Fillon dit non à la taxe carbone

François Fillon annonçait hier, mardi 23 mars, le report de l’application de la taxe carbone au niveau national, au profit de négociations européennes, provoquant ainsi de nombreuses réactions dans le milieu politique. Alors que le président de la République proclamait le 15 septembre 2009 que cette taxe serait un événement historique, à la hauteur de l’abolition de la peine de mort ou de la décolonisation, le recul qu’affiche le gouvernement suite à l’annonce de François Fillon suscite incompréhension et critiques de toutes parts.

Au micro de Nicolas Demorand, au matin du 24 mars, Michel Rocard, président de la conférence d’experts sur la taxe carbone mais qui se considère toujours de l’opposition, trouvait « stupide » cette décision du gouvernement : « il a réagit trop rapidement, sous le coup des élections régionales […] et cela d’autant plus que Nicolas Sarkozy considérait jusqu’à hier que les élections locales ne devaient pas avoir de conséquences nationales. »

Également contacté par France Inter, Cécile Duflot se disait consternée : « je suis fatigué des hommes politiques français qui se tournent vers l’Europe quand ils n’ont pas le courage d’assumer leurs promesses. »

A cette annonce, Noël Mamère a violemment réagit sur le Monde.fr : « le président a préféré plaire à sa majorité et satisfaire les grands lobbies industriels de ce pays ainsi qu’au Medef plutôt que de répondre à ses engagements. »

Comme écho, Laurence Parisot se réjouissait dans un communiqué : « nous sommes soulagés, notamment pour toute l’industrie qui n’aurait pas supporté ce nouveau handicap de compétitivité […] Nous avons su convaincre. »

Par contre, Chantal Jouano se plaint sans retenue aucune sur le site les échos.fr : « je suis désespérée de ce recul, désespérée que ce soit l’écolo-scepticisme qui l’emporte […] C’était possible de le faire en France avant de le faire en Europe. C’est ce qu’on avait prévu à l’origine, c’est ce que d’autres pays comme la Suède ont fait. »

Empêtrée dans ces contradictions, la majorité ne sait plus sur quel pied danser. Après le revers mal vécu des élections régionales, que les ministres ont tous tenté de minimiser, on sent naître une fébrilité face aux problèmes qui s’accumulent. Les manifestations sociales d’hier, mardi 23 mars, ayant remportées un assez bon succès, la réforme des retraites qui s’annonce difficile pour le gouvernement et qui peut jouer sur la capacité de Nicolas Sarkozy à se représenter en 2012 en faisant remonter ou dégringoler sa côte de popularité, ainsi que les évidentes tensions internes au sein même de la majorité qui remettent en cause les méthodes politiques du président, déstabilisent fortement les dirigeants.

Tout ceci montre que la présidence est beaucoup moins solide et inébranlable que ce qu’elle s’évertue à démontrer. Traduisez : la majorité, sous des dehors sereins et déterminés, comme investie d’une sorte de mission divine que rien ne saurait faire ployer, risque pourtant de ralentir fortement la machine à réformer qui jusqu’ici semblait difficile à arrêter. La réforme des retraites sera le révélateur des problèmes que la majorité accumule et certainement le plus dur combat que le président aura à mener.

Le silencieux lendemain du « Grand débat sur l’identité nationale »

Presque un mois après sa suspension, qu’en est-il du « grand débat sur l’identité nationale » mis en place par Éric Besson au mois de novembre dernier ? Hautcourant revient sur les suites de ce débat controversé, longtemps au cœur de la tempête médiatique.

C’est un fait qui ne se dément pas. Le « grand débat sur l’identité nationale » lancé par Éric Besson a fait pschitt. Enterrée en grande pompe par le Premier ministre, François Fillon, le 8 février dernier, l’œuvre du ministre de l’intégration et de l’identité nationale semble bel et bien avoir disparue des écrans radars du débat politique français.

Pour s’en persuader, il suffit de se rendre sur le site du « grand débat sur l’identité nationale », sorte de vestige, témoin des controverses et dérapages des derniers mois.

Car il faut bien le dire, depuis le gel du débat sur l’identité nationale début février, le site ne connaît plus la même vitalité qui l’animait lors de son lancement retentissant. Il est en quasi-inertie.

Dès la page d’accueil, c’est non sans amertume que le zélé contributeur cliquant sur l’onglet « grand débat » constate que la page est « introuvable ». Pire, « la page que vous demandez n’existe plus » !

Le constat n’est guère plus réjouissant au sein de la rubrique « actualité ». La dernière contribution éclairée au « grand débat » remonte au 10 février, deux jours après son interruption. C’est également à la date du 10 février que cesse l’actualisation de l’espace presse. La dernière publication concerne ainsi les « Décisions issues des trois premiers mois du grand débat sur l’identité nationale ».

Parmi les mesures phares : « Créer un carnet du jeune citoyen », « Donner à tous les enfants de France l’occasion de chanter au moins une fois par an la Marseillaise », « Rendre obligatoire la présence du drapeau français dans chaque école et la présence de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dans chaque classe », ou encore, « Rendre plus solennelle l’accession à la nationalité française ».

Mais, pour les plus fervents défenseurs du débat qui ne sauraient se satisfaire de telles mesures, les contributions les plus érudites peuvent toujours être publiées sur le site. Et certains ne s’en privent pas. Si les dérapages et autres écarts de langage aux relents xénophobes se font plus rares, ils n’ont pas complètements disparus de la circulation.

« Depuis la fin de la colonisation, la France assiste à une nouvelle vague de migration venue d’Afrique. Dans l’immense majorité des cas, ces peuples ne sont pas intégrés. Pourquoi ? » s’interroge ainsi Sérésin. La réponse pour ce gardien de l’identité nationale est simple : il faut chercher « les racines communes entre la France et les sociétés polonaise, portugaise, … et vous aurez la réponse. Français de souche et peuples immigrés se croisaient sur le parvis de l’église. L’échange était possible. Ceci est impossible avec les peuples musulmans qui vivent à l’écart de la civilisation occidentale et qu’on ne peut croiser ni dans la rue ni dans les églises » …

Dans la même veine, un dénommé Cosinus s’en prend à « tous les gouvernements [qui] ont bradé la nationalité Française en la donnant comme un timbre poste à n’importe quel immigré tout en lui conservant sa nationalité d’origine. L’immigration musulmane massive est une MENACE pour l’Identité Nationale qu’elle détruit de plus en plus« . Et de poursuivre son discours d’ouverture : « les immigrés d’Afrique ne veulent pas s’intégrer mais nous imposer leurs mœurs : polygamie, burqa […]. Où est l’Identité Nationale dans les villes des émeutes ethniques de 2005 ? Ce n’est pas à la France de s’adapter aux musulmans mais l’inverse ! Il faut en finir avec le laxisme, la capitulation, la lâcheté gouvernementale face aux agressions des musulmans. Réagissez! Le laxisme gouvernemental nous exaspère On veut des actes dignes d’un gouvernement ! AGISSEZ !!! ».

Un certain Charles De Herstal se pose quant à lui en historien averti de l’identité nationale : « 1500 ans de combats, de souffrances pour en arriver à donner les clés de notre pays aux musulmans et à terme, s’en faire chasser. Si vous connaissez l’Histoire vous verrez que depuis le 7ème siècle tous les peuples d’Afrique du Nord ont été soit arabisés soit éradiqués et quelquefois les deux (Kabyles). Nous deviendrons des esclaves comme ces millions de noirs africains envoyés dans les pays arabes, les hommes étant systématiquement castrés pour éviter que ne se forment des communautés noires dans les pays arabes, opération réussie. […] Vous vous rendrez vite compte que plus la proportion de musulmans, pratiquants et non pratiquants, va aller croissante plus les choses vont se compliquer, ça s’est toujours passé ainsi partout dans le monde, pourquoi cela se passerait-il autrement chez nous ».

Mais pourtant, en dépit de ces derniers barouds d’honneur nauséabonds, les contributions de ce genre semblent s’être éclipsées. Le cœur n’y est plus.

Même chez ses plus fervents défenseurs au sein des sphères médiatiques, ces « soldats perdus de l’identité nationale », qui voyaient dans cette suspension du débat une victoire du « Parti des Médias », le triomphe des « prêtres anti-racistes », la cause ne semble plus guère rassembler.

Reste le très radical Riposte laïque pour s’inquiéter des dangers de mettre un terme au débat. A l’image de l’article d’Yves Rectenwald dans son numéro de mars : « demain, la France sera musulmane sans qu’aujourd’hui quelqu’un puisse s’en offusquer. […] Car demain, nos femmes seront voilées, la loi musulmane, la charia, aura primauté sur les lois de la république, le ramadan sera obligatoire, les viandes de porc bannies, … on pourra battre sa femme et la répudier en toute impunité, on pourra être polygame sans être poursuivi… seul Allah dirigera nos actes et nos consciences. […] Demain, les églises seront transformées en mosquées, les catholiques en dhimmis, sujets soumis à la loi coranique… Nous serons tous enturbannés, en babouches, prêts à céder St Jacques de Compostelle pour la Mecque… Nous serons en marche pour une parfaite assimilation, la Gaule sera l’Arabia, le français deviendra un sabir déjà usité dans nos banlieues » …

Mais au-delà de ces derniers assauts, la presse, dans son ensemble, ne fait plus écho au débat sur l’identité nationale. A l’image du silence du site en ligne Mediapart, qui, avec son « appel« , s’était voulu le porte drapeau des opposants au débat.

Les médias délaissent même son instigateur, Éric Besson, qui, longtemps au cœur de la tempête médiatique, apparaît aujourd’hui isolé, en panne de médiatisation. Même son agenda, semble désespérément vide.

Le ministre pourrait pourtant vite revenir sur les devants de la scène. Son projet de loi portant sur le durcissement des règles de renouvellement des cartes de séjour, tenant compte des « efforts d’intégration du migrant », ne devrait pas manquer de faire réagir.

Il reste qu’en définitive, si le « grand débat sur l’identité nationale » semble avoir été définitivement enterré, la xénophobie rampante et la stigmatisation systématique continuent de se manifester de manière toujours plus patente, à l’image de la délétère « affaire » Ali Soumaré. A la question « Que signifie être français ? « , les réponses des responsables politiques du pays n’ont sûrement pas fini de nous surprendre.

La drogue, véritable fléau des établissements scolaires

En quelques années, les chiffres de la consommation de drogue ont explosé. Lors d’un déplacement houleux au lycée Paul-Bert, à Paris, François Fillon s’est exprimé sur ce fléau en milieu scolaire. Le Premier ministre a même présenté les principaux axes d’un plan d’action, prévu pour fin juin. Pour l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, l’établissement scolaire demeure le premier lieu où trouver du cannabis. Recueillis devant un grand lycée montpelliérain, des témoignages confirment cette tendance. Pourtant, dans la région, les actions de prévention se multiplient.

Des résultats au bac (82 %) en adéquation avec la moyenne nationale, une architecture moderne, un encadrement dynamique, des enseignants motivés. Ici, aussi bien qu’ailleurs, on étudie les maths ou la philo, mais aussi le cinéma, le théâtre, les arts plastiques. Jean-Monnet est un lycée qui a plutôt bonne réputation. Et pourtant… Devant l’établissement, la drogue circule au quotidien. En France, en milieu scolaire, c’est partout comme ça.

« Il n’y a jamais de problème pour trouver de l’herbe ou du shit… » Pour Sébastien, élève en première, le lycée montpelliérain ne déroge pas à la tendance nationale. Il affirme même que plusieurs revendeurs y sont scolarisés : « Des jeunes de l’extérieur et même des collégiens des alentours viennent se fournir devant le lycée. » En effet, ils sont nombreux, âgés entre 12 et 16 ans à grouiller sur le parking, à l’heure des sorties. « Les après-midis, on vient se poser à côté du lycée pour fumer », explique Nardre, 16 ans et non scolarisé. Si, selon Sébastien, il s’agit exclusivement de drogues douces, certains sont moins catégoriques. « Trois fois par jour, trois jeunes vendent de la drogue devant le lycée et notamment de la cocaïne », raconte Cyril, 17 ans.

Moins dramatiques ou plus naïfs, certains élèves comme Cédric et Paul nient la circulation de drogue dans leur institution : « Il n’y en a pas vraiment ou sinon, c’est seulement des drogues douces. Après, ça ne nous intéresse pas, donc on ne fait pas trop attention. » Mais si beaucoup consomment des stupéfiants, de nombreux adolescents témoignent avoir reçu la visite de policiers pour leur faire de la prévention.

Une approche des pouvoirs publics mal adaptée

« Tous les ans, le lycée nous fait remplir un QCM pour se rendre compte de notre consommation. L’an dernier, en seconde, un policier est venu nous parler des risques de la drogue », explique Emilie. « C’est une bonne chose. Cela permet de nous faire découvrir certains produits méconnus », se réjouit-elle. « Pour moi, ça ne sert à rien même s’il faut le faire. Il vaudrait mieux trouver des choses qui choquent », réplique Pierre.

Élève en terminale, Icham, 20 ans, pense que l’approche actuelle des pouvoirs publics n’est pas adaptée : « Faire venir un policier, cela ne sert à rien. Un jeune qui apporterait son témoignage d’ancien drogué sensibiliserait davantage les lycéens », estime-t-il.

Attendant sa fille à la sortie du lycée, Didier Valez ne semble pas préoccupé par le sujet : « Avec ma femme, nous ne nous sommes jamais véritablement posé la question. » Pour lui, la prévention dans les lycées apparaît nécessaire. Il avoue ne pas savoir comment aborder un tel problème : « Je touche du bois. Pour l’instant notre fille ne fume pas et ne boit pas. Mais, si elle s’y mettait, je ne sais absolument pas comment je réagirais. » Un témoignage qui illustre à merveille le flou qui règne aujourd’hui autour de la lutte contre la drogue.

Rapport Attali : 316 propositions qui ont fait l’effet d’une bombe

La place de Paris le guettait depuis plusieurs semaines comme le lait sur le feu. Quelques fuites dans la presse (Le Figaro du 10 janvier), des chuchotements ça et là sur le contenu du rapport… Jacques Attali, iconoclaste président de la commission sur la libération de la croissance française, a finalement réussi à protéger son rapport avant sa remise officielle le 23 janvier entre les mains de Nicolas Sarkozy.