Vin bios : les sentiers de l’export

Environ 40 % du vin bio est exporté. Qui sont les principaux pays acheteurs et quels sont les particularismes à prendre en compte ? Éléments de reponse avec Pascal Barbe de Sud France Export.

En 2012 le chiffre d’affaire des vins bio en France a progressé de 15 % pour atteindre 413 millions d’euros. Mais qu’en est-il dans d’autres pays de l’UE aux États-Unis ou sur les marchés des pays émergents? Et surtout, où en est la consommation du vin bio chez eux ?

L’enquête réalisée en 2012 par l’Agence Bio établit le classement suivant : le vin bio français s’exporte en grande majorité dans la zone Europe, suivie par l’Asie et l’Amérique du Nord. Des chiffres assez proches de ceux des exportations de vins conventionnels.

vinbiosexportes.png Selon Pascal Barbe, responsable adjoint filière vin chez Sud de France Export, le plus gros client des vins du Languedoc-Roussillon (bios et conventionnels confondus) est l’Allemagne. Hors Europe, il s’agit de la Chine et l’Amérique du Nord. Côté vins bio, Pascal Barbe assure qu’au-delà de l’Allemagne « les pays scandinaves sont de bons clients car ils sont plus sensibilisés à l’écologie ». Autre constat selon lui : aux Etats-Unis le vin bio se vend mieux « sur les côtes, à l’Est comme à l’Ouest », avec un marché « assez ouvert contrairement au Brésil ou à la Russie où les taxes douanières sont très élevées ». Enfin, le Japon dont le marché est depuis longtemps « mature » est aussi un important consommateur de bio.

La Chine : futur eldorado du vin bio français ?

La Chine est un cas à part. Les acheteurs sont obsédés par le prix qu’ils souhaitent toujours le plus bas possible. Mais dans le même temps d’autres parmi eux développent un marché très haut de gamme à destination des nouveaux riches. Pascal Barbe et Sud de France export ont été les premiers à réaliser une prospection bio en Chine. Objectif : comprendre si les produits bios pouvaient y trouver des débouchés. L’agriculture biologique en est là-bas à ses balbutiements, même si le pays commence à s’y intéresser en raison « des scandales alimentaires récents qu’ils ont connus comme ceux des porcs repêchés ou du lait maternel contaminé ». De plus, une classe moyenne a émergé en Chine, dotée d’un pouvoir d’achat conséquent. Ce qui est une niche aujourd’hui pourrait s’avérer être un marché très lucratif. Aux producteurs bio de savoir en profiter…

Pour en revenir à l’Europe, l’Allemagne est le deuxième plus gros consommateur de produits issus de l’agriculture biologique en général (après les Etats-Unis au niveau mondial). Et l’attachement des Allemands aux vins français – particulièrement les vins du Languedoc-Roussillon – est réel. Pascal Barbe explique surtout cela par « le rapport qualité/prix de ces derniers, et le fait que de nombreux Allemands passent leurs vacances ici et sont attachés à cette région ».
L’Espagne est le premier producteur mondial de vin bio (voir graphique), et les pays scandinaves ainsi que la Grande Bretagne sont traditionnellement de grands consommateurs de produits issus de l’agriculture biologique. productionbiomonde.png

Une différence de goût en fonction des marchés

Outre-Atlantique les différences ne sont pas seulement marchandes, mais aussi culturelles. Face à ces contraintes, les vignerons français savent adapter leur savoir-faire pour que leurs offres correspondent à ces demandes. Pascal Barbe remarque que les vins rouges dégustés en Amérique du nord possèdent un sucre résiduel plus élevé d’un point que ceux bus en France. Cela ne veut pas dire qu’ils sont forcément plus sucrés, mais qu’ils possèdent un goût plus sucré. Une tendance confirmée par Amaury Jourjon, titulaire du diplôme national d’œnologie de l’ENSAT (université Paul Sabatier de Toulouse), qui vit aujourd’hui en Californie et travaille pour le site de vente en ligne « nakedwines » proposant des vins du monde entier. Selon lui « le vin est plus consommé au verre et en apéritif aux Etats-Unis contrairement à la France ou le vin accompagne bien souvent un repas, cela se place globalement dans une tendance classe, branchée dite « trendy » ».

En effet, il n’est pas inhabituel de commander un verre de vin rouge dans un bar, mais le vin, assure Amaury Jourjon, sera « plus sucré, plus fort en alcool mais plus facile à boire ». Le vin rouge y possède une image positive et luxueuse comme le champagne. Mais coté prix, « l’équivalent qualitatif d’un vin à 5€ en France, peut se retrouver dans les 20$ aux USA ». Lorsque l’on vend des vins français à l’étranger il est soit obligatoire, soit très fortement conseillé d’inclure une contre étiquette à la bouteille dans la langue du pays. Et gare aux particularités locales ! Aux Etats-Unis, pas de logo de femme enceinte barrée sur les étiquettes, cela représente pour les autorités américaines une image sexuelle.

Finalement selon Pascal Barbe, le vin bio n’est plus une niche sur les marchés installés, il s’est généralisé. De plus, chaque pays possède plusieurs marchés avec des comportements différents. Donc, aucune n’est généralisation possible mais une certitude : le vin biologique est en train de trouver sa clientèle. En France comme ailleurs dans le monde.

« A Port Marianne, on a acheté de l’illusion »

Port Marianne est le quartier « à la mode » de Montpellier. Cependant derrière une façade attirante mais toujours en construction, de nombreux commerçants en dressent un portrait totalement différent. Vincent en fait partie, rencontre.

Vincent, 60 ans, est coiffeur pour hommes à Port Marianne depuis 12 ans. Ce qui en fait le plus vieux commerçant du quartier. Chemise blanche rayée et noire, jean foncé et chaussures marron. Son métier, il l’exerce depuis ses 15 ans, âge auquel il a commencé son apprentissage. Aujourd’hui il fêtera sa 45ème année dans la profession. Avant d’arriver à Port Marianne il a travaillé dans le Centre, sa région d’origine, puis dans la région lyonnaise ainsi qu’a Genève en Suisse. Il est arrivé à Montpellier il y a plus de 20 ans. Avant de monter son propre salon à Pérols, il a travaillé dans trois établissements du centre ville.

« On m’a présenté Port Marianne comme les Champs Élysées de Montpellier »

Cependant il y a 12 ans il choisit de déménager : « je voyais qu’a Pérols le chiffre d’affaires baissait beaucoup, et je me suis dit que cet endroit ne valait plus rien pour le commerce ». C’est à ce moment qu’il choisit de s’installer à Port Marianne, rue Famagouste, à deux pas de l’arrêt de Tramway du même nom que le quartier. Ce changement il l’explique par « le ouï-dire. Tout le monde disait il y a 12 ans que Port Marianne serait le futur de Montpellier. La pub de Georges Frêche présentait ce quartier comme les nouveaux Champs Elysées de Montpellier. Tout le monde en disait beaucoup de bien. Ce quartier avait une image de luxe ».

« Un quartier complètement bidon »

Or aujourd’hui, ce choix ne parait pas si judicieux. Cette image du quartier de Port Marianne est pour lui : « complètement erronée. Ce quartier est complètement bidon. Il ne vaut rien pour le commerce. A Pérols ça fonctionnait beaucoup mieux qu’ici ». Il pointe de nombreux dysfonctionnements. Notamment le manque de places de parking. Et le zèle de la police municipale : « quand les clients viennent, ils tournent pendant 30 minutes pour trouver une place. Quand ils repartent, ils ont souvent pris un PV. Si la seconde fois c’est pareil, la troisième ils ne reviennent pas ». Outre ces problèmes, le manque de vie du quartier l’impressionne : « c’est un quartier qui n’est pas vivant. Il n’est passé que trois piétons en 2h. Alors qu’à l’origine on m’avait dit que ce serait fabuleux, qu’avec la fac à côté il y aurait du monde. J’avais fait un bilan prévisionnel. Je pensait coiffer huit étudiants par jour alors qu’aujourd’hui j’en coiffe huit par mois. Aujourd’hui 80% de ma clientèle sont des clients que j’avais à Pérols et à la Grande Motte. Seuls 20% habitent Port Marianne ». Sur les 10000 nouveaux habitants arrivés depuis douze ans, il répond : « Moi je n’ ai eu que dix clients de plus à peine. Les restaurateurs font le même constat, ils ont peu de gens du quartier ». Il trouve aussi très étonnant le manque de diversité des commerces. Et estime très dommageable pour l’activité du quartier qu’il n’y ait que « des banques, des restaurants et des agents immobiliers ».

Une situation qui ne s’améliore pas

« Il y a de plus en plus d’habitants et le quartier est presque plus mort qu’avant ». S’il admet que la crise est certainement passée par là, il trouve ce constat « paradoxal ». Et pas isolé à son salon. Membre de l’association des commerçants de Port Marianne, il estime que 80% de ceux qui la composent font le même constat. Mais aucun d’entre eux ne tient à l’ébruiter. « On se dit que plus on va l’ébruiter, moins on aura de chances de vendre nos commerces, ou alors moins cher ». Propriétaire de ses murs, il ne se trouve pas tout à fait malheureux à côté de ceux qui sont locataires, « parce qu’ici, les loyers sont fous ». Ils rendent difficile la réalisation de bénéfices. Dans ce contexte, le grand turnover l’a amené à voir « des commerces changer sept ou huit fois en 12 ans. Les commerces ne tiennent pas plus de trois ou quatre ans ». Si lui tient, il le doit pour beaucoup à sa femme, qui a un « bon salaire ». Sans elle, il admet qu’il aurait « déjà fermé le salon, parce que certains mois, je ne me fais même pas 500€ de salaire. Alors que j’ai encore deux ans de crédit ».

« La priorité c’est de construire des parkings »

Avec son association de commerçants, ils essaient de faire pression sur la ville. Mais défaitiste, il balance : « ils n’en ont rien à foutre de nous ». Le sentiment d’abandon est assez fort. Durant la période de Noël, il s’est étonné qu’il n’y ait « aucune guirlande » dans sa rue, alors que son « lotissement de Lattes était tout illuminé ». Autre exemple concernant les Parkings. Alors que la place à la journée coûte 1,60 € à un riverain, les commerçants doivent payer 13 €. Et quand ils demandent l’application du tarif riverain pour les commerçants, la mairie répond « allez vous garer à Odysseum ». La priorité pour lui, c’est de construire des parkings. Il concède que cela « coûte cher ». Cependant, il estime que la proximité d’un parking gratuit à côté de son salon augmenterait son chiffre d’affaires de « 20 à 30% ».

Aujourd’hui, Vincent est désabusé et se sent trompé : « quand on a acheté ici, on pensait qu’il y aurait un port qui ramènerait du monde. Depuis, ce projet est tombé à l’eau. On a acheté de l’illusion. Ici il y a trois canards qui se battent en duel dans le bassin, les gens ne viennent pas pour trois canards ». Mais à deux-trois ans de la retraite, avec le soutien de sa femme, il préfère continuer pour atteindre ses annuités légales. Si la vie est plus difficile depuis 12 ans, Vincent garde le sens de l’humour : « A l’époque je partais en vacance aux Bahamas, maintenant que je suis à Port Marianne, j’ai du mal à partir à Palavas ».

Port-Marianne : le mal-vivre des commerçants

Port-Marianne, le nouvel Eldorado promis aux montpelliérains, peine à se diversifier. Entre les innombrables bâtiments et bureaux d’entreprises, les commerçants ont la vie dure. Résultat : des habitants frustrés, des restaurants qui pullulent, un flux extérieur qui n’arrive pas…

Port-Marianne n’a rien du quartier vivant et attractif décrit dans les annonces immobilières. Tranquille, ça oui, il l’est. Le quartier vit le midi. Au rythme des cadres et employés aux alentours. 20 heures passées, ce n’est plus la même ambiance. Les rues sont désertes et sombres. Quelques riverains s’aventurent sur le bassin Jacques Cœur. Souvent les mêmes. Ils promènent leurs chiens ou passent rapidement en footing. Les visiteurs se font rares. Les plus débrouillards arrivent à se garer et regagnent un restaurant. Car les restaurants, ce n’est pas ce qui manque aux alentours.

La logique du tout-restaurant poussée à l’extrême

« Les restaurateurs du Bassin Jacques Cœur ferment les uns après les autres. Il y en a trop  », résume Alain, un riverain. Pour ce sexagénaire, membre de l’association Défense du Bassin Jacques Cœur, la Serm (Société d’équipement de la région montpelliéraine) est la principale responsable : « Elle a voulu faire de Port-Marianne un endroit festif. Mais à trop mettre de restaurants…la concurrence tue  », tranche-t-il. Des propos relayés par Jean-François Boudet, président de l’association des professionnels de Port-Marianne. « C’est la Serm qui décide de l’implantation des commerces avec la mairie. Les restaurants sont imposés sur le bassin Jacques Coeur  », explique-t-il. Les restaurants autour du bassin sont quasiment une institution. A tel point que l’arrivée d’un quelconque autre commerce sur ce secteur en étonne plus d’un. « Un magasin de vêtements avait ouvert en début d’année. Il n’a pas fait long feu. D’ailleurs tout le monde s’est demandé ce qu’il venait faire ici  », se rappelle Jean-François. Cet agent général d’assurance ne semble pas trop dérangé par le surplus de restaurants. Il travaille chez Axa, à l’angle du bassin. « Moi, ça ne me gêne pas qu’il y ait autant de restaurants. C’est pratique pour déjeuner le midi, j’ai le choix ! », plaisante-t-il. Il reconnaît tout de même que cela pose problème. « Souvent, les restaurants ne sont ouverts que le midi. Le soir, seuls la Factory ou le Trinque-Fougasse, celui de mon frère, sont ouverts. Port-Marianne, c’est beaucoup de bureaux. Les gens qui déjeunent là le midi travaillent sur le bassin ou viennent du Millénaire. Le soir, c’est désert  », regrette-t-il.
Il est vrai que la concurrence est rude. Si le Trinque-Fougasse et la Factory s’en tirent bien, les restaurants milieu de gamme ont bien du mal à maintenir le cap. Les charges sont énormes et la clientèle se dilue. En témoigne le turnover impressionnant des restaurateurs. Marc Rayna, vice-président du comité de quartier de Port-Marianne, est bien placé pour en parler. Il est agent immobilier : « Les restaurants sont tellement nombreux qu’on aurait de quoi nourrir la moitié de Montpellier ! Le prix des loyers est rédhibitoire. Sur le Lez, il faut compter 23 euros le mètre carré pour de la location, sans charges. Sur le bassin, c’est bien plus cher. Par exemple, le restaurant Jap Asian, qui compte 200m² de surface, doit payer un loyer mensuel de 7000 euros. Si vous êtes la Tour d’Argent (restaurant chic de Paris à 170 € le menu du soir, ndlr) vous pouvez vous le permettre, mais sinon…c’est suicidaire ». Il conclut, un brin défaitiste : « La mairie a vendu ce quartier comme étant les nouveaux Champs-Élysées. Du coup, les prix sont très élevés. Les investisseurs achètent les locaux très cher et forcément, derrière, ils les louent cher. Malheureusement, au bout de la chaîne, les gens n’ont pas l’argent nécessaire pour faire face ».

Et le commerce de proximité alors ?

A l’image de tous les habitants, Didier, retraité, regrette qu’il n’y ait pas plus de diversité des commerces. « Si on avait mis d’autres types de commerces et qu’on les avait mieux mélangés, tout le monde s’y serait retrouvé. Le tout-restaurant, c’est se tirer une balle dans le pied  », soupire-t-il.
Marc Rayna est remonté contre la Serm et la mairie. « Les gens, ce qui les intéresse, c’est la vie quotidienne. On est censés être le nouveau centre-ville et il n’y a rien… Le Carrefour Market, c’est nous qui avons insisté pour qu’il soit construit  », déplore-t-il. Port-Marianne est un quartier en devenir. Mais la méthodologie de construction n’est pas au point :  « On sait monter des immeubles mais il n’y a pas de service minimum offert aux habitants. Pour faire vivre un quartier, il faut une crèche, une poste, des médecins, des commerçants de toutes sortes  », poursuit Marc. Il regrette le manque de relation commerçants-habitants : « moi, en tant qu’habitant, il me manque un boucher, un traiteur, un pressing, un poissonnier… Il y a ce genre de services au Carrefour Market mais ce n’est pas pareil. Chez un boucher de quartier, on n’est pas anonyme  ». Il reconnaît que tout n’est pas noir. Côté boulangeries, la situation est satisfaisante. Le secteur Jacques Cœur en compte trois. Les coiffeurs sont présents. Eux aussi souffrent. « La dernière fois que j’ai croisé mon coiffeur, il m’a dit qu’il n’avait fait que trois coupes dans la journée. Avant, il était basé à Pérols. Il avait un salon de coiffure qui marchait bien. Aujourd’hui, il se mord les doigts d’avoir déménagé  », rapporte Jean-François Boudet.
Certains services du quotidien sont inexistants. Déposer un vêtement au pressing est un vrai parcours du combattant. Marc Rayna, comme tout agent immobilier qui se respecte, porte tous les jours des costumes. Autant dire que c’est une galère, pour lui : « je dois aller jusqu’à Odysséum. Nous n’avons pas de pressing à Port-Marianne. Moi, encore, ça va, mais imaginez une personne à mobilité réduite… C’est juste infaisable  », peste-t-il.

Pas de lumière, pas de parking, pas d’entretien…

La Serm n’est pas la seule fautive dans l’histoire. Si le flux extérieur n’est pas au rendez-vous, ce n’est pas qu’une question de stratégie d’implantation de commerces. Alain témoigne d’un contexte global qui s’est dégradé. « Le Fise et le wakeboard ont dégradé le cadre de Port-Marianne. Les roseaux poussent de manière très anarchique sur le bassin. Il n’y a plus cet attrait champêtre du début. Il n’y a quasiment plus de pelouse  ». Selon lui, le cadre joue fortement sur la fréquentation du quartier : « Avant, venir ici, ça faisait une sortie sympathique. Mais maintenant, les chemins sont défoncés et l’environnement est beaucoup moins agréable. Le bassin est laissé en friche depuis deux-trois ans. Evidemment que ça a contribué à la perte de clientèle  ». Il tient à souligner un problème majeur : le manque de lumière autour du bassin. « Le soir, quand les dames de l’association rentrent chez elles, elles ne sont pas tranquilles. Il fait vraiment très sombre  », commente-t-il. Il ajoute :  « Depuis peu, un camp de roms s’est installé dans le quartier. Les gens ne sont pas venus s’établir à Port-Marianne pour vivre dans un contexte pareil. Mais personne ne fait rien ».
Quoi qu’il se dise, Port-Marianne reste une cité dortoir. Retraités aisés et jeunes cadres moyens se partagent le quartier. Le charme n’opère pas et les visiteurs se font rares. En cause, le stationnement. Un réel handicap dans le quartier. Aller au restaurant, oui. Mais où se garer ? Bien évidemment, les commerçants en pâtissent. Marc Rayna en témoigne : « j’ai parlé à un ami restaurateur il y a quelques jours. Il m’a raconté qu’un soir, des clients qui avaient réservé une table ont appelé pour annuler. Cela faisait 40 minutes qu’ils tournaient en rond sans trouver de place pour se garer. Ça devient vraiment problématique  ». Alain pense que c’est une question de pratique : « Les montpelliérains ont eu l’habitude d’aller au restaurant et de laisser leur voiture juste devant. A Port-Marianne, c’est tout bonnement impossible  ». Odysseum, le centre commercial à ciel ouvert regroupant plus de 100 boutiques, n’est pas loin…et dispose d’un parking de 2000 places. De quoi faire rêver les commerçants de Jacques Coeur. « L’ouverture d’Odysseum a drainé une partie de la clientèle. Avec ses restaurants, le cinéma et les parkings à côté, Odysseum est beaucoup plus attractif. Ça a créé un réel déséquilibre. Pour le coup, là-bas, on peut aller au restaurant et garer sa voiture juste à côté  », explique Alain.
Les esprits s’échauffent et les tensions se font sentir entre riverains et pouvoirs publics. Les revendications des habitants du quartier sont simples. Marc Rayna se charge de les faire remonter aux autorités compétentes. Visiblement, le temps de réaction est long. Très long. « Il faut une meilleure signalétique. Pas un panneau indique la direction du bassin Jacques Cœur. Il est complètement confiné et n’amène que très peu de clients. De façon similaire, personne ne sait qu’il y a un parking accessible sous la mairie  », rapporte-t-il.

Seules la mairie et la Serm ont le pouvoir de venir en aide aux commerçants de Port-Marianne. Malheureusement, ces instances sont restées muettes face à nos questions. Espérons qu’elles ne seront pas sourdes face à la colère grandissante des habitants du quartier.

L’Odysseum de Montpellier : quatre ans après ?

Fin 2009, Georges Frêche présentait l’Odysseum de Montpellier comme « un véritable levier fondamentale pour l’emploi ». Quatre ans après son ouverture, comment ce complexe unique en Europe est-il perçut par les Montpelliérains ?

Au terminus de la ligne 1 du tramway de Montpellier, l’Odysseum s’inscrit dans un ensemble urbain mêlant achat et plaisir. Quatre ans après son ouverture, le centre commercial répond parfaitement à la volonté de l’agglomération de renforcer et d’étendre l’attractivité du cœur de ville. Malgré des débuts difficiles, le complexe où règnent la démesure et la consommation excessive, a réussi à fidéliser sa clientèle. «L’été dernier, ça a été le boom en matière de fréquentation» confie une employée de la librairie Sauramps. Une croissance de la fréquentation liée au développement des activités ludiques comme le cinéma géant, la patinoire, le bowling, l’aquarium et le planétarium. L’Odysseum accueille un public de plus en plus familial, surtout les week-ends.

Le centre commercial entend bien continuer son expansion. Le complexe juteux représente un business conséquent pour les commerçants. De nombreuses entreprises ont choisi de s’y implanter et l’on attend avec impatience l’ouverture de la gare en 2017, qui promet un trafic important dans le quartier. Celle-ci s’accompagnera du projet Odysseum 2, un prolongement pharaonique de l’Odyseum, qui réserve un quartier d’affaires, des logements, des commerces, de l’hôtellerie, de nouveaux loisirs dont un casino et un vrai parc d’attractions.

Une vie de quartier peu développée

Malgré le succès du centre commercial, il semble que la vie locale soit peu développée. Principal lieu de consommation, le quartier laisse peu de place aux habitations. Une résidence étudiante y est toutefois implantée pour accueillir les élèves de l’établissement George Frêche, seul lycée de la zone. La situation géographique du quartier, aux portes du centre ville, empêche la construction de nouveaux logements. Cependant, la zone, a l’avantage d’être située en bordure d’autoroute, les touristes s’y arrêtent facilement pour se reposer. Selon le personnel de l’hôtel Holiday Inn, le quartier est plus vivant l’été. L’établissement enregistre une clientèle à grande majorité touristique pendant cette période (80%). En dépit de l’aspect pratique de celui-ci, l’Odysseum n’est pas la première destination des Montpelliérains : «On y vient seulement si l’on a quelque chose de précis à faire, je favorise d’avantage le centre ville qui est plus dynamique» confie une élève du lycée Georges Frêche. Certaines enseignes du centre commercial comme le supermarché Géant Casino, déplorent ce manque de fréquentation l’hiver. La gratuité des parkings serait-elle une solution ? Il s’agit en tout cas d’un souhait récurrent chez les Montpelliérains.

Les soldes d’hiver : un démarrage timide

Le coup d’envoi national des soldes d’hiver a été donné mercredi 9 janvier à 8 heures, avec des démarques importantes. Selon l’agence France Presse et l’IPSOS, le budget moyen des Français est en baisse avec 223 euros par personne contre 244 euros l’an dernier. Ce n’est donc pas gagné pour les commerçants, d’autant plus que les soldes sont concurrencés par les promotions proposées tout au long de l’année. Vêtements, chaussures et matériel high-tech, sont les produits phares de cette période de soldes d’hiver 2013.

Mercredi 9 janvier au centre commercial Polygone de Montpellier. Dans un contexte où les consommateurs restreignent leur budget, les Montpelliérains sont nombreux à arpenter les boutiques à la recherche de la bonne affaire. Cette année les achats utiles semblent primer sur les coups de cœur : «Nous avons vu de bonnes affaires mais nous privilégions les articles dont on a réellement besoin. Nous essayons de ne pas céder à la tentation car nous avons un budget limité. Environ 550 euros pour deux.» confie Sylvie et sa fille Eva au centre Polygone de Montpellier. La tendance des consommateurs cette année : faire de repérage sur internet. Selon la fédération e-commerce et vente à distance, plus de sept consommateurs sur dix ont fait du repérage en amont sur internet, c’est le cas de Jérôme et son épouse Maya : «Il y a tellement de monde pendant les soldes et c’est mal rangé dans les rayons, on s’y perd. Nous avons repéré des vêtements qui nous plaisaient sur les sites web des magasins pour gagner du temps et nous venons voir sur place le premier jour des soldes pour les essayer. L’attente pour les cabines d’essayages est insupportable !» Autre tendance : les magasins de grandes marques sont nombreux à avoir proposé des ventes privées, pour clients fidèles, dix jours avant la période des soldes. Cette situation affecte la fréquentation des soldes. Bien que la fin de cette période propice aux bonnes affaires soit annoncée pour le 12 février, des commerçants spécialisés dans l’habillement, tels que Zara ou Mango, déclarent que «l’essentiel des soldes se réalise les dix premiers jours et représente 30 % des ventes totales de leur enseigne.» Les soldes restent donc un moment fort de consommation mais beaucoup moins que par le passé, notamment à cause d’Internet. Les consommateurs ne sont plus forcés d’attendre les soldes pour accéder à des offres très attractives.

Internet : une concurrence écrasante

Les sites spécialisés dans le textile frappent fort cette année avec des remises de l’ordre de – 60 %, voire – 70 %. Aujourd’hui, il est beaucoup plus facile de trouver des bonnes affaires sur ces sites spécialisés que de se ruer dans les magasins. Le large choix des produits, les prix bas, la rapidité de livraison sont plébiscités par les cyberacheteurs, en particulier les jeunes : «Grâce à mon iPhone, j’ai présélectionné mes achats sur les sites web et j’ai attendu l’ouverture des remises, signalées « Off » ou « On », sur les sites, pour acheter» déclare Amine venu accompagner sa copine dans le bain de foule des soldes du Polygone. Les sites spécialisés dans la mode comme Net-à-porter, Topshop, Outshop, Stylebop ne cessent de se développer et permettent également aux plus fashionistas d’acheter des pièces originales et rares. Nombreuses sont les marques anglaises et américaines à ne pas posséder de magasins en France. En boutique ou sur Internet les soldes d’hiver sont toujours l’occasion de se faire plaisir avec modération après les fêtes !

Carlos Fructuoso : «Tousenville.com met en avant les commerçants de l’Écusson»

Lancé le 13 novembre 2010, Tousenville.com permet de se balader dans les rues du centre-ville de Montpellier depuis chez soi. C’est le pari de Carlos Fructuoso, ancien directeur commercial de Direct Montpellier Plus. Le site propose une modélisation de l’Écusson en 3D et un réseau de commerçants qui mettent en ligne une sélection d’articles de leur boutique.

Chope’in : la bière tient boutique à Montpellier

Au cœur du quartier des Beaux Arts, la rue Bernard Délicieux porte désormais très bien son nom. Et pour cause, depuis près d’un mois et demi, Chope’in s’y est installé. Le concept : une boutique spécialisée dans la vente de bières.

Le Graal est désormais à portée de main. Ce Graal, c’est Chope’in, une boutique entièrement dédiée à ce délicieux breuvage qu’est la bière. Et son prophète se nomme Olivier Tabariès. Mais comment ce Nîmois de quarante ans a-t-il pu se lancer dans cette aventure? Il nous le donne en mille : «C’est tout bête, je suis amateur de bière, j’adore vraiment ce produit». Ça tombe bien, nous aussi.

De la bière jusqu’à plus soif

Et ce n’est pas rien, car tenez-vous bien, Chope’in est le premier magasin du genre à Montpellier. Bien sûr, il existe d’autres points de vente à emporter, mais ceux-ci sont adossés à un bar. Alors qu’il existe des caves à vin, les caves à bières manquaient à l’appel. Le gérant argumente : je possède une tireuse à bière chez moi, et un jour qu’elle était en panne, je n’ai pas réussi à trouver un seul commerce qui pouvait remédier à mon problème». Honteux non ? Alors il décide d’y remédier lui-même. Une nouvelle vie pour cet ancien chef de projet des télécoms, qui a décidé de faire «primer la passion».

Entre bières trappistes et celles issues de la région, l’offre est d’environ quatre-vingt bières. Mais ce n’est qu’un début. Le commerçant pioche dans un catalogue contenant trois mille étiquettes. «Le but est de renouveler les bières qui marchent, puis d’ajouter de nouvelles références, trente à cinquante par livraison». On en a presque le vertige ! À cela s’ajouteront prochainement des dégustations et la possibilité de louer une tireuse professionnelle pour vos soirées les plus folles.

La passion pour la pression

L’ambition du gérant est aussi de «faire découvrir les produits difficilement accessibles» . Les brasseries locales par exemple, celles qui reviennent à l’artisanat. Car, si selon lui, toutes les brasseries sont censées être artisanales, ce n’est pas le cas des grandes industries, comme Kronenbourg ou Heineken. «Ce ne sont pas des brasseries, ils font des bières qui sont tout le temps pareilles, alors que la bière est un produit vivant, au même titre que le vin.»

Vous l’aurez compris, le dada d’Olivier Tabariès, c’est la bière. Il est d’ailleurs intarissable sur les aspects techniques du cycle de production du produit. De la torréfaction de l’orge à la fermentation, le commerçant est incollable. Sa bière préférée ? «C’est une passion, donc par définition j’aime toutes les bières !»

Cette passion pour la bière, Olivier ne demande qu’à la partager. Comment résister ? D’ailleurs, pourquoi résister ?

Halles Laissac: des tripes, des courges et du rouge

«Un matin de marché aux Halles», ce n’était pas exactement ce à quoi nous nous attendions. À la place des légumes chers et des commerçants aigris, à Laissac, nous avons trouvé une ambiance chaleureuse, des clients fidèles et bavards. Récit d’une crise de foie.

9h40, un matin de Beaujolais Nouveau, aux Halles Castellanes. Pas un chat, les commerçants semblent à peine se réveiller. Le reportage paraît d’ores et déjà compromis. Qu’à cela ne tienne, nous irons aux Halles Laissac. 9h50, arrivés sur les lieux, l’ambiance est toute autre. Le contraste avec les Halles Castellanes est saisissant. Une structure métallique qui semble crouler sous le poids des années, des commerçants qui s’activent à leurs besognes quotidiennes, et surtout, des clients qui flânent d’échoppe en échoppe. Si ces halles sont d’apparence précaire, leur histoire ne l’est pas.

Au détour d’un étal, Jeannine, jeunette de 78 ans, nous alpague: « Vous êtes nouveaux ici? » Une permanente blond Marilyn, un visage gaiement fardé, de grosses bagues à chaque main, un accent chantant du midi, Jeannine fait partie des murs. « Je viens ici tous les jours depuis que je suis petite. J’accompagnais maman aux commissions, et j’ai pris le relais ». On ne peut plus l’arrêter. On apprend rapidement qu’elle est cancer ascendant scorpion, qu’elle aime la viande chevaline et qu’elle travaillait en tant que secrétaire au Lycée Clémenceau. Derrière sa vitrine, une commerçante qui a suivi le monologue s’exclame «Vous êtes tombés sur la bonne!»

«La triperie, si ce n’est pas frais, vous ne tenez pas le choc»

Plus loin, Françoise s’affaire à ranger museaux et pieds de porc dans son présentoir. Elle tient la dernière triperie de Montpellier. Sa mère avait ouvert le magasin en 1958, et la fille a pris la relève en 1970. Elle nous explique brièvement le fonctionnement des halles: «Ici, on est tous locataires, on paie un loyer en fonction du m². Moi, je paie 750 euro par trimestre». Les clients se succèdent. L’un achète une tête de veau, le suivant deux cœurs de bœuf. Pour beaucoup, ce sera du foie ou du gras double. «La triperie, si ce n’est pas frais, vous ne tenez pas le choc,» explique la commerçante. Pour elle, c’est simple, elle se fournit chez son frère, qui a repris le poste de chevillard de son père.

En face, la tenancière de la maison Christopholi range potimarrons et salades dans ses paniers. Elle a un regard moins positif sur les halles que les autres commerçants. Selon elle, ce lieu devrait être détruit, ou au moins réhabilité. «Elles sont vraiment vétustes, et la clientèle vieillit. Les jeunes ne savent pas que les légumes sont moins chers ici qu’en grande surface». Mais elle reste optimiste sur un fait: avec les émissions culinaires qui ont le vent en poupe, elle compte bien sur un retour aux produits des terroirs. Aujourd’hui, selon elle, les habitudes changent, les consommateurs demandent de plus en plus des produits bio. «C’est très dur de faire du bio en France, avec la concurrence de l’Espagne du Maroc et d’Israël». Et de se désoler de la disparition des petits producteurs de proximité. Surtout qu’elle a pris un risque en prenant la succession de sa mère dans le commerce. «Avant, j’étais infirmière de bloc et j’ai repris les légumes pour des raisons sentimentales» lorsque sa mère est partie à la retraite.

«Je crois bien que cette année ils ont mis du raisin dedans!»

DSCF5778B.jpgIl est 10h30 et il nous reste le cœur des halles à visiter. Placé au centre, ouvert aux quatre vents, le bar est déjà occupé par une dizaine d’hommes, tous un ballon de rouge et un bout de pâté devant eux. Accoudés au bar, ils discutent, refont le monde. Dans notre souci de réalisme, nous nous joignons à la bande apparemment joyeuse pour comprendre l’essence des halles. Nous faisons la connaissance du taulier, Gérard. À peine les verres de Beaujolais Nouveau servis, il s’exclame «je crois bien que cette année ils ont mis du raisin dedans!». Très vite, nous nous faisons adopter par la clientèle du bar. Une première tournée est offerte: «ça vient des Corses, là-bas!» Les autres s’enchaînent rapidement: «celle-là, c’est de la part d’un de vos confrères journalistes». D’ailleurs ce dernier nous rejoint rapidement et entame la conversation. Il semble connaître le bar de longue date: «Ici, il y a la moitié des clients qui n’a pas de voiture, et l’autre moitié qui n’a plus le permis!» Une fois intégrés, nous pouvons questionner Gérard, qui travaille ici depuis une douzaine d’années. Les clients sont pour la plupart réguliers. Très tôt le matin, ce sont les commerçants qui viennent prendre le café, puis suivent «ceux qui vont au boulot». L’heure passe, notre sens journalistique s’évapore, nous voilà copains comme cochons avec la bande à Gégé.

Pour les commerçants de la Rue de la Loge, une crise en cache une autre

La Rue de la Loge est le principal axe de l’Ecusson. Au lendemain des fêtes de Noël, les magasins sont bondés. Rencontre avec quelques commerçants.

Un samedi soir bruineux, quelques jours après le Réveillon, la Rue de la Loge conserve les accents de Noël. Les illuminations se reflètent dans les flaques. Malgré le mauvais temps, petits et grands flânent et contemplent d’un œil pétillant les vitrines décorées de neige, de guirlandes rouges et de boules dorées.

Pour se réchauffer, rien de mieux qu’entrer dans une chocolaterie et respirer les effluves du cacao. Godiva-Médicis regorge de friandises : pralinés, ganaches, liquoreux au champagne… La boite rouge incrustée de diamants Swarovski s’est avérée être un écrin parfait pour toutes ces douceurs. La valeur ? 160 euros. Il n’en reste plus qu’une en boutique. D’un œil connaisseur, une petite grand-mère commande un plateau de marrons glacés, fruits confits et autres gourmandises, pour la somme de 150 euros. La crise ne semble donc pas toucher la chocolaterie. Les commerçants interrogés, sont unanimes : « Nous avons préparé les fêtes comme d’habitude. Les chiffres précédents n’étaient pas mauvais, alors pas de raison de s’inquiéter« . Cendrine, gérante de Godiva, bien que consciente de la baisse du pouvoir d’achat des Français, n’a pas sa langue dans sa poche : « La crise, elle a bon dos ! C’est un faux prétexte. Derrière, il y a d’autres problèmes de société que personne ne veut voir« .

Rangeant des dragées, elle dénonce des phénomènes sociaux qui seraient à l’origine des difficultés des commerçants. L’évolution de la société aurait une incidence directe sur le commerce, surtout en période de Noël. Depuis 20 ans, avec l’augmentation des divorces, le phénomène des familles recomposées, les repas de famille sont plus rares et les cadeaux pour les proches aussi : « les gens me disent : ‘Nous ne fêtons pas Noël ou le Réveillon, nous sommes seuls, les enfants ne sont pas là cette année’. Les grands-mères qui ne voient plus leurs petits-enfants, n’achètent plus de chocolats pour eux« . Cendrine constate que les gens préfèrent partir en voyages : « pour les agences touristiques, les chiffres progressent« . Donnons en exemple, le site Voyages-sncf.com qui a enregistré un record d’un million de connections, le jour d’ouverture des réservations pour la période de Noël.

Vive, Cendrine souligne un autre phénomène : la perte du sens de la convivialité. « Il y a quelques années, les gens remerciaient leur médecin de famille ou la maîtresse d’école. Aujourd’hui, avec leur travail, ils sont plus mobiles et ne restent pas suffisamment dans un lieu pour nouer des liens. Ainsi, tous les petits cadeaux liés à cette sociabilité se perdent.« . Les ventes ont donc changé : « La valeur du panier moyen était plus élevée. Facilement 500 francs minimum, soit 75 euros. Il était courant de vendre des paniers à 2000 francs, soit 300 euros. Maintenant c’est 40 euros en moyenne. Pour faire le même chiffre, il faut plus de clients. Soit quatre pour un« . Pourtant, Cendrine ne se plaint pas : « nous nous y retrouvons quand même. Nous avons beaucoup plus de petits clients avec le rajeunissement de notre clientèle.« . La chocolatière avance un autre atout : la situation de son magasin. La rue de la Loge est un sacré lieu de passage. Chose que confirme Philippe Larose, son voisin opticien : « si je n’étais pas situé rue de la Loge, aujourd’hui je n’existerais pas. Une grande majorité de ma clientèle est constituée de gens de passage. « .

Un petit liquoreux serait parfait pour accompagner une truffe. Petit saut dans la boutique surpeuplée de Nicolas, où le caviste Patrice Orset confirme les dires de sa gourmande de voisine : « il n’y a pas de grosse différence. Cette année, nous avons vendu beaucoup de Champagne. Seules les entreprises ont réduit leur budget« . En présentant une bouteille de Whisky digne d’un flacon Chanel n°5, Patrice rajoute : « pour nous, décembre c’est un quart du chiffre de l’année. Heureusement que les fêtes ont marché !« .

Finalement, le vrai problème auquel sont confrontés les commerçants est l’essor des ventes sur Internet. Cendrine est claire : « je ressens amplement la concurrence d’Internet. Mais c’est surtout l’industrie de l’habillement qui est touchée. Les gens essayent dans les boutiques et achètent en ligne« . Et Philippe de renchérir : « Les gens viennent, essayent les lunettes et prennent les références pour acheter sur la Toile« . La chocolatière donne quelques chiffres : «  la vente Internet croît de 27% par an. 43% des Français font leurs achats de Noël en ligne« . Chiffres confirmés par la Fevad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance). « Face à cette montée d’Internet, est-ce qu’il faut continuer à monter autant de boutiques ? » questionne la chocolatière. A Montpellier, comme ailleurs, sont créés de plus en plus de commerces alors que la population n’augmente pas proportionnellement. Alors, « au lieu de se répartir un gâteau en quatre, on se le partage en douze« . Espérons que ce gâteau sera au chocolat, et accompagné d’une petite flûte !

Les halles Laissac, côté coulisses

Gérard, cafetier : « Faire évoluer la vie à l’intérieur des halles ».

P1370463-2.jpg Gérard, ancien pro de football, reconverti en coiffeur, tient, depuis 2004, la buvette « Chez Corinne ». L’enseigne est ouverte depuis l’inauguration du marché, en 1962. Le lieu est aussi le rendez-vous incontournable des halles : « Je démarre tous les matins avant
six heures ! Il n’y a que deux cafés du centre-ville qui commencent si tôt ».
Pour lui, les raisons de préférer les halles Laissac sont nombreuses : « Nous avons les meilleurs commerçants de toute la ville. Il y a une ambiance conviviale qui touche les clients. » Gérard est cependant conscient que le marché est déserté par les plus jeunes. L’homme est ouvert à l’idée de rénover ce lieu : « Je pense qu’il faut rendre la structure extérieure plus attirante. Les étages de parking sont une vraie verrue dans le centre historique… » Mais il fustige le manque d’initiatives de certains de ses collègues commerçants : « Il faut aussi faire évoluer la vie à l’intérieur, en proposant des animations. Le problème c’est que les autres commerçants attendent trop de la municipalité et ne proposent pas grand-chose de nouveau ».

Alain, le doyen de Laissac : « C’est agréable de travailler ici ».

P1370461-2.jpg Autrefois, les halles Laissac comptaient une dizaine de bouchers. Aujourd’hui, ils ne sont plus que trois. Alain Pons est l’un de ceux-là. Depuis vingt-trois ans. Ce qui fait de lui le plus ancien des commerçants des halles. Il a connu une autre époque, où les échoppes fleurissaient : « nous étions plus de soixante. Aujourd’hui, nous sommes vingt-trois. Les deux étages étaient remplis. Maintenant, les commerçants n’occupent que le bas ou préfèrent s’installer à l’extérieur.» Lui, préfère rester : « C’est agréable de travailler ici. Nous sommes plus proches de nos clients. Le contact humain est important ». De génération en génération, sa clientèle lui est fidèle : « J’ai servi les grands-parents, les parents et maintenant c’est le tour des enfants ». Pourtant, les jeunes couples se font rares. Faisant fi du vieillissement de sa clientèle, le boucher vante les mérites du marché couvert : « Comparé à un marché plein air, nos conditions de travail sont plus agréables. Par exemple, nous sommes à l’abri du vent. D’ailleurs, les portes coulissantes ne datent que d’une dizaine d’années. Notre plus grand avantage est que nous pouvons avoir une vie de famille à côté. Nous avons nos après-midi de libres. »

Emilie, une relève froidement accueillie.

flzeu-2.png Ouverte depuis le début du mois d’octobre, Emilie Argiolas, est critique sur l’ambiance aux halles : « La plupart des commerçants se connait depuis longtemps, et certains entretiennent d’anciennes rivalités. Ici c’est un peu chacun pour soi, et les nouveaux venus sont mis à l’écart. » En reprenant ce magasin, la jeune fleuriste sait que l’emplacement de son commerce maximise ses chances de réussir : « Le boulevard du Jeu-de-Paume est un passage obligé ». Reste que l’enseigne qu’elle a reprise avait besoin d’un sacré coup de neuf : « La majorité des magasins des halles a gardé une allure traditionnelle. J’ai voulu faire de ce lieu un fleuriste urbain, plutôt que de conserver l’allure d’un fleuriste de marché. »

Marie, nouvelle arrivante aux halles : « Je suis à 100% souriante dans la journée ».

P1370465-2.jpg Installée depuis le mois de mars, Marie, est l’une des dernières arrivées aux halles Laissac. Elle a repris un stand qui donne à l’extérieur du marché. L’intégration dans la famille des halles se fait petit à petit : « Je suis un peu à part parce que les autres commerçants se connaissent depuis des années. Il faut que je fasse ma place. Je suis à part aussi à cause de mon emplacement à l’extérieur ». Côté produits, la jeune femme mise sur la diversité « Je vends de l’huile d’olive, de la confiture, des fruits et légumes secs et du miel en plus des olives préparées. Ce sont à la fois des produits régionaux et de France. Mais certains viennent d’Italie, du Pakistan et d’Inde. » En hiver, les halles tournent au ralenti : « En ce moment c’est plutôt calme. Ce n’est pas pareil en période estivale où les gens prennent plus souvent l’apéritif. En été, ils sont attirés par l’odeur des olives et viennent me voir. » Pour attirer et fidéliser sa clientèle, un seul mot d’ordre : « Je suis à 100% souriante dans la journée. Il faut aussi aimer le dialogue, c’est important pour s’attirer des clients. C’est une des bases à connaître quand on fait les marchés. » Pour faire face à la baisse de la fréquentation, « il faudrait rénover la Halle, mais pour l’instant, les projets sont au point mort ».

Jean Michel, primeur : « Cela fait trois générations que l’on est sur place »

P1370470-2.jpg À son compte depuis 20 ans au marché Laissac, Jean Michel est la troisième génération de vendeurs de légumes installée ici. Autrefois, la distribution de commerces était bien différente : « Avant, les légumes se vendaient à l’étage. Lors de la construction du parking en 1990, nous nous sommes tous installés en bas ». L’avantage d’être installé aux halles est clair pour lui : « Je ne peux pas imaginer être dans un marché extérieur et ne pas pouvoir disposer du frigo et de toutes les installations ». La Halle a fait l’objet d’une rénovation très sommaire en 2000 : « On a eu un nouveau carrelage au lieu du béton, mais vous voyez bien l’état ». En effet, l’immeuble s’avère un peu vétuste. « Nous attendons de voir ce que la mairie décide en termes de rénovation » prononce – t-il avec un certain air d’inquiétude.

M. Martínez, charcutier : « Il y a beaucoup de clients qui viennent de Pérols, Lattes, St Jean de Védas… »

P1370469-2.jpg Pour M. Martínez, le petit plus des halles Laissac est son parking qui permet aux personnes des villages environnants de s’y rendre pour faire leurs courses. S’il est installé depuis 22 ans à Laissac, sa femme quant à elle, exerce la même activité aux halles Castellane : « là bas, on y travaille toute la journée, donc même si la clientèle n’est pas concentrée, c’est plus avantageux ». Ceci explique les loyers plus élevés en plein centre ville. Il exprime certaines craintes vis-à-vis de l’avenir : « On sait qu’il nous reste cinq ou six ans avant la construction du parking quartier St. Roch. Mais, à ce moment là, le garage de Laissac sera démoli. Impossible de savoir ce que l’on va faire de nous » Entre temps, il cherche à satisfaire les clients avec zèle : « J’ai des produits italiens, espagnols, français, des spécialités catalanes. Le client peut choisir » Au cours des années, les habitudes de consommation ont muté : « Avant les gens achetaient pour la semaine, en grandes quantités et des produits de base comme le lard, le foie, pour faire du foie gras. Maintenant ça reste rôti – jambon – saucisson. Il n’y a que pendant les jours de fêtes que les gens achètent des produits un peu différents ».