, ça déborde ! » mais comment ?

Leçon une : le compostage. Il consiste à transformer nos biodéchets en fertilisants naturels. Premier avantage, il fournit un engrais 100% bio et gratuit pour le jardin ou les plantes de balcon. Deuxième avantage il permet de réduire de 40 kg par an et par personne le poids de nos déchets. C’est simple et place de Zeus on l’a tellement bien compris qu’on l’enseigne aux enfants. Olivier tient un stand pour l’association Apieu, l’Atelier permanent d’initiation à l’environnement urbain. Face à des gamins fascinés, il décortique la terre, passe des bestioles au microscope et explique les différentes phases du compostage. Et malgré les cris dégoutés que provoquent la vue des vers grouillants, le message passe bien. « Le compost ça sert à donner à manger aux vers et aux fleurs » affirme Benjamin, 8 ans, ce à quoi Salim ajoute : « Et ça fait moins de trucs dans la poubelle !» La vérité sort de la bouche des enfants.

Pourtant la grande majorité d’entre nous ne le fait pas. Pourquoi ? Parce que tous ou presque pensons que le compost est réservé à la vie rurale. Faux ! Habitants des centre-villes il existe au moins trois façons de composter en individuel ou en collectif.
En collectif tout d’abord. Certains quartiers, comme c’est le cas au square du Père Bonnet à Figuerolles, ont décidé de mettre à dispositions des riverains des composts collectifs. Quatre planches clouées, une notice d’utilisation écrite sur un panneau de bois et le tour est joué. Pour Enrique, familier de ce square qui est aussi un jardin collectif, le principe fonctionne : « Il suffisait de le faire pour que ça marche. La preuve il déborde. Tous les jours des gens passent en allant prendre le tram déposent leurs déchets et reviennent chercher du terreau quand ils ont besoin.» Deuxième solution, faire appel à l’agglomération. Sur simple demande et gratuitement elle fournit une installation en plastique, hermétique et sans odeur adaptée aux résidences et aux immeubles. Pour André Demaison, chargé de mission à l’agglomération du programme local de prévention des déchets, la demande est importante « Nous avons installé plus de 17000 composts depuis 2001, et trois projets d’équipement de grosses résidences sont en cours dans les secteurs Garosud, Mosson et Castelnau-le-lez. Les usagers prennent vite l’habitude et sont satisfaits »
Troisième solution : composter directement dans son appartement grâce au lombricompostage. Une petite boîte de quatre étages, une poignée de lombrics pour faire le travail et c’est tout. Là encore, pas de mauvaise odeurs ou de fuites désagréables. Il ne vous reste plus qu’à ouvrir le robinet situé en bas du bac pour récupérer le jus du compost qui, une fois dilué, vous procurera un engrais surpuissant. Yann, habitant de Boutonnet a installé un lombricompost dans sa cuisine il y a un an : « Au début il y avait le côté un peu bizarre : tiens je vais installer des vers dans ma cuisine. Au final y’a pas d’odeurs, on oublie vite les vers qui nous rendent bien service, ça fait marrer les gamins, les plantes sont contentes et si un jour on nous taxe en fonction du poids de déchets produits, j’aurai pris de bonnes habitudes. » Question prix, le composteur se vend entre 80 et 110 euros, auxquels il faudra ajouter entre 15 et 20 euros pour 250g de lombrics. Sur simple demande, ici encore, l’agglomération finance une partie de ces équipements pour les particuliers. Pour les plus modestes de nombreux sites expliquent comment fabriquer soi-même son composteur pour un moindre coût.

Enfin pour les plus fainéants, ne culpabilisons pas ! Il reste encore la poubelle orange, destinée à recevoir tous nos biodéchets. Ceux-là seront ensuite acheminés vers Amétyst, l’usine de méthanisation de l’agglomération. Grâce à ce procédé biologique, les matières organiques sont transformées en biogaz (producteurs d’électricité et de chaleur) et en compost.
Alors pas de quoi se décomposer, au final réduire ses déchets c’est pas si compliqué.