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3 questions à Christian Dupraz : «Montpellier n’est pas une ville verte»
Dominique Voynet : « Il faut choisir sa Gauche »
C’est au nom d’une « vieille complicité » que Dominique Voynet est venue soutenir Jean-Louis Roumégas dans la dernière ligne droite du premier tour des élections régionales, mardi 9 mars à Montpellier. Avec une simplicité et un franc-parler qui la caractérisent, la co-fondatrice du parti des Verts a un objectif en tête : le second tour pour son acolyte écologiste.
Europe Écologie aime les symboles. Et quoi de plus symbolique que la visite de l’une des figures historiques des Verts ? Authentique écologiste, venue en tramway après avoir tracté dans les rues de Montpellier aux côtés de Jean-Louis Roumégas, Dominique Voynet donne une petite conférence de presse à la brasserie Le Sud, face à l’Hôtel de Région.
Une institution régionale dépouillée
Entourée de quelques-uns des candidats d’Europe Écologie pour les Régionales, Mustapha Majdoul, Agnès Langevine et Katia Mingo , l’édile de Montreuil est longuement revenue sur la menace que représente la réforme sur les collectivités locales sur l’institution régionale.
Selon la sénatrice de Seine-Saint-Denis : « la Région est aujourd’hui menacée par les réformes du gouvernement. Notamment en ce qui concerne son autonomie financière et fiscale. En effet, la région est accusée d’être une institution dépensière par le président de la République. » Et de rajouter : « l’absence d’autonomie financière est extrêmement inquiétante. La promesse venant de la droite qui est de baisser les impôts régionaux est un peu facile à faire : les conseillers régionaux ne voteront quasiment plus rien de leur budget ».
Pourtant, Dominique Voynet rappelle l’importance de l’institution régionale. Elle cite quelques exemples : « la Région permet d’assurer la solidarité des territoires, elle est responsable de la formation professionnelle, elle prend en charge les lycées. Elle a notamment la responsabilité de mettre en place la formation pour les nouveaux métiers dont on aura besoin demain ».
La réforme des collectivités locales est, pour l’ancienne ministre de l’environnement, « un dépouillement de l’institution régionale ». Elle rappelle que « c’est peut-être la dernière fois que l’on procède à l’élection des conseillers régionaux, un scrutin de liste qui permet une juste représentation des hommes et des femmes. Si l’on laisse faire le gouvernement, demain on élira des conseillers territoriaux, siégeant à la fois au département et à la Région, élus sur la base de gros cantons regroupés. Ce, au détriment de la parité et au détriment de l’autonomie institutionnelle ».
Pour Dominique Voynet, le chef de l’État souhaite mettre en place un mode de scrutin adapté aux besoins de son parti et amplifier le mouvement de re-centralisation engagé à tous les niveaux : « après l’Université, l’Hôpital, la Justice, la Police, … c’est au tour des collectivités territoriales ».
« Il faut choisir sa Gauche »
Ainsi, pour Dominique Voynet, le Languedoc-Roussillon mérite une meilleure campagne électorale que celle qui a été offerte aux électeurs jusqu’à présent. « La maladresse des partis, d’une part, et l’utilisation du scrutin pour en faire une sorte de plébiscite pour ou contre le sortant d’autre part, prime sur tout le reste », affirme l’écologiste. La tête de liste Europe Écologie Languedoc Roussillon, Jean-Louis Roumégas, rajoute : « la campagne a été confisquée par des faux débats». Il explique, entre autres, que le Parti Socialiste, au niveau national, a sacrifié le Languedoc Roussillon, « selon les propres mots du bureau national ».
Il reproche notamment au parti de la rose que « pour se refaire une image au niveau national, les socialistes ont utilisé l’affaire en Languedoc Roussillon, sans se préoccuper des conséquences ici. Ils considèrent donc qu’ici les électeurs sont des cobayes qui peuvent être sacrifiés sur l’autel de l’hégémonie du Parti Socialiste ou de l’image de Mme Aubry. C’est regrettable ».
Selon la sénatrice de Seine-Saint-Denis, « l’espoir de rassemblement a été torpillé par la Rue de Solférino. Il est temps de choisir sa gauche maintenant ». Ainsi, pas d’autres solutions pour Europe Écologie, que d’agir seule pour représenter la modernisation de la gauche. Et les atouts de Roumégas pour cela ne manquent pas : « une énergie formidable, une qualité d’écoute et de respect des autres. Il est attentif aux problèmes des gens », affirme Dominique Voynet.
L’inévitable évocation du président de Région sortant, Georges Frêche, n’a pas tardé. Ce dernier aurait effectivement affirmé ces derniers jours : « l’écologie, il y a ceux qui en parlent et ceux qui agissent », raillant ainsi la venue de Dominique Voynet. Et Jean-Louis Roumégas de lui retourner le compliment : « le Languedoc Roussillon était premier en matière d’énergies renouvelables, il a aujourd’hui reculé au 5e rang ».
Quant à Dominique Voynet, elle ne se sent que peu concernée par la sentence de Frêche : « quand on veut être le bon écologiste de service, on ne doit pas seulement s’intéresser à des équipements symboliques que l’on peut inaugurer un dimanche soir. On doit, dans son domaine de compétence, mettre en place des politiques en vraie grandeur qui vont permettre la création d’emplois. L’enjeu est de passer de la phase expérimentale à la diffusion des bonnes pratiques en vraie grandeur ».
Elle ajoute en souriant : « quand j’entends cette phrase de Georges Frêche, je n’ai pas envie de la prendre pour moi. Jamais les écologistes n’ont été des bavards qui n’agissaient pas… On agit à la mesure des responsabilités qui nous sont confiées par les électeurs ». Chose confirmée par Jean-Louis Roumégas : « les écolos ont souvent été considérés comme des alliés sympathiques mais pas essentiels et au cœur des politiques ».
Par contre, pour l’ancienne ministre de l’environnement, la phrase de Georges Frêche s’appliquerait « magnifiquement » à Nicolas Sarkozy : « le président a prétendu se faire le champion de l’écologie mais vient de se renier à plusieurs reprises ses dernières semaines : qu’il s’agisse des phrases désastreuses prononcées au Salon de l’Agriculture, ou qu’il s’agisse de son attitude concernant la prévention des risques naturels. Le président de la république est inconséquent, il agit au hasard des rencontres et dit tout et son contraire ».
« Risques de tempêtes et d’inondations, on ne nous a pas écouté »
Cette rencontre aura aussi été l’occasion, pour Jean-Louis Roumégas, d’un petit retour sur l’actualité, peu drôle, mais ô combien au cœur des préoccupations écologistes : la tempête et les inondations en Vendée et dans l’Ouest de la France ayant causé une soixante de morts. Le porte-parole national des Verts rappelle que le Languedoc-Roussillon est l’une des régions les plus fortement menacées par les risques d’inondations : « nous avons des zones submersibles très importantes ».
Toujours selon lui, cette catastrophe naturelle prouve que « les écologistes ont malheureusement eu raison trop tôt. On ne les a pas écouté ». Il critique l’utilisation politique qui est faite de ce drame par les membres du gouvernement : « les hélicoptères ministériels viennent déverser de la compassion et des promesses… Mais en réalité, on le sait bien, rien ne va changer. Après les inondations dans le Gard, en 2005 et 2008, rien n’a changé. Des digues qui ne font que menacer encore plus gravement les habitants ont été construites. Des permis de construire continuent d’être distribués dans des zones inondables. De même, on continue à monter des murs, des digues, non pas pour protéger les habitants, mais pour pouvoir continuer l’œuvre d’urbanisation ».
Ainsi, il rappelle que le projet politique porté par Europe Écologie est avant tout de stopper l’urbanisation et de restituer à la nature ses zones d’expansion spontanée. Notamment pour mieux gérer ces risques d’inondations.
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Le Languedoc-Roussillon devient un enjeu national pour Europe Ecologie
De nombreux leaders d’Europe Écologie se sont réunis, mercredi 17 février 2010, pour un meeting animé à Montpellier. Daniel Cohn-Bendit, José Bové et Noël Mamère se sont donnés rendez-vous pour soutenir Jean-Louis Roumégas, tête de liste Europe Écologie LR. La campagne pour les régionales a pris des accents nationaux. » Le Languedoc Roussillon est un laboratoire pour qu’émerge une nouvelle culture politique » résume Dany le Vert.
19h15, la salle Fernand Pelloutier commence à s’échauffer. Elle attend les « stars » d’Europe Écologie. Soudain, la musique retentit et c’est sous une nuée de caméras que Dany, José, Noël et Jean-Louis se dirigent vers la scène.
«Il y a de l’ambiance ce soir», s’exclame Noël Mamère, invité surprise, qui a remis pour l’occasion son costume de journaliste afin d’animer le débat. Rapidement le ton est donné : les socialistes et Georges Frêche en prennent pour leur grade. «Le Languedoc-Roussillon a été le théâtre d’une vaste opération de manipulation du Parti Socialiste qui a préféré s’accommoder de M. Frêche. Quant à Mme Mandroux, la pauvre, elle a été sacrifiée par le Parti Socialiste.» Les régionales sont, pour lui, une étape dans la reconquête de la gauche. Europe Écologie représente une alternative au frêchisme, «variante du sarkozysme adapté au niveau régional.»
Un programme, point par point
«Il est temps de parler programme», lance Agnès Langevine, tête de liste P-O. Les spotlights laissent place à une lumière tamisée… Confortablement assis sur d’immenses canapés installés sur la scène, les uns après les autres, différents candidats présentent quelques points du programme d’Europe Écologie. Trois par trois, pour un temps de trois minutes chacun.
La perpignanaise ouvre le bal et parle de s’attaquer au chantier de l’emploi : «il faut créer des emplois non délocalisables.» Et cela passe par quoi ? « La transformation écologique de l’économie. Un exemple : la reconversion de l’agriculture qui développera des emplois et amènera une autonomie alimentaire de la région. » Puis, c’est au tour de Pere Manzanares de s’essayer à l’exercice des trois minutes, avec un maître-mot : l’euro-région. «Pour le moment, l’euro-région est plus virtuelle que réelle. Elle doit devenir l’instance d’une coopération gagnant-gagnant entre deux territoires. L’euro-région est une chance, la transformation un outil», dit-il avant de conclure sur quelques mots de catalan. L’accent chantant, Silvain Pastor, le Gardois l’a aussi : «il est nécessaire que notre région soit dénucléarisée et développe l’énergie positive. Le potentiel est là. Il faut décroître notre consommation d’énergie, gaspillée inutilement, et il faut mettre en place des moyens massifs pour cela.» Ce n’est pas Georges Fandos, le représentant héraultais de Cap21 qui va le contredire. L’agronome, adepte de l’aménagement équilibré du territoire, est aussi contre le gaspillage : «arrêtons avec cette société consumériste où si t’as pas une marque, t’es rien». En effet, «nous nous croyions à l’abri des désordres du monde. Il en n’est rien», tance Pascal Frissant, le tête de liste audois. Le viticulteur évoque les difficultés du monde paysan et viticole : «notre colère est au niveau de notre tristesse». Pour lui, il est clair qu’«il faut mettre de l’argent sur la table.» Et pour cela, changer le modèle de gouvernance. «Ici, la gouvernance actuelle est contestée. Ce n’est pas une question de personne mais de projet politique qui s’appuie sur la loi du plus fort», explique Nadja Flank, la représente de Gauche Alternative. Elle décrie le modèle de métropolisation abusif et prône la promotion de la diversité sociale et culturelle, et la coopération.
Transformation sociétale, démocratique, économique et écologique : on l’a compris Europe Écologie veut que les choses changent ! «Nous sommes les visionnaires», explique Georges Fandos.
Roumégas :« On part pour gagner !»
Finies les discussions au coin du feu, confortablement installés sur un canapé. Le patron est de retour. Avec ferveur et dynamisme, du haut de son pupitre, il réveille la salle : «c’est une urgence sociale et écologique. Si on n’agit pas, on ne s’en sortira pas !» Érosion du littoral, réchauffement climatique, folles dépenses énergétiques, tout y passe. Jean-Louis Roumégas rappelle quelques données du bilan économique de Georges Frêche : chômage le plus important de France, région dernière en terme de PIB par habitant, Languedoc-Roussillon champion du RMI… «On dit dans les médias, Georges Frêche est certes amoral mais il a un bon bilan. Ce n’est pas vrai. Pour un chantre du développement libéral, ce n’est pas un bon résultat ! » C’est le résultat de « rêves mégalomaniaques». Pour Roumégas, il faut sortir «de la tutelle de cette économie de la grande distribution qui nous tue». Le défi est lancé : «on va gagner ! En plus, il y a les copains du Front de Gauche avec nous.» Une alliance de second tour est annoncée : Europe Écologie et le Front de Gauche feront front commun contre Frêche… pour gagner !
José Bové: «l’alternative de cette région, c’est l’écologie»
Noël Mamère l’accueille comme «un des alliages fondateurs d’Europe Écologie avec Cohn-Bendit et Éva Joly», ajoutant non sans humour «l’alliance du taulard et de la juge». L’ex-leader de la Confédération paysanne José Bové se déclare «heureux» de revenir à Montpellier, où l’engagement des militants ne faiblit pas. Le député européen insiste sur l’importance de créer un pont entre l’Europe et les régions, et de renforcer les moyens d’actions en ce sens. Sans oublier les enjeux locaux qu’il connait bien, lui qui réside près de Millau : «je ne peux m’empêcher de penser au projet de la Salamane, et à l’implantation de cette plateforme logistique par Système U. Ce serait plus utile de donner ces terres à de jeunes agriculteurs locaux, au lieu de favoriser cette logique de concurrence déloyale inacceptable.» Le projet Agrexco n’a pas échappé à son courroux. Il s’engage au nom d’Europe Écologie et de la coalition des 85 associations : «si nous arrivons en tête au second tour, nous arrêterons ce projet immoral soutenu par Frêche.». Il achève son pamphlet sous les applaudissements du public : «nous avons quatre semaines pour montrer que l’alternative de cette région, c’est Europe Écologie ! Vive Europe Écologie Languedoc Roussillon !»
Daniel Cohn-Bendit: «l’écologie est une préoccupation universelle, même la femme du patron ne veut pas que le ciel lui tombe sur la tête».
Il était attendu comme le messie, Dany le vert. Orateur hors pair, il a fait un discours dont la ferveur et le franc-parler ne faiblissent depuis un certain jour de mai 1968, dans la cour de la Sorbonne. Il a rappelé aux militants qu’«Europe Écologie est la troisième force politique en France. Il n’y a pas d’alternance possible sans ! Ce qui est fondamental, c’est que nous serons dans les majorités de gestion. Peu importe que le PS fasse 20% et nous 17 ou 18%. Ce ne sera pas une défaite. Plus nous sommes forts, plus nous serons nombreux dans les conseils régionaux et plus nous pourrons effectuer une politique de transformation.» Le député européen réaffirme sa position d’ouverture au Modem ou au PS: «Nous cultiverons une culture de partenariat dans le respect d’un projet commun. Ne nous coupons pas de cela avec un jusqu’au boutisme incohérent». Il cite l’exemple improbable de l’Alsace, traditionnellement à droite, comme la seule région où les sondages donnent gagnant Europe Écologie : «nos militants, là bas, ont réussi à rassembler». Selon Dany, Europe Écologie se positionne sur beaucoup de sujets à gauche, mais concernant l’écologie, elle est centrale : «il s’agit d’une préoccupation au centre d’une lutte planétaire, universelle. Même la femme du patron ne veut pas que le ciel lui tombe sur la tête !»
L’État Major de Solférino sérieusement critiqué
Dans ce meeting, ce n’est pas tant la maire de Montpellier qui est critiquée, vue par Europe Écologie comme «une sacrifiée», mais plutôt le bureau national du Parti Socialiste. Pour ne citer que des morceaux choisis : «le PS a fait preuve de péché d’orgueil en pensant qu’ils étaient les seuls à pouvoir avoir une réflexion politique sur la région et en demandant ainsi la direction de la liste», selon José Bové. Cohn-Bendit ajoute : «les membres du PS ne sont pas nos adversaires, ni nos concurrents. Leur logiciel est resté collé au XXe siècle. Alors camarades socialistes, venez, nous sommes capables de vous emmener vers le XXI e siècle !» Revenant sur l’alliance manquée entre la liste de Jean-Louis Roumégas et celle d’Hélène Mandroux, il tape sur les doigts de Solférino, affirmant qu’une «solution locale avait été trouvé» et que lorsque la maire de Montpellier a demandé l’aval du bureau national, celui-ci a refusé. «Ils voulaient la direction de la liste et non pas une démocratie gérée à parité et à égalité».
Bien qu’en début de meeting Noël Mamère ait annoncé «le maelström des derniers jours est maintenant derrière», la pilule a du mal à passer…
Georges Frêche, «le parrain» a les oreilles qui sifflent
S’il y a bien une personne dont les oreilles ont du siffler, c’est le président de Région sortant : Georges Frêche. Chacun y va de son petit commentaire. Noël Mamère critique l’anti-parisianisme primaire du sudiste : «il n’y a pas Paris contre la province. Georges Frêche fait du localisme contre la démocratie.» José Bové souhaite en finir avec cet «égoïsme régional» et devient même poétique : «les coqs sur leurs tas de fumier croient que lorsque le soleil se lève, c’est parce qu’ils chantent». Quant à Jean-Louis Roumégas, il critique le «fait du prince» et «l’exploitation marketing de la morale politique». Une chose est sûre, le porte parole national des Verts ne porte pas Georges Frêche dans son cœur. Pas plus que Dany le Rouge : «vous avez un parrain. Vous pouvez avoir tous les projets que vous voulez pour la Sicile, vous ne gagnerez jamais face à la mafia. Ces clientélismes touchent des pans entiers de la société. Il faut en finir avec le frêchisme, avec cette gauche au visage ubuesque.»
Et même «Monsieur Météo» en prend pour son grade
La liste Génération Écologie de Patrice Drevet a été qualifiée d’«imposture» ou «d’usurpation de la démocratie» par Daniel Cohn Bendit. L’alliance de Drevet avec Georges Frêche au deuxième tour n’est un secret pour personne. Puis, ironisant sur les origines douteuses de ce produit «peine en vert», il a appelé les chercheurs qui ont «retrouvé» le père de Toutankhamon à faire des recherches pour retrouver les origines du Piscenois.
22h. C’est avec liesse et joie, que l’ensemble des candidats présents ont rejoint les « stars » sur scène. Applaudissements et pas de danses viennent clôturer la soirée. Le meeting d’Europe Écologie aura fait salle comble. Plus en tout cas qu’Hélène Mandroux la veille, qui n’avait réuni que 300 militants…
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J-L Roumégas : « les socialistes ne peuvent pas se poser en rassembleurs de la Gauche alors qu’ils sont divisés »
Porte-parole national des Verts, Jean-Louis Roumégas a été désigné pour mener la liste Europe-Ecologie aux élections régionales en Languedoc-Roussillon. Alors que la liste officielle vient tout juste d’être établie, il répond aux questions de Haut Courant.
Quel bilan tirez-vous de la politique du Conseil régional sous le mandat de Georges Frêche ?
Il faut distinguer le bilan personnel de Georges Frêche, assez mauvais, et celui de l’équipe du Conseil régional, plus mitigé. D’une part, M. Frêche s’est fâché avec tout le monde : les Verts, les communistes mais aussi avec le Parti Socialiste. Cela n’arrive pas par hasard : c’est le résultat d’un comportement, de pratiques de gouvernance qui sont inacceptables, et des dérives de son discours politique. Le bilan de l’équipe du Conseil régional, secteurs par secteurs, est à nuancer.
En ce qui concerne la rénovation des lycées, le retard a été en partie rattrapé. Il y a eu plusieurs constructions d’établissements. Par contre, ce qu’il manque : une plus Haute Qualité Environnementale (ndlr. HQE), une basse consommation ou du bio dans les cantines. Pour les lycées 21, l’initiative vient des lycéens sur la base de l’Agenda 21. Il n’y a pas eu de politique de la Région pour impulser ce type d’établissement, même si elle s’en vante.
En matière de transports ferroviaires, une des compétences de la Région, il y a eu de bonnes choses de faites comme la KARTATOO. Cependant, la modernisation des lignes ferroviaires n’a pas été à la hauteur de ce qui avait été promis.
Concernant l’aménagement du territoire, Georges Frêche a une vision qui est à l’opposée de ce que nous défendons. Il a fait de Montpellier une mégalopole susceptible d’attirer tous les habitants de la région. Au contraire, nous sommes pour une région multipolaire.
Frêche se vante d’avoir développé les énergies renouvelables. Il l’a un peu fait. Nous étions premiers en matière d’éolien en 2008. Nous sommes maintenant quatrièmes alors que le Languedoc-Roussillon a un fort potentiel en éolien et en solaire.
Et sur le plan économique ?
Là, l’échec est flagrant. Les gens pensaient que Frêche allait faire pour le Languedoc-Roussillon, le « miracle Montpellier ». Il voulait hisser la région au quatrième rang de France. Or, six ans après, nous sommes derniers en termes de PIB par habitant derrière le Nord-Pas-de-Calais, et avant-derniers en matière de chômage.
Que pensez-vous des dernières déclarations de Georges Frêche, notamment au sujet de Laurent Fabius ?
Cela fait des années que nous dénonçons les dérapages de Georges Frêche. Dernièrement, il a traité un pasteur de la CIMADE de nazi, Silvain Pastor d’antisémite parce qu’il soutient les Palestiniens, Jean-Paul II d’abruti, il a accusé les policiers d’avoir mis le feu à des voitures lors des émeutes de 2005. Aujourd’hui, son directeur de la communication lui arrache le micro avant qu’il ne dise des bêtises.
Ce n’est pas ces dérapages qui sont les plus graves. Ce qui est contestable, c’est sa politique autocratique, le fait du prince.
Donc, vous excluez tout accord avec Georges Frêche au second tour ?
Oui, et ce depuis le début de la campagne. Nous ne voulons plus de lui comme président. Il est hors de question de cautionner sa politique. Le Front de gauche et certains socialistes, ont pris la même position. Une majorité de gens à gauche veulent un changement. D’où la volonté de rassemblement.
Envisagez-vous une alliance avec Hélène Mandroux ?
Nous n’avons pas attendu l’intervention de Martine Aubry pour discuter d’une éventuelle alliance. Les socialistes autour de Paul Alliès et d’Hélène Mandroux nous avaient déjà sollicités pour savoir si Europe Ecologie était prête à accueillir des socialistes. Nous avions répondu favorablement. J’ai même proposé à Hélène Mandroux de prendre la tête de liste dans l’Hérault. Aujourd’hui, Martine Aubry se réveille, bien tard, et fait comme si c’était elle et les socialistes qui allaient rassembler. J’attends déjà de voir ce qu’ils vont rassembler ici, car beaucoup restent derrière Georges Frêche. Les socialistes ne peuvent pas se poser en rassembleurs de toute la Gauche alors qu’ils sont eux-mêmes divisés.
Que pensez-vous du fait qu’un ancien Vert comme Yves Piétrasanta soit inscrit sur la liste de Georges Frêche ?
C’est parce qu’il y est, qu’il a été exclu des Verts. Il a choisi de soutenir Frêche et son système plutôt que l’écologie. Je trouve dommage que des gens qui se disent écologistes aillent servir de caution à Georges Frêche sans infléchir sa politique dans un sens plus écologique. Il ne suffit pas de mettre quelques petites pincées de « vert » sur les politiques du Conseil régional, il faut une réelle transformation écologique. Je trouve que ce sont des écologistes qui manquent d’ambition.
Et que pensez-vous de Patrice Drevet qui conduit la liste de l’Alliance écologique indépendante ?
C’est un écologiste mondain. Il a présenté la météo à la télévision et s’est découvert écologiste quand tout le monde était déjà convaincu. Il est adjoint dans une mairie UMP et ne se présente pas comme écologiste mais en tête d’une liste MoDem teintée d’écologie. C’est comme le pâté d’Alouette : il y aura un cheval de MoDem et une alouette d’écologie.
Pouvez-vous nous résumer votre programme en quelques mots ?
Nous proposons aujourd’hui une politique économique très différente de ce qui a été fait à la Région. Notre projet repose sur trois piliers.
Le premier est la transformation écologique de l’économie régionale pour créer des emplois. Notamment dans le secteur du bâtiment. Il faut que la Région impulse et soutienne les projets de rénovation thermique et d’isolation. Elle doit aussi impulser encore plus largement dans le parc du logement.
Le second pilier est le développement des énergies renouvelables : l’éolien, le solaire et la biomasse (bois et déchets agricoles). Par exemple : créer une plate-forme offshore de grande dimension sur le littoral languedocien, construire des centrales terrestres de petite dimension sous forme de sociétés coopératives créées avec les communes. Nous souhaitons développer le solaire sur les toits des habitats et les bâtiments publics de la région. Il faut créer des centrales photovoltaïques. Pour la biomasse, il y a deux axes : impulser l’équipement en chaudières et monter des filières de granulés et de copeaux de bois, en profitant du gisement important qu’offre la forêt languedocienne. Il est aussi nécessaire de créer des transports alternatifs.
Le troisième pilier : l’agriculture. Nous voulons développer un vrai plan biologique au niveau régional, avec des aides à la conversion bio, le développement de circuits agroalimentaires courts. L’offre en bio n’est pas, aujourd’hui, à la hauteur de la demande au niveau régional. Nous devons donc importer, ce qui est une aberration. Il est idiot de faire voyager des produits sur des milliers de kilomètres.
Et au sujet de la viticulture ?
La viticulture, en Languedoc-Roussillon, est en grave crise de revenus. Notamment à cause de la concurrence internationale et de la baisse de la demande. Nous sommes pour une viticulture régionale de qualité environnementale, dans sa dimension de terroir. Ce doit être un argument de vente à l’étranger.
Comment allier la compétitivité et l’écologie dans ce cas ?
Les vins biologiques et les vins de terroir se vendent à un meilleur prix sur le marché international. C’est sur les vins standardisés, bons marchés, que nous perdons la compétition. Certains pays sont moins chers que nous comme la Nouvelle-Zélande et l’Argentine. Alors, il ne faut pas chercher à s’aligner sur eux. Les salaires ne le permettent pas ici. Considérer que les produits agroalimentaires sont aussi des produits culturels est une valeur ajoutée. Il faut sortir de cette vision industrielle de l’agroalimentaire. Les gens évoluent vers du produit culturel, du savoir-faire, et du produit bon pour la santé. Nous voulons créer un centre de ressources international de la vigne et du vin qui œuvrera pour servir cette culture du vin et qui va assoir la notoriété internationale des vins du Languedoc.
Que proposez-vous en matière de politique culturelle ?
Nous voulons éviter les phénomènes de concentration, de soutien exclusif à la culture de prestige. Nous souhaitons aider au développement local de la culture en soutenant des lieux de création et de diffusion dans l’ensemble de la région. Il faut laisser la liberté aux artistes d’innover plutôt que de conserver la culture « fait du prince » actuelle. Actuellement, des dépenses de prestige représentent environ 90% du budget culturel. La Région a dépensé 54 millions d’Euros pour construire la Grande Salle alors qu’avec cet argent on aurait pu créer une cinquantaine de lieux culturels dispersés dans l’ensemble du territoire régional.
Pour finir, que pensez-vous de l’échec du Sommet de Copenhague ?
Il montre qu’il existe des grands discours sur l’écologie, mais lorsqu’il s’agit de passer aux actes, il y a eu incapacité des politiques traditionnelles. Il n’y a pas l’expertise nécessaire : Nicolas Sarkozy confond le changement climatique et le trou dans la couche d’ozone, Rachida Dati parle de refroidir la planète de 2 degrés. Il y a donc une méconnaissance des questions écologiques.
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Mis à jour le 3 février à 0h30
Europe Ecologie peaufine sa stratégie
A moins de deux mois des élections, ils étaient réunis le 25 janvier dernier à Montpellier, pour leur réunion hebdomadaire. Constitution des listes, campagne de terrains et futures alliances, les enjeux ne manquent pas pour les sympathisants d’Europe Ecologie.
« Europe Ecologie est un miracle qui progresse. » C’est avec le sourire qu’Emmanuel Reynaud, secrétaire régional des Verts, a présenté le 25 janvier dernier l’évolution du rassemblement écologiste. A l’occasion de leur réunion hebdomadaire dans un local des verts boulevard Ledru Rollin à Montpellier une trentaine de sympathisants d’Europe Ecologie ont évoqué leur stratégie pour l’élection. Petit résumé des enjeux de la campagne électorale du mouvement écolo.
L’envie de vite faire campagne
Une impatience de partir sur le terrain a été manifestée par de nombreux participants. « On ne va tout de même pas attendre les affiches pour partir en campagne, il faut vite aller à la rencontre des gens, des associations. N’oublions pas que ce qui a fait le succès d’Europe Ecologie aux européennes, c’est que nous étions parti en campagne très tôt ! » s’exclame un militant Vert. « C’est vrai » surenchérit une responsable associative du quartier de la Paillade à Montpellier : « Les associations sont en souffrance et les autres partis occupent le terrain. » Aussitôt dit aussitôt fait, la prochaine réunion hebdomadaire d’Europe Ecologie se tiendra à La Paillade dans un local prêté gracieusement par un sympathisant.
La difficile constitution des listes
Emmanuel Reynaud est également revenu sur la constitution des listes. « Vous le savez la constitution des listes est longue à mettre en place car nous souhaitons la parité. Parité homme/femme et entre Verts et non Verts. Il s’agit de trouver une alchimie. Mais je pense que d’ici une semaine à quinze jours maximum, les listes seront constituées » explique-t-il.
Les listes sont d’autant plus longues à mettre en place qu’Europe Ecologie discute avec les « résistants » socialistes qui refusent de soutenir la liste conduite par Georges Frêche. « C’est une discussion, une rencontre qu’ils ont souhaité et que nous n’allons pas refuser. Comme toujours depuis la fondation d’Europe Ecologie, le rassemblement se fait sur la base d’idées, d’adhésion au projet » poursuit Emmanuel Reynaud. Des idées et un projet qui seront présenté en même temps que les listes officielles.
L’entre deux-tours déjà dans les esprits
Les listes ne sont pas totalement constituées mais se profilent déjà les enjeux du second tour. Un sympathisant se demande : « Le rassemblement avec la liste de René Revol (ndlr Parti Communiste Français, Parti de gauche, Nouveau Parti Anticapitaliste) est prévue mais j’aimerais savoir sur quelle base ? » La réponse d’Emmanuel Reynaud ne se fait pas attendre : « Si les conditions le permettent, ils pourront nous rejoindre en fusionnant leur liste avec la notre comme la règle électorale le permet. A ce moment là, la répartition se fera à la proportionnelle selon les voix obtenues au premier tour. »
Un premier tour qui sera sûrement évoqué le vendredi 29 janvier lors du meeting d’Europe Ecologie à Mende à 20h30 en présence de José Bové et de Jean Louis Roumegas, tête de liste des Verts en Languedoc-Roussillon.
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Mis à jour le 26 janvier à 20h00
J.-L. Roumégas : « Nicolas Hulot n’est qu’au début de sa déconvenue »
Interview du porte-parole national des Verts Jean-Louis Roumégas alors que le Grenelle de l’environnement tend à s’enliser dans les sables administratifs avec le report du vote du projet de loi Grenelle I à l’automne, initialement prévu avant l’été.
Quel regard les Verts portent-ils sur la démarche de Nicolas Hulot qui a fait signer aux principaux candidats son pacte écologique durant la dernière campagne présidentielle ?
Je suis moi-même signataire du pacte écologique. C’est un travail indispensable au niveau associatif mais l’écologie ne peut pas se limiter à une action associative, c’est la raison pour laquelle je me suis engagé en politique. Si on est un certain nombre d’écologistes qui au départ étions dans le monde associatif et qui avons franchi le pas, ce n’est pas pour rien. L’écologie est quelque chose qui déjà sur le fond est éminemment politique, il faut donc rentrer dans le jeu politique pour faire bouger les choses. Toute la question est de savoir si on peut faire bouger les choses de l’extérieur de la politique. Je ne pense pas que Nicolas Hulot et Jean-Paul Besset (1) récusent l’idée que l’écologie est éminemment politique. Mais peut-on agir sans entrer dans le jeu politique ? Moi, je pense que lorsqu’une association fait ça, c’est bien, ça fait avancer les choses, mais c’est illusoire de croire que ça peut remplacer la présence en politique d’écologistes, c’est une analyse qui est d’ailleurs en train de se fracasser contre la réalité.
Pouvez-vous donner un exemple ?
On peut prendre l’exemple des OGM. On a vu que « le droit de consommer et de produire sans OGM » est sorti des conclusions du Grenelle. C’était alors une démarche purement associative. Et lorsque cela s’est confronté au rapport de forces politiques au sein de l’Assemblée et du Sénat, où s’exprime des intérêts autres que ceux de la simple parole associative, cela s’est complètement fracassé contre la réalité. De grands intérêts économiques ont pesé. On se rend alors compte que les papiers signés, les engagements en termes de discours, c’est très joli, mais si au quotidien, dans l’ingratitude de la gestion politique, il n’y a pas des gens convaincus qui se battent pour faire avancer les choses, cela reste lettre morte. D’ailleurs, je constate qu’Hulot et Besset, dans l’analyse qu’ils font aujourd’hui de l’évolution du Grenelle, manifestent une certaine déception. Je pense qu’ils ne sont qu’au début de leur déconvenue. Pour l’instant, on a examiné que la loi OGM mais lorsqu’on va examiner le premier projet de loi Grenelle, je pense que là, entre les belles déclarations des conclusions du Grenelle et la réalité…
La démarche du Grenelle de l’environnement n’a donc selon vous pas été efficace ?
Elle a été efficace pour faire évoluer les idées, il s’agit d’un travail culturel de prise de conscience bénéfique. Il n’y a d’ailleurs pas eu que la Fondation Hulot, il y a eu le travail du Giec sur le climat, le prix Nobel de la paix donné à Al Gore, le rapport Stern sur les implications économiques du changement climatique, le travail de centaines d’associations de défense de l’environnement et le travail des Verts depuis des années au quotidien qui a finit par créer une majorité culturelle. Nous avons aujourd’hui une majorité culturelle pour constater la crise écologique mais on n’a pas encore une majorité pour admettre des solutions à cette crise.
Les Verts ne se sont-ils pas fait piéger durant la campagne présidentielle avec seulement 1,57% des suffrages exprimés ?
Il y a plusieurs explications. D’abord le mode de scrutin lui-même qui appelle à une bipolarisation, le vote utile parce qu’en 2002 la gauche avait été absente du second tour et la démarche de Hulot qui a laissé penser que le problème écologique était traité. Mais lors des élections municipales, les Verts ont retrouvé en général les scores de 2001 qui étaient des scores hauts. Les électeurs d’aujourd’hui se comportent de façon très ouverte, ils ne sont pas enfermés dans un vote partisan. Aux présidentiels, ils ont considéré que l’enjeu, c’était autre chose, on ne peut donc pas dire que c’est la fin des Verts, loin de là, je n’y crois pas du tout. Il y a des partis écologistes qui continuent à jouer un rôle important dans le monde entier. Penser qu’en France, l’existence même de l’écologie sur le plan politique serait remise en cause, non, c’est excessif.
Questionné sur la méfiance des Verts vis-à-vis du Grenelle de l’environnement, Jean-Paul Besset a répondu : « tout d’un coup, ce pour quoi ils militent depuis 30 ans a commencé à voir le début d’une résolution. Les Verts voient passer le train sans en être, il y a du dépit dans tout ça ». Quelle est votre réaction ?
Premièrement, il reconnaît qu’on se bat là-dessus depuis 30 ans. Ensuite, avant de dire que la démarche du Grenelle est réussie, il faut peut-être attendre, il crie victoire un peu tôt. La leçon du Grenelle, ce sera peut-être que justement, on a encore plus besoin des Verts. On n’a pas du tout eu de réaction de dépit, la preuve, c’est qu’on a joué le jeu. D’abord, on a demandé à participer au Grenelle mais les partis politiques n’étaient pas admis. On a quand même suivi à fond le dossier. On a des membres des Verts qui se sont engagés au titre de leur rôle d’élu, je pense à Marie-Christine Blandin, sénatrice du Nord qui était présidente de l’atelier sur la biodiversité. Les Verts ont fait un travail dans les ateliers, on a été très présents et on a crée un groupe de suivi du Grenelle dès le début, on y a d’ailleurs porté une parole peut-être moins naïve que celle de certaines associations.
Dès le début, on a manifesté une méfiance pour des raisons très précises. Il pouvait s’agir d’un simple coup médiatique du gouvernement, Sarkozy est d’ailleurs coutumier du fait. On s’est également rendu compte que Sarkozy a exclu autoritairement dès le début du Grenelle certains sujets. La question du nucléaire n’a par exemple pas été débattue, ce qui est une hérésie ; comment peut-on discuter de la politique énergétique de la France sans intégrer la question du nucléaire, ça rime à quoi, ce n’est pas honnête intellectuellement comme démarche. C’est notre deuxième réserve, outre le fait qu’on sentait bien une opération médiatique. Malgré tout, on a dit « il faut y aller », il y avait un côté intéressant de mettre autour de la table des acteurs de la société civile qui en général ne se parlent pas. Mettre ensemble face à face les acteurs économiques, les syndicats, les associations de défense de l’environnement et les collectivités locales, cela a été très intéressant. Cela a permis de dégager un consensus sur la crise écologique, de faire ressortir un consensus sur certaines solutions et cela a permis de dégager des points de débat, de controverses sur d’autres questions. Bref, un état des lieux a été réalisé. En même temps, beaucoup d’espoir a été suscité, et le problème, c’est qu’aujourd’hui, ces espoirs risquent d’être déçus. Il faut passer maintenant à la partie concrète. C’est là où l’on voit la difficulté et la dimension politique et parfois conflictuelle des questions écologiques. Comment ne pas parler du conflit entre les intérêts de Monsanto qui a tout intérêt à vendre ses semences génétiquement modifiées et la volonté des consommateurs et des défenseurs de l’environnement de consommer et de produire sans OGM ? Comment gérer le conflit d’intérêts entre les pêcheurs, les routiers et les agriculteurs qui demandent une baisse du prix du gasoil et la nécessité de diminuer la consommation énergétique. Je suis désolé mais le côté « tout le monde il est beau, tout le monde il est écolo » a ses limites. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas prendre en compte les intérêts de ces catégories mais baisser le prix du gasoil serait une mesure typiquement contraire à l’esprit du Grenelle et au développement durable.
Il faudrait dire « il y a une crise énergétique, on comprend les intérêts des pêcheurs, on va les aider à condition qu’ils se convertissent à une pêche durable » en sachant bien qu’il y aura quand même de la casse, c’est un secteur qui va devoir se restructurer.
Mais pendant que le Grenelle se déroule, « la vente » continue. On continue à développer des projets autoroutiers. Il n’y a aucune liste de projets gelés, par exemple à Montpellier avec le doublement de l’A9. On attend de voir ce qui va aboutir du Grenelle mais pour le moment, rien n’a changé.
Que pensez-vous de la mesure du bonus-malus appliqué aux automobiles et qui sera bientôt expérimentée sur une vingtaine de familles de produits ?
Jean-Louis Borloo, qui devait être le vice-premier ministre du développement durable, le fameux, c’est devenu un ministre qui demande seulement aux Français de faire des gestes quotidiens et qui leur promet des étiquettes. C’est aussi le ministre qui a dit que maintenant il avait une voiture hybride, c’est formidable mais si c’est que ça… on attendait plutôt qu’il ait autorité sur le ministre de l’agriculture, qu’il ait son mot à dire sur le budget… Et c’est devenu le ministre qui pendant la semaine du développement durable demande à chacun des Français d’éteindre son robinet pendant qu’il se lave les dents et d’acheter des ampoules basse consommation. C’est très bien les gestes quotidiens mais on n’avait pas besoin d’un vice-premier ministre pour arriver finalement à mendier des gestes individuels.
Nous observons également des dérives avec ce qu’on appelle l’éco blanchiment, la publicité abusive qui utilise le thème de l’écologie pour vendre des 4×4 Mitsubishi au pays du protocole de Kyoto. Vous avez donc le travail fait par les acteurs, un travail positif de diagnostic et vous avez ce qu’en fait le gouvernement. Autant tout ce travail du Grenelle est positif, autant la politique du gouvernement en matière écologique n’a progressé que de façon très marginale, en tout cas pas à la hauteur des enjeux fixés par Nicolas Hulot.
Pensez-vous que Nicolas Hulot a fait preuve de naïveté par rapport aux véritables intentions du gouvernement ?
Je pense que lui-même a fait le constat que beaucoup d’ambitions du Grenelle se fracassent contre la réalité politique, ce qui ne l’empêche pas et c’est normal de continuer à se battre. D’une certaine façon, il est en train de sortir de sa naïveté. Dans une interview donnée au « Journal du dimanche », en septembre dernier je crois, il a avoué avoir évolué dans sa pensée. Il a retrouvé quelque chose que les Verts ont intégré depuis longtemps, en se rendant compte que les questions écologiques ne peuvent pas être pensées en dehors des questions sociales et économiques. Il prenait conscience de son opposition au libéralisme économique. Sur le plan politique, il a avoué se sentir proche de Daniel Cohn-Bendit et d’Olivier Besancenot. Il est en train de réaliser que les questions écologiques ont forcément une dimension politique.
Pensez-vous malgré tout que les députés UMP sont suffisamment mûrs écologiquement pour transformer en loi les accords trouvés au moment du Grenelle ?
Le gouvernement est en pleine contradiction entre les ambitions du Grenelle d’un côté et la logique de culte de la croissance de l’autre. La politique, c’est faire des choix, ce n’est pas à la fois être pro-croissance et économe en ressources et énergies. Sinon, il faut parler de croissance sélective. On ne peut pas être à la fois pour le libéralisme et les régulations, ce n’est pas possible. Les mots ont quand même un sens. Ce qui est intéressant dans le Grenelle, c’est la mise à jour de ces contradictions. C’est pourquoi on ne manifeste absolument pas de dépit par rapport au Grenelle. Pour nous, le Grenelle est une formidable opportunité – merci Sarko ! – de démontrer premièrement, que l’écologie, c’est quelque chose de politique et deuxièmement qu’il faut aller contre le dogme du libéralisme économique qui correspond à la recherche du profit immédiat et au culte de la croissance pour la croissance. L’écologie, c’est un autre projet de société, ce qu’exprime très bien Nicolas Hulot dans son pacte écologique. Il faut sortir de la société de consommation, le seul but n’est pas de gagner de l’argent. Là-dessus, on est d’accord avec lui, mais la naïveté, c’est de croire qu’on va convertir l’UMP à cette logique comme un prophète, même les prophètes ne sont pas devenus majoritaires.
Que pensez-vous du report à l’automne concernant le vote du premier projet de loi Grenelle ?
Ce report est à mon avis une conséquence de ce qui s’est passé sur les OGM. Les OGM, honnêtement, ça a été le bordel dans la majorité entre membres du gouvernement et députés UMP, des contradictions sont apparues entre eux. Ils se sont dits, « la loi Grenelle I produite par Borloo, ça va être la même chose » alors que le projet de loi est déjà un détricotage des conclusions du Grenelle. Nicolas Hulot le reconnaît mais en plus, les députés UMP ont annoncé qu’ils allaient s’occuper de cette loi et la réduire encore dans ses ambitions. Ce projet de loi là, s’il est reporté à l’automne, c’est parce que les députés UMP ont décidé de faire sa fête à Borloo. C’est ça qu’il faut voir. Borloo, qui est déjà le ministre des robinets fermés pendant qu’on se lave les dents, va se faire attaquer par la majorité UMP.
L’écologie est-elle fondamentalement de gauche ?
A condition que le mot de « gauche » reprenne tout son sens c’est-à-dire le refus de la loi du plus fort sur le plan économique, la volonté de justice sociale. L’écologie, qui est la prise en compte de la planète, ça n’a pas de sens si ce n’est pas pensé dans une logique de justice sociale. Qui dit harmonie avec le monde dit harmonie au sein de la société. La crise sociale et la crise écologique sont liées, c’est le même mécanisme qui produit les deux, c’est la recherche du profit rapide et aveugle qui produit l’exploitation des hommes entre eux et l’exploitation des richesses. Croire qu’on peut lutter contre l’un sans lutter contre l’autre, c’est illusoire. Impossible d’être écologiste et adepte du libéralisme économique basé sur la compétition et l’illusion que la croissance sans fin est possible et qu’elle va apporter le bien-être à tous. L’illusion du libéralisme n’est pas possible dès le début, c’est une question même philosophique. C’est pour ça que l’écologie politique est sur ses fondements au-delà du clivage gauche/droite actuel mais en même temps, il nous paraît plus naturel de travailler avec ceux qui recherchent la justice sociale qu’avec ceux qui veulent simplement la compétition économique.
Mais sur le fond de la pensée philosophique, il y a aussi des gens de gauche qui sont très productivistes, qui se font une religion de la croissance pour la croissance. Je ne suis pas du tout pour cautionner les méthodes socialistes que je n’aime pas mais fondamentalement, je crois à la justice sociale. Dans la pratique politique, la question est de savoir si on doit tomber dans le « ni droite ni gauche ». On se rend compte que ça ne marche pas ; à moins d’être majoritaire tout seul, le système électoral vous impose de faire des choix d’alliance. C’est une question de démocratie, de clarté aussi par rapport aux électeurs, donc, il faut bien faire ce choix. C’est vrai que lorsqu’on reste sur le plan associatif, il n’y a aucune raison de ne pas faire du lobbying sur tous les acteurs politiques ; sur le plan théorique, ils ont raison Besset et Hulot et nous ramènent au sens de la démarche écologique mais après, dans la pratique politique, il faut y aller, il faut convaincre dans le système électoral, ça ne sert à rien d’avoir une majorité dans les sondages et les enquêtes d’opinion. Le poids électoral qu’auront les Verts dans le terrain politique, ça comptera beaucoup plus que le simple poids médiatique parce que à un moment donné, dans une Assemblée, ce qui compte, c’est numérique, savoir qui a les voix et qui peut faire pencher la balance. Il a raison Besset, ça fait trente ans qu’on rame, mais si on n’assume pas ça, les choses n’avanceront pas concrètement, on va aller de déceptions en déceptions. L’enjeu, c’est de donner un poids politique suffisamment important pour imposer aux autres des changements, c’est ça la politique, si c’était la culture du « tout le monde il est beau… », s’il suffisait de convaincre, on aurait pas besoin de plusieurs partis. C’est la démocratie aussi qui impose la confrontation d’idées mais ce qu’il faut, c’est que le point de vue écologique qui va s’exprimer dans le système électoral ait du poids, et de plus en plus de poids.
(1) Jean-Paul Besset est le porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot.
«Nous ne sommes pas une petite partie jetable de la gauche»
Les Verts de Jean-Louis Roumégas, et la liste d’Hélène Mandroux n’ont pas réussi à s’entendre pour le second tour des élections municipales. Avec 11,12% des suffrages, ils se présentent alliés à la liste Montpellier écologique, sociale, vraiment à gauche conduite par Francis Viguié (5,46%). Explications d’Emmanuel Reynaud, secrétaire régional des verts.
Contre toutes attentes, Les Verts présentent au second tour une liste commune avec Montpellier écologique, sociale, vraiment à gauche.
Oui, la liste de Francis Viguié qui regroupe la LCR, les Collectifs Unitaires Anti-Libéraux (CUAL) et Montpellier Tous Ensemble (MTE). C’est une liste de gauche alternative très diverse, comme ils aiment à le montrer. On a pu se contacter rapidement, car on partage beaucoup de combats. Nos militants se connaissent. Pour le coup, il y avait urgence. Eux comme nous avons du y réfléchir très vite du fait des contraintes légales (dépôt des listes en préfecture mardi à 18H) et logistique (impression des professions de foi et du matériel de vote).
Vous n’aviez jamais envisagé de ne pas fusionner avec la liste d’Hélène Mandoux?
Non, jamais! Si on l’avez envisagé, nous n’aurions pas agit comme ça vis à vis du parti socialiste. Nous avons cru un accord possible, cela aurait été si nous avions eu face à nous des partenaires loyaux. Georges Frêche avait déclaré «vouloir nous faire descendre en dessous des 10%», mais c’était avant le premier tour. Nous avons prouvé que nous étions une force électorale, et les politiques ont le devoir de respecter les gens.
Pendant la campagne, le message que nous passions était qu’il fallait que l’on fasse plus de 10% pour peser, mais qu’ensuite on conclurait une alliance avec Hélène Mandroux pour le second tour. Elle, de son coté, acquiesçait. Au second tour, on va demander aux électeurs s’ils pensent qu’Hélène Mandroux a bien fait d’éjecter les Verts, et donc de dire aux 9000 personnes qui ont voté pour la liste de Jean-Louis Roumégas : «Vous ne m’intéressez pas». Elle les place sur le même plan que les électeurs de Jacques Domergue. Ni eux, ni nos électeurs n’auront droit à la parole. C’est plutôt grave.
Quelles sont les conséquences pour vous, d’une entrée dans l’opposition?
Nous avons toujours été pragmatique. Il n’y a pas d’opposition de principe à avoir. En revanche, en cas de désaccord avec la majorité, nous n’aurons pas de compromis à faire. Nos électeurs nous soutiennent. Il n’y aura pas de «vote utile», Hélène Mandroux a déjà gagné. Quand on est dans sa position, agir comme elle l’a fait avec nous est synonyme d’arrogance. En ce qui me concerne, je n’aimerai pas être dans la liste Mandroux à l’heure actuelle, avec ceux qui ont participé à l’éviction de l’écologie de la ville de Montpellier. Qui va nous protéger demain des promoteurs immobiliers? Je ne vois pas ce que le MoDem de Dufour et le PCF peuvent apporter à cette ville.
Les Verts, ne sont pas là pour protéger des pâquerettes! Nous avons un message fort qui concerne la planète, l’environnement, et donc les gens. Je ne comprends pas qu’elle abandonne l’écologie au profit d’une absence de projet pour la ville. Si on en croit la profession de foi de Mandroux, elle est pour l’emploi, pour le logement, pour l’environnement. C’est bien. Comme tout le monde en fait. Le seul message politique que délivre cette liste c’est: «Nous sommes les plus forts, donc on fait ce que l’on veut!».
«Nous avons un problème avec Georges Frêche»
Hélène Mandroux vous a proposé 4 sièges au conseil municipal, au final vous en visez 6 dont 2 accordé à la liste de Francis Viguié. Qu’est-ce que ça change?
La politique ce n’est pas de la comptabilité! Il est question de rester debout, on ne peut pas accepter n’importe quoi. Quand on est élu on représente des gens, en l’occurrence, les 9000 qui ont voté pour nous. Ils l’ont fait pour un projet et c’est pour celui-ci que l’on se bat. Si on ne pèse pas au sein d’une majorité, à quoi ça sert? En étant dans l’opposition, on crée des lignes pour l’avenir. On sera là pour rappeler le message que les électeurs écologistes ont voulu faire passer.
On sera également là pour faire passer un message: «Nous avons un problème avec Georges Frêche». Nous l’avons toujours dit. Ce message sera plus clair si on est dans l’opposition. Honnêtement, le traitement «Frêchiste» réservé à l’opposition, nous ne le souhaitons à personne. Ses méthodes sont presque dignes de la Stasi [[Police Politique de la RDA]] ! Le principe c’est l’intimidation et la menace. Il n’y a aucune humanité dans sa façon de traiter les gens. Il faut admettre que les choses ne sont plus comme ça depuis Mandroux. Contrairement à Frêche, elle est humaine. Profondément.
Pourtant vous ne cessez de pointer sa «déloyauté»
Elle est mal entourée. On se demande qui tire les ficelles dans cette liste, elle s’est tellement contredite! Elle n’a pas cessé de dire qu’elle voulait des verts. Je renvoie au PS les mots de Robert Navarro [[1er secrétaire de la fédération socialiste de l’Hérault]] : «Quand on veut vraiment un accord, on le trouve».
Georges Frêche dit vouloir faire à Montpellier avec cette alliance qui va du PCF au MoDem un «Laboratoire d’un futur parti de gouvernement». Pourquoi le fait-il sans les Verts? C’est ne pas tenir compte des résultats! Nous ne sommes pas une petite partie jetable de la gauche! Nous notre propos n’est pas de faire que Montpellier soit aussi gros que Shangaï. Sans prétention, les verts veulent pouvoir peser sur l’avenir de la planète.