Montebourg investit l’aile gauche du PS

En déplacement lundi 24 et mardi 25 janvier dans l’Hérault, le député de Saône-et-Loire candidat déclaré aux primaires du PS en vue de la présidentielle 2012, est venu chercher le soutien des militants et des élus locaux. Sur invitation du département de Science Politique, il a présenté son nouveau livre à l’Université Montpellier I.

Haut Courant sur Radio Campus: les primaires socialistes

Cette semaine, la venue d’Arnaud Montebourg à Montpellier donne l’excuse parfaite pour parler des primaires socialistes. Comment se dérouleront-elles ? Qui se présentera ? Qui pourra voter ? Vous trouverez les réponses dans le podcast.

Au sommaire cette semaine

  Hugo Jolion-David explique comment vont se dérouler ces primaires socialistes.

 Damien Fournier présente un reportage sur la venue d’Arnaud Montebourg dans l’Hérault.

 Claire Peyrard fait le résumé d’une polémique née d’un article dans Direct Montpellier Plus.

 Lucie Delorme se met dans la peau d’un sympathisant allant voter, le 9 octobre prochain, pour les primaires.

Haut Courant sur RCM

Le président : chronique d’un « monstre » politique

Mercredi 15 décembre sort Le président, le nouveau documentaire d’Yves Jeuland. Près de deux mois après la mort de Georges Frêche, le film retrace la dernière campagne politique de « l’empereur de Septimanie » : les Régionales 2010.

Les larmes coulent sur son visage, sa voix est éreintée par l’émotion. Debout sur la tribune, Georges Frêche galvanise une audience déjà toute acquise à sa cause. Ce moment fort du documentaire est symptomatique du dilemme vécu par la caméra d’Yves Jeuland. « Le président » l’avouera plus tard, mais il ment. L’histoire qu’il raconte, son grand-père travaillant dur et uniquement muni de sabots, est fausse ou romancée du moins.

L’empathie gagne pourtant le spectateur. Le réalisateur, qui a pris conscience qu’il suivait «le dernier combat d’un homme», restitue toute l’ambiguïté et la complexité du personnage. Fort, grande gueule et orateur de talent, mais cynique et prêt à tout pour gagner, le trait caractéristique du personnage était de mettre en application sa philosophie de vie : «Je suis un tendre, mais si vous êtes trop tendre, on vous tue. Moi, je tue le premier et je pleure après.»

Dans la peau de Georges Frêche

L’immersion dans l’univers frêchiste est totale, Yves Jeuland a parfaitement su se faire oublier des protagonistes. Le résultat donne l’impression au spectateur de vivre la campagne de l’intérieur, sans intermédiaires. Les relations de l’ancien maire de Montpellier avec ses collaborateurs ne subissent visuellement pas de contraintes. À tel point qu’ils en oublient souvent la présence du réalisateur.

Frédéric Bort, directeur de cabinet, est omniprésent et ses conseils sont parfois immoraux. «Il faut mentir en politique» explique-t-il au grand Georges. Ce dernier, qui visiblement n’a pas besoin de conseil en la matière, reconnaît plus tard qu’il sort parfois «les chiffres qui lui viennent à la tête».

La solitude du pouvoir

Le documentaire met en exergue la façon de faire du « président ». L’homme est politiquement seul dans son combat, ses colistiers ne sont que très peu présents et tentent dans de rares occasions d’ajouter leurs touches à cette campagne. L’impression ressentie accorde une grande place à son cabinet. Frédéric Bort et Laurent Blondiau, responsable de sa communication, le harcèlent de remarques et de recommandations.

Des consignes qu’il ne suit qu’occasionnellement. «Pas d’attaques personnelles !», son communicant se veut implacable, « l’empereur de septimanie » dans son entêtement l’ignore. Critiquant tour à tour Arnaud Montebourg, «ce petit morveux», Martine Aubry et le plus souvent sa nouvelle rivale Hélène Mandroux, sa campagne est sans concession.

Sur fond d’affaire Fabius

Au-delà du charisme de Georges Frêche, le documentaire a gagné un intérêt soudain le 28 janvier 2010. Dans l’Express, le président attaque Fabius sur sa «tête pas très catholique». Cette campagne des régionales, qui devait se résumer en un affrontement entre la gauche Frêchiste et la droite de Raymond Couderc s’est transformée en une lutte fratricide entre socialistes. L’ancien maire de Montpellier devint alors une attraction nationale. Défendu ou pourfendu, les médias se sont focalisés sur le personnage et l’élection est devenue une sorte de référendum dont « le président » est sorti gagnant.

La conclusion est identique pour ce documentaire qui dépeint avec brio la personnalité d’un des leaders les plus charismatiques de la politique régionale et française.

« Le président » : la bande-annonce du film

La candidature de Georges Frêche : « un aveu d’impuissance » de la direction du Parti socialiste

Samedi 23 janvier, Georges Frêche lançait officiellement sa campagne pour les élections régionales en inaugurant son local à Montpellier. Le président sortant de la région Languedoc-Roussillon mettait ainsi un terme au feuilleton à rebondissement le mettant aux prises avec la direction du Parti socialiste.

La cause est entendue. Martine Aubry, première secrétaire du Parti socialiste soutient la candidature de Georges Frêche en Languedoc-Roussillon pour les élections régionales des 14 et 21 mars prochains.

La maire de Lille l’a une nouvelle fois affirmé dimanche 17 janvier au micro du « Grand Jury » RTL – Le Figaro – LCI. Saluant l’action de Georges Frêche pour la région, elle a estimé que « oui », si elle était résidente du Languedoc-Roussillon, elle voterait pour lui. La première secrétaire du PS précisait toutefois qu’elle aurait « préféré une autre solution et un autre candidat de gauche avec l’ensemble de nos partenaires de gauche ». Et de rappeler que « Georges Frêche n’a pas l’investiture du PS ».

Ce soutien de Mme Aubry au président sortant se veut donc avant tout l’assurance pour le Parti socialiste de ne pas voir la droite l’emporter en Languedoc-Roussillon. « J’espère qu’il gagnera parce que je ne veux pas que cette droite gagne […] Jamais je ne ferais le jeu de la droite » a-t-elle ajouté.

Mais ce soutien correspond également à une certaine logique électoraliste pour une première secrétaire qui a affirmé à plusieurs reprises vouloir réaliser le « grand chelem » en l’emportant dans les 22 régions de la France métropolitaine. Dans cet objectif, Martine Aubry a sans doute intérêt à soutenir Georges Frêche, exclu du PS en 2007, aussi controversé soit le personnage. Un récent sondage vient d’ailleurs la conforter dans ce choix en créditant le président de région de 29% des intentions de vote (ndlr notons tout de même que le sondage a été commandité par le PS et, en l’occurence, se porte en faveur du PS). Soutien en demi-teinte donc, soutien « contraint », mais soutien malgré tout.

Victoire « Frêchiste », désaveu socialiste

La candidature de l’ancien maire de Montpellier prend donc une forme de désaveu pour la direction du Parti socialiste qui affirmait, au lendemain de la déroute électorale des européennes de juin dernier, ne pas souhaiter le reconduire à la tête de la région Languedoc-Roussillon. A la Rochelle au mois d’août, lors de l’université d’été du PS, les caciques du parti continuaient d’affirmer qu’« il serait difficile de soutenir Georges Frêche ».

Sur le site du Parti socialiste, Arnaud Montebourg affirmait que « Georges Frêche et son système ne sont décidément pas solubles dans la rénovation du socialisme ». Le Secrétaire national chargé de la rénovation s’en prenait alors à « son hostilité radicale et son mépris affiché pour un parti qu’il n’imagine pas se rénover un jour ».

Et pourtant ! En dépit de cet apparent consensus interne de ne pas voir M. Frêche reconduit à la tête de la région, c’est bien pour ce dernier, sous couvert de la candidature de Didier Codorniou, que les militant ont massivement voté (plus de 90% des votes) les 1er octobre et 3 décembre dernier. Un vote en forme de plébiscite qui se faisait au dépend du candidat soutenu par la direction du parti, Eric Andrieu.

Mise devant le fait accompli, Martine Aubry devait prendre acte, le mardi 8 décembre, de la décision des militants. Sans avaliser officiellement la candidature de Georges Frêche, la direction du parti annonçait qu’elle ne présenterait pas de liste alternative pour faire barrage au président sortant. « Nous n’entérinons pas sa candidature qui] réellement nous a posé un certain nombre de questions » déclarait ainsi Marine Aubry le 9 décembre au micro de [France Inter. « Nous prenons acte du vote des adhérents de cette région […] Nous ne proposerons pas à la Convention nationale de donner l’investiture nationale à Georges Frêche. Et nous ne proposerons pas un autre dispositif, car sans nos partenaires, ce serait ajouter de la division » précisait de son côté Christophe Borgel, secrétaire national du PS aux élections. Une petite victoire pour Georges Frêche, qui prend pour le PS la forme d’un désaveu majeur.

« Indéboulonnable » Georges Frêche

Au final, un tel déroulement témoigne d’une chose : l’assise de Georges Frêche en Languedoc-Roussillon présent depuis 1973 dans le paysage politique local.

Contacté par hautcourant, Michel Noblecourt, éditorialiste au journal Le Monde, spécialiste du Parti socialiste, explique que l’ancien maire de Montpellier « apparaît indéboulonnable, par le parti ». « C’est vrai que c’est un aveu d’impuissance [pour le PS] mais Frêche tient solidement et fermement la région » poursuit l’éditorialiste. A ses yeux, la victoire de du Président ne semble faire guère de doute : « je ne crois pas qu’il puisse être très inquiété » reconnait-il.

Si Georges Frêche s’est félicité de la décision du parti de ne pas proposer d’investiture officielle face à sa liste, jugeant que cela relevait du « bon sens », il n’a toutefois pas manqué de railler la position de la direction socialiste à son égard. Ainsi déclarait il au micro d’Europe 1, samedi 16 janvier : « Ils sont sympas au PS mais il y a beaucoup de faux culs ». Et d’ajouter, non sans provocation « Si je perds ce sera moi qui perdrait, si je gagne ce sera le PS qui gagnera ».

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